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C. Bottiglieri
\section{Parcours et contexte}
Au croisement entre danse et robotique, ce projet de recherche-création interroge et construit des formes performatives en lien avec des notions émergentes comme la \gls{conscience artificielle} (CA). À travers lexpressivité du corps organique du performeur et les principes de cognition incarnée (ie.\gls{embodied cognition}) transposées au corps mécanique des robots, je cherche à confronter le réel aux limites de la perception. Le résultat s'approche dun exercice d'écriture plurielle hybride où lhomme sappuie sur la machine pour mieux se connaître et mieux anticiper ses projections dans cette relation. Plus concrètement, cette thèse intitulée - ``Danser avec les robots: le corps performatif et la \textit{conscience artificielle}” traite des interactions homme-robot dans des contextes artistiques.\smallskip
Au croisement entre danse et robotique, ce projet de recherche-création interroge et construit des formes performatives en lien avec des notions émergentes comme la \gls{conscience artificielle} (CA). À travers lexpressivité du corps organique du performeur et les principes de cognition incarnée (c'est à dire \gls{embodied cognition}) transposées au corps mécanique des robots, je cherche à confronter le réel aux limites de la perception. Le résultat s'approche dun exercice d'écriture plurielle hybride où lhomme sappuie sur la machine pour mieux se connaître et mieux anticiper ses projections dans cette relation. Plus concrètement, cette thèse intitulée - ``Danser avec les robots: le corps performatif et la \textit{conscience artificielle}” traite des interactions homme-robot dans des contextes artistiques.\smallskip
Pendant deux ans, j'ai été doctorante invitée au Laboratoire dinformatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (LIRMM). Jy ai eu loccasion danalyser les possibilités dinteraction artistique dun robot humanoïde HRP-4 ainsi qu'un bras industriel Franka. Ayant la création expérimentale comme activité de recherche, mon projet est centré autour d'un travail pluridisciplinaire qui consiste à imaginer différentes possibilités dinteraction physique avec des robots. Dans une démarche scientifique, je cherche à théoriser cette pratique de danse avec des machines, en mettant les bases dun langage chorégraphique inédit influencé par des pratiques somatiques et par ce que la littérature appelle \textit{la pensée du corps} ou l' \gls{intelligence du mouvement}. Cette démarche est proche des écrits et dexpérimentations des artistes tel Anna Halprin, Deborah Hay ou Jonathan Burrows, parmi autres.
Mon postulat part de ce que le chercheur et analyste en danse Hubert Godard a identifié comme \textit{des mythologies du corps en mouvement}. En espérant identifier leur contrepoids technologique dans les robots du LIRMM, j'ai suivi de loin et de près les roboticiens pour essayer de comprendre leurs artefacts:

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@ -28,9 +28,9 @@ Le troisième chapitre \textit{Corps performatifs en robotique} présente diffé
\chapter{Pratiques somatiques et quête de lintelligence sensorielle}
Je commence ce chapitre par une contextualisation des pratiques somatiques, en retraçant de loin leur histoire en lien avec la danse. Mon analyse commence au début du 20é siècle, avec des précurseurs de ce que nous connaissons aujourd'hui comme de l'\gls{éducation somatique} et de l'\gls{intelligence sensorielle}. La plupart des termes que j'emploie sont définis dans le glossaire à la fin du manuscrit. Cependant je précise dés le début de notre enquête, le contexte par lequel je désigne l'intelligence sensorielle et les pratiques somatiques comme notions clés de ce travail en recherche-création. D'abord l'intelligence sensorielle représente notre capacité d'agir au travers non sens. Elle est notre faculté de sentir, de comprendre et dorganiser les informations sensorielles provenant de notre corps et de notre environnement. Ensuite les pratiques somatique regroupent plusieurs approches corporelles dont l'objectif est la réappropriation de son corps en mouvement afin de mieux comprendre son propre mode de fonctionnement et créer de nouvelles possibilités dexpression. Ces approches sont d'abord expérientielles, basées sur une expérience subjective de chacun, en contrepoids des connaissances empiriques observées chez les autres.
Je commence ce chapitre par une contextualisation des pratiques somatiques, en retraçant de loin leur histoire en lien avec la danse. Mon analyse commence au début du 20é siècle, avec des précurseurs de ce que nous connaissons aujourd'hui comme de l'\gls{éducation somatique} et de l'\gls{intelligence sensorielle}. La plupart des termes que j'emploie sont définis dans le glossaire à la fin du manuscrit. Cependant je précise dès le début de notre enquête, le contexte par lequel je désigne l'intelligence sensorielle et les pratiques somatiques comme notions clés de ce travail en recherche-création. D'abord l'intelligence sensorielle représente notre capacité d'affiner notre perception. Elle est notre faculté de sentir, de comprendre et dorganiser les informations sensorielles provenant de notre corps et de notre environnement. Ensuite les pratiques somatiques regroupent plusieurs approches corporelles dont l'objectif est la réappropriation de son corps en mouvement afin de mieux comprendre son propre mode de fonctionnement et créer de nouvelles possibilités dexpression. Ces approches sont d'abord expérientielles, basées sur une expérience subjective de chacun, en contrepoids des connaissances empiriques observées chez les autres.
Dans son livre \textit{The Thinking Body}(1937) l'américaine Mabel Todd (1907-1977) met les bases dune pédagogie corporelle qui intègre des principes de la physique, de la mécanique et de lanatomie humaine. En prenant appui sur les travaux scientifiques de son époque, Todd souligne l'importance de l'équilibre des forces du mouvement pour privilégier une économie de l'effort. Elle note également le fonctionnement autonome du corps humain, en faisant référence à la proprioception et au équilibre postural, aux émotions et à une forme de ``conscience kinesthesique” ou \gls{intelligence du mouvement}(qu'elle décrit en relation avec les muscles que la rétine engage pour approximer des distances). En réfléchissant à la structure anatomique humaine, à la disposition des os, des nerfs et des muscles, elle cherche à déterminer un lien entre la forme et la fonction comme ´´loi d'un développement organique”. Son approche est révolutionnaire pour son époque, puisqu'elle relie des principes mécaniques et biologiques avec les lois de la physique. Intuitivement elle désigne la forme comme résultat de la fonction, par exemple en expliquant la structure du squelette en lien avec les forces de la gravité. Sa méthodologie est fondée sur des procédures de visualisation des images mentales, en amont de toute exécution du mouvement. Son objectif est dintervenir sur les mécanismes inconscients qui régissent la motricité, en travaillant sur la représentation la plus précise du mouvement pendant que celui-ci soit accompli:
Dans son livre \textit{The Thinking Body} (1937) l'américaine Mabel Todd (1907-1977) pose les bases dune pédagogie corporelle qui intègre des principes de la physique, de la mécanique et de lanatomie humaine. En prenant appui sur les travaux scientifiques de son époque, Todd souligne l'importance de l'équilibre des forces du mouvement pour privilégier une économie de l'effort. Elle note également le fonctionnement autonome du corps humain, en faisant référence à la proprioception et à l'équilibre postural, aux émotions et à une forme de ``conscience kinesthesique” ou \gls{intelligence du mouvement} (qu'elle décrit en relation avec les muscles que la rétine engage pour approximer des distances). En réfléchissant à la structure anatomique humaine, à la disposition des os, des nerfs et des muscles, elle cherche à déterminer un lien entre leur forme et leur fonction, sorte de ´´loi d'un développement organique”. Son approche est révolutionnaire pour son époque, puisqu'elle relie des principes mécaniques et biologiques avec les lois de la physique. Intuitivement elle désigne la forme comme résultat de la fonction, par exemple en expliquant la structure du squelette en lien avec les forces de la gravité. Sa méthodologie est fondée sur des procédures de visualisation des images mentales, en amont de toute exécution du mouvement. Son objectif est dintervenir sur les mécanismes inconscients qui régissent la motricité, en travaillant sur la représentation la plus précise du mouvement pendant que celui-ci est accompli:
\begin{quote}
``Limagination libère de la puissance. Lorsquon apprend consciemment à se servir dimages motivantes pour conditionner les réactions motrices adéquates, il faut connaître précisément trois choses : où cela se passe, dans quelle direction et selon quel désir. Quand les conditions sont réunies, le mouvement peut avoir lieu. ``Ça bouge”, alors, exactement comme ``il neige”, ``il pleut” ou ``il grêle”. Les muscles obéissant instantanément à la pensée, laction adaptée survient.”
\cite{todd2012corps}
@ -38,91 +38,91 @@ Dans son livre \textit{The Thinking Body}(1937) l'américaine Mabel Todd (1907-1
Je précise déjà que cette notion de représentation va accompagner aussi des observations en lien avec les sciences cognitives dans le deuxieme chapitre de ce manuscrit, et plus tard en lien avec les contextes artistiques comme les spectacles avec des robots.
Toujours sur les muscles, en lien avec ses observations sur la forme, elle identifie le mouvement comme sensation globale analogue à la fonction des muscles. Pour expliquer la compréhension quelle a de cette partie du corps, elle note l'inexistence d'une expérience phénoménale de nos muscles. En général, nous sommes conscients d'une sensation globale de mouvement, sans comprendre individuellement comment chaque muscle active une partie de notre squelette. Le sens de la perception, que je vais traiter dans les prochaines pages, viendra compléter cette appréhension que nous avons de notre propre corps et sa motricité. Cependant son fonctionnement est autonome, indépendamment de notre concentration et attention sur une partie du corps.
A lépoque où Todd écrivait son livre, les médecins pensaient que les muscles étaient commandés instantanément par la pensée. Les dernières découvertes en neurosciences\cite{schmidt2018motor} confirment que la plupart des opérations impliquées dans le contrôle des mouvements corporelles, comme la plupart des stimuli qui initient un mouvement réflexe en particulier, sont de nature inconsciente. Doù vient alors cette pensée et comment des sens comme la proprioception sont en charge, autant des sensations de nos organes, que des fonctions régulatrices en lien avec les muscles. Par exemple, lorsque nous nous penchons en avant, nous faisons presque instantanément un mouvement en arrière afin de préserver notre équilibre.
A lépoque où Todd écrivait son livre, les médecins pensaient que les muscles étaient commandés instantanément par la pensée. Les dernières découvertes en neurosciences\cite{schmidt2018motor} confirment que la plupart des opérations impliquées dans le contrôle des mouvements corporels, comme la plupart des stimuli qui initient un mouvement réflexe en particulier, sont de nature inconsciente. Doù vient alors cette pensée et comment des sens comme la proprioception sont en charge, autant des sensations de nos organes, que des fonctions régulatrices en lien avec les muscles. Par exemple, lorsque nous nous penchons en avant, nous faisons presque instantanément un mouvement en arrière afin de préserver notre équilibre.
Comment comprendre cette vitesse avec laquelle opère notre corps pendant quil utilise des mouvements anticipateurs? Tout cela sans que notre pensée le détermine. Que dire alors des processus dapprentissage comme celui de la conduite auto ou dun nouveau type de danse?
Je rejoins Todd pour qui une nouvelle capacité motrice devient automatique une fois apprise et exécutée un nombre suffisamment des fois. C'est intéressant de réfléchir à pourquoi cela n'est pas (encore) le cas pour des robots.
Si la plupart dentre nous, ne sommes pas capables didentifier linstance de notre cerveau qui soccupe de ce type dapprentissage et auto-réglage, celui-ci a lieu dans notre corps, étant un processus organique constitutif de notre identité.
Presque un siècle après les observations de Todd, le neurophysiologiste Alain Bertoz décrit la perception comme une action simulée, bien plus qu'une interprétation des messages sensoriels:
Notre corps apprends des nouveaux mouvements et aptitudes, cela étant un processus organique constitutif de notre existence. À part des chercheurs en biologie et médecine, la plupart dentre nous ne sommes pas capables didentifier linstance de notre cerveau qui soccupe de ce type dapprentissage ou auto-réglage, ni ressentir le moment précis quand cela se produit. Je rejoins Todd pour qui une nouvelle capacité motrice devient automatique une fois apprise et exécutée un nombre suffisamment des fois. C'est intéressant de remarquer que cela n'est pas (encore) possible chez les robots, malgré le nombre illimité d'itérations dont ils sont capables.
Presque un siècle après les observations de Todd, le neurophysiologiste Alain Berthoz décrit la perception comme une action simulée, bien plus qu'une interprétation des messages sensoriels:
\begin{quote}
``elle est contrainte par laction, elle est simulation interne de laction, elle est jugement et prise de décision, elle est anticipation des conséquences de laction.”\cite{berthoz1997sens}
\end{quote}
Toujours pour Bertoz, les modèles internes de la réalité physique ne sont pas seulement d'opérateurs mathématiques abstraits mais des vrais neurones avec des propriétés en lien avec le monde physique. Analyser le mouvement du point de vue neurologique, nous permet de mieux comprendre notre spécificité et les processus physiologiques ayant lieu à lintérieur de nous:
Toujours pour Berthoz, les modèles internes de la réalité physique ne sont pas seulement des opérateurs mathématiques abstraits mais des vrais neurones avec des propriétés en lien avec le monde physique. Analyser le mouvement du point de vue neurologique nous permet de mieux comprendre notre spécificité et les processus physiologiques ayant lieu à lintérieur de nous:
\begin{quote}
``Lanalyse du mouvement permet donc de découvrir les solutions trouvées au cours de lévolution pour anticiper les conséquences de laction et simplifier le contrôle des gestes.”\cite{berthoz1997sens}
\end{quote}
Plus cette connaissance du corps humain sélargit grâce à des disciplines comme les neurosciences, plus cest compliqué dadapter ces principes à des nouvelles technologies. Par exemple en robotique le problème de degrés de liberté (ie le nombre darticulations dont un corps organique dispose) reste un défi pour les ingénieurs en mécatronique. Pour Berthoz, les centaines de degrés de liberté qui caractérisent lorganisation anatomique et dynamique du squelette de la plupart des animaux et de lhomme, rend possible le contrôle du mouvement grâce aux mécaniques dorganisation géométriques du squelette. Ces mécanismes se sont développés au cours de lévolution, adaptant constamment le nombre de degrés de liberté que le cerveau doit contrôler. Comme le chercheur le souligne, les roboticiens rencontrent des vrais défis mécaniques lors qu'ils tentent de réaliser des machines de la complexité d'un moindre insecte. Bien qu'il y a eu des progrès dans les algorithmes utilisés ces derniers années\cite{bouyarmane2018quadratic}, la capacité de calcul des ordinateurs est vite saturée\cite{berthoz1997sens}, une fois que le nombre de dégrées de liberté augmente.
Bertoz va plus loin quant à la complexité des systèmes vivants et à lintégration de ces principes dans des systèmes technologiques, en faisant référence au terme de \textit{synérgie}, du grec ``syn (ensemble) et ``ergos” (travail) pour définir la manière dont le système nerveux s'organise pour exécuter des \gls{mouvements naturels}:
Plus cette connaissance du corps humain sélargit grâce à des disciplines comme les neurosciences, plus cest compliqué dadapter ces principes à des nouvelles technologies. Par exemple en robotique le problème de degrés de liberté (c'est à dire le nombre darticulations dont un corps organique dispose) reste un défi pour les ingénieurs en mécatronique. Pour Berthoz, les centaines de degrés de liberté qui caractérisent lorganisation anatomique et dynamique du squelette de la plupart des animaux et de lhomme, rendent possible le contrôle du mouvement grâce aux mécaniques dorganisation géométriques du squelette. Ces mécanismes se sont développés au cours de lévolution, adaptant constamment le nombre de degrés de liberté que le cerveau doit contrôler. Comme le chercheur le souligne, les roboticiens rencontrent de vrais défis mécaniques lors qu'ils tentent de réaliser des machines de la complexité d'un moindre insecte. Bien qu'il y ait eu des progrès dans les algorithmes utilisés ces dernières années\cite{bouyarmane2018quadratic}, la capacité de calcul des ordinateurs est vite saturée\cite{berthoz1997sens}, une fois que le nombre de dégrées de liberté augmente.
Berthoz va plus loin quant à la complexité des systèmes vivants et à lintégration de ces principes dans des systèmes technologiques, en faisant référence au terme de \textit{synérgie}, du grec ``syn (ensemble) et ``ergos” (travail) pour définir la manière dont le système nerveux s'organise pour exécuter des \gls{mouvements naturels}:
\begin{quote}
``le système nerveux ne peuvent contrôler toutes les degrés de liberté, lévolution a sélectionné un répertoire de mouvements simples ou complexes, que nous pouvons appeler ``mouvements naturels”, et qui impliquent des groupes de muscles et de membres travaillant (ergos) ensemble (syn). Nous avons dailleurs mentionné plus haut les contraintes quexerce le squelette sur le nombre de mouvements possibles à chaque articulation. Ce répertoire nest dailleurs pas très large. Il suffit de contempler une danseuse pour constater lextraordinaire pauvreté du répertoire moteur dont elle dispose.”
``le système nerveux ne peut contrôler tous les degrés de liberté, lévolution a sélectionné un répertoire de mouvements simples ou complexes, que nous pouvons appeler ``mouvements naturels”, et qui impliquent des groupes de muscles et de membres travaillant (ergos) ensemble (syn). Nous avons dailleurs mentionné plus haut les contraintes quexerce le squelette sur le nombre de mouvements possibles à chaque articulation. Ce répertoire nest dailleurs pas très large. Il suffit de contempler une danseuse pour constater lextraordinaire pauvreté du répertoire moteur dont elle dispose.”
\end{quote}
Pour le chercheur français, la richesse d'une danse réside dans les quelques éléments du répertoire et les permutations entre le temps, l'espace et les différents partenaires face à ces éléments. Il me semble pertinent dappliquer ce processus de synergie à des exercices de recherche-création, dans ma façon de travailler une chorographie. En limitant les mouvements naturels par exemple, je peux mieux me concentrer sur les variations qu'il peut avoir entre ceux-ci est les autres éléments scéniques. D'ailleurs ces mouvements naturels ont leur propre définition, dans notre contexte. Par mouvements naturels jentends des mouvements qui procurent une sensation daccomplissement artistique, des gestes à caractère esthétisant - donnés à voir. En contrepoids, j'utilise le terme \gls{mouvements spontanés} pour définir des gestes réflexes ou des mouvements à caractère spontanée qui surgissent lors des improvisations et des exercices somatiques. Cela m'aide à mieux comprendre les défis de langage et des pratiques entre les différentes disciplines que j'adresse.
Pour le chercheur français, la richesse d'une danse réside dans les quelques éléments du répertoire et les permutations entre le temps, l'espace et les différents partenaires face à ces éléments. Il me semble pertinent dappliquer ce processus de synergie à des exercices de recherche-création, dans ma façon de travailler une chorégraphie. En limitant les mouvements naturels par exemple, je peux mieux me concentrer sur les variations qu'il peut y avoir entre ceux-ci est les autres éléments scéniques. D'ailleurs ces mouvements naturels ont leur propre définition, dans notre contexte. Par mouvements naturels jentends des mouvements qui procurent une sensation daccomplissement artistique, des gestes à caractère esthétisant - donnés à voir. En contrepoids, j'utilise le terme \gls{mouvements spontanés} pour définir des gestes réflexes ou des mouvements à caractère spontané qui surgissent lors des improvisations et des exercices somatiques. Cela m'aide à mieux comprendre les défis de langage entre les différentes disciplines dont je m'inspire.
Les critiques et philosophes spécialistes en danse ont longuement analysé lémergence du geste dansé, selon le contexte socio-culturel et lépoque dont il se réclame. Pour ce quil y a de la danse contemporaine, la pratique de limprovisation, vue comme geste libre et libérée du dogmatisme de la technique du danseur, a suscité une révolution longuement attendue. Comme le remarque Anne Boissiére dans son livre ``Approche philosophique du geste dansé”\cite{boissiere2020approche}, ce geste semble sinventer par lui-même dans l'intention de se produire sans objectif immédiat ou point de départ. Un geste qui na pas besoin des explications pour s'auto-suffire:
Les critiques et philosophes spécialistes en danse ont longuement analysé lémergence du geste dansé, selon le contexte socio-culturel et lépoque dont il se réclame. En ce qui concerne la danse contemporaine, la pratique de limprovisation, vue comme geste libre et libérée du dogmatisme de la technique du danseur, a suscité une révolution longuement attendue. Comme le remarque Anne Boissiére dans son livre \textit{Approche philosophique du geste dansé}\cite{boissiere2020approche}, ce geste semble sinventer par lui-même dans l'intention de se produire sans objectif immédiat ou point de départ. Un geste qui na pas besoin des explications pour s'auto-suffire:
\begin{quote}
La question de limprovisation apparaît centrale pour penser le geste dansé, dans la mesure où celui-ci, dans sa liberté, semble ne plus devoir emprunter à un quelconque modèle mais procéder de soi, dans une impulsion et un dynamisme internes affranchis de tout point dappui, de toute extériorité. Limprovisation nest plus une variation sur des schémas préexistants, elle a une valeur constituante. Elle tisse une forme en acte à laquelle rien ne préexiste, une forme sinventant à partir delle-même, dans une sorte de point zéro ou de commencement absolu qui lui donne son évidence et sa pureté.
\end{quote}
Cette question d'improvisation, proche d'une démarche expérimentale du mouvement est aussi ce qui a permis l'émergence d'une sous-discipline au croisement entre esthétique, perception, physiologie et mécanique corporelle. Selon Jeremy Damian\cite{damian2014interiorites}, les pratiques somatiques sont nées en 1976, lorsque Thomas Hanna (1928 1990) fonde la revue \textit{Somatics Magazine - Journal of the Bodily Arts and Sciences} dont le thématique soriente autour des études sur le corps expérientiel et ses expériences personnels - (ie. the study of the body through the personnel experiential perspective). Pour lui, les recherches sur le corps sont souvent limités à un débat entre une interprétation dinspiration phénoménologique et une interprétation tirée de la sémiotique ou dans les autres mots \textit{le corps comme expérience versus le corps comme signe}.
Pour mieux appuyer cela, l'anthropologue Thomas J. Csordas établit une synthèse de ces deux approches. Il focalise son attention sur ce quil nomme les``modes somatiques dattention” (\textit{somatic modes of attention}), définis comme des``manières culturellement élaborées dêtre présent à et avec son corps (\textit{ways of attending to and with ones body)}. Csordas souligne également l'importance des environnements qui incluent la présence``incorporée” des autres. L'originalité de son approche provient de l'attention qu'il porte à des retours sensoriels impliquant à la fois une personne, un corps et son environnement. Cela produit un ``milieu intersubjectif”, médiée par une perspective somatique qui ouvre une autre ``image et idée du corps que celle que renvoie le miroir.” Nous remarquons toujours cette idée d'image de corps, cette fois dans un contexte social et anthropologique.
Cette question d'improvisation, proche d'une démarche expérimentale du mouvement est aussi ce qui a permis l'émergence d'une sous-discipline au croisement entre esthétique, perception, physiologie et mécanique corporelle. Selon Jeremy Damian\cite{damian2014interiorites}, les pratiques somatiques sont nées en 1976, lorsque Thomas Hanna (1928 1990) fonde la revue \textit{Somatics Magazine - Journal of the Bodily Arts and Sciences} dont la thématique soriente autour des études sur le corps expérientiel et ses expériences personnelles - (c'est à dire the study of the body through the personnel experiential perspective). Pour lui, les recherches sur le corps sont souvent limitées à un débat entre une interprétation dinspiration phénoménologique et une interprétation tirée de la sémiotique ou en d'autres termes \textit{le corps comme expérience versus le corps comme signe}.
Pour mieux appuyer cela, l'anthropologue Thomas J. Csordas établit une synthèse de ces deux approches. Il focalise son attention sur ce quil nomme les ``modes somatiques dattention” (\textit{somatic modes of attention}), définis comme des ``manières culturellement élaborées dêtre présent à et avec son corps (\textit{ways of attending to and with ones body)}. Csordas souligne également l'importance des environnements qui incluent la présence ``incorporée” des autres. L'originalité de son approche provient de l'attention qu'il porte à des retours sensoriels impliquant à la fois une personne, un corps et son environnement. Cela produit un ``milieu intersubjectif”, médié par une perspective somatique qui ouvre une autre ``image et idée du corps que celle que renvoie le miroir.” Nous remarquons toujours cette idée d'image de corps, cette fois dans un contexte social et anthropologique.
A son tour, la chercheuse en danse Violetta Salvatierra évoque dans sa thèse\cite{salvatierra2020atelier}, le contexte dapparition de l\gls{éducation somatique} en France:
À son tour, la chercheuse en danse Violetta Salvatierra évoque dans sa thèse\cite{salvatierra2020atelier}, le contexte dapparition de l\gls{éducation somatique} en France:
\begin{quote}
``(...) appréhendé dans sa dimension holistique et systémique, et attaché au corps vécu à la première personne, le terme``soma”, dans la définition de Thomas Hanna, fait référence au ``corps perçu de l'intérieur” et ``la somatique” est définie comme ``l'art et la science des processus d'intéraction synergétique entre la conscience, le fonctionnement biologique et l'environnement”. Par la suite, d'autres théoricien·nes ont proposé d'autres termes et notions pour désigner le champ d'expériences mobilisé par ces pratiques, tels que la ``soma-esthétique”, proposé par le philosophe Richard Shusterman, dont les travaux dans le domaine se révèlent fort normatifs”.
\end{quote}
Dans une autre optique, une préoccupation actuelle rapproche les pratiques somatiques d'une certaine forme d'écologie. Ce point de vue est défendu par la chercheuse Laurence Jay, selon qui cela renvoie au chaque contexte spécifique dune personne, pour encourager une forte affirmation de sa subjectivité. Sadressent au corps-sujet dans une approche psycho-phénoménologique, le corps est identifié par des caractéristiques communes avec le domaine du vivant. Pour paraphraser Jay il est en homéostasie, pour assurer une survie permanente:
Dans une autre optique, une préoccupation actuelle rapproche les pratiques somatiques d'une certaine forme d'écologie. Ce point de vue est défendu par la chercheuse Laurence Jay, selon qui cela fait appel au contexte spécifique de chaque personne, pour encourager une forte affirmation de sa subjectivité. Dans une approche psycho-phénoménologique, le corps est identifié par des caractéristiques communes avec le domaine du vivant. Pour paraphraser Jay, la homéostasie de ce corps-sujet assure sa survie permanente:
\begin{quote}
``Il est pensé comme un tout. Il ne sagit pas dun amas de parties disjointes, mais dun système organisé de façon dynamique et en équilibre complexe, interdépendant dans chaque mouvement, chaque fonction, chaque échange dénergie et dinformation. Il ne sagit pas dune vision mécaniste qui sépare le haut et le bas, la matière et le processus, le soi et les autres, le soi et lenvironnement, la pensée et les émotions. Cest une pensée systémique, un point de vue corps-sujet-monde. Ce point de vue rejoint les théories écologiques et systémiques et permet dimaginer une écologie corporelle, en actes.”
\end{quote}
Des artistes visionnaires, puis des chercheurs en neurosciences, nous aident à mieux comprendre notre rapport au corps. En danse, l'improvisation interroge le mouvement dans sa potentialité artistique pour générer des nouvelles formes d'expressivité. A mon tour, je me concentre sur les mouvements spontanées pour comprendre leur impacte sur une danse avec des robots. Ces mouvements sont issus d'un laboratoire dexpérimentations en lien avec des pratiques somatiques, bien que la définition exacte de cette somatique est sujet à des débats selon la discipline où elle opère.
Des artistes visionnaires, puis des chercheurs en neurosciences, nous aident à mieux comprendre notre rapport au corps. En danse, l'improvisation interroge le mouvement dans sa potentialité artistique pour générer des nouvelles formes d'expressivité. À mon tour, je me concentre sur les mouvements spontanés pour comprendre leur impact sur une danse avec des robots. Ces mouvements sont issus d'un laboratoire dexpérimentations en lien avec des pratiques somatiques, bien que la définition exacte de cette somatique soit sujette à des débats selon la discipline où elle opère.
\section{Les multiples facettes des pratiques somatiques}
Pour mieux expliquer la dynamique qui opère entre la danse et les pratiques somatiques\cite{eddy2017mindful}, je m'interroge sur la façon dont ces techniques structurent la corporéité ainsi que l'expérience phénoménologique du cors et ses sensations. Lorsquelles sont employés comme exercices d'échauffement et d'entraînement régulier, elles facilitent une nouvelle appréhension du corps et de son mouvement. Lorsquun danseur apprend une technique de danse, son corps est capable de reproduire les mouvements et de se mouvoir presque de façon automatique, selon les caractéristiques de cette technique. Lorsqu'il sapproprie une pratique somatique, le danseur na de preuve à son appui autre que les traces que laissent cette expérience à lintérieur de son propre corps. Ainsi lintériorité et l'expérience sensible du danseur sont cultivés grâce à l'\gls{expérience kinesthésique}:
Pour mieux expliquer la dynamique qui opère entre la danse et les pratiques somatiques\cite{eddy2017mindful}, je m'interroge sur la façon dont ces techniques structurent la corporéité ainsi que l'expérience phénoménologique du cors et de ses sensations. Lorsquelles sont employées comme exercices d'échauffement et d'entraînement régulier, elles facilitent une nouvelle appréhension du corps et de son mouvement. Lorsquun danseur apprend une technique de danse, son corps est capable de reproduire les mouvements et de se mouvoir presque de façon automatique, selon les caractéristiques de cette technique. Lorsqu'il sapproprie une pratique somatique, le danseur na d'autre preuve à son appui que les traces de cette expérience à lintérieur de son propre corps. Ainsi lintériorité et l'expérience sensible du danseur sont cultivées grâce à l'\gls{expérience kinesthésique}:
\begin{quote}
``Si toute technique de danse est affaire dun programme systématique dinstructions, venant façonner le corps perçu à limage dun corps idéal, via la médiation dun corps démonstratif (Foster, 1992) ; si les injonctions à faire et à sentir, et corrélativement, les actions et les perceptions produites (Cazemajou, 2013), relatent implicitement un modèle déterminé de corporéité ; peut-on dire la même chose pour les somatiques?”
\end{quote}
Depuis 2013, lors des stages et des ateliers de danse partout en Europe, jai eu l'occasion de me former et d'acquérir des compétences orientées autour de ma propre intériorité. Bien que chaque expérience du corps et son vécu est difficilement traduisible et quantifiable, je tente d'évoquer ce que chacun de ces pratiques a retenu mon attention. Pour mieux témoigner de cette démarche, je m'appuie sur les écrits du philosophe Bruno Latour(1947-2022) qui explicite dans son essai ``How to talk about the body” ce quil entend par le fait d'avoir un corps:
Depuis 2013, lors des stages et des ateliers de danse partout en Europe, jai eu l'occasion de me former et d'acquérir des compétences orientées autour de ma propre intériorité. Bien que chaque expérience du corps et son vécu est difficilement traduisible et quantifiable, je tente d'évoquer ce que chacune de ces pratiques m'a appris. Pour mieux témoigner de cette démarche, je m'appuie sur les écrits du philosophe Bruno Latour (1947-2022) qui explicite dans son essai ``How to talk about the body” ce quil entend par le fait d'avoir un corps:
\begin{quote}
``
Avoir un corps, signifie apprendre à être affecté, cest-à-dire effectué, déplacé, mis en mouvement par dautres entités, humaines ou non-humaines. Si vous ne vous engagez pas dans cet apprentissage, vous risquez de devenir insensible, stupide, vous tombez mort. Doté dune telle définition pathologiquedu corps, personne nest obligé de définir une essence, une substance (ce quest le corps par nature), mais plutôt, à mon sens, de le considérer comme une interface qui devient de plus en plus descriptible, lorsqu'elle apprend à être affecté par de plus en plus d'éléments(...)En se concentrant sur le corps, on est immédiatement ou plutôt médiatement dirigé vers ce dont le corps a pris conscience
Avoir un corps, signifie apprendre à être affecté, cest-à-dire effectué, déplacé, mis en mouvement par dautres entités, humaines ou non-humaines. Si vous ne vous engagez pas dans cet apprentissage, vous risquez de devenir insensible, stupide, vous tombez mort. Doté dune telle définition pathologiquedu corps, personne nest obligé de définir une essence, une substance (ce quest le corps par nature), mais plutôt, à mon sens, de le considérer comme une interface qui devient de plus en plus descriptible, lorsqu'elle apprend à être affectée par de plus en plus d'éléments(...)En se concentrant sur le corps, on est immédiatement ou plutôt médiatement dirigé vers ce dont le corps a pris conscience
\footnote{en version originale:
``To have a body is to learn to be affected, meaning effectuated, moved, put into motion by other entities, humans or non-humans. If you are not engaged in this learning you become insensitive, dumb, you drop dead. Equipped with such a patho-logical definition of the body, one is not obliged to define an essence, a substance (what the body is by nature), but rather, I will argue, an interface that becomes more and more describable as it learns to be affected by more and more elements(...)By focusing
on the body, one is immediately or rather, mediately directed to what
the body has become aware of.}.”\cite{latour2004talk}
\end{quote}
Ainsi pour Latour il n'existe pas de hiérarchie entre corps et esprit. Plutôt chaque corps opère une trajectoire dynamique par laquelle il apprend à connaitre et à interagir avec les autres éléments ou la matière dont est faite le monde. Plus précisément, pour le philosophe français, cela na aucun sens de définir le corps directement, mais plutôt de le rendre sensible aux autres éléments qui constituent le monde.
Ainsi pour Latour il n'existe pas de hiérarchie entre corps et esprit. Plutôt, chaque corps opère une trajectoire dynamique par laquelle il apprend à connaitre et à interagir avec les autres éléments ou la matière dont est faite le monde. Plus précisément, pour le philosophe français, cela na aucun sens de définir le corps directement, mais plutôt de le rendre sensible aux autres éléments qui constituent le monde.
Pour revenir au terme de somatique et faire la distinction entre ses différentes approches, je fais également appel aux observations dIsabelle Ginot. Dans l'ouvrage collectif ``Penser les somatiques avec Feldenkrais” elle montre comment sont réunis sous le terme générique de \textit{somatiques}, une panoplie de pratiques dont les principes sont communs. Elle définit \textit{le sujet} par un ensemble de pensées, affects et émotions en lien avec le corps en lien avec ``un instrumentarium savant de techniques gestuelles, manuelles et tactiles”\cite{ginot2014penser}, dont l'attention se porte sur la proprioception. Ginot note comment ces techniques puisent à leur tour dans des croyances et des savoirs divers selon leur époque, pour inventer ``des imaginaires du corps et des gestes bien différents les uns des autres”\cite{ginot2014penser}. Plus loin dans ce livre, la chercheuse propose une classification selon les critères de lanalyste du mouvement Hubert Godard. Ses observations font la distinction entre les expériences collectives et les expériences individuelles. Lors d'une expérience collective le praticien propose des explorations sans illustrer le mouvement, afin que chacun puisse explorer sa propre sensibilité esthétique et contraintes physiologiques. Lors des séances individuelles, le praticien propose une exploration à partir du toucher, parfois guidant par la parole une prise de conscience du sujet. Celui-ci observe les effets du relâchement des blocages musculaires sur ses gestes, les variations de son propre poids selon les changements de posture. Il découvre grâce à des représentations internes, des parties auparavant méconnues de lui-même, appelés par Godard ``des zones organiques profondes”:
\begin{quote}
``Certaines travaillent à partir dune cartographie des tissus et de leurs caractéristiques biologiques — \gls{fascia}s, muscles, peau, os, viscères — et pensent le changement du geste et de la posture primordialement à partir des changements conduits dans ces tissus ; dautres, telle la méthode Feldenkrais qui nous intéressera ici, sappuient avant tout sur la construction des coordinations, soit la façon dont chacun de nous a appris (et peut réapprendre) à composer ses gestes dans lespace et le temps jusquà ce que ce répertoire de nouvelles habitudes gestuelles compose la texture même de sa vie, et garde la plasticité nécessaire pour des changements ultérieurs. Dautres encore privilégient le travail sur la perception… Elles se pratiquent en séances collectives ou individuelles, passent très souvent par un travail sur le toucher (un des nombreux tabous concernant le corps en Occident), se définissent soit comme ``éducatives” soit comme ``thérapeutiques”, ou encore les deux à la fois.” \cite{ginot2014penser}
\end{quote}
Lorsque jai les pratiques somatiques en 2013, cette idée de vocabulaire et définitions est restée une question ouverte. Lesquelles des écoles revendiquer, laquelle des techniques approfondir? Je m'appuie sur les observations concernant l'\gls{intelligence du mouvement} de Jay, proche de ce que je comprends par \gls{intelligence sensorielle}:
Lorsque jai découvert des pratiques somatiques en 2013, cette idée de s'approprier un vocabulaire et des définitions est restée une question ouverte. Lesquelles des écoles revendiquer, laquelle des techniques approfondir? En ce moment je m'appuie sur les observations concernant l'\gls{intelligence du mouvement} de Jay, proche de ce que je comprends par \gls{intelligence sensorielle}. Mais est-ce vocabulaire suffisant lorsque je tente d'expliquer des concepts propres à la robotique ?
\begin{quote}
``Lintelligence du mouvement habite le corps tout entier, pas seulement le cerveau. Le cerveau est informé et informe et lintelligence du mouvement dialogue avec la pensée. Nous avons appris à considérer notre corps comme une machine, à faire en sorte de le contrôler le plus efficacement possible, à le gérer comme un lieu dentrée sortie, à lespérer plus silencieux quexpressif, pour finalement somatiser lorsque notre corps exprime linexprimé.”\cite{jay2014pratiques}
\end{quote}
Concernant mes propres expériences kinesthésiques et le travail de ``prise de conscience” de mon corps, j'ai remarqué que cela est plus facilement traduisible en mots, lors des moments de lâcher prise en improvisation. Les outils que jai retenus lors des sessions d'apprentissage que je vais détailler plus bas, servent principalement à affiner ma concentration et la facilité de mouvement. La plupart des méthodes que jai pu expérimenter, visent l'utilisation dune quantité d'effort appropriée pour une activité particulière, libérant les tensions du corps pour avoir plus d'énergie à utiliser ailleurs. Bien que la communauté des pratiquants puisse parler des effets thérapeutiques de ces pratiques, j'aimerais clarifier cet aspect.
Pour moi et probablement pour des autres danseurs, il ne s'agit pas des traitements proprement parler, mais plutôt d'une volonté de rééducation du corps en libérant des tensions, des blocages émotionnelles et la pensée.
Concernant mes propres expériences kinesthésiques et le travail de ``prise de conscience” de mon corps, j'ai remarqué que cela est plus facilement traduisible en mots, lors des moments de lâcher prise en improvisation. Les outils que jai retenus lors des sessions d'apprentissage que je vais détailler plus bas, servent principalement à affiner ma concentration et la facilité de mouvement. La plupart des méthodes que jai pu expérimenter visent l'utilisation dune quantité d'effort appropriée pour une activité particulière, libérant les tensions du corps pour avoir plus d'énergie à utiliser ailleurs. Bien que la communauté des pratiquants puisse parler des effets thérapeutiques de ces pratiques, j'aimerais clarifier cet aspect.
Pour moi et probablement pour des autres danseurs, il ne s'agit pas des traitements à proprement parler, mais plutôt d'une volonté de rééducation du corps en libérant des tensions, des blocages émotionnelles et la pensée.
\subsection{B.M.C}\label{sec:elements-basiques}
En me rapprochant des ces pratiques, j'ai découvert entre outre la méthode Body Mind Centering ou BMC lors de sessions d'entraînement physique au théâtre du Soleil. En 2014, j'ai été en stage à la Cartoucherie de Vincennes en tant quassistante décor pour le spectacle MacBeth. Avec d'autres stagiaires, nous nous réunissons le matin pour pratiquer des exercices déveil corporel. Parmi les participants, quelqu'un a mentionné cette pratique, puis a proposé un exercice et cela m'a bien intrigué. Mon cheminement a été ensuite plutôt autodidacte, en m'appuyant sur des matériaux et témoignages. Lors des cours de danse à Micadanses puis à la Ménagerie de Verre à Paris, j'ai souvent rencontré des danseurs plus ou moins familiers avec cette technique. Leur qualité de mouvement était souvent impressionnante. Plus tard j'ai eu l'occasion d'approfondir et mieux me renseigner sur ces observations intuitives.
En me rapprochant des ces pratiques, j'ai découvert entre outre la méthode Body Mind Centering ou BMC lors de sessions d'entraînement physique au théâtre du Soleil. En 2014, j'ai été en stage à la Cartoucherie de Vincennes en tant quassistante décor pour le spectacle MacBeth. Avec d'autres stagiaires, nous nous réunissons le matin pour pratiquer des exercices déveil corporel. Parmi les participants, quelqu'un a mentionné cette pratique, puis a proposé un exercice et cela m'a bien intriguée. Mon cheminement a été ensuite plutôt autodidacte, en m'appuyant sur des matériaux et témoignages. Lors des cours de danse à Micadanses puis à la Ménagerie de Verre à Paris, j'ai souvent rencontré des danseurs plus ou moins familiers avec cette technique. Leur qualité de mouvement était souvent impressionnante. Plus tard j'ai eu l'occasion d'approfondir et de mieux me renseigner sur ces observations intuitives.
Le Body-Mind Centering a été créée à la fin des années 70 par Bonnie Bainbridge Cohen, danseuse, ergothérapeute et ancienne choréologue en \gls{notation Laban}. Son approche se focalise sur la perception individuelle, lors des études expérientielles de l'anatomie et de la physiologie du corps. Elle utilise des systèmes pour définir plusieurs niveaux d'exploration sensorielle. Cela donne suite à un mélange d'expérience cognitive de compréhension et expérience phénoménologique d'intégration des sensations du corps. Selon Bainbridge Cohen, un des objectifs de cette pratique est d'agrandir les dynamiques psycho-physiques de la perception. Plus important, BMC est une étude expérientielle basée sur des techniques d'incarnation (ie. emboddiment). Cela soulève des questions sur le développement en tant que processus de travail mais aussi comme devenir du corps:
Le Body-Mind Centering a été créé à la fin des années 70 par Bonnie Bainbridge Cohen, danseuse, ergothérapeute et ancienne choréologue en \gls{notation Laban}. Son approche se focalise sur la perception individuelle, lors des études expérientielles de l'anatomie et de la physiologie du corps. Elle utilise des systèmes pour définir plusieurs niveaux d'exploration sensorielle. Cela donne suite à un mélange d'expérience cognitive de compréhension et expérience phénoménologique d'intégration des sensations du corps. Selon Bainbridge Cohen, un des objectifs de cette pratique est d'agrandir les dynamiques psycho-physiques de la perception. Plus important, le BMC est une étude expérientielle basée sur des techniques d'incarnation (c'est à dire \gls{embodiment}). Cela soulève des questions sur le développement en tant que processus de travail mais aussi comme devenir du corps:
\begin{quote}
``Le devenir du corps (ie. développement) nest pas un processus linéaire, mais se produit par vagues qui se chevauchent, chaque étape contenant des éléments de toutes les autres. Parce que chaque étape précédente sous-tend et soutient chaque étape successive, toute interruption ou échec à terminer une étape de développement peut entraîner des problèmes d'alignement/de mouvement, des déséquilibres au sein des systèmes corporels et des problèmes de perception, de séquençage, d'organisation, de mémoire, de créativité et communication\footnote{en version originale: ``Development is not a linear process but occurs in overlapping waves with each stage containing elements of all the others. Because each previous stage underlies and supports each successive stage, any skipping, interrupting, or failing to complete a stage of development can lead to alignment/ movement problems, imbalances within the body systems, and problems in perception, sequencing, organization, memory, creativity and communication.”}.”
``Le devenir du corps (c'est à dire son développement) nest pas un processus linéaire, mais se produit par vagues qui se chevauchent, chaque étape contenant des éléments de toutes les autres. Parce que chaque étape précédente sous-tend et soutient chaque étape successive, toute interruption ou échec à terminer une étape de développement peut entraîner des problèmes d'alignement/de mouvement, des déséquilibres au sein des systèmes corporels et des problèmes de perception, de séquençage, d'organisation, de mémoire, de créativité et communication\footnote{en version originale: ``Development is not a linear process but occurs in overlapping waves with each stage containing elements of all the others. Because each previous stage underlies and supports each successive stage, any skipping, interrupting, or failing to complete a stage of development can lead to alignment/ movement problems, imbalances within the body systems, and problems in perception, sequencing, organization, memory, creativity and communication.”}.”
\cite{bainbridge1993sensing}
\end{quote}
Ainsi le développement du mouvement est étudié à l'échelle de son développement ontogenetique (de l'embryon à l'adulte) et comme évolution progressive des espèces dans le règne animal(Un exemple expliqué par cette pratique est la marche des amphibies - évoluée en marche bipède des mammifères).
Ainsi le développement du mouvement est étudié à l'échelle de son développement ontogénétique (c'est à dire de l'embryon à l'adulte) et comme évolution progressive des espèces dans le règne animal (un exemple expliqué par cette pratique est la marche des amphibies - évoluée en marche bipède des mammifères).
BMC est aussi une pédagogie du corps orientée vers la recherche dun équilibre entre le système nerveux sympathique( responsable du contrôle d'un grand nombre d'activités automatiques de l'organisme, tel le rythme cardiaque ou la contraction des muscles lisse) et le système nerveux parasympathique(régule les fonctions corporelles qui ne sont pas sous le contrôle volontaire de l'individu). Ces deux systèmes ont un fonctionnement complémentaire, avec le système nerveux sympathique qui active le corps lors des situations de stress et le système nerveux parasympathique qui le ralentit pour créer des situations de détente. Ainsi cette pratique corporelle est utilisée non seulement dans la danse mais aussi dans de nombreux types de travail corporel en lien avec la gestion du stress comme la psycho-thérapie, le yoga ou la musicothérapie. A travers le mouvement et le toucher, les praticiens explorent des principes anatomiques et physiologiques multiples. Cela favorise une prise de conscience des divers systèmes du corps(cellules, tissus, organes, squelette, le système neuro-endocrinien) pour orienter une action basée sur la perception.
BMC est aussi une pédagogie du corps orientée vers la recherche dun équilibre entre le système nerveux sympathique ( responsable du contrôle d'un grand nombre d'activités automatiques de l'organisme, tel le rythme cardiaque ou la contraction des muscles lisses) et le système nerveux parasympathique (régule les fonctions corporelles qui ne sont pas sous le contrôle volontaire de l'individu). Ces deux systèmes ont un fonctionnement complémentaire, avec le système nerveux sympathique qui active le corps lors des situations de stress et le système nerveux parasympathique qui le ralentit pour créer des situations de détente. Ainsi cette pratique corporelle est utilisée non seulement dans la danse mais aussi dans de nombreux types de travail corporel en lien avec la gestion du stress comme la psychothérapie, le yoga ou la musicothérapie. À travers le mouvement et le toucher, les praticiens explorent des principes anatomiques et physiologiques multiples. Cela favorise une prise de conscience des divers systèmes du corps (cellules, tissus, organes, squelette, le système neuro-endocrinien) pour orienter une action basée sur la perception.
Parmi ces systèmes, sont mentionnés:
\begin{itemize}
\item Le système squelettique - structure de soutien qui répartit notre poids sur la terre, en lien avec la gravité.
@ -130,7 +130,7 @@ Parmi ces systèmes, sont mentionnés:
\item Le système endocrinien est vu comme métaphore de notre intuition et s'exprime dans nos moments forts tandis que le système de muscles exprime notre vitalité et notre puissance.
\item Le système nerveux à son tour est un support de la mémoire de nos expériences et perceptions. Lorsque le mental incorpore cette structure, il facilite l'apprentissage de nouvelles expériences basées sur lintuition et la créativité.
\end{itemize}
Pour les praticiens BMC, lorsqu'un système est sur-stimulé ou déséquilibré, il peut devenir source de blessures, de maladies ou de détresse émotionnelle et psychologique. Pour équilibrer cela, l'imaginaire biologique du BMC stimule la prise en conscience du fonctionnement du corps, au travers des sessions guidées. Cependant, comme le décrit lanthropologue Jeremy Damien dans sa thèse, lors de son expérience BMC en danse amateur avec le collectif \textit{Les Zélées}, les danseurs ont du mal à se représenter et entrer en relation avec certains systèmes. Pour illustrer, le système lymphatique est décrit en lien avec des attributs comme ``la clarté” et ``la finesse”. Cela induit parfois en erreur les danseurs, au point où Damien se demande si cela relève dune réalité physiologique du corps ou plutôt dune métaphore à intégrer de façon subjective. C'est important de noter encore une fois les possibles ambiguïtés apparus en lien avec des concepts pluridisciplinaires. La signification du mot ``lymphe” dans le domaine de la médecine nest pas la même lors dun atelier de danse. En tant quanthropologue, Damien rapproche la pré-supposée dimension thérapeutique de certaines pratiques, semblables à des rituels et formes dauto-suggestion collectives. Pour ma part, je suis sensible aux observations de Damien. Ces pratiques m'intéressent en tant que outils de recherche-création par leurs effets sur limagination des danseurs et leur capacité de produire des mouvements ``nouveaux”.
Pour les praticiens BMC, lorsqu'un système est sur-stimulé ou déséquilibré, il peut devenir source de blessures, de maladies ou de détresse émotionnelle et psychologique. Pour équilibrer cela, l'imaginaire biologique du BMC stimule la prise en conscience du fonctionnement du corps, au travers des sessions guidées. Cependant, comme le décrit lanthropologue Jeremy Damien dans sa thèse, lors de son expérience BMC en danse amateur avec le collectif \textit{Les Zélées}, les danseurs ont du mal à se représenter et entrer en relation avec certains systèmes. Pour illustrer, le système lymphatique est décrit en lien avec des attributs comme ``la clarté” et ``la finesse”. Cela induit parfois en erreur les danseurs, au point où Damien se demande si cela relève dune réalité physiologique du corps ou plutôt dune métaphore à intégrer de façon subjective. Il est important de noter encore une fois les possibles ambiguïtés apparues en lien avec des concepts pluridisciplinaires. La signification du mot ``lymphe” dans le domaine de la médecine nest pas la même lors dun atelier de danse. En tant quanthropologue, Damien rapproche la pré-supposée dimension thérapeutique de certaines pratiques, semblables à des rituels et formes dauto-suggestion collectives. Pour ma part, je suis sensible aux observations de Damien. Ces pratiques m'intéressent en tant qu'outils de recherche-création par leurs effets sur limagination des danseurs et leur capacité de produire des mouvements ``nouveaux”.
En guise d'explication, Bainbridge Cohen clarifie sa démarche:
\begin{quote}
``Lorsque nous parlons de sang, de lymphe ou de toute autre substance physique, nous ne parlons pas seulement de substances, mais aussi détats de conscience et de processus qui leur sont inhérents. Nous associons nos expériences à ces cartes, mais les cartes ne sont pas l'expérience\footnote{en version originale: When we are talking about blood or lymph or any physical substances, we are not only talking about substances but about states of consciousness and processes inherent within them. We are relating our experiences to these maps, but the maps are not the experience.”}.”
@ -144,11 +144,12 @@ Dans un article\cite{bainbridge1993sensing} qui a donné suite à son livre ``Se
\begin{itemize}
\item les réflexes primitifs en lien avec les \gls{mouvements spontanés} et leur relation avec les mouvements intégrés
\item les réactions de redressement par rapport à la gravité
\item les réponses d'équilibration pour garder notre centre de masse en équilibre et rester début.
\item les réponses d'équilibration pour garder notre centre de masse en équilibre et tenir début.
\end{itemize}
Plus tard, un quatrième concept intitulé \gls{Basic Neuro Cellular Patterns} (2018) synthétise ces derniers, en organisant une classification de modèles en lien avec le développement ontogénétique (du stade d'embryon jusqu'à l'age adulte de la même espèce) du mouvement.
Il faut également préciser quen BMC le terme ``somatique” est pensé en contrepoids de celui de ``psychique”, avec un fort intérêt pour les mouvements réflexes et la façon dont le système nerveux périphérique s'organise lorsque nous apprenons un mouvement. Pour ma part cette définition trouve écho dans celle que j'ai du mouvement spontanée, décrit auparavant. Dans une série déchanges intitulée \textit{Dialogue\# 1 Reflexes and Expression}, la praticienne réponds à des questions après une exploration en lien avec les mouvements réflexifs:
Il faut également préciser quen BMC le terme ``somatique” est pensé en contrepoids de celui de ``psychique”, avec un fort intérêt pour les mouvements réflexes et la façon dont le système nerveux périphérique s'organise lorsque nous apprenons un mouvement. Pour ma part cette définition trouve écho dans celle que j'ai du mouvement spontané, décrit auparavant. Dans une série déchanges intitulée \textit{Dialogue\# 1 Reflexes and Expression}, la praticienne répond à des questions après une exploration en lien avec les mouvements réflexifs:
\begin{quote}
``Nancy: Lorsquun mouvement devient réflexif, diriez-vous que lexpérience passe du perçu au ressenti ?
Bonnie: Oui, ça passe dans le sang. Je sens que les réflexes ont beaucoup à voir avec le sang, avec les expressions émotionnelles\footnote{en version originale: ``Nancy: When a movement becomes reflexive, would you say that the experience goes from sensing to feeling? Bonnie: Yes, it gets into the blood. I feel the reflexes have a lot to do with the blood, with emotional expressions.”}
@ -158,7 +159,7 @@ Bonnie: Oui, ça passe dans le sang. Je sens que les réflexes ont beaucoup à v
Selon BMC, la manière de bouger de chaque individu est influencée par la façon dont le mental se manifeste dans le corps lorsquil bouge. Lorsqu'il y a un ajustement perpétuel entre action et cognition, il y a également un alignement harmonieux entre différents systèmes. Comme précisé plus haut, les supports d'exploration sont constitués de nos sens mais aussi de notre imagination.
Entrer dans cette dimension imaginaire implique la sollicitation du sens de la proprioception. En BMC cela part de l'hypothèse que chaque tissu de notre corps a sa propre vibration et résonance. La qualité du toucher est résultat de la compréhension expérientielle de ces données. Les praticiens peuvent prendre conscience d'une partie du corps en étudiant des images, des textes ou des livres d'anatomie pour mieux les visualiser. Une des formes dexploration le plus directes repose sur un mélange entre le toucher et la visualisation des parties du corps pour arriver à un état de somatisation. Cet état corresponds à une prise de conscience directe des sensations et perceptions qui se dégagent de la partie du corps sur laquelle nous nous focalisons. Il est suggéré que, lors de cette étape de somatisation en BMC, un échange d'informations bi-directionnel a lieu entre les cellules du corps et le cerveau. Si le toucher et le mouvement sont parmi les premiers sens que nous expérimentons lors de notre naissance, cela renvoie à des processus de re-mémorisation des sensations plus anciennes de notre corps.
Entrer dans cette dimension imaginaire implique la sollicitation du sens de la proprioception. En BMC cela part de l'hypothèse que chaque tissu de notre corps a sa propre vibration et résonance. La qualité du toucher est le résultat de la compréhension expérientielle de ces données. Les praticiens peuvent prendre conscience d'une partie du corps en étudiant des images, des textes ou des livres d'anatomie pour mieux les visualiser. Une des formes dexploration les plus directes repose sur un mélange entre le toucher et la visualisation des parties du corps pour arriver à un état de somatisation. Cet état correspond à une prise de conscience directe des sensations et perceptions qui se dégagent de la partie du corps sur laquelle nous nous focalisons. Il est suggéré que, lors de cette étape de somatisation en BMC, un échange d'informations bi-directionnel a lieu entre les cellules du corps et le cerveau. Si le toucher et le mouvement sont parmi les premiers sens que nous expérimentons lors de notre naissance, cela renvoie à des processus de re-mémorisation des sensations plus anciennes de notre corps.
Un autre concept employé dans cette méthode est le centrage, décrit par Bottiglieri de la façon suivante:
\begin{quote}
@ -166,7 +167,7 @@ Un autre concept employé dans cette méthode est le centrage, décrit par Botti
\cite{bottiglieri2012soigner}
\end{quote}
La relation entre le toucher du potier et le réglage fin du centre de sa forme est une belle métaphore de ce qui représente une exploration BMC. La personne qui pratique est en constant renouvellement et amélioration de ses sensations internes. Ce vocabulaire, proche d'une expérience onthologique, peut-prêter à des confusions. Cependant, pour citer la chorégraphe Deborah Hay, l'endroit où la \gls{conscience} et lincorporation ou l'\gls{embodiment} se rencontrent, représente un état d'alignement interne pour que chaque cellule du corps dévient réceptive et capable d'un changement:
La relation entre le toucher du potier et le réglage fin du centre de sa forme est une belle métaphore de ce que représente une exploration BMC. La personne qui pratique est en constant renouvellement et amélioration de ses sensations internes. Ce vocabulaire, proche d'une expérience ontologique, peut prêter à des confusions. Cependant, pour citer la chorégraphe Deborah Hay, l'endroit où la \gls{conscience} et lincorporation ou l'\gls{embodiment} se rencontrent, représente un état d'alignement interne pour que chaque cellule du corps dévient réceptive et capable d'un changement:
\begin{quote}
``S'accorder à notre conscience cellulaire nous amène à un état de base d'où découlent les manifestations complexes de notre être physique, physiologique et spirituel.\footnote{
@ -174,44 +175,44 @@ en version originale: ``Attuning ourselves to our cellular consciousness brings
\cite{hay2000my}
\end{quote}
Dans sa pratique, Hay emploie ces concepts pour évoquer un état méditatif qui facilite des états de présence. Je vais aborder la façon dont je m'approprie ces concepts dans ma recherche, dans la partie pratique de cette thèse. Mes observations m'ont aidé rétrospectivement à comprendre comment faire l'expérience de ma propre anatomie et de son fonctionnement psychologique, ont affiné mes intentions en tant que danseuse. A ce jour, je pense avoir utilisé le BMC comme point de départ pour développer une meilleure compréhension des sensations de mon corps et de l'action exprimée par le mouvement et le toucher. Cela m'a permis d'activer une forme de conscience ou d'état de présence spécifique pour chaque partie de mon corps et ainsi faire émerger une danse spontanée, propre à ce vécu.
Dans sa pratique, Hay emploie ces concepts pour évoquer un état méditatif qui facilite des états de présence. Je vais aborder la façon dont je m'approprie ces concepts dans ma recherche, dans la partie pratique de cette thèse. Mes observations m'ont aidé rétrospectivement à comprendre comment faire l'expérience de ma propre anatomie et de son fonctionnement psychologique, ont affiné mes intentions en tant que danseuse. À ce jour, je pense avoir utilisé le BMC comme point de départ pour développer une meilleure compréhension des sensations de mon corps et de l'action exprimée par le mouvement et le toucher. Cela m'a permis d'activer une forme de conscience ou d'état de présence spécifique pour chaque partie de mon corps et ainsi faire émerger une danse spontanée, propre à ce vécu.
\begin{figure}
\centering
\includegraphics[width=0.7\linewidth]{bmc.png}
\caption{Exemple des improvisations inspirées par la technique BMC, april 2021 lors de ma residence de recherche à la Halle Tropismes à Montpellier. Source photo: compte instagram de la cie desiderate}
\caption{Exemple des improvisations inspirées par la technique BMC, april 2021 lors de ma résidence de recherche à la Halle Tropisme à Montpellier. Source photo: compte instagram de la compagnie Desiderate}
\label{fig:bmc}
\end{figure}
\subsection{Feldenkrais}
Cette méthode développé par Moshé Feldenkrais (1904-1984) revisite le mouvement des articulations, laissant à chacun la possibilité dêtre plus autonome et confiant lorsquil bouge. Ses cours sont connus sous le nom des \textit{cours de prise de conscience par le mouvement}. Pareil aux autres pratiques somatiques, ils permettent de se focaliser sur les sensations internes, pour voir comment exécuter des mouvements plus souples. La méthode développée à partir des années 50, vise à restaurer la capacité de bouger lors des accidents et à reprendre des habitudes de mouvement naturelles, en comprenant la quantité d'efforts nécessaires pour exécuter un mouvement de façon efficace. De cette façon, chaque participant a la possibilité d'être plus autonome et en confiance lors de ses déplacements dans lespace. Proche de pratiques corporelles comme le Tai Chi, Feldenkrais utilise des mouvements lents pour faciliter la concentration du pratiquant sur la maîtrise de sa force ou de sa flexibilité.
Cette méthode développée par Moshé Feldenkrais (1904-1984) revisite le mouvement des articulations, laissant à chacun la possibilité dêtre plus autonome et confiant lorsquil bouge. Ses cours sont connus sous le nom des \textit{cours de prise de conscience par le mouvement}. Pareil aux autres pratiques somatiques, ils permettent de se focaliser sur les sensations internes, pour voir comment exécuter des mouvements plus souples. La méthode développée à partir des années 50, vise à restaurer la capacité de bouger après un accident et à reprendre des habitudes de mouvement naturelles, en comprenant la quantité d'efforts nécessaires pour exécuter un mouvement de façon efficace. De cette façon, chaque participant a la possibilité d'être plus autonome et en confiance lors de ses déplacements dans lespace. Proche de pratiques corporelles comme le Tai Chi, Feldenkrais utilise des mouvements lents pour faciliter la concentration du pratiquant sur la maîtrise de sa force ou de sa flexibilité.
Jai découvert la méthode Feldenkrais lors des cours hebdomadaires à luniversité Sorbonne Nouvelle. En 2013, je venais de commencer mes études théâtrales à Paris et c'était une de mes premiers expérimentations en lien avec la danse.
Jai découvert la méthode Feldenkrais lors des cours hebdomadaires à luniversité Sorbonne Nouvelle. En 2013, je venais de commencer mes études théâtrales à Paris et c'était une de mes premières expérimentations en lien avec la danse.
Ce qui m'a interpelée dans cette approche est le lien fait par Feldenkrais être la conscience et la perception:
Ce qui m'a interpelée dans cette approche est le lien fait par Feldenkrais entre la conscience et la perception:
\begin{quote}
``la conscience est la perception, conjuguée à la compréhension de son fonctionnement ou de ce qui se passe en nous pendant que nous sommes en état de perception.” \cite{ginot2014penser}
\end{quote}
Découvrir sa perspective, confirmait mes intuitions quant à lexpérience du plateau et ce qu'elle révélait de l'introspection d'un artiste. La chercheuse Sylvie Fortin mentionne comment cette pratique valorise les explorations subjectives concentrés sur \textit{le corps-sujet} plutôt que \textit{le corps-objet}. Cela peut se faire par exemple, en invitant une personne ``à déterminer la position optimale pour exécuter un mouvement en sappuyant sur son ressenti plutôt que sur des standards esthétiques arbitraires”\cite{husquinet2018corps}. Différents exercices basés sur la perception du corps en mouvement ou sur la conscience de la respiration, permettent aux participants de appréhender leurs propres habitudes corporelles. Ainsi en Feldenkrais, ``lapprentissage consiste à éveiller les zones danesthésie sensorielle et à élargir les types de sensation possible”\cite{husquinet2018corps}. Plus généralement, cette méthode aide à coordonner différentes parties du corps, encourageant l'expression des ressentis et des émotions pour une intégration holistique du corps et de l'esprit. Dans lapproche défendue par cette pratique, souvent intelligence du mouvement et conscience de la respiration vont ensemble. Léducateur somatique regarde comment un fonctionnement sensori-motrice déficitaire affecte lensemble de la personne. Son rôle est d'aider améliorer ce fonctionnement, de plus la respiration est un des moyens le plus accessibles à le faire.
Découvrir sa perspective, confirmait mes intuitions quant à lexpérience du plateau et ce qu'elle révélait de l'introspection d'un artiste. La chercheuse Sylvie Fortin mentionne comment cette pratique valorise les explorations subjectives concentrées sur \textit{le corps-sujet} plutôt que \textit{le corps-objet}. Cela peut se faire par exemple, en invitant une personne ``à déterminer la position optimale pour exécuter un mouvement en sappuyant sur son ressenti plutôt que sur des standards esthétiques arbitraires”\cite{husquinet2018corps}. Différents exercices basés sur la perception du corps en mouvement ou sur la conscience de la respiration, permettent aux participants d'appréhender leurs propres habitudes corporelles. Ainsi en Feldenkrais, ``lapprentissage consiste à éveiller les zones danesthésie sensorielle et à élargir les types de sensation possible”\cite{husquinet2018corps}. Plus généralement, cette méthode aide à coordonner différentes parties du corps, encourageant l'expression des ressentis et des émotions pour une intégration holistique du corps et de l'esprit. Dans lapproche défendue par cette pratique, souvent intelligence du mouvement et conscience de la respiration vont ensemble. Léducateur somatique regarde comment un fonctionnement sensori-moteur déficitaire affecte lensemble de la personne. Son rôle est d'aider à améliorer ce fonctionnement, de plus la respiration est un des moyens le plus accessibles pour le faire.
Il y a un fort lien entre ces pratiques et des concepts émergents en sciences cognitives tels que l``image du corps” et le ``schéma corporel” que nous détaillerons dans le prochain chapitre. C'est important de noter que leur appréhension dans les pratiques somatiques est probablement différente des études en neurosciences par exemple. Si ici elles renvoient à un engagement envers soi, à une exploration intime, les sciences cognitives traitent de ce sujet pour mieux cartographier le fonctionnement du cerveau et de nos fonctions motrices.
Il y a un fort lien entre ces pratiques et des concepts émergents en sciences cognitives tels que l``image du corps” et le ``schéma corporel” que nous détaillerons dans le prochain chapitre. Il est important de noter que leur appréhension dans les pratiques somatiques est probablement différente des études en neurosciences par exemple. Si ici elles renvoient à un engagement envers soi, à une exploration intime, les sciences cognitives traitent de ce sujet pour mieux cartographier le fonctionnement du cerveau et de nos fonctions motrices.
\begin{figure}
\centering
\includegraphics[width=0.7\linewidth]{images/conscience_bottiglieri_ginot}
\caption{Lien entre l'image du corps et le schema corporel. Source: le livre \textit{Penser les somatiques avec Feldenkrais}, page 153.}
\caption{Lien entre l'image du corps et le schéma corporel. Source: le livre \textit{Penser les somatiques avec Feldenkrais}, page 153.}
\label{fig:consciencebottiglieriginot}
\end{figure}
Contrairement à BMC, les exercices collectifs structurés autour dun thème ont comme objectif de prendre en conscience son propre mouvement, sans référence visuelle. En dehors des instructions sur la façon de bouger, le praticien donne des indications perceptives (sur quoi concentrer son attention) et conceptuelles (pourquoi cette méthode ne sillustre pas, pourquoi elle cherche le moindre effort). Des postures comme \textit{la pose au sol}, visent à comprendre leffet de la gravité sur le corps. Le plus un corps est proche du sol, allongé, le moins il rasent de la gravité. Sa hanche peut s'ouvrir pour soulager les tensions des articulations. À la fin dune séance d'exploration, l'élève a parcouru son propre chemin, sans se servir d'un modèle visuel pour réaliser les mouvements. Ces exercices peuvent être liés aux travaux du neuroscientifique Francesco Varela sur l'\gls{autopoiesis}, que nous allons détailler dans le prochain chapitre. Lexpérience la plus courante est celle dun changement très sensible dans la perception de la posture debout - comprendre quels appuis, observer son alignement, son hauteur et lespace autour. En guise de conclusion de la séance, la marche et divers mouvements quotidiens sont proposés à lexploration. Chaque changement peut être ressenti plus ou moins durablement et surtout différemment. Chaque perception est spécifique et les élèves ressentent différemment la répartition de poids. Parmi les retours d'expérience, les participants éprouvent soit de la confusion, soit de l'excitation par la découverte de nouvelles postures et relations entre leurs parties du corps. Quand un changement persiste d'une séance à l'autre, il deviendra habituel ou, selon lexpression de Feldenkrais - ``intégré”. Ce qui signifie que le poids du corps est mieux réparti quauparavant, sans que l'élève ne le remarque.
Contrairement à BMC, les exercices collectifs structurés autour dun thème ont comme objectif de prendre en conscience son propre mouvement, sans référence visuelle. En dehors des instructions sur la façon de bouger, le praticien donne des indications perceptives (sur quoi concentrer son attention) et conceptuelles (pourquoi cette méthode ne sillustre pas, pourquoi elle cherche le moindre effort). Des postures comme la \textit{pose au sol}, visent à comprendre leffet de la gravité sur le corps. Le plus un corps est proche du sol, allongé, le moins il ressent de la gravité. Sa hanche peut s'ouvrir pour soulager les tensions des articulations. À la fin dune séance d'exploration, l'élève a parcouru son propre chemin, sans se servir d'un modèle visuel pour réaliser les mouvements. Ces exercices peuvent être liés aux travaux du neuroscientifique Francesco Varela sur l'\gls{autopoiesis}, que nous allons détailler dans le prochain chapitre. Lexpérience la plus courante est celle dun changement très sensible dans la perception de la posture debout - comprendre quels appuis, observer son alignement, sa hauteur et lespace autour. En guise de conclusion de la séance, la marche et divers mouvements quotidiens sont proposés à lexploration. Chaque changement peut être ressenti plus ou moins durablement et surtout différemment. Chaque perception est spécifique et les élèves ressentent différemment la répartition de poids. Parmi les retours d'expérience, les participants éprouvent soit de la confusion, soit de l'excitation par la découverte de nouvelles postures et relations entre leurs parties du corps. Quand un changement persiste d'une séance à l'autre, il deviendra habituel ou, selon lexpression de Feldenkrais - ``intégré”. Ce qui signifie que le poids du corps est mieux réparti quauparavant, sans que l'élève ne le remarque.
Si j'ai mentionné plus haut cette manière d'intégrer un mouvement ou une posture de manière automatique, par la répétition, c'est pour mieux témoigner de cet état d'\gls{intelligence sensorielle}. Elle est propre à la danse, comme aux expérimentations somatiques, car elle relève d'une pratique inhérente du corps, de son vécu expérientiel.
\subsection{Viewpoints}
\subsection{ViewPoints}
Une méthode que jai intégrée dans mon approche expérimentale d'entraînement du corps sur scène, est la technique ViewPoints. Cette technique relève plutôt d'un travail sur l'\gls{intelligence sensorielle} en tant qu'outil pour mieux structurer les processus de composition et de mise en scène. Issue dune méthode inventée par lartiste de théâtre Mary Overlie dans les années 70, elle stimule la créativité en s'inspirant des points de vue ou des (\textit{viewpoints}). Ces points de vue permettent de focaliser la concentration et d'ordonner la façon de travailler. Ultérieurement adaptée par les metteuses en scène Anne Bogart et Tina Landau, cette méthode déconstruit les hiérarchies de travail sur le plateau. Cet apprentissage, ou plutôt désapprentissage par rapport aux connaissances acquises en école de mise en scène, sest fait pour moi à travers une session d'expérimentation pratique entre mise en scène et photographie, avec le collectif de metteurs en scène \textit{Open Source}\footnote{https://collectifopensource.fr/} en mai 2016.
En tant quoutil de travail, le ViewPoints revisite la hiérarchie traditionnelle entre metteur en scène ou chorégraphe et les performeurs. Les performeurs sont considérés comme des participants actifs dans la création globale du spectacle. Ils apparentent à focaliser leur attention sur différents éléments du jeu scénique: rythme, durée, geste, relation spatiale. Larticle \cite{dennis2013viewpoints} rend compte des expériences des étudiants en danse qui utilisent cette méthode. L'auteur interroge l'impact de cette méthode sur les multiples postures du sujet qui est à la fois observateur, participant, créateur, témoin et acteur du processus de recherche. Cela part de la supposition que si les acteurs sont ouverts à leur environnement, ils peuvent créer un mouvement et une composition scénique dynamique. Dans un entretien lors dune conférence sur cette technique, Anne Bogart affirme que rien n'a été inventée par eux pour cette pratique, mais que tout est venu comme une réponse concrète à des besoins de plateau. Cherchant à convoquer l'instinct et l'intuition lors des laboratoires de recherche-création, ce qui m'intéresse dans cette technique est son rapport à la danse, définie au sens large comme mouvement:
Une méthode que jai intégrée dans mon approche expérimentale d'entraînement du corps sur scène, est la technique ViewPoints. Cette technique relève plutôt d'un travail sur l'\gls{intelligence sensorielle} en tant qu'outil pour mieux structurer les processus de composition et de mise en scène. Issue dune méthode inventée par lartiste de théâtre Mary Overlie dans les années 70, elle stimule la créativité en s'inspirant des plusieurs points de vue ou des \textit{viewpoints} en anglais. Ces points de vue permettent de focaliser la concentration et d'ordonner la façon de travailler. Ultérieurement adaptée par les metteuses en scène Anne Bogart et Tina Landau, cette méthode déconstruit les hiérarchies de travail sur le plateau. Cet apprentissage, ou plutôt désapprentissage par rapport aux connaissances acquises en école de mise en scène, sest fait pour moi à travers une session d'expérimentation pratique entre mise en scène et photographie, avec le collectif de metteurs en scène \textit{Open Source}\footnote{https://collectifopensource.fr/} en mai 2016.
En tant quoutil de travail, le ViewPoints revisite la hiérarchie traditionnelle entre metteur en scène ou chorégraphe et les performeurs. Les performeurs sont considérés comme des participants actifs dans la création globale du spectacle. Ils apprennent à concentrer leur attention sur différents éléments du jeu scénique: rythme, durée, geste, relation spatiale. Larticle \cite{dennis2013viewpoints} rend compte des expériences des étudiants en danse qui utilisent cette méthode. L'auteur interroge l'impact de cette méthode sur les multiples postures du sujet qui est à la fois observateur, participant, créateur, témoin et acteur du processus de recherche. Cela part de la supposition que si les acteurs sont ouverts à leur environnement, ils peuvent créer un mouvement et une composition scénique dynamique. Dans un entretien lors dune conférence sur cette technique, Anne Bogart affirme que rien n'a été inventée par eux pour cette pratique, mais que tout est venu comme une réponse concrète à des besoins de plateau. Cherchant à convoquer l'instinct et l'intuition lors des laboratoires de recherche-création, ce qui m'intéresse dans cette technique est son rapport à la danse, définie au sens large comme mouvement:
\begin{quote}
``What is dance? they asked. If an elephant swings its trunk, is it dance? If a person walks across the stage, is that dance?”
\end{quote}
@ -221,17 +222,17 @@ Appliquer ces principes à la danse vient presque naturellement. Par exemple, le
\item gestes comportementaux: ceux que nous employons dans notre vie quotidienne, qui font écho à des situations de vie
\item gestes expressifs: ceux qui expriment une émotion et répondent à des besoins dabstractisation
\end{itemize}
Parmi les principes employés, un qui m'intéresse en particulier est la\gls{réponse kinesthésique}. Ce type de mouvement observe comment un geste spontané surgit en réponse à lenvironnement extérieur. Des exemples de réponses kinesthésiques apparaissent lorsque nous nous levons instantanément quand quelquun ouvre une porte ou nous grattons la tête si quelquun nous pose une question difficile. Ce type de mouvement est similaire avec ce que nous avons mentionné auparavant comme mouvement réflexif en BMC et mouvement spontanée.
Parmi les principes employés, un qui m'intéresse en particulier est la \gls{réponse kinesthésique}. Ce type de mouvement observe comment un geste spontané surgit en réponse à lenvironnement extérieur. Des exemples de réponses kinesthésiques apparaissent lorsque nous nous levons instantanément quand quelquun ouvre une porte ou nous grattons la tête si quelquun nous pose une question difficile. Ce type de mouvement est similaire avec ce que nous avons mentionné auparavant comme mouvement réflexif en BMC, ou comme mouvement spontané.
Ce qui nous intéresse pour nos expérimentations pratiques est de savoir si ce type de mouvementes peuvent être modélisés pour les robots ou pas.
\subsection{Jinen Butō}
Une autre type dexploration sensorielle que jai eu loccasion de découvrir est la danse Jinen Butō, lors de mes stages avec Atsushi Takenouchi entre 2013 et 2015. Cette pratique, issue du mouvement de danse Butō a émergé en 1986 comme lien entre la nature, la terre et l'humain.
Un autre type dexploration sensorielle que jai eu loccasion de découvrir est la danse Jinen Butō, lors de mes stages avec Atsushi Takenouchi entre 2013 et 2015. Cette pratique, issue du mouvement de danse Butō a émergé en 1986 comme lien entre la nature, la terre et l'humain.
Créé par Tatsumi Hijikata et Kazuo Ohno probablement en réaction aux événements de la Seconde Guerre mondiale, le Butō a longuement exploré des thèmes tabous de la société japonaise. Dés de son début, cette danse a cherché convoquer des postures grotesques via des mouvements corporels parfois lents, parfois compulsifs, pour devenir ensuite un mode de vie. Butō diffère à la fois de la danse traditionnelle japonaise et de la danse occidentale moderne. Plus tard des disciples de Hijikata, comme Takenouchi ont a leur tour continué cette pratique selon leur contexte et expérience de vie. Ainsi Takenouki s'est concentré sur le rapport à la nature et aux possibilités de connexion avec celle-ci.
Créé par Tatsumi Hijikata et Kazuo Ohno probablement en réaction aux événements de la Seconde Guerre mondiale, le Butō a longuement exploré des thèmes tabous de la société japonaise. Dès son début, cette danse a cherché à convoquer des postures grotesques via des mouvements corporels parfois lents, parfois compulsifs, pour devenir ensuite un mode de vie. Butō diffère à la fois de la danse traditionnelle japonaise et de la danse occidentale moderne. Plus tard des disciples de Hijikata, comme Takenouchi, ont a leur tour continué cette pratique selon leur contexte et expérience de vie. Ainsi Takenouchi s'est concentré sur le rapport à la nature et aux possibilités de connexion avec celle-ci.
Entendre parler, puis voir les images du corps nu de Takenouki enveloppé par des paysages naturels, dans un état mi-éveillé, mi-transe est quelque chose qui à l'époque a beaucoup suscité mon émoi et mon imagination. Cétait une première expérience d'immersion dans une entité non-humaine, composer avec et se laisser inspirée par la découverte des nouvelles sensations que cela puisse engendrer.
Entendre parler, puis voir les images du corps nu de Takenouchi enveloppé par des paysages naturels, dans un état mi-éveillé, mi-transe est quelque chose qui à l'époque a beaucoup suscité mon émoi et mon imagination. Cétait une première expérience d'immersion dans une entité non-humaine, composer avec et se laisser inspirée par la découverte des nouvelles sensations que cela pourrait engendrer.
\begin{figure}
\centering
\includegraphics[width=0.7\linewidth]{images/jinen}
@ -255,50 +256,50 @@ Un de ses poèmes ``HA-NE NO KI ou L'arbre Ailé” découvert lors de ces renco
O arbre ailé ! Tant quil y aura la vie, accorde-moi, accorde-nous dêtre lardente danse
Qui est sève des corps et âmes !}
A l'époque, l'expérience sensible de Jinen Butō a été un catalyseur pour mon envie de danser, d'explorer au travers mon corps le monde afin d'y trouver un sens autre que celui donné par les paroles.
Lorsque plus tard, j'ai découvert que Bonnie Bainbridge Cohen a pratique une grande partie de sa vie le \gls{Katsugen Undō}\cite{eddy2002somatic}(mouvement spontané naturel, régénérateur du corps en relation avec certaines pratiques shinto au Japon), j'ai compris à quel point les traditions orientales nous aident à nous réapproprier le corps au travers des interactions avec des partenaires non-humains, dont les robots sont un exemple.
À l'époque, l'expérience sensible de Jinen Butō a été un catalyseur pour mon envie de danser, d'explorer au travers mon corps le monde afin d'y trouver un sens autre que celui donné par les paroles.
Lorsque plus tard, j'ai découvert que Bonnie Bainbridge Cohen a pratiqué une grande partie de sa vie le \gls{Katsugen Undō}\cite{eddy2002somatic} (mouvement spontané naturel, régénérateur du corps en relation avec certaines pratiques shinto au Japon), j'ai compris à quel point les traditions orientales nous aident à nous réapproprier le corps au travers des interactions avec des partenaires non-humains, dont les robots sont un exemple.
\subsection{Gaga}
Mes pérégrinations ont continué et début 2020 je suis arrivée en Israël pour expérimenter le Gaga Movement, dont la pédagogie encourage le lâcher prise et le plaisir de la danse. Mouvement de danse non-conventionnelle, cette pratique a été développée par le directeur artistique de la Batsheva Dance Company, Ohad Naharin. Lors dun accident au dos dans les années 90, Naharin s'est lancé dans un processus de recherche corporelle avec des personnes sans expérience en danse. Ces expérimentations ont donné place au laboratoire Gaga/people, étant ensuite demandés comme training régulier par les danseurs de sa compagnie, sous la forme de cycles Gaga/dancers. Selon le contexte, cette technique a plusieurs déclinaisons: training pour renforcer le corps et le préparer physiquement en termes de souplesse et d'endurance, échauffement avant les répétitions et outil dexploration pour cultiver la créativité.
Mes pérégrinations ont continué et début 2020 je suis arrivée en Israël pour expérimenter le Gaga Movement, dont la pédagogie encourage le lâcher prise et le plaisir de la danse. Mouvement de danse non-conventionnelle, cette pratique a été développée par le directeur artistique de la Batsheva Dance Company, Ohad Naharin. Lors dun accident au dos dans les années 90, Naharin s'est lancé dans un processus de recherche corporelle avec des personnes sans expérience en danse. Ces expérimentations ont donné place au laboratoire Gaga/people, étant ensuite demandées comme training régulier par les danseurs de sa compagnie, sous la forme de cycles Gaga/dancers. Selon le contexte, cette technique a plusieurs déclinaisons: training pour renforcer le corps et le préparer physiquement en termes de souplesse et d'endurance, échauffement avant les répétitions et outil dexploration pour cultiver la créativité.
Dans son article - ``The Phenomenology of the Body Schema and Contemporary Dance Practice: The Example of \textit{Gaga}”, la chercheuse en danse Anna Foultier décrit les modalités de travail des danseurs du 21e siècle, devenus entrepreneurs de leur propre corps et de leur technicité:
\begin{quote}
``En raison des tendances chorégraphiques et artistiques récents, ainsi que de la difficulté croissante d'obtenir des contrats plus longs, les danseurs sont devenus des \textit{entrepreneurs} censées réinventer leur formation, s'adapter à divers styles et pratiques chorégraphiques pour souvent composer du matériel chorégraphique pour les projets pour lesquelles ils travaillent. Que cela soit perçu comme promouvant leur agence et leur autorité ou comme une adaptation à un contexte sociétal marqué par le néolibéralisme, le danseur contemporain doit faire preuve d'une approche éclectique où son entraînement peut varier du ballet, moderne, jazz, capoeira, pilates ou yoga à la natation ou à la course. Dans le monde de la danse post-postmoderne, l'accent n'est plus donné par le moulage du corps à une certaine norme, comme dans le ballet classique, ou sur le démantèlement des habitudes afin de découvrir des modèles de mouvement naturels, comme dans la danse moderne, mais plutôt sur la déconstruction et le remodelage continus des corps\footnote{ne version originale: ``Due to choreographic and artistic trends as well as the increasing difficulty for dancers to obtain longer contracts, the dancer has become an “entrepreneur” supposed to fashion her training, adapt to various choreographic styles and practices, and often provide movement material to the pieces she works with. Whether this is seen as liberating the dancers agency and authority over her work or as an accommodation to a societal context marked by neo- liberalism where marketability is an imperative, the contemporary dancer has an eclectic approach where training can vary from ballet, modern, jazz, capoeira, pilates or yoga classes to swimming or running. In the post-postmodern dance world, emphasis is no longer on moulding the body into a certain form, as in classical ballet, or to dismantle habits in order to uncover natural movement patterns, as in early modern dance, but rather on continuously deconstructing and repatterning the body .”}.”
``En raison des tendances chorégraphiques et artistiques récentes, ainsi que de la difficulté croissante d'obtenir des contrats plus longs, les danseurs sont devenus des \textit{entrepreneurs} censés réinventer leur formation, s'adapter à divers styles et pratiques chorégraphiques pour souvent composer du matériel chorégraphique pour les projets pour lesquels ils travaillent. Que cela soit perçu comme promouvant leur agence et leur autorité ou comme une adaptation à un contexte sociétal marqué par le néolibéralisme, le danseur contemporain doit faire preuve d'une approche éclectique où son entraînement peut varier du ballet, moderne, jazz, capoeira, pilates ou yoga à la natation ou à la course. Dans le monde de la danse post-postmoderne, l'accent n'est plus donné par le moulage du corps à une certaine norme, comme dans le ballet classique, ou sur le démantèlement des habitudes afin de découvrir des modèles de mouvement naturels, comme dans la danse moderne, mais plutôt sur la déconstruction et le remodelage continus des corps\footnote{ne version originale: ``Due to choreographic and artistic trends as well as the increasing difficulty for dancers to obtain longer contracts, the dancer has become an “entrepreneur” supposed to fashion her training, adapt to various choreographic styles and practices, and often provide movement material to the pieces she works with. Whether this is seen as liberating the dancers agency and authority over her work or as an accommodation to a societal context marked by neo- liberalism where marketability is an imperative, the contemporary dancer has an eclectic approach where training can vary from ballet, modern, jazz, capoeira, pilates or yoga classes to swimming or running. In the post-postmodern dance world, emphasis is no longer on moulding the body into a certain form, as in classical ballet, or to dismantle habits in order to uncover natural movement patterns, as in early modern dance, but rather on continuously deconstructing and repatterning the body .”}.”
\cite{foultier2021phenomenology}
\end{quote}
Dans les cours de Gaga que jai pris, l'enseignant et les participants sont en constant mouvement. Les participants reçoivent plusieurs types dinstructions: lever ses bras comme s'ils ont un poids lourd sur le dos, les soulever et les laisser tomber en étant recouvert par du miel, sentir ses bras légers comme une plume, tomber au sol avec la même vitesse que les bras qui tombent, etc. L'objectif de Gaga est d'ouvrir de nouvelles possibilités d'exploration dans le corps et ainsi confronter les anciennes habitudes et facilités musculaires afin de développer une conscience du corps et une écoute intérieure.
L'approche ludique de Naharin, son engagement envers la danse professionnelle et la beauté de ses spectacles m'ont bien nourri. Bien que ce temps de transmission fut court, cela a été une belle découverte pour la chercheuse en pratiques corporelles que je suis. Je me rappelle l'ambiance type sanctuaire dans le bâtiment de Batscheva, sorte de forteresse de la paix du Tel Aviv. Des danseurs, des élevés, des curieux se
promenait à l'intérieur d'une cour millénaire, la mer pas loin. Sur les couloirs des danseurs se préparait, dans les studios un méli-mélo des corps, une ambiance type ruche.
Dans les cours de Gaga que jai pris, l'enseignant et les participants sont en constant mouvement. Les participants reçoivent plusieurs types dinstructions: lever ses bras comme s'ils avaient un poids lourd sur le dos, les soulever et les laisser tomber en étant recouvert par du miel, sentir ses bras légers comme une plume, tomber au sol avec la même vitesse que les bras qui tombent, etc. L'objectif de Gaga est d'ouvrir de nouvelles possibilités d'exploration dans le corps et ainsi confronter les anciennes habitudes et facilités musculaires afin de développer une conscience du corps et une écoute intérieure.
L'approche ludique de Naharin, son engagement envers la danse professionnelle et la beauté de ses spectacles m'ont bien nourri. Bien que ce temps de transmission fut court, cela a été une belle découverte pour la chercheuse en pratiques corporelles que je suis. Je me rappelle l'ambiance type sanctuaire dans le bâtiment de la Batsheva, sorte de forteresse de la paix de Tel Aviv. Des danseurs, des élèves, des curieux se
promenaient à l'intérieur d'une cour millénaire, la mer pas loin. Dans les couloirs des danseurs se préparaient, dans les studios un méli-mélo des corps, une ambiance type ruche.
\section{Le Shaking comme outil de travail}
Lors de ouvrages que j'ai pu consulter au fur et au mesure de ma recherche en pratiques somatiques, j'ai décidé d'intégrer une méthode qui est pour le moins surprenante. Elle est a la base utilisée dans des pratiques comme le Katsugen Undo développé par le japonais Haruchika Noguchi et diffusé en Europe à partir des années soixante-dix \footnote{https://www.ecole-itsuo-tsuda.org/qu-est-ce-que-le-mouvement-regenerateur/}. Noguchi part du postulat que le corps humain concentre des énergies excessives qui inhibent notre système d'autorégulation, altérant ainsi nos fonctions physiques, mentales et émotionnelles. Sa pratique laisse libre cours aux mouvements involontaires du système nerveux autonome, en améliorant l'endurance et la flexibilité de l'organisme:
Dans les ouvrages que j'ai pu consulter au fur et au mesure de ma recherche en pratiques somatiques, j'ai décidé d'intégrer une méthode qui est pour le moins surprenante. Elle est à la base utilisée dans des pratiques comme le Katsugen Undo développé par le japonais Haruchika Noguchi et diffusé en Europe à partir des années soixante-dix \footnote{https://www.ecole-itsuo-tsuda.org/qu-est-ce-que-le-mouvement-regenerateur/}. Noguchi part du postulat que le corps humain concentre des énergies excessives qui inhibent notre système d'autorégulation, altérant ainsi nos fonctions physiques, mentales et émotionnelles. Sa pratique laisse libre cours aux mouvements involontaires du système nerveux autonome, en améliorant l'endurance et la flexibilité de l'organisme:
\begin{quote}
``C'est une sorte déducation physique utilisant le mouvement involontaire. Ainsi, vous devriez le considérer comme un moyen pour restaurer la résilience du corps. Ce nest sûrement pas une forme de \textit{mystique orientale}. Il ny a vraiment rien dextraordinaire à propos du Katsugen Undō. Cest simplement la manifestation dun travail interne que les êtres humains possèdent à lorigine.”
``C'est une sorte déducation physique utilisant le mouvement involontaire. Ainsi, vous devriez la considérer comme un moyen pour restaurer la résilience du corps. Ce nest sûrement pas une forme de \textit{mystique orientale}. Il ny a vraiment rien dextraordinaire à propos du Katsugen Undō. Cest simplement la manifestation dun travail interne que les êtres humains possèdent à lorigine.”
\cite{bel2015corps}
\end{quote}
C'est intéressant de noter que Bonnie Bainbridge Cohen également s'est familiarisé avec cette technique lors de un de ses voyages au Japon, avant de mettre les bases de son propre pédagogie. Bien que je l'ai jamais pratiqué, cette technique semble une déclinaison de ce que j'ai déjà pu constater auparavant comme effet de relâchement après des mouvements compulsif proche du shaking que je vais détailler plus bas.
C'est intéressant de noter que Bonnie Bainbridge Cohen également s'est familiarisée avec cette technique lors d'un de ses voyages au Japon, avant de poser les bases de sa propre pédagogie. Bien que je l'ai jamais pratiquée, cette technique semble une déclinaison de ce que j'ai déjà pu constater auparavant comme effet de relâchement après des mouvements compulsif proches du \textit{shaking} que je vais détailler plus bas.
\textit{Le Shaking} vu ici comme tremblement volontaire, est une pratique somatique observée chez les animaux lorsquils secouent leur corps après un événement dangereux qui a sollicité leur instinct de survie. Dans la littérature\cite{levine2010unspoken}, les éthologues ont identifié trois mécanismes de défense comme formes de réaction immédiate chez les animaux: sen fuir, se battre ou se figer - le célebre \textit{fight, flee or freez mood}. Parmi les trois, la réponse ``se figer” (en anglais \textit{freeze}) est un mécanisme de survie qui protège lanimal en danger en inhibant et immobilisant son corps face à la douleur ou à un potentiel danger. Cest le cas d'un bison entouré par des lions qui dévient tout dun coup mou et arrête de se débattre dans la bouche du crocodile, pour senfouir deux secondes après que les lions commencent à leur tour attaquer le crocodile pour disputer leur proie.\textbf{mettre lien}
Une fois inhibés, les mécanismes de défense produisent des hormones (ie l'adrénaline) qui restent stockés à lintérieur du corps en état d'inhibition. Lorsque le danger est passé, les animaux vont secouer leur corps pour le libérer.
\textit{Le Shaking} vu ici comme tremblement volontaire, est une pratique somatique observée chez les animaux lorsquils secouent leur corps après un événement dangereux qui a sollicité leur instinct de survie. Dans la littérature\cite{levine2010unspoken}, les éthologues ont identifié trois mécanismes de défense comme formes de réaction immédiate chez les animaux: sen fuir, se battre ou se figer - le célebre \textit{fight, flee or freeze mood}. Parmi les trois, la réponse ``se figer” (en anglais \textit{freeze}) est un mécanisme de survie qui protège lanimal en danger en inhibant et immobilisant son corps face à la douleur ou à un potentiel danger. Cest le cas d'un bison entouré par des lions qui dévient tout dun coup mou et arrête de se débattre dans la bouche du crocodile, pour senfouir deux secondes après que les lions commencent à leur tour attaquer le crocodile pour disputer leur proie.\textbf{mettre lien}
Une fois inhibés, les mécanismes de défense produisent des hormones (cest-à-dire l'adrénaline) qui restent stockées à lintérieur du corps en état d'inhibition. Lorsque le danger est passé, les animaux vont secouer leur corps pour le libérer.
Inspirés par cela, divers praticiens ont mis en place des exercices de libération des hormones en lien avec le stress accumulé dans le corps. Leur rôle est d'accéder à des schémas musculaires en tension, par un mécanisme réflexe naturel de tremblement et de vibration. Une fois la tension musculaire libérée, le système nerveux est à son tour calmé. Lorsque ce mécanisme de secousses musculaires est activé de façon volontaire, le corps est encouragé à retrouver un état d'équilibre.
Inspirés par cela, divers praticiens ont mis en place des exercices de libération des hormones en lien avec le stress accumulé dans le corps. Leur rôle est d'accéder à des schémas musculaires en tension, par un mécanisme réflexe naturel de tremblement et de vibration. Une fois la tension musculaire libérée, le système nerveux, à son tour, est calmé. Lorsque ce mécanisme de secousses musculaires est activé de façon volontaire, le corps est encouragé à retrouver un état d'équilibre.
Jai décidé dutiliser et ensuite adapter cette technique lors de mes échauffements de danse car cette méthode na pas spécifiquement pour but de se concentrer sur soi et de ralentir le fil des pensées, mais plutôt de ``libérer” le corps de ses tensions et privilégier un sentiment de lâcher-prise.
\subsection{Contexte}
Actuellement des thérapeutes utilisent des techniques de shaking pour réduire les effets du stress traumatique (PTSD). Parmi eux David Berceli, est psychologue et activiste humanitaire qui travaille dans les domaines de la réduction du stress suite à des evenements traumatiques. Dés la fin des années 1990, Berceli a travaillé en Extrême-Orient et en Afrique dans des zones en guerre. Suite à ses expériences de terrain, il a remarqué à quel point les secousses étaient une réponse universelle au traumatisme. Ces expériences lont mené à la création d'un ensemble d'exercices de libération de tension et de traumatisme appelés \textit{Tension and Trauma Releasing Exercises(TRE)}. Lobjectif de sa pratique est de trouver les moyens pour calmer le système nerveux avec laide de ce qu'il définit comme \textit{Self Induced Therapeutic Tremors (SUTT)}. Sa méthode est basée sur une approche neurophysiologique intégrative qui vise un état de détente et repos parasympathique profond. En d'autre mots, Berceli s'appuie sur des principes d'homéostasie(phenomene d'autorégulation des systèmes biologiques pour maintenir leur stabilité, tout en s'adaptant aux conditions optimales pour la survie) pour décharger de façon mécanique la tension physique du corps.
Actuellement des thérapeutes utilisent des techniques de shaking pour réduire les effets du stress traumatique (PTSD). Parmi eux David Berceli, est psychologue et activiste humanitaire qui travaille dans les domaines de la réduction du stress suite à des évènements traumatiques. Dès la fin des années 1990, Berceli a travaillé en Extrême-Orient et en Afrique dans des zones en guerre. Suite à ses expériences de terrain, il a remarqué à quel point les secousses étaient une réponse universelle au traumatisme. Ces expériences lont mené à la création d'un ensemble d'exercices de libération de tension et de traumatisme appelés \textit{Tension and Trauma Releasing Exercises (TRE)}. Lobjectif de sa pratique est de trouver les moyens pour calmer le système nerveux avec laide de ce qu'il définit comme \textit{Self Induced Therapeutic Tremors (SUTT)}. Sa méthode est basée sur une approche neurophysiologique intégrative qui vise un état de détente et repos parasympathique profond. En d'autre mots, Berceli s'appuie sur des principes d'homéostasie (phénomène d'autorégulation des systèmes biologiques pour maintenir leur stabilité, tout en s'adaptant aux conditions optimales pour la survie) pour décharger de façon mécanique la tension physique du corps.
Une première étude pilote qui mesure le stress chez 21 professionnels de la santé en Afrique du Sud, avant et après une utilisation de la méthode TRE pendant 8 semaines, montre les effets de cette méthode. Selon son auteur, pratiquer le ``shaking” en tant que protocole de mouvement, entre 5 et 15 minutes à la fois, permettrait dactiver le système nerveux parasympathique. Cette communication directe entre nos muscles, nos membres et notre système nerveux central permet de relâcher certaines tensions, tout en activant un sens de présence dans le corps. Un autre outil que Berceli emploie dans sa technique est la méditation de la pleine conscience. Cela aide à réguler les émotions en augmentant le lien avec le corps et sa sensorialité. Dans son contexte, la pleine conscience encourage l'acceptation plutôt que l'évitement des expériences traumatiques et diminue la rumination autour des événements passés ou futurs - source d'épuisement de l'énergie.
\subsection{Exemple dexploration sensorielle avec du shaking inspiré par la technique TRE}
Pour donner un exemple pratique d'application de ces principes TRE dans la danse, je décris plus bas un exemple d'exercice déchauffement avant un séance d'improvisation.
Tout d'abord, je me familiarise avec la pièce où je suis et la surface sur laquelle mon corps sappuie, afin que je me sens détendue et habituée à mon environnemt. Je ferme les yeux et écoute les bruits autour de moi, du plus lointain au plus proche. Je touche les surfaces autour de moi, en insistant sur les textures. Une fois cet exercice sensoriel fini, je commence par faire quelques exercices préparatoires tels que des étirements de yoga pour mettre en marche mes muscles. Lobjectif est de privilégier un état de disponibilité, pour l'étape suivante. Ensuite je m'allonge sur le dos, la plante des pieds sur le sol, les genoux pliés sur le côté. Je tire mes pieds vers la poitrine comme pour un saut puis je les relâche pour avoir une distance optimale entre les pieds et le bassin. Les pieds sont parallèles et touchent le sol, les genoux sont fléchés, orientés vers l'extérieur. Avec des respirations lentes, je compte jusqu'au 200 pendant que je ramène mes genoux l'un vers l'autre avec une certaine résistance. Je maintiens chaque position le plus longtemps possible. Je répète cette étape jusq'au quand mes genoux se touchent.
Tout d'abord, je me familiarise avec la pièce où je suis et la surface sur laquelle mon corps sappuie, afin que je me sente détendue et habituée à mon environnemt. Je ferme les yeux et écoute les bruits autour de moi, du plus lointain au plus proche. Je touche les surfaces autour de moi, en insistant sur les textures. Une fois cet exercice sensoriel fini, je commence par faire quelques exercices préparatoires tels que des étirements de yoga pour mettre en marche mes muscles. Lobjectif est de privilégier un état de disponibilité, pour l'étape suivante. Ensuite je m'allonge sur le dos, la plante des pieds sur le sol, les genoux pliés sur le côté. Je tire mes pieds vers la poitrine comme pour un saut puis je les relâche pour avoir une distance optimale entre les pieds et le bassin. Les pieds sont parallèles et touchent le sol, les genoux sont fléchis, orientés vers l'extérieur. Avec des respirations lentes, je compte jusqu'à 200 pendant que je ramène mes genoux l'un vers l'autre avec une certaine résistance. Je maintiens chaque position le plus longtemps possible. Je répète cette étape jusq'à ce que mes genoux se touchent.
Petit à petit, je sens les muscles de ma cuisse se fatiguer. Pour Berceli, cette phase provoque les shakes ou les tremblements. Au fur et à mesure que mes genoux sapprochent, les tremblements deviennent plus évidents et je peux les sentir remonter le long de mes jambes. Après vingt minutes, alors que mes genoux sont maintenant presque collés l'un à lautre, je commence à saccader le bas de mon corps presque d'une façon comique. Pour prolonger l'expérience, je m'allonge sur le dos et prends quelques minutes pour expirer bruyamment. Lorsque je me sens prête, je massois sur mes talons. Je prends quelques respirations, puis je réfléchis à mon ressenti et à comment mon corps a réagi. Puis je remémore cette sensation pour la laisser m'accompagner dans mon improvisation.
Petit à petit je sens les muscles de ma cuisse se fatiguer. Pour Berceli, cette phase provoque les shakes ou les tremblements. Au fur et à mesure que mes genoux sapprochent, les tremblements deviennent plus évidents et je peux les sentir remonter le long de mes jambes. Après vingt minutes, alors que mes genoux sont maintenant presque collés l'un à lautre, je commence à saccader le bas de mon corps presque d'une façon comique. Pour prolonger l'expérience, je m'allonge sur le dos et prends quelques minutes pour expirer bruyamment. Lorsque je me sens prête, je massois sur mes talons. Je prends quelques respirations, puis je réfléchis à mon ressenti et à comment mon corps a réagi. Puis je remémore cette sensation pour la laisser m'accompagner dans mon improvisation.
Si dans BMC, le \gls{Basic Neuro Cellular Patterns} s'appuie aussi sur des analogies avec les vibrations des organismes non-vertébrées, je ne peux pas omettre la question du rythme (relatif à l'espace, au temps et aux relations) et la place que cela a lors des \gls{mouvements spontanés} qui semblent s'y extraire à son fonctionnement. Tout comme l'opacité des \gls{fascia}, sorte d' élément diffus à travers le corps (loin de la précision des articulations), qui nous fournit davantage un sentiment de connexion entre l'extérieur et l'intérieur du corps, une fois que nous apprenons à le reconnaitre. Lors d'une session de \gls{contact improvisation}, utiliser les informations sensorielles pour cultiver par exemple notre sens d'intéroception, ou bien celui de proprioception, nous aide à mieux résonner avec notre environnement et aussi à mieux nous connaitre. Cependant, lorsque nous nous concentrons sur ces sensations, la danse est vécue intérieurement. Alors est-il possible de pratiquer un état de présence en parallèle avec un état de concentration interne, ou faut-il osciller entre les deux? Dans les processus collectifs, les sens, et particulièrement celui de toucher, sont engagés. Un dialogue entre sensation et mouvement opère, sorte de fondement d'une perception individuelle et subjective, des autres et de nous-mêmes. Nous allons nous arrêter sur ce type dexpériences dans la partie pratique de ce travail en danse. Les pratiques somatiques ont apporté un nouveau souffle dans la compréhension du corps et de la subjectivité de chacun. J'ai pu expérimenter certaines de ces formes afin délargir ma vision de la danse, comme forme d'expression de soi en lien avec les autres. Comme nous avons vu plus haut, cet \textit{autre} dépends du contexte socio-culturel de chaque pratique. En général j'ai observé comment l\gls{éducation somatique} rentre le focus sur le corps, en interrogeant la place du danseur et de son identité dans les formes contemporaines de la danse. Les pages qui suivent constituent une synthèses des chorégraphes qui ont marque l'histoire de la danse. Je me suis arrêté sur des chorégraphes dont le travail m'inspire, afin d'annoncer une certaine revendication d'une identité artistique en cours de définition.
Si dans BMC, le \gls{Basic Neuro Cellular Patterns} s'appuie aussi sur des analogies avec les vibrations des organismes non-vertébrées, je ne peux pas omettre la question du rythme (relatif à l'espace, au temps et aux relations) et la place que cela a lors des \gls{mouvements spontanés} qui semblent s'y extraire à son fonctionnement. Tout comme l'opacité des \gls{fascia}, sorte d'élément diffus à travers le corps (loin de la précision des articulations), qui nous fournit davantage un sentiment de connexion entre l'extérieur et l'intérieur du corps, une fois que nous apprenons à le reconnaitre. Lors d'une session de \gls{contact improvisation}, utiliser les informations sensorielles pour cultiver par exemple notre sens d'intéroception, ou bien celui de proprioception, nous aide à mieux résonner avec notre environnement et aussi à mieux nous connaitre. Cependant, lorsque nous nous concentrons sur ces sensations, la danse est vécue intérieurement. Alors est-il possible de pratiquer un état de présence en parallèle avec un état de concentration interne, ou faut-il osciller entre les deux? Dans les processus collectifs, les sens, et particulièrement celui de toucher, sont engagés. Un dialogue entre sensation et mouvement opère, sorte de fondement d'une perception individuelle et subjective, des autres et de nous-mêmes. Nous allons nous arrêter sur ce type dexpériences dans la partie pratique de ce travail en danse. Les pratiques somatiques ont apporté un nouveau souffle dans la compréhension du corps et de la subjectivité de chacun. J'ai pu expérimenter certaines de ces formes afin délargir ma vision de la danse, comme forme d'expression de soi en lien avec les autres. Comme nous avons vu plus haut, cet \textit{autre} dépend du contexte socio-culturel de chaque pratique. En général j'ai observé comment l\gls{éducation somatique} réorganise l'attention sur le corps, en interrogeant la place du danseur et de son identité dans les formes contemporaines de la danse. Les pages qui suivent constituent une synthèse des chorégraphes qui ont marque l'histoire de la danse. Je me suis arrêté sur des chorégraphes dont le travail m'inspire, afin d'annoncer une certaine revendication d'une identité artistique en cours de définition.
\section{Renouvellement des approches chorégraphiques dans lhistoire de la danse}
@ -487,8 +488,7 @@ Lors des dernières décennies, les sciences cognitives ont suscité beaucoup de
Selon l'école qui la revendique, la cognition et ses propriétés sont sujet à des multiples points de vue et d'oppositions. Pour témoigner de la difficulté d'employer les termes qui concernent ce chapitre, et les appartenances que chaque champ revendique, nous nous appuyons sur les observations de lartiste Simon Penny. Dans son anthologie \textit{Making sense: cognition, computing, art and embodiment}, Penny énumère les quelques termes que j'emploie lors de cet état d'art, avec la polémique qui les entoure:
\begin{quote}
``la perspective autopoïétique de la cognition est incompatible avec la perspective cognitiviste (qui dérive de la philosophie analytique anglo-américaine, même si les philosophes analytiques ont accusé les cognitivistes d'être un peu négligents). Les philosophes continentaux (phénoménologues) établissent des distinctions différemment. Lorsque Lakoff et Johnson parlent de linconscient cognitif, leurs conceptions du conscient et de linconscient sécartent des idées freudiennes. Lune des raisons de cette confusion terminologique résident dans le changement de paradigme lui-même. Néologismes (certains d'entre eux maladroits) et des emprunts à d'autres langues abondent parce que le langage existant est construit autour de concepts dualistes. Un nouveau langage est nécessaire. Maturana et Varela inventent l' \gls{autopoiesis}. Gibson propose l' \gls{affordance}. De même, \gls{umwelt} et \gls{enactivisme} et d'autres termes font désormais partie d'un nouveau vocabulaire
\footnote{en version originale: ``the autopoietic conception of cognition is incompatible with the cognitivist conception (which is derived from Anglo-American analytic philosophy, though ana­lytic philosophers have accused cognitivists of being a bit sloppy). Continen­tal philosophers (phenomenologists) draw distinctions differently. When Lakoff and Johnson talk about the cognitive unconscious, their conceptions of the conscious and unconscious diverge from Freudian ideas. One reason for this confusion of terminology is precisely the condition of the paradigm shift itself. Neologisms
(some of them clunky) and borrowings from other languages abound because existing language is built around dualist concepts. New language is needed. Maturana and Varela coine \gls{autopoiesis}. Gibson invented \gls{affordance}. Likewise \gls{umwelt} and \textit{enactivism} and other terms are now part of a new vocabulary.”.”}
\footnote{en version originale: ``the autopoietic conception of cognition is incompatible with the cognitivist conception (which is derived from Anglo-American analytic philosophy, though ana­lytic philosophers have accused cognitivists of being a bit sloppy). Continen­tal philosophers (phenomenologists) draw distinctions differently. When Lakoff and Johnson talk about the cognitive unconscious, their conceptions of the conscious and unconscious diverge from Freudian ideas. One reason for this confusion of terminology is precisely the condition of the paradigm shift itself. Neologisms (some of them clunky) and borrowings from other languages abound because existing language is built around dualist concepts. New language is needed. Maturana and Varela coine \gls{autopoiesis}. Gibson invented \gls{affordance}. Likewise \gls{umwelt} and \textit{enactivism} and other terms are now part of a new vocabulary.”.”}
\cite{penny2019mit}
\end{quote}
Par exemple l'affordance, concerne les possibilités d'interaction d'un objet (une tasse sur la table peut servir pour boire aux humains qui le prennent en main, tandis qu'une mouche s'y noie et une insecte peut se faire écraser en marchant en-dessous). D'une manière analogique, si nous considérons les robots des objets, la manière dont nous les employions dépends de notre contexte (un robot médical est utilisé d'une manière en laboratoire lors de sa configuration, d'une autre à lhôpital et d'une autre dans un spectacle de danse).
@ -498,7 +498,7 @@ Par exemple l'affordance, concerne les possibilités d'interaction d'un objet (u
Les préoccupations actuelles de scientifiques s'orientent vers un renouvellement de la vision traditionnelle du cognitivisme. Ce courant a été fondé dans les années 1950, autour de représentations et de calculs mentaux. Ses principes ont été promus entre outre par les recherches de l'épistémologiste suisse Jean Piaget (1896-1980) sur la biologie du développement des enfants.
Les découvertes de Piaget ont ensuite influencée le \gls{constructivisme} qui place l'expérience au cœur de l'acquisition des savoirs. Des modèles théoriques inspirés par le cognitivisme, emploient les mécanismes de construction active des savoirs au centre des expérimentations pratiques.
Un des objectifs du cognitivisme est de démontrer comment les états intentionnels définis par des propriétés causales (ie. désirs, intentions), sont physiquement possibles et capables d'induire un comportement. Pour illustrer cela, Valera utilise la notion de \textit{calcul symbolique} où les calculs sont définis comme opérations sur des symboles qui respectent ou sont contraints par des valeurs sémantiques. Cependant il souligne combien c'est important de se rappeler quun ordinateur fonctionne seulement sur la forme physique des symboles quil calcule, puisquil na pas accès à leur valeur sémantique. Avec le temps, lidée que la logique ne suffit pas pour simuler et comprendre le fonctionnement du cerveau a fait émerger de points de vue contradictoires parmi les chercheurs. Pour Varela l'intelligence réside dans la capacité de calcul des symboles:
Un des objectifs du cognitivisme est de démontrer comment les états intentionnels définis par des propriétés causales (c'est à dire désirs, intentions), sont physiquement possibles et capables d'induire un comportement. Pour illustrer cela, Valera utilise la notion de \textit{calcul symbolique} où les calculs sont définis comme opérations sur des symboles qui respectent ou sont contraints par des valeurs sémantiques. Cependant il souligne combien il est important de se rappeler quun ordinateur fonctionne seulement sur la forme physique des symboles quil calcule, puisquil na pas accès à leur valeur sémantique. Avec le temps, lidée que la logique ne suffit pas pour simuler et comprendre le fonctionnement du cerveau a fait émerger de points de vue contradictoires parmi les chercheurs. Pour Varela l'intelligence réside dans la capacité de calcul des symboles:
\begin{quote}
``Lintuition centrale derrière le cognitivisme est que lintelligence y compris lintelligence humaine ressemble tellement au calcul dans ses caractéristiques essentielles, que la cognition peut en réalité être définie comme le calcul de représentations symboliques. Il est clair que cette observation naurait pas pu exister, sans les résultats obtenus au cours de la décennie précédente. La principale différence est qu'aujourd'hui lune des nombreuses idées originales et provisoires, est désormais promue au rang dhypothèse à part entière. Cela avec un fort désir de démarquer ses limites de ses racines exploratoires et interdisciplinaires, où les sciences sociales et biologiques occupent une place consacrée dans leur multiple complexité
\footnote{en version originale: ``The central intuition behind cognitivism is that intelligence—human intelligence included—so resembles computation in its essential characteristics that cognition can actually be defined as computations of symbolic representations. Clearly this orientation could not have emerged without the basis laid during the previous decade. The main difference was that one of the many original, tentative ideas was now promoted to a full-blown hypothesis, with a strong desire to set its boundaries apart from its broader, exploratory, and interdisciplinary roots, where the social and biological sciences figured preeminently with all their multifarious complexity.”}.”
@ -523,10 +523,10 @@ J'ai choisi de présenter le concept de cognition sous langle de la Théorie
Les caractéristiques principales de cette théorie se déclinent en quatre types de cognition:
\begin{itemize}
\item la cognition incarnée ou incorporée (ie. \gls{embodied cognition})
\item la cognition ancrée (ie. \gls{embedded cognition})
\item la cognition énactée (ie. \gls{enacted cognition})
\item et la cognition étendue (ie. \gls{extended cognition})
\item la cognition incarnée ou incorporée (c'est à dire \gls{embodied cognition})
\item la cognition ancrée (c'est à dire \gls{embedded cognition})
\item la cognition énactée (c'est à dire \gls{enacted cognition})
\item et la cognition étendue (c'est à dire \gls{extended cognition})
\end{itemize}
Une des prémisses qui nous intéressent désigne lactivité perceptive-motrice comme constitutive pour la cognition. Cela ramène dans la discussion le rôle des sens sur la coordination motrice et donne suite à deux hypothèses danalyse:
@ -609,7 +609,7 @@ vivantes, il existe des sortes de ``stimuli auto-référentiels”\cite{vanhaude
\begin{figure}
\centering
\includegraphics[width=0.7\linewidth]{images/vangaudenhuyse}
\caption{Schema illustrant les differents niveau de concience et leur lien avec lenvironnement dans le papier de Vangaudenhuyse (2007).}
\caption{Schéma illustrant les différents niveau de conscience et leur lien avec lenvironnement dans le papier de Vangaudenhuyse (2007).}
\label{fig:vangaudenhuyse}
\end{figure}
@ -741,7 +741,7 @@ specific to that species, given to it by virtue of its particular suite of senso
Pour résumer sa pensée, les environnements sensoriels de la plupart des organises vivants sont spécifiques, sans qu'une espèce puisse faire l'expérience de la spécificité de l'autre.
Pour ce qu'il y a de l'espèce humaine, les \gls{qualia} témoignent de nos expériences uniques à l'échelle individuelle. Suivant la pensée de Nagel, il est important de considérer létendue de ces expérience dans la durée. Bien que la plupart du temps nous accédons à notre conscience phénoménale indépendamment de celle daccès, les deux états peuvent co-exister simultanément.
Dans son article, ``Consciousness: The last 50 years.”(2018)\cite{seth2018sage} le neuroscientifique Anil K. Seth (n. 1972) souligne le caractère interdisciplinaire des études sur la conscience et la volonté de tisser des ponts entre les expériences phénoménologiques et le fonctionnement neuronal. Pour lui, lexpérience phénoménologique ne peut pas exister sans lancrage du corps dans son environnement - en anglais \textit{an environment embedded embodiment processes}. Seth trace lhistoire des études sur la conscience, en tant que phénomène neurologique et identifie une première étape entre 1960 et 1990. Après les découvertes en études comportementales, les scientifiques mettent les bases dune nouvelle approche en sciences cognitives. Cette approche, atteste lexistence dun état mental qui opère une modulation entre réponse et stimulation nerveuse. D'une façon prédictible, cela provoquera beaucoup de débats à l'intérieur de la communauté scientifique. La plupart des chercheurs se heurtent aux limites de leurs hypothèses théoriques lorsqu'ils cherchent à modéliser une unité de la conscience. Seth note la contribution de Michael Gazzaniga (n. 1939) et ses observations en lien avec les hémisphères cérébraux alternant des processus cognitifs entre lhémisphère droit et gauche\footnote{https://www.nature.com/articles/483260a}. Tout comme celle de Benjamin Libet que Chalmers a mentionné en lien avec le libre arbitre et les mouvements volontaires. La deuxième étape dans lévolution des études sur la conscience commence dans les années 1990 et continue jusquau moment présent. Cette période est marquée par les études de Christoph Koch (n. 1956) dont le papier ``Towards a neurobiological theory of
Dans son article, ``Consciousness: The last 50 years.” (2018)\cite{seth2018sage} le neuroscientifique Anil K. Seth (n. 1972) souligne le caractère interdisciplinaire des études sur la conscience et la volonté de tisser des ponts entre les expériences phénoménologiques et le fonctionnement neuronal. Pour lui, lexpérience phénoménologique ne peut pas exister sans lancrage du corps dans son environnement - en anglais \textit{an environment embedded embodiment processes}. Seth trace lhistoire des études sur la conscience, en tant que phénomène neurologique et identifie une première étape entre 1960 et 1990. Après les découvertes en études comportementales, les scientifiques posent les bases dune nouvelle approche en sciences cognitives. Cette approche, atteste lexistence dun état mental qui opère une modulation entre réponse et stimulation nerveuse. D'une façon prédictible, cela provoquera beaucoup de débats à l'intérieur de la communauté scientifique. La plupart des chercheurs se heurtent aux limites de leurs hypothèses théoriques lorsqu'ils cherchent à modéliser une unité de la conscience. Seth note la contribution de Michael Gazzaniga (n. 1939) et ses observations en lien avec les hémisphères cérébraux alternant des processus cognitifs entre lhémisphère droit et gauche\footnote{https://www.nature.com/articles/483260a}. Tout comme celle de Benjamin Libet que Chalmers a mentionné en lien avec le libre arbitre et les mouvements volontaires. La deuxième étape dans lévolution des études sur la conscience commence dans les années 1990 et continue jusquau moment présent. Cette période est marquée par les études de Christoph Koch (n. 1956) dont le papier ``Towards a neurobiological theory of
consciousness”\cite{crick1990saunders} offre une nouvelle perspective quant au problème difficile de la conscience, mentionné en début de ce chapitre. Ses recherchent visent une simulation neurobiologique de la conscience, comme processus purement physiologique. Seth mentionne également Karl Friston (n. 1959) dont le principe dénergie libre, en anglais - \gls{Free Energy Principle} (FEP) renforce lhypothèse que la perception est guidée par laction. Selon FEP, le cerveau fait des prédictions basées sur des modèles internes améliorés à l'aide d'entrées sensorielles. Plus concrètement les actions sont guidées par des prédictions. Ces prédictions sont affinées par du feedback sensoriel. Devenu entre-temps principe normatif qui décrit les systèmes adaptatifs capables dauto-organisation (dont le cerveau), le FEP suscite l'intérêt de la communauté robotique.
Pour ce qu'il y a de ce travail, je m'interroge sur la façon dont FEP peut influencer le comportement d'un robot. Jassocie à cette hypothèse le concept de \gls{représentation} (déjà mentionné en lien avec la conscience daccès). Dans notre contexte particulier d'interactions artistiques, cela corresponds à une modification interne propre aux organismes vivants\cite{sims2021springer}, afin de voir comment limprovisation peut engendrer des mouvements innovants et si les robots en sont capables de cela un jour.
@ -865,7 +865,7 @@ Quil sagisse dun objet mobile avec une source dénergie, programmé
Certains mouvements en robotique ont suivi de prêt les avancées en sciences cognitives\cite{liu2024elsevier}. Parmi eux, jévoque la robotique basée sur le comportement - behavior based robotics - BBR qui sinspire des systèmes biologiques. Cette branche de la robotique construit des dispositifs qui réagissent à lenvironnement. Le focus de la BBR est le monde animal, plus particulièrement le comportement des insectes. Un des caractéristiques les plus importantes de cette discipline est \textit{ladaptabilité} des systèmes qui en font partie. Ainsi, ces robots sont peu dotés d'une puissance de calcul pour réaliser des actions. En échange, leur comportement émerge des interactions quils ont avec lenvironnement. Le type dintelligence artificielle qui opère dans ces systèmes est inspiré par la branche de lIA faible ou \gls{weak AI} mentionné quelques pages auparavant. La programmation de ces robots contient un set des comportements spécifiques, selon lenvironnement où ils opèrent, avec les problèmes quils doivent résoudre. Quand un comportement nest pas adapté à un contexte particulier, ils sappuient sur des erreurs pour améliorer leur modèle interne.\smallskip
Le fondateur de cette discipline est Rodney Brooks (n. 1954), qui par ses expérimentations au Massachusetts Institute of Technology (MIT) dans les années 1980, a mis les bases de la robotique basée sur le comportement. Ses premiers robots, avec des roues pour suggérer des pattes, ont été construits suite à ses observations des comportements anthropomorphiques. Parmi leurs instructions: éviter un obstacle, sapprocher dune source de lumière, chercher à économiser sa batterie lors de longs trajets, etc.
Le fondateur de cette discipline est Rodney Brooks (n. 1954), qui par ses expérimentations au Massachusetts Institute of Technology (MIT) dans les années 1980, a posé les bases de la robotique basée sur le comportement. Ses premiers robots, avec des roues pour suggérer des pattes, ont été construits suite à ses observations des comportements anthropomorphiques. Parmi leurs instructions: éviter un obstacle, sapprocher dune source de lumière, chercher à économiser sa batterie lors de longs trajets, etc.
Une des influences de Brooks est le travail de neurophysiologiste et pionnier de la robotique W. Gray Walter. Fin des années 1940, Gray Walter a développé un certain nombre de robots simples basés sur des comportements ressemblant à des animaux. Ces prototypes de robots ont aidé Gray Walter à mieux comprendre le fonctionnement du cerveau des animaux, par des modèles simples de leurs opérations de base. Les plus connus sont Elmer et Elsie (abréviation de ELectro MEchanical Robots, Light Sensitive), recouverts dune coque en plastique transparent similaire aux tortues. Enfant, Brooks a lu le livre de Walter \textit{The Living Brain} (1963), pour ensuite construire ses propres prototypes. Ingénieur brillant, Walter décrit dans son recueil ses débuts dans les années 1930 à lépoque de lélectronique à tubes sous vide. D'une invention à l'autre, il finit par transformer son laboratoire de Bristol, en Angleterre, en l'un des principaux centres mondiaux de recherche en électroencéphalogramme (EEG).
@ -971,8 +971,8 @@ Ces catégories sont transformés par le cerveau en langage, nous aidant à inte
\textbf{Le rôle de laffecte}
Le concept démotion, vu sous l'angle de la théorie 4E de la cognition (\gls{The 4E Cognition Theory}) est une affectivité située, pour qui la cognition nest pas un processus quantifiable, similaire à un modèle informatique. Au contraire, tout affecte nécessite un type incarné et situé de cognition. Dés la petite enfance, jusqu'aux situations sociales sophistiquées qui caractérisent lâge adulte, les processus emphatiques complexifient la compréhension que nous avons de nous-mêmes et notre environnement. Ainsi nous remarquons que ce nest pas seulement le sentiment conscient démotion qui est important. Des processus affectifs inconscients comme la douleur ou le plaisir, jouent un rôle tout aussi important et peuvent biaiser la perception des émotions.
Pour interroger cette place des affectes dans la construction de l'expérience du réel, la chercheuse Branka Zei Pollermann introduit un\textit{modèle unifié de cognition}\cite{pollermann2006} basé sur les théories de Jean Piaget (1896-1980) et Ludwig von Bertalanffy (1901-1972) et Louis J. Prieto. Ce modèle stipule que les espaces affectives (ie. \textit{affected spaces}) facilitent des comportements adaptatifs lors des processus cognitifs. Ses observations s'appuient sur la théorie générale des systèmes, qui cherche un modelé unifié des connaissances. La modélisation des organismes humains, appelés \textit{systèmes ouverts} par von Bertalanffy, et le concept de \textit{praxis} de Prieto comme action intentionnelle mettant en avant les particularités des connaissances scientifiques. Alors que Jean Piaget avance deux concepts-clé pour caractériser linteraction des systèmes dites intelligentes avec lenvironnement. Le premier est le concept d\textit{assimilation des schémas de comportement préexistant} et lautre le concept d\gls{adaptation}. Concept clé en robotique, la capacité d'adaptation est considérée ici comme moment déquilibre entre deux états, évoquant un sentiment de plaisir quand cet équilibre atteint. Selon le point de vue de Piaget, lintelligence humaine se développe avec lâge, passant par plusieurs étapes parmi lesquelles: lintelligence logico-mathématique, musicale, spatiale, corporelle-kinesthésique,
Le concept démotion, vu sous l'angle de la théorie 4E de la cognition (\gls{The 4E Cognition Theory}) est une affectivité située, pour qui la cognition nest pas un processus quantifiable, similaire à un modèle informatique. Au contraire, tout affecte nécessite un type incarné et situé de cognition. Dès la petite enfance, jusqu'aux situations sociales sophistiquées qui caractérisent lâge adulte, les processus emphatiques complexifient la compréhension que nous avons de nous-mêmes et notre environnement. Ainsi nous remarquons que ce nest pas seulement le sentiment conscient démotion qui est important. Des processus affectifs inconscients comme la douleur ou le plaisir, jouent un rôle tout aussi important et peuvent biaiser la perception des émotions.
Pour interroger cette place des affectes dans la construction de l'expérience du réel, la chercheuse Branka Zei Pollermann introduit un\textit{modèle unifié de cognition}\cite{pollermann2006} basé sur les théories de Jean Piaget (1896-1980) et Ludwig von Bertalanffy (1901-1972) et Louis J. Prieto. Ce modèle stipule que les espaces affectives (c'est à dire \textit{affected spaces}) facilitent des comportements adaptatifs lors des processus cognitifs. Ses observations s'appuient sur la théorie générale des systèmes, qui cherche un modelé unifié des connaissances. La modélisation des organismes humains, appelés \textit{systèmes ouverts} par von Bertalanffy, et le concept de \textit{praxis} de Prieto comme action intentionnelle mettant en avant les particularités des connaissances scientifiques. Alors que Jean Piaget avance deux concepts-clé pour caractériser linteraction des systèmes dites intelligentes avec lenvironnement. Le premier est le concept d\textit{assimilation des schémas de comportement préexistant} et lautre le concept d\gls{adaptation}. Concept clé en robotique, la capacité d'adaptation est considérée ici comme moment déquilibre entre deux états, évoquant un sentiment de plaisir quand cet équilibre atteint. Selon le point de vue de Piaget, lintelligence humaine se développe avec lâge, passant par plusieurs étapes parmi lesquelles: lintelligence logico-mathématique, musicale, spatiale, corporelle-kinesthésique,
interpersonnelle et ainsi de suite.
Le chercheur Olivier Houdé, spécialiste en développement cognitif, complète cette théorie\cite{houde2019intelligence}, en situant trois phases de lintelligence humaine difficilement modélisables par des algorithmes:
\begin{itemize}
@ -1075,13 +1075,13 @@ la convergence entre lhomme et la machine est à la fois séduisante et
repoussante. En contrepartie, la culture japonaise entretient une certaine
distance avec la technologie, expliquant pourquoi les robots sont moins
problématiques là-bas, et comment ils ont été apprivoisés\cite{kaplan2004ws} avant dêtre intégrés dans la société. En observant différents formats et expériences artistiques, ce qui mintéresse est de comprendre comment les robots pourraient trouver à travers lart, une condition indomptée, avant leur
industrialisation et en dehors leur commercialisation à grande échelle. Ainsi c'est important de noter que cette sélection représente seulement un échantillon des œuvres d\gls{art robotique} en lien avec la scène et la danse. Lorsquelles sont mentionnées par les artistes eux-mêmes ou la littérature, les spécifications techniques offrent un aperçu important sur les défis et les limites de ce type de processus de recherche-création. Puisqu'il ny a pas actuellement une méthodologie officielle sur la manière dont l\gls{art robotique} doit être évaluée, cette synthèse est parfois complétée par les retours artistiques des auteurs ou les archives des processus de création et de réception. Le format des œuvres va des sculptures et installations cinématiques, aux spectacles, performances et improvisations en direct. Pour mieux comprendre leur évolution, elles sont mentionnées en ordre chronologique. À cela, jai pensé inclure également les
industrialisation et en dehors leur commercialisation à grande échelle. Ainsi il est important de noter que cette sélection représente seulement un échantillon des œuvres d\gls{art robotique} en lien avec la scène et la danse. Lorsquelles sont mentionnées par les artistes eux-mêmes ou la littérature, les spécifications techniques offrent un aperçu important sur les défis et les limites de ce type de processus de recherche-création. Puisqu'il ny a pas actuellement une méthodologie officielle sur la manière dont l\gls{art robotique} doit être évaluée, cette synthèse est parfois complétée par les retours artistiques des auteurs ou les archives des processus de création et de réception. Le format des œuvres va des sculptures et installations cinématiques, aux spectacles, performances et improvisations en direct. Pour mieux comprendre leur évolution, elles sont mentionnées en ordre chronologique. À cela, jai pensé inclure également les
apparitions dans le média où des robots se présentent comme maîtres spirituels\footnote{https://www.youtube.com/watch?v=RH3Yk1spxtk} ou artistes pour voir comment le rapport à la scène est influencé par ce statut publique.
De cette manière une caractéristique importante de cet étude, repose sur
lhypothèse que les interactions homme-robot dans un contact rapproché ou \textit{close-contact}, au travers lutilisation de gestes et dinterfaces haptiques\cite{dahiya2009tactile}, \cite{silvera2015artificial}, peut améliorer la façon dont les robots sociaux sont acceptés par les utilisateurs non expérimentés. Mon objectif est donc de voir comment ce processus dapprivoisement opère dans des contextes artistiques et culturelles et quest ce que pourrait être son opposé - défini ici comme une condition indomptée ou sauvage des robots. Dans les prochaines pages, janalyse la spécificité des robots présentés dans les œuvres sélectionnées, puis jappréhende les facteurs qui ont influencé le développement de l\gls{art robotique}. Pour argumenter ce processus, je mappuie sur une première partie qui précise le contexte dans lequel la robotique et lart aurait pu se rencontrer, leur lien commun et la façon dont elles se sont inspirées réciproquement. Souvent, limpact des œuvres
sélectionnées a facilité des découvertes en robotique sociale. Puisque les
projets artistiques impliquant les robots ont été soumis à des contraintes
technologiques (i.e. choix de matériaux influençant le message de lœuvre
technologiques (c'est à dire choix de matériaux influençant le message de lœuvre
dart), je regarde comment ceux-ci sont considérés tout au long des processus de
création et comment ils ont été mis en scène.
@ -1095,13 +1095,13 @@ Lhistoire de la robotique est étroitement liée à celle de lart\cite{ste
Pas si loin du monde de lart, la fascination pour des artefacts et des machines qui pourraient éventuellement devenir vivants, a longtemps peuplé les rêves des humains. Quelques-uns de ces artefacts - les automates - ont été identifiés par des chercheurs\cite{bedini1964role} comme vecteurs du développement technologique de nos sociétés. La définition du terme implique lexistence des dispositifs mécaniques qui se déplacent de manière autonome sans être directement manipulés par des humains. Remontant lhistoire pour identifier
leurs origines, nous remarquons lexistence dappareils mécaniques mobiles
autonomes à Alexandrie vers le IVe siècle av. J.-C. ainsi lutilisation des
autonomes à Alexandrie vers le 4e siècle av. J.-C. ainsi lutilisation des
gardiens robotiques automatisés en bois, conçus à lépoque du roi indien
Ajatasatru de Magadha un siècle plus tard. Quelque temps plus tard, le
polymathe Ismail al-Jazari - suronmé ``le père de la robotique” parmi les
roboticiens daujourdhui - a construit plusieurs automates humanoïdes pendant
la période islamique du XIIIe siècle. Trois siècles plus tard Léonard de Vinci
aurait présenté à la cour de Milan son chevalier mécanique\footnote{https://www.leonardodavinci.net/robotic-knight.jsp}. Dès le XVIIIe
la période islamique du 13e siècle. Trois siècles plus tard Léonard de Vinci
aurait présenté à la cour de Milan son chevalier mécanique\footnote{https://www.leonardodavinci.net/robotic-knight.jsp}. Dès le 18e
siècle, Jacques de Vaucanson présente lors des salons et des expositions
privées, des inventions comme son célèbre ``joueur de flûte” avec des poumons
artificiels, ainsi que un canard qui pouvait manger, déféquer et flotter sur
@ -1124,7 +1124,7 @@ des artefacts uniques, créés à la main\cite{reilly2011automata} alors que les
derniers sont produits en masse, de façon automatisée.
Au début du XXe siècle, lécrivain tchèque Karel Capek écrit \textit{R.U.R.-
Au début du 20e siècle, lécrivain tchèque Karel Capek écrit \textit{R.U.R.-
Rossumovi Univerzalni Roboti} (Les Robots Universels de Rossum) - une pièce de
théâtre sur des créatures artificielles travaillant en usine. Ces créatures
appelées \textit{roboti} étaient facilement confondus avec les humains en
@ -1276,7 +1276,7 @@ précédemment, \textit{Heart Robot} (2008) marque une transition dans la façon
robots sont présentés dans lespace publique. Cette fois, les machines bruyantes
et métalliques sont remplacées par une petite marionnette hybride capable de
toucher et être touchée. Marionnettiste lui-même ainsi que roboticien, Goran met
au défi la perception culturelle des robots grace aux émotions artificielles et
au défi la perception culturelle des robots grâce aux émotions artificielles et
à lintelligence sociale. Son robot ne peut pas marcher mais présente une forme
de respiration (simulée par un affichage LED sur sa
poitrine) et des clignotements. Ses yeux fonctionnent en quatre modes : endormi,
@ -1979,7 +1979,7 @@ industries. Ils ne sont moins au courant des certifications appropriées en
matière de cobotique et de sécurité. En absence dune méthodologie officielle,
les artistes invités à exploiter le plein potentiel de la technologie, décident
de lutiliser avec parcimonie. Cest le cas de chorégraphies de renommée
internationale comme le auédois Pontus Lidberg ou la canadienne Isabelle Van
internationale comme le suédois Pontus Lidberg ou la canadienne Isabelle Van
Grimde qui ont développé des projets utilisant des algorithmes ML, autour des rencontres entre une intelligence humaine et une intelligence
artificielle sur scène. Comprendre les effets de la proximité et lutiliser avec
justesse dans la robotique, reste un défi. Au moins dans le domaine de lart les possibilités de
@ -1989,7 +1989,7 @@ non exhaustive de ces possibilités, ainsi que de possibles convergences entre
plusieurs domaines et leur lien avec lindustrie, une fois que les prototypes
attirent lattention des scientifiques. De même, les artistes pourraient
utiliser des techniques de reconnaissance des émotions issues des neurosciences
et de la psychologie cognitive. Des capteurs physiologiques(comme la reponse
et de la psychologie cognitive. Des capteurs physiologiques(comme la réponse
galvanique cutanée (GSR), lélectromyographie (EMG), la fréquence de la
réspiration (RR), la fréquence cardiaque (FC) et lélectroencéphalographie (EEG) )
peut être portés et utilisés par les artistes pour fabriquer des robots

View File

@ -90,7 +90,7 @@ Le D.V.P est le résultat des données de position du souris et des gestes devan
\begin{figure}
\centering
\includegraphics[width=0.7\linewidth]{images/avoid_schema}
\caption{Schema d'interaction pour le systeme multi-agents}
\caption{Schéma d'interaction pour le systeme multi-agents}
\label{fig:avoidschema}
\end{figure}
@ -304,9 +304,9 @@ La version intégrale du cahier de bord est disponible en ligne\footnote{https:/
L'atelier a été structuré en plusieurs étapes. D'abord nous avons mis en place un syllabus contenant une état d'art des projets créatifs utilisant du matériel électronique et le lien vers des tutoriels de \textit{creative coding} et projets DIY qui nous ont inspiré. Ensuite nous avons présenté notre propre matériel électronique et quelques capteurs avant de commencer le travail pratique de familiarisation et expérimentation avec les boards Arduino et les capteurs. Le troisième temps a été celui de la réalisation d'une maquette collective, pensée comme étude de cas des connaissances acquises. Grâce à l'utilisation de capteurs, des servo-moteurs et de formes textiles plissées et pliées, les participants ont appris à créer une extension corporelle portable connecté aux mouvements d'un autre corps. Dans les semaines qui ont précédé cet atelier, nous avons également organisé un temps d'échange et de retour d'expérience.
Une partie importante pour les permises du projet, a été le partage des ressources bibliographiques. Parmi les artistes qui nous ont le plus inspiré, il y a le travail de Katie Hartman. Son livre \cite{hartman2014make} présente les bases de l'électronique pour des projets créatifs, ainsi que des exemples de code et d'autres astuces et ressources partagés par la communauté. Artiste, chercheuse et pédagogue basée à Toronto, le travail de Hartman couvre des domaines comme la physique, l'informatique, l'électronique portable et l'art conceptuel. Fondatrice du \textit{Social Body Lab}, elle coordonne une équipe de recherche dédiée à l'exploration de technologies centrées sur le corps dans
un contexte social. Pour Hartman, le corps humain est une interface primaire en lien avec le monde extérieur et son projet d'utiliser des dispositifs portables (i.e. \textit{wearables}) est pensé en lien avec l'augmentation de nos capacités sensorielles.
un contexte social. Pour Hartman, le corps humain est une interface primaire en lien avec le monde extérieur et son projet d'utiliser des dispositifs portables (c'est à dire \textit{wearables}) est pensé en lien avec l'augmentation de nos capacités sensorielles.
Un expriment qu'elle propose, décrit les consignes pour l'écoute et l'amplification des bruits produit par une partie de notre corps. J'ai utilisé ses conseils lors des étapes de recherches ultérieurs, grâce à l'aide des capteurs sonores (microphones piezoéléctriques). Je parlerai de mes observations dans un prochain chapitre.
Cependant il est important de mentionner que cette approche informelle, au caractère ludique de Hartman m'a réconcilié et aidé à mieux comprendre le rapport au corps, par le biais d'une technologie simplifiée (\textit{lowtech})
Cependant il est important de mentionner que cette approche informelle, au caractère ludique de Hartman m'a réconcilié et aidé à mieux comprendre le rapport au corps, par le biais d'une technologie simplifiée (\textit{lowtech}).
Au même titre, Hannah Perner-Wilson et Mika Satomi, dont le travail est répertorié online sur le site \textit{How to get what you want}.
Leur idée est de mettre à disposition des références ``compréhensibles, accessibles et maintenables” qui encouragent les participants à contribuer ultérieurement, une fois les bases acquises. Les deux artistes et chercheuses cherchent à souder la communauté du collectif KOBAKANT\footnote{https://www.kobakant.at} qu'elles ont crée en 2008. Pour cela, elles explorent (souvent avec de l'auto-ironie et de l'humour) l'artisanat textile et l'électronique comme outils critiques des aspects technologiques de notre société.
@ -807,7 +807,7 @@ Les modélisations mathématiques résolues grâce à la QP, traduisent ensuite
\begin{figure}
\centering
\includegraphics[width=0.7\linewidth]{images/admittance}
\caption{Schema qui illustre le fonctionnement de l'admittance. Source: le livre\cite{natale2020springer}}
\caption{Schéma qui illustre le fonctionnement de l'admittance. Source: le livre\cite{natale2020springer}}
\label{fig:admittance}
\end{figure}
@ -1040,7 +1040,7 @@ Lorsque le corpus des œuvres et des articles nous l'a permis, nous avons commen
Pour cette première expérience de recherche-création en art robotique, j'ai imaginé des séquences de mouvements qui remettent en question le concept danthropomorphisme\cite{spatola2019cairn} chez les \gls{digital twin}s ou les jumeaux numériques des robots du laboratoire. En considérant le terme d'interactivité pour mieux définir leur interaction, nous observons comment différents matériaux de mouvement stimulent la créativité à travers un processus d'hybridation entre l'humain et la machine. Dans cette perspective, nous déterminons comment les utilisateurs vivent des expériences proche de \gls{qualia} en apprenant par imitation une séquence de danse démontrée consécutivement par un robot humanoïde, un bras industriel et un humain. Leurs retours et nos propres expérimentations pratiques nous permettent de mieux comprendre limpact de lanthropomorphisme numérique dans la réalisation dune interaction homme-robot durable.
Depuis le VIe siècle avant notre ère, lorsque le terme a été utilisé pour la première fois pour décrire des phénomènes religieux\cite{demers2015playmouth}, l'anthropomorphisme a accompagné l'intention de l'humanité de reproduire ses caractéristiques dans différents environnements. L'anthropomorphisme (du mot grec \textit{anthropos} signifiant ``humain” et \textit{morphe} signifiant ``forme”) est décrit dans\cite{duffy2003anthropomorphism} comme:
Depuis le 6e siècle avant notre ère, lorsque le terme a été utilisé pour la première fois pour décrire des phénomènes religieux\cite{demers2015playmouth}, l'anthropomorphisme a accompagné l'intention de l'humanité de reproduire ses caractéristiques dans différents environnements. L'anthropomorphisme (du mot grec \textit{anthropos} signifiant ``humain” et \textit{morphe} signifiant ``forme”) est décrit dans\cite{duffy2003anthropomorphism} comme:
\begin{quote}
``la tendance à attribuer des caractéristiques humaines à des objets inanimés, des animaux et d'autres entités dans le but de nous aider à rationaliser leurs actions. C'est attribuer des états cognitifs ou émotionnels à quelque chose sur la base de l'observation afin de rationaliser le comportement d'une entité dans un environnement social donné\footnote{en version originale: ``the tendency to attribute human characteristics to inanimate objects, animals and others with a view to helping us rationalize their actions. It is attributing cognitive or emotional states to something based on observation in order to rationalize an entitys behavior in a given social environment.”}.”
\end{quote}
@ -1197,7 +1197,7 @@ Dans ce contexte, sur la base de lexpérience mentionnée ci-dessus, nous avo
\subsection{Configuration expérimentale HRHI}
Notre expérience motivante s'est déroulée à l'extérieur du laboratoire, lors d'une pratique de cours de danse. Les observations de \cite{jung2018acm} nous ont inspiré à travailler dans un cadre original, en adaptant notre hypothèse aux contraintes de l'environnement (ie. les participants ont vécu une expérience collective de HRI, lors d'une séance de formation collective en danse). Les résultats de ce processus hybride sont disponibles ici (\url{https://vimeo.com/779347404} et \url{https://vimeo.com/779363288}). Même si notre objectif était de comprendre comment lanthropomorphisme numérique déclenche la créativité, lexpérience a fourni des informations utiles sur la créativité en général, nous donnant lopportunité daborder ce concept dans un contexte plus large.
Notre expérience motivante s'est déroulée à l'extérieur du laboratoire, lors d'une pratique de cours de danse. Les observations de \cite{jung2018acm} nous ont inspiré à travailler dans un cadre original, en adaptant notre hypothèse aux contraintes de l'environnement (c'est à dire les participants ont vécu une expérience collective de HRI, lors d'une séance de formation collective en danse). Les résultats de ce processus hybride sont disponibles ici (\url{https://vimeo.com/779347404} et \url{https://vimeo.com/779363288}). Même si notre objectif était de comprendre comment lanthropomorphisme numérique déclenche la créativité, lexpérience a fourni des informations utiles sur la créativité en général, nous donnant lopportunité daborder ce concept dans un contexte plus large.
Les vingt-cinq étudiants participants ont eu pour mission d'imiter puis d'improviser avec les versions virtuelles d'un robot industriel et d'un robot humanoïde, puis de remplir un formulaire comportant des questions sur une échelle de notation de 1 à 5. L'apprentissage par imitation, pour commencer par établir une interaction créative, a permis d'améliorer la qualité globale du mouvement grâce à l'improvisation dansée. La plupart des participants étaient fortement d'accord sur le fait qu'il était plus facile de suivre les mouvements du robot humanoïde (64\%), par rapport au bras industriel (8\%). Une partie importante des participants ne savait pas (36\%) si les robots sont des créatures étranges, 24\% étant tout à fait d'accord avec le fait qu'ils le soient et 20\% étant d'une manière ou d'une autre d'accord qu'ils ne le soient pas. La majorité des participants - (68\%) - ont ressenti le besoin d'ajouter d'autres mouvements, une fois la séquence devenue répétitive. Aucun d'entre eux n'a convenu qu'ils appliquaient habituellement les mouvements appris lorsqu'ils dansaient, tandis que très peu d'entre eux ont convenu que les mouvements étaient naturels pour le robot HRP-4 (8\%) et le robot Franka (16\%). Concernant les émotions, seulement 12\% des participants étaient daccord sur le fait que le robot HRP-4 communiquait des émotions par la danse, avec une majorité (64\%) en désaccord. Quant aux émotions du robot Franka, 80\% des participants nétaient pas daccord sur le fait quil exprimait ses émotions à travers la danse.
Notre modèle d'interaction suit l'amélioration de l'étude précédente mentionnée ci-dessus, basée sur des simulations virtuelles et adressée à des participants familiers avec la danse.
@ -1313,7 +1313,7 @@ Influencés par\cite{penny2013art}, nous considérons l'inspiration comme un pro
\begin{itemize}
\item Existe-t-il un état \textit{sauvage} pour les robots, en amont de leur état de programmation orienté taches (ie., task programming) ? Sont-ils capables de développer une forme de \textit{CA} sur scène, au sein d'une interaction dansée ?
\item Existe-t-il un état \textit{sauvage} pour les robots, en amont de leur état de programmation orienté taches (c'est à dire task programming) ? Sont-ils capables de développer une forme de \textit{CA} sur scène, au sein d'une interaction dansée ?
\item Qu'est-ce qu'un \textit{corps performatif} pour un robot et comment pouvons-nous générer des mouvements instinctifs et fluides ? Linteraction de la danse avec les robots génère-t-elle des états créatifs ?
@ -1388,7 +1388,7 @@ Un autre repère dans la mise en place de mon processus de composition en danse,
J'ai traité cette question de l'emprunt en faisant hommage à des artistes que j'admire ou en voulant continuer dans leur lignée de recherche. Ce leitmotiv de la chaise comme objet scénographique, les
La pratique de recherche-création fait partie dun processus spéculatif non linéaire qui se déroule simultanément. Pour illustrer, Sarah Truman décrit la résidence artistique de cinq ans \textit{Walls to the Ball} réalisée en collaboration avec l'artiste Hazel Meyer, pour une classe d'art d'un lycée de Toronto. Le projet interroge le sport, le mouvement, les textiles, le genre rajoutant des thématiques et des activités selon lévolution du groupe. Rétrospectivement, si je liste les étapes de ma recherche et ses éléments clés, je me rends compte des vas-et-vient des directions que cela a pris. Certaines lignes fortes de mon corpus se sont imposées presque par hasard et une fois déplié, chaque processus de recherche-création a fait émerger des concepts clé qui lui sont propres. Parmi ces concepts, celui d'\gls{exaptation}. Selon\cite{d2018cultural}, ce concept est un mécanisme évolutif important dans l'histoire des espèces, des écosystèmes mais aussi des artefacts. Les auteurs illustrent des traits biologiques développés à l'origine dans un but particulier - par exemple, les os étaient à l'origine des réservoirs de calcium en excès, tandis que certaines zones du cerveau utilisées initialement pour la reconnaissance des formes sont aujourd'hui réutilisées pour la musique. Considérant notre cas particulier des robots qui dansent, \textit{quelle pourrait être la signification de cet acte dans un processus évolutif discontinu ? Quelle caractéristique ultérieure pourrait émerger de cet acte?} C'est important de pouvoir aborder ces questions dans un contexte \textit{pluri} et \text{trans} disciplinaire.
La pratique de recherche-création fait partie dun processus spéculatif non linéaire qui se déroule simultanément. Pour illustrer, Sarah Truman décrit la résidence artistique de cinq ans \textit{Walls to the Ball} réalisée en collaboration avec l'artiste Hazel Meyer, pour une classe d'art d'un lycée de Toronto. Le projet interroge le sport, le mouvement, les textiles, le genre rajoutant des thématiques et des activités selon lévolution du groupe. Rétrospectivement, si je liste les étapes de ma recherche et ses éléments clés, je me rends compte des vas-et-vient des directions que cela a pris. Certaines lignes fortes de mon corpus se sont imposées presque par hasard et une fois déplié, chaque processus de recherche-création a fait émerger des concepts clé qui lui sont propres. Parmi ces concepts, celui d'\gls{exaptation}. Selon\cite{d2018cultural}, ce concept est un mécanisme évolutif important dans l'histoire des espèces, des écosystèmes mais aussi des artefacts. Les auteurs illustrent des traits biologiques développés à l'origine dans un but particulier - par exemple, les os étaient à l'origine des réservoirs de calcium en excès, tandis que certaines zones du cerveau utilisées initialement pour la reconnaissance des formes sont aujourd'hui réutilisées pour la musique. Considérant notre cas particulier des robots qui dansent, \textit{quelle pourrait être la signification de cet acte dans un processus évolutif discontinu ? Quelle caractéristique ultérieure pourrait émerger de cet acte?} Il est important de pouvoir aborder ces questions dans un contexte \textit{pluri} et \text{trans} disciplinaire.
\section{Pour une conscience artificielle dans toutes ses états}
@ -1454,7 +1454,7 @@ Donner à voir, mettre en scène, un élément propre à notre quotidien à cot
Dans \textit{TIWIDWH} le robot et la performeuse sont assis face à face à une table et improvisent une série des mouvementes de bras inspirées par le spectacle \textit{Rosas danst Rosas} (1983) d'Anne Teresa de Keersmaeker. Ce contexte de danse indique un type de cognition qui influe sur des actions, qui est donc incarnée, \gls{embodied cognition}. D'habitude les gestes peuvent être générés par des actions conscientes ou émerger de processus inconscients comme les réflexes. Dans notre exploration artistique, nous avons choisi dexaminer ce dernier cas et questionner les \gls{mouvements spontanés} et les \gls{mouvements réflexes} propre aux pratiques somatiques. Quelques mois auparavant, notre performeuse s'est emparée d'une série des mouvements de bras, dont lenchainement est devenu réflexe. En le répétant, ces gestes ont été déformés. Cela nous a donné l'opportunité de vérifier dans quelle mesure ils peuvent être recontextualisés et identifiés lorsquils sont programmés pour correspondre à des robots. Ensuite nous avons programmé cet ensemble de mouvements dans une sorte de base données. Cela a permis a HRP-4 de générer deux types de mouvements :
\begin{itemize}
\item mouvements intentionnels (lever les bras en synchrone, fléchir un coude puis l'autre, tourner la tête, etc)
\item mouvements intentionnels (lever les bras en synchrone, fléchir un coude puis l'autre, tourner la tête, etc.)
\item mouvements spontanés ou réflexes, c'est-à-dire non intentionnels (propres à la sphère intime comme un bâillement ou un tremblement)
\end{itemize}