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\addcontentsline{toc}{chapter}{Introduction Générale}
\markboth{Introduction Générale}{Introduction Générale}
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Introduction
``Il paraît que ça passe par le corps, mais par un corps qui aurait tout juste commencé à sindividuer, et qui nen finirait pas dindividuer en lui quoi, au juste ? des lieux, ou des foyers de sensibilité, des êtres : à force dêtre nommé de tant de façons, ça finit par exister.” C. Bottiglieri
Au croisement entre danse et robotique, ce projet de recherche-création vise à construire des installations performatives qui portent une réflexion sur les formes de conscience artificielle (CA) et leur lien avec la créativité. À travers l'expressivité du corps organique du danseur et les principes d'embodied cognition du corps mécanique des robots, notre objectif est de confronter le réel aux limites de la perception, afin d'en dégager une écriture plurielle hybride où l'homme sappuie sur la machine pour mieux se connaître et mieux anticiper ses projections dans cette relation. Ainsi ce projet de thèse- Danser avec les robots : le corps performatif et la « conscience artificielle »- traite des interactions homme-robot dans des contextes artistiques. Doctorante invitée au Laboratoire d'informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (LIRMM), jai eu l'occasion danalyser les possibilités dinteraction artistique dun robot humanoïde HRP-4 ainsi que de comprendre le fonctionnement dun robot QT, un robot Pepper et un bras industriel Franka. Ayant la création comme activité de recherche, le projet est centré sur un travail transdisciplinaire qui consiste à imaginer différentes possibilités d'interaction physique avec des robots utilisés dans la recherche. Dans une démarche scientifique, je cherche à théoriser cette pratique de danse avec des machines en mettant les bases dun langage chorégraphique inédit influencé par des pratiques somatiques et par ce que la littérature appelle ``la pensée du corps” ou la ``conscience du mouvement”, proche des écrits et dexpérimentations des artistes tel Anna Halprin, Deborah Hay, Nadia Vadori-Gauthier et Lia Rodrigues, parmi autres.
Mont postulat part de ce que Hubert Godard identifié comme ``des mythologies du corps en mouvement”, en espérant identifier leur contrepoids technologique dans les robots du laboratoire LIRMM:
``Chaque individu, chaque groupe social, dans une résonance avec son environnement, crée et subit ses mythologies du corps en mouvement, qui façonnent ensuite les grilles fluctuantes, conscientes ou non conscientes, en tout cas actives, de la perception. La danse est le lieu par excellence qui donne à voir les tourbillons où saffrontent ces forces de lévolution culturelle, qui tend à produire et en même temps à contrôler ou même à censurer les nouvelles attitudes de lexpression de soi et de limpression de lautrui.”
Le chercheur et analyste en danse fait appel au concept de pré-mouvement comme langage non conscient de la posture:
“Tout un système de muscles dit gravitaires, dont laction échappe pour un grande part à la conscience vigile et à la volonté, est chargé dassurer notre posture; ce sont eux qui maintiennent notre équilibre et qui nous permettent de nous tenir debout sans avoir à y penser. Il se trouve que ces muscles sont aussi ceux qui enregistrent nos changements détat affectif et émotionnel. Ainsi, toute modification de notre posture aura une incidence sur notre état émotionnel, et réciproquement tout changement affectif entraînera une modification, même imperceptible, de notre posture.”
Parcours et contexte
Cette thèse en danse et robotique confirme mon parcours pluridisciplinaire à la rencontre des arts et de la science. Titulaire dune diplôme en ingénierie de systèmes à lEcole Polytechnique de Timisoara et dun master en phénoménologie de la religion à l'Université de lOuest Timisoara en Roumanie, je suis arrivée en France pour poursuivre des études en art, notamment un master professionnel ``Mise en scène et dramaturgie” à l'université Paris Nanterre. En parallèle avec mes études, jai intégré des ateliers et stages de professionnalisation avec Mathieu Bauer, Ricci Forte, Silvia Costa, Odin Teatret, le Théâtre du Soleil ainsi que des résidences de création autour du numérique, en participant à l'atelier La Scène numérique, mené par Robert Faguy aux Laboratoires Lantiss de l'université de Laval à Québec. Lors de ce séjour au Canada, nous avons travaillé sur les nouvelles formes performatives et l'usage de la technologie dans le spectacle vivant. Cela ma permis dimaginer ce projet de recherche-création orienté autour des robots et leur impact sur scène. Après ma formation en mise en scène, jai travaillé comme assistante de Heiner Goebbels pour son ``Anthology of Sounds \& Spaces" à Bogota, ainsi qu'interprète et assistante à la mise en scène pour Michel Cerda pour son spectacle “La Source des Saints” en tournée en France entre 2018 et 2020. Jai également mis les bases de la compagnie Desiderate, imaginée comme laboratoire d'expérimentation artistique.
Nayant pas eu une formation conventionnelle en danse, mon approche sinspire de techniques et disciplines variées ainsi que des rencontres faites tout au long de projets. Pour construire des séquences de mouvement adaptées à des besoins artistiques, je mappuie sur les mouvements naturels du corps et de son vécu, proche de ce que des autres praticiens ont défini comme éducation somatique, pensée du corps et intelligence sensorielle. Loin des critères esthétisants, mon objectif est de chercher des mouvements inspirés par le vécu somatique du corps, identifier lendroit et le moment où son ressenti et son autonomie engendrent de la créativité pour performer sur scène. Depuis 2014, je me forme à la danse à travers des stages de Gaga avec Ohad Naharin et Batscheva Dance Company, buto avec Atsoushi Takenouchi, des techniques ViewPoints, Body Mind Centering, Feldenkrais, mime corporelle et OpenFloor Medicine. Dans le cadre de ce doctorat jai eu loccasion d'intégrer plusieurs sessions de travail dans le studio de danse de la chorégraphe française Mathilde Monnier. Pendant ces résidences, lors de laboratoires et des sessions d'expérimentation autour du corps, je cherche à développer ma présence, mon ancrage, ma spontanéité et réactivité. Ayant un intérêt particulier pour les expériences phénoménologiques et les processus dindividuation, j'intègre ces concepts dans des projets performatifs arts/science dont la démarche se situe entre la dramaturgie du corps et les nouveaux médias.
Desiderate
L'idée de travailler avec les robots et interroger leur potentiel créatif est venue pour continuer mes envies de recherche et d'expérimentation avec la technologies au sein de la compagnie DESIDERATE dont je suis la directrice artistique. Créé en 2015, Desidératé est un lieu de rencontres pluridisciplinaires, un rassemblement dartistes œuvrant dans différentes disciplines - la danse, le théâtre, les arts numériques. Depuis 2017, la compagnie a été accueillie en résidence à Anis Gras-le lieu de l'autre à Arcueil pour le projet jeune création Les sept Princesses” de M. Maeterlinck et le projet danse et nouvelles technologies “En attendant que la vie passe…” . Je suis également artiste résidente au DOC! dans Paris 19éme où jai participé à la création des projets performatifs “Ne pas penser quau fond de moi cest Hiroshima et “Jai décidé de plus me laver” en tant que membre fondatrice du collectif C.B.F.
Interroger le réel par les nouveaux technologies
A partir des laboratoires d'expérimentation et de création des formes hybrides qui interrogent notre expérience du réel, le dernier projet de la compagnie- ``En attendant que la vie passe…” (2019) a été labellisée lors de la saison croisée France- Roumanie, organisée par l'Institut Culturel Français. Ce spectacle prend comme point de départ ``La Métamorphose>> de Franz Kafka où un employé en burn-out vit avec ses parents et sa sœur, sans trouver une issue à ses malheurs. Un matin il se réveille avec lapparence dun insecte, dans limpossibilité physique daller au travail. Son patron vient le chercher à la maison. Impuissants et perdus face à cette situation, les membres de sa famille lenferment dans sa chambre, puis le négligent jusquà sa disparition. A travers les corps, les gestes et la danse, les spectateurs sont plongés dans un univers dystopique marqué par labsurdité de travailler dans une société où tout fonctionne autour de la rentabilité et où les compromis étouffent lenvie de vivre. En contrepoint, le sentiment dautodérision et le rire apparaissent comme une réponse légitime à des questions existentielles sans réponse. Par lusage des nouvelles technologies, nous avons cherché à actualiser lécriture de Kafka à l'ère du numérique rapprochant la figure de linsecte à celle de drone. Lorsque des androïdes et robots humanoïdes satisferont nos fantasmes dimmortalité, nos corps seront remplacés par des dispositifs robotisés, drones, prothèses bioniques etc. Dans ce contexte nous semble important de confronter le corps à ses propres limites, à lépuisement.
Le laboratoire de robotique et microélectronique de Montpellier (LIRMM)
En mars 2021 je suis arrivée au Laboratoire d'informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier- LIRMM-, sous lencadrement de prof. Abderrahmane Kheddar de l'équipe Interactive Digital Humans (IDH) pour étudier les robots humanoïdes. Initié dans les années 2000, le Humanoid Robotics Project (HRP) est un projet de développement des robots conçus pour collaborer avec les humains, parrainé par le ministère japonais de l'Économie, du Commerce et de l'Industrie (METI), dirigé par Kawada Industries et soutenu par l'Institut national des sciences et technologies industrielles avancées (AIST) et Kawasaki Heavy Industries. Aboutissement d'une décennie de R\&D, le HRP-4 est l'un des humanoïdes les plus avancés dans sa gamme, connu pour effectuer des mouvements remarquablement naturels. Cependant le niveau de programmation de ce type de robot est très complexe. Dabord il nécessite des connaissances préalables en langage C++ ou Python et Linux, ensuite la maîtrise de interfaces comme ROS, MCRTC et GitHub.
Le projet artistique Co-évolution, Co-création et improvisation Homme-Machine (CECCI-H2M)
Le CECCI-H2M est un projet interdisciplinaire et international conçu sous la forme dune coopération scientifique et artistique. Il entend explorer des modes de transcription artistique de concepts tels que la co-évolution comportementale, la co-création et limprovisation chorégraphique autour du thème de la dépendance/co-dépendance entre des humains et des entités artificielles (robot ou système virtuel évolutif). Il interroge la manière de mettre en place des relations de symbiose entre des systèmes en interaction, afin quils puissent cohabiter ensemble. Jai travaillé en tant qu'ingénieur détudes de ce projet en 2021 et 2022. Ma mission a été dinterroger la manière de représenter une relation de co-création sur scène à travers une performance entre un danseur, un Robot HRP (Humanoid Robotics Project) et un Ecosystème Virtuel Evolutif (EVE) qui les entoure.
Le projet a bénéficié de plusieurs étapes de résidence au Centre des Arts dEnghien-les-Bains. En juillet 2021, lors de notre première phase du projet, nous avons travaillé avec une version simplifiée du robot -une animata Arduino construite pour des déplacements aléatoires dans lespace. Cette étape nous a permis de tester linteraction avec un prototype doté dun comportement involontaire. Lors des improvisations sur le plateau, nous avons cherché un terrain d'entente entre lintelligence du corps humain, la réponse du corps machinal de lanimat et la réactivité de l'environnement virtuel. L'influence de ces éléments artificiels sur lexpression corporelle du performeur, ainsi que les mouvements de lanimat, sa fragilité et sa dimension réduite, ont provoqué une interaction instinctive, en marge dune construction rationnelle basée sur de la réciprocité.
Quelques mois plus tard, la deuxième phase du projet nous a permis de projeter les mouvements du robot virtuel HRP-4 sur la performeuse afin de tester une forme de mimétisme gestuel et aussi dapprofondir les concepts d'altérité et dautonomie des dispositifs robotiques. Les qualités de “sauvage” ainsi que la notion d “Umwelt” ont accompagné cette recherche artistique. Après quelques tests avec le robot virtuel, nous avons pu constater à quel point le virtuel reste une manifestation mystérieuse qui suscite limagination des artistes. Cela nest possible qu'à partir de l'interprétation du virtuel comme une altérité, un différent, en manifestant une autonomie sensible à la perception du performeur. Cela nous a également permis de réfléchir aux contraintes suite à lintégration des éléments virtuels et réels dans un projet performatif. Comme une négociation entre les solutions software et les dispositifs hardware, lillusion du réel versus limaginaire virtuel et la place que chacune de ces dimensions occupe sur le plateau, représentent une phase importante de notre projet.
Lors des prochaines étapes du projet, nous avons mis l'accent sur la spécificité du robot HRP-4. Pour sa programmation, jai dû d'abord étudier ses mouvements mécaniques, leur potentiel artistique en termes d'expressivité, de contraintes et de libertés. Leffet de présence dun robot humanoïde sur scène a suscité des questionnements en lien avec l'altérité de sa figure mécanique et le concept de uncanny produit par ses mouvements remarquablement naturels. Les différences entre l'organicité du corps humain et l' artificialité du robot deviennent une source dinspiration, voire une matière à détourner, pour imaginer de nouvelles formes décriture corporelle en vue dune improvisation performative entre les deux.
En 2022 le travail de programmation du robot HRP4 a été réalisé en deux temps. Dabord une familiarisation avec les systèmes MoCap utilisés par l'équipe du laboratoire et l installation de plugins qui nous ont permis que les séquences de mouvement soient simulées avec le robot virtuel. Ensuite, des tests avec le robot HRP réel ont été réalisés en mars 2022. Ces tests ont facilité la mise en place dune séquence de mouvements sur une chaise. Ce choix de faire s'asseoir le robot sur la chaise est le résultat de nos réflexions sur les contraintes d'équilibre du robot, lors des séances d'improvisation. La réalisation la plus simple, pensée avec les ingénieurs de l'équipe de prof. Kheddar, a été l'organisation de ces séquences dans de programmes de type F.S.M (Finite State Machines) qui permettent une meilleure organisation des transitions entre différentes postures.
Ainsi jai pu créer des simulations de séquences de mouvements sur un robot virtuel comme hypothèse de recherche pour une chorégraphie mimétique. Dans un premier temps, jai décidé de rapprocher la figure du robot à celle dun danseur de slow, réalisant quelques tests dinteraction réelle avec la version physique du HRP-4. Ensuite jai effectué un travail de gestes inspirés par les postures de dirigeants politiques, pour voir dans quelle mesure les postures de pouvoir sont incarnées par des gestuelles et non par des attitudes. Le pouvoir que nous leur désignons est parfois le pouvoir de fascination que leur potentiel exerce sur nous, sans s'en rendre compte. Dans cette configuration centrée sur la fascination d'un objet inanimé, nous avons voulu comprendre dans quelle mesure le mouvement et les gestes dansés deviennent vecteurs d'influence.
Une autre séquence de mouvements a été préparée pour la troisième résidence de création au Centre des Arts dEnghien Les Bains. Pour cela, jai codé une séquence de mouvement sur la chaise qui dure approximativement 2 minutes. A lintérieur de cette séquence, les états sont enchaînés selon une règle inspirée par la quatrième itération de lalgorithme de la courbe du Dragon. Pour correspondre aux quatre postures choisis initialement, nous avons opéré une conversion entre les états de la courbe du dragon et les états F.S.M. Pour la performance ``Le mythe de l'Immorta" présentée lors de notre sortie de résidence, un travail de synchronisation avec les sons produites par Hui-Tin Hong a été fait ultérieurement. Une autre s``équence de code, cette fois en montrant le robot commencer à applaudir a été rajoutée. Ainsi le robot virtuel est apparu dans deux moments différents de la performance- au départ sur une chaise pour présenter sa danse et à la fin début pour applaudir les spectateurs. Le rythme de certains mouvements a été modifié pour correspondre avec la musique. Une pause de six secondes a été introduite dans la séquence pour marquer un moment darrêt: le robot virtuel tourne sa tête pour regarder le public. Ce geste a été interprété par les spectateurs comme une façon d évaluer la danse des performeuses.
Le robot comme possible partenaire sur scène
Le robot en tant qu'objet scénique est à la fois un élément contraignant de notre recherche-création, à la fois il suscite de nombreux fantasmes et projections. Nous avons tous interagit d'une forme ou une autre avec une machine intelligente dans nos vies privées, cela n'a pas empêché notre curiosité se déployer encore plus et s'imaginer ce qu'il pourrait se passer le jour où un robot sera autonome. Au moins sur scène, lieu d'expérimentation de toute possibilité, nous essayons de comprendre dans quelle mesure son corps dévient performatif. Mon rôle est d'imaginer une interaction improvisée avec, de solliciter dans mon corps autant que dans le sien des possibilités de convergence et d'expression artistique. Le moyen dexpression choisi est la danse, vu comme écriture corporelle et langage non-verbal. Ainsi pendant deux ans, j'ai eu l'opportunité de l'observer de loin et de prêt chez lui, dans son laboratoire. D'imaginer et préparer des séquences de danse avec. Ensuite j'ai appris petit à petit à le programmer pour lui permettre de s'exprimer. Dans ma quête sur lautonomie de lartificiel, la notion du “sauvage” a été évoquée en marge d'une construction consensuelle dinteractions Homme-Robot. Cette notion désigne le fait quun robot doté dautonomie pourrait être non apprivoisée sur scène, et que le performeur y verrait une perte de contrôle pour arriver à un compromis cognitif, tel un terrain d'entente, entre sa créativité, son intuition et les “réactions” du robot.
Résidences dessai et laboratoires d'expérimentation
En parallèle, des autres moments de recherche en écriture corporelle sont possibles grâce à la mise à disposition du studio de répétition de la chorégraphe Mathilde Monnier à Montpellier. Une recherche sur le lien entre son et mouvement a été mise en place pour continuer les expérimentations Arduino précédentes. Ainsi avec laide du logiciel PureData nous avons créé un prototype de capteur EmG pour convertir le signal électrique des muscles en du son aléatoire. Ce prototype, testé lors dune résidence artistique à la Halle Tropismes a Montpellier, a été présenté dans le cadre du Module Pédagogique Innovant Objets Magiques, conçu en collaboration avec Isadora Télés de Castro pour le projet CECCI-H2M dans le cadre du dispositif Artec. Des laboratoire de recherche inspirés par mes expériences déducation somatique ainsi que par lutilisation des techniques de shaking, constituent une boîte aux outils pour rechercher une corporéité autre sur le plateau.
Champs de recherche
Dans les expériences de réalité augmentée, ainsi que dans les états de conscience altérée, nous expérimentons le réel d'une façon inouïe. Cependant aujourd'hui il nous est difficile de définir le concept du réel d'une seule et unique façon. Pour le psychanalyste Jacques Lacan, nous ne pouvons pas du tout définir ce concept car le réel soppose à la réalité et échappe à limaginaire. Pour Lacan, ``le Réel, cest ce qui est strictement impensable. (...) Le réel a un statut particulier, du fait que l'on ne l'atteint pas. Le réel est inaccessible." La conscience de soi, étudiée plus largement à partir des recherches phénoménologiques de Martin Heidegger, est un terme difficile à saisir et à interpréter. De plus, traduire cette expérience de la conscience à la réalité physique de la machine est un défi. Lors des projets entre neurosciences et robotique, plusieurs aspects de l'état conscient: l'autonomie motrice, l'attention, la mémoire, l'imagination ont été étudiés et modélisés dans des programmes informatiques, pour générer des systèmes type <<conscience artificielle>>. Par ce projet de recherche-création, nous aimerions travailler avec des robots capables d'auto-analyser, planifier et improviser leur comportement dans une situation d'interaction avec un performeur. Développer une CA dans un robot signifie donc concevoir un programme capable d'interagir avec le monde extérieur et avec l'humain pour que le robot puisse se construire des représentations dexpériences sensibles, voire subjectives, identifiées par les neurosciences cognitives comme qualia. Comme l'ont déjà remarqué les chercheurs de ce domaine, une CA doit pouvoir avoir la capacité d'éprouver le concept Dasein de Heidegger, ou tout simplement prouver du fait d'être là de manière subjective. Le chercheur Tom Ziemke, spécialiste dans la recherche de formes incarnées de conscience ou embodied cognition parle de la relation entre l'IA incarnée dans des dispositifs physiques et la biologie synthétique. Selon lui, un programme qui assure une relation entre le robot et son environnement via des capteurs et actionneurs, représente une forme d'IA incarnée. Son travail, inspiré par F.J. Varela, lie l'intelligence à l'état d'autopoïèse comme façon d'organiser la vie. Ziemke se demande si la conscience est essentiellement liée au domaine du vivant, ou si tout système autonome autoréférentiel est capable d'une forme de conscience.
Actuellement, les interactions multimodales (geste/visage/parole/toucher) sont les formes d'interaction naturelle homme-machine les plus abouties, l'appui central étant lextérieur de la machine, son corps. Pour Bruno Latour le corps humain est défini par sa relation avec lextérieur. Ce penseur démystifie le dualisme corps-intellect et parle de lapprentissage de l'intellect (et de la conscience) à travers les sens. Il utilise la métaphore de léducation des sens olfactifs pour illustrer ses propos. De façon similaire, Guy Hoffman, codirecteur du IDC Media Invention Lab, travaille depuis quelques années sur l'expressivité des robots. Il a intégré des principes de design graphique et de l'improvisation théâtrale afin de rendre ses robots plus humains par leurs mouvements et leurs gestes.
Parallèlement, des artistes comme Heiner Goebbels ou Aurélien Bory utilisent, dans des spectacles comme Stifter's Dinge (2007) ou Sans Objet (2009), les dernières technologies pour provoquer des expériences sensorielles et convoquer le réel sur leur plateau. Dans ``Sans Objet” par exemple, le performeur se retrouve devant un bras de robot industriel:
« En dehors de tout but, de toute fonction, la danse entre le corps de lhomme et celui de la machine donne lieu à un théâtre mécanique sur le terrain du sensible, entre la fragilité de lhumain et la puissance du bras métallique articulé. Placé au centre, au milieu dun vide, complètement sorti de son contexte industriel, le robot devient inutile. Et dans sa fonction perdue ne nous rappellerait-il pas la nature de lart : être absolument sans objet ?»
Plus précisément il danse avec et à côté du bras industriel pour trouver sa place. Alors que dans “Stifter's Dinge”, il ny a pas de performer sur scène, les cinq pianos de Heiner Goebbels deviennent les performeurs dune musique envoûtante. Chaque artiste dispose de son langage unique, de son propre univers. Il communique sa sensibilité par des mouvements, des sons ou des images laissant le choix d'interprétation au spectateur. De la même façon, un robot nest pas mis en scène, il y est sur scène avec les performeurs ou seul. Par ce fait, il permet au spectateur de composer sa propre histoire et de donner une nouvelle signification à lexpérience vécue, tout comme un performeur humain le fait.
Le corps performatif à la lisière de pratiques somatiques et developpements technologiques
Le corps humain en tant que sujet se retrouve à la lisère de plusieurs disciplines et paradigmes de notre société. Beaucoup de personnes font de la chirurgie plastique pour correspondre à des normes de beauté irréelles, d'autres pensent capacité augmentée et biohacking. Dans la quête du sens à lère de l'Anthropocène, le corps semble une coquille vide en attente de connexion avec d'autres objets connectés. Cependant la danse comme forme d'expression artistique est une pratique qui n'a pas beaucoup changé avec le temps. De nombreuses façons de danser liées à des formes expressives archaïques tels les rituels se sont recyclés en formes performatives artistiques. En cela la danse apparaît comme un geste qui résiste à lhistoire de notre civilisation et aux tendances du moment, les surpassant.
Pour interroger le corps performatif des machines, nous nous rapportons dabord au corps du danseur. Pour cela nous analysons les différentes postures que le danseur occupe dans l'histoire récente de la danse. Ces postures interrogent la place du danseur inspirés par des pratiques somatiques, celle du danseur libre ou libéré dans la danse postmoderne des années 70, celle du “danseur piéton” des performances du début de 21e siècle:
“Ainsi, les danseurs piétons incarnent une distance critique avec la norme du corps dansant, mais aussi de nouvelles poétiques du geste ; non entraînés, ils sont plus « naturels », leur geste est supposé plus authentique ou plus spontané. Plus encore, « non danseurs », ils appartiennent mieux au corps social, ils sont « plus dans le monde » que les danseurs normaux, plus imprégnés de la culture commune, et à ce titre « représentatifs » de nous-mêmes, leur public. La présence des corps piétons sur nos scènes serait donc par nature doublement subversive, sopposant dune part à des normes esthétiques du corps dansant et des œuvres chorégraphiques ; et dautre part, à lordre social qui prétend séparer les artistes des gens ordinaires, contribuant à transformer le monde en apportant les savoirs et lexpérience artistique à ceux que nos sociétés en priveraient. On aura compris que ces « corps piétons » ne sont pas piétons par eux-mêmes, mais en tant que contraste avec le corps normal du danseur : sans la référence à celui-ci, peut-être seraient-ils tout simplement invisibles.”
Nous rappelons les remarques dIsabelle Ginot sur lopposition entre un danseur piéton et un danseur virtuose (dans le sens danseur inscrit dans un courant esthétique), quelle désigne comme une fiction à double mythe : le mythe dun « corps naïf », en marge de toute convention esthétique en contradiction avec celui dun « danseur marqué par le stigmate de sa virtuosité>>. Cependant la catégorie « danseur virtuose » ou « danseur normal » ne peut pas correspondre à une réalité tangible puisque il nous paraît impossible de déterminer les critères selon lesquels un danseur de Cunningham, un danseur de Wim Wandekeybus, un danseur de Pina Bausch est le plus virtuose.
Notre recherche identifie les robots comme potentiels candidats à la catégorie de danseurs piétons. En occupant la scène contemporaine avec leurs identités polymorphes et leurs contraintes technologiques, nous essayons de comprendre comment les robots sociaux peuvent prétendre à un tel statut.
Problématiques
Nous partons du postulat que l'intelligence humaine dépend du corps et du mouvement et que «le corps a un rôle crucial dans la constitution de l'identité et la conscience de soi». L'interaction sensori-motrice d'un système peut déterminer son degré d'intelligence. En mettant en place des études inspirées par des découvertes en neuroscience et robotique, ce projet de recherche-création questionne les limites des ces interactions sur scène et leur impact sur des concepts tels que la CA et le corps performatif.
Si les robots nont pas encore manifesté une intention réelle pour faire de lart, les artistes les amènent sur scène pour raconter une histoire ou adresser des problématiques sociétales. Leur motivation et volonté de travailler avec des machines part d'un phénomène dactualité, pour préconiser des spéculations sur un avenir plus ou moins proche. Cependant la réception de ces œuvres a lieu indépendamment de leur propos, selon la sensibilité du spectateur ou son vécu mais aussi selon les contraintes que ce type de démarche implique (production artistique versus projet scientifique).
Revenons cependant à notre point de départ- le lien entre la conscience et le corps et leurs correspondants technologiques. Si lobjectif d'une CA est d'imiter le cerveau humain, faire danser des robots sur un plateau nous permet de vérifier si une conscience artificielle est seulement un état dans lequel la machine imite le comportement humain, ou si elle est capable dexpériences perceptives propres qui font émerger des nouvelles formes dexpressivité dans le performeur. Nous pourrions peut-être supposer que pour un robot, le fait de manifester sa sensibilité au monde revient au fait dêtre sur un plateau.
Confronter l'intelligence du corps du performeur à l'intelligence du fonctionnement du robot pour trouver, à travers des mouvements, une intelligence symbiotique de deux, ouvre de nouvelles formes de collaboration homme-machine. La danse et les éducateurs somatiques nous semblent alors des contextes appropriés pour interroger cette possibilité, sans attendre une réponse rationnelle, mais plutôt instinctive. Dans ce contexte, comment l'intelligence propre à la machine peut-elle être saisie par l'humain? Comment l'homme et la machine pourraient-ils se retrouver sur un terrain autre que celui de la pensée rationnelle ?
Ça ne peut pas s'expliquer, il faut le vivre pour le comprendre.
Les praticiens d'éducation somatique peuvent répondre, au moins partiellement, à cette question. Dans sa thèse, l'anthropologue Jeremy Damian explicite son initiation à des pratiques somatiques en tant que danseur amateur. Au-delà de ses réserves quant aux dérives sectaires de ce type de pratiques, il analyse les “pour” et les “contre” des théories sur le savoir empirique du corps, dans un contexte artistique. Ainsi Damian intègre un collectif artistique pour récréer un spectacle de danse à partir de la méthode Body Mind Centering. Avant dadopter complètement ces méthodes, il s'interroge sur la spécificité de la production des savoirs du champ somatique et leur légitimité en tant que science. Il sappuie sur les observations des autres chercheurs, tels Isabelle Ginot, pour illustrer la tendance de la parole somatique à faire de la spéculation scientifique :
« Détachés de leur contexte dincorporation (embodiment) les discours somatiques […] courent chargés des poids dinnombrables idéologies : le naturel (voire lanimal), le transcendant (voire le religieux), la différence biologique des sexes, les hiérarchies culturelles (...)Rarement, montre Isabelle Ginot, il est fait appel aux sciences pour introduire du doute ou situer les pratiques somatiques dans des controverses scientifiques. Plus encore, poursuit-elle, bien que lon espère de lui, le discours scientifique sera demblée confronté aux récits fondateurs de ceux qui sont à la base de ces pratiques et dont on hésite à les appeler des « inventeurs », des « découvreurs », des « créateurs » ou des « expérimentateurs »: « La perspective ultime du récit somatique, son point de fuite, cest toujours un récit somatique antérieur, dont le point dorigine indépassable serait lhistoire personnelle (la biographie ou autobiographie) du fondateur. »
Dans son article “Que faisons nous et à quoi ça sert”, Ginot est cependant moins radicale, reconnaissant la difficulté de sa double posture (en tant que philosophe et praticienne dune méthode somatique) lorsquil faut justifier la apparténence scientifique à un autre domaine:
“Lorsquil sagit dintroduire ces pratiques dans un contexte institutionnel, notamment médico-social, cette difficulté est encore redoublée : non seulement la description de la pratique semble toujours insatisfaisante, non seulement elle arrive dans un contexte qui na aucune culture de pratiques corporelles comparables, mais encore elle doit être médiatisée par les professionnels, chargés de la retraduire auprès des usagers. Ce problème de « communication », selon le jargon interne à linstitution, nest pas le seul : la double question « Que faites-vous, et à quoi ça sert ? » devient plus problématique encore lorsquelle est posée par les experts, ou sur le ton de lexpertise (notamment par les professionnels à qui de telles pratiques ont parfois été imposées, et qui ne les accueillent pas toujours très volontiers).”
Bien comprendre les nuances qui transforment les principes des pratiques somatiques en formes dart ou en science, implique savoir où et à qui sadresser pour mieux cibler son argumentaire. Pour Ginot, définir une méthode somatique comme une pratique holistique qui peut tout guérir, risque de discréditer la démarche scientifique des autres disciplines, alors que rentrer dans la logique spécialisée des professionnels de différents domaines, fragmente les objectifs de la pratique en la rendant adaptable à plusieurs enjeux et donc à aucun.
A ce point dans notre enquête, il nous semble outil de tenter une définition des pratiques somatiques en danse en retraçant un peu leur histoire.
Elles commencent au début du 20é siècle avec des formateurs tels Mabel Todd qui dans son livre “The thinking body”, met les bases dune pédagogie et dune écologie corporelle qui sappuient sur létude concomitante de la physique, de la mécanique, de lanatomie et de la physiologie. En prenant appui sur les travaux scientifiques de son époque, Todd centre son analyse sur la place des principes déquilibre des forces dans léconomie corporelle et sur la détermination de la forme par la fonction, en tant que loi du développement organique”. Ainsi pour elle, lanalyse des rapports entre forme et fonction explique la forme, celle-ci en étant le reflet des principes mécaniques relayant les « lois universelles » de la physique. Sa méthodologie est fondée sur des procédures de visualisation des images mentales, en amont de toute exécution du mouvement. Son objectif est dintervenir sur les mécanismes inconscients qui régissent la motricité en travaillant sur la représentation la plus précise du mouvement pendant que celui là soit accompli :
« Limagination libère de la puissance. Lorsquon apprend consciemment à se servir dimages motivantes pour conditionner les réactions motrices adéquates, il faut connaître précisément trois choses : où cela se passe, dans quelle direction et selon quel désir. Quand les conditions sont réunies, le mouvement peut avoir lieu. « Ça bouge », alors, exactement comme « il neige », « il pleut » ou « il grêle ». Les muscles obéissant instantanément à la pensée, laction adaptée survient. Le degré de précision et daisance sera fonction de la netteté de la réponse imaginée ou de son importance vitale ou non. Autrement dit, la pulsion émotionnelle ou ladhésion à une idée conditionne un type précis de mouvement, tout comme la condensation est lun des préalables importants à la pluie ou à la neige. »
Toujours sur les muscles en lien avec ses observations sur la forme, elle identifie le mouvement comme sensation globale analogue à la fonction des muscles pour expliquer la compréhension quelle a de cette partie du corps :
“We have no objective phenomenal experience of our muscles. All that we are aware of and can judge by our other senses is the movement as a whole, and our sensation of movement is therefore referred to the whole movement and not the individual muscles.”
Si à lépoque où Todd écrivait son livre, les muscles obéissant instantanément à la pensée, les dernières découvertes en neurosciences confirment que la plupart des opérations impliquées dans le contrôle de nos mouvements corporelles, comme la plupart des sensations qui initient un mouvement réflexe en particulier, sont de nature inconsciente. Doù vient alors cette pensée et comment des sens comme la proprioception sont en charge, autant des sensations de nos organes, que des fonctions régulatrices en lien avec les muscles. Par exemple, lorsque nous nous penchons en avant, nous faisons presque instantanément un mouvement en arrière afin de préserver notre équilibre. Comment comprendre cette vitesse avec laquelle opère notre corps pendant qu'il utilise des mouvements anticipateurs ? Tout cela sans que notre pensée le détermine. Que dire alors des processus d'apprentissage comme celui de la conduite auto ou d'un nouveau type de danse? Une nouvelle capacité motrice devient automatique une fois apprise et exécutée un nombre suffisamment des fois. Si la plupart dentre nous, nous ne sommes pas capables didentifier linstance de notre cerveau qui soccupe de ce type d'apprentissage, celui-ci a lieu dans notre corps, donc cest un processus organique constitutif de notre identité.
Pour le neurophysiologiste Alain Bertoz, la perception est une action simulée, nétant pas seulement “une interprétation des messages sensoriels: elle est contrainte par laction, elle est simulation interne de laction, elle est jugement et prise de décision, elle est anticipation des conséquences de laction.“ Ainsi pour lui, les modèles internes de la réalité physique qui ne sont pas seulement d'opérateurs mathématiques mais des vrais neurones dont les propriétés sont accordés au monde physique. Analyser le mouvement du point de vue neurologique nous permet de mieux comprendre notre spécificité et les processus physiologiques ayant lieu à l'intérieur de nous:
“Lanalyse du mouvement permet donc de découvrir les solutions trouvées au cours de lévolution pour anticiper les conséquences de laction et simplifier le contrôle des gestes.”
Le plus que cette connaissance du corps humain sélargit grâce à des disciplines comme les neurosciences, le plus cest compliqué dadapter ces principes à des technologies. Par exemple en robotique le problème de degrés de liberté (ie le nombre darticulations dont un corps organique dispose) reste un défi pour les ingénieurs qui les désignent:
“Les centaines de degrés de liberté qui caractérisent lorganisation anatomique et dynamique du squelette de la plupart des animaux et de lhomme, auraient rendu le contrôle du mouvement impossible si au cours de lévolution nétaient apparues des mécaniques par lorganisation de la géométrie du squelette, mais aussi le nombre de degrés de liberté que le cerveau doit contrôler. Les roboticiens, qui à ce jour, ne sont toujours pas capables de réaliser des machines de la complexité du moindre insecte, savent à quel point tous les ordinateurs sont vite saturés, à la fois en capacité de calcul et en rapidité, par les quelques degrés de liberté des robots quils essaient de construire.”
Bertoz va plus loin quant à la complexité des systèmes vivants et à lintégration de ces principes dans des systèmes technologiques, en faisant référence au terme de synérgie:
“Le mot synergie vient de syn (ensemble) et ergos (travail). Ce concept a été proposé par Bernstein pour appuyer lidée que, le système nerveux ne peuvent contrôler toutes les degrés de liberté, lévolution a sélectionné un répertoire de mouvements simples ou complexes, que nous pouvons appeler “mouvements naturels”, et qui impliquent des groupes de muscles et de membres travaillant (ergos) ensemble (syn). Nous avons dailleurs mentionné plus haut les contraintes quexerce le squelette sur le nombre de mouvements possibles à chaque articulation. Ce répertoire nest dailleurs pas très large. Il suffit de contempler une danseuse pour constater lextraordinaire pauvreté du répertoire moteur dont elle dispose. Cest la combinaison dans le temps et l'espace de ces éléments et les jeux de partenaires qui font à la fois le génie du chorégraphe et la richesse expressive de la danse. “
Il nous semble pertinent dappliquer ce processus de synergie à notre façon de travailler, dans la mesure où cela va nous aider à mieux comprendre les incompatibilités des langages et des pratiques entre les différentes disciplines que nous adressons et leurs enjeux.
Objectifs et enjeux du projet
Ce projet cherche à établir des synergies entre des hypothèses sur lexistence de la CA et son impact sur la danse, par la mise en place des interactions robot-performer. Il vise une amélioration des capacités cognitives et interactives des robots en analysant l'influence de la créativité sur la perception humaine. Du point de vue de la danse et de la mise en scène, ce projet vise à travailler sur la simulation et le contrôle des fonctions motrices en programmant d'abord des robots virtuels, puis réels pour analyser et adapter leur mouvement au comportement du performeur. Le mélange des corps organiques et corps synthétiques aboutissant à de nouvelles formes de compositions et dinteractions scéniques, nous conduira à examiner en quoi et jusquoù les critères de lesthétique (pour l'art) et de la technique (pour la robotique) peuvent être transgressés.
Mon parcours professionnel est pluridisciplinaire: jai travaillé en tant quingénieur de systèmes, ayant obtenu en parallèle un master de phénoménologie et un master professionnel de mise en scène. Par le biais de mon activité artistique, je m'intéresse à la danse et plus spécifiquement au geste spontané à travers différentes techniques dexpression corporelle. Dans le cadre du dispositif Idefi CréaTIC, j'ai eu l'occasion dapprofondir les méthodologies d'analyse des mouvements de gestes avec des capteurs, lors du séminaire La scène numérique au Laboratoire Lantiss de l'Université Laval de Québec. Mon expérience d'ingénieur pour une multinationale française et mes connaissances en programmation Java Plateforme Eclipse et C++, mont permis de comprendre les outils et les interfaces utilisés dans le laboratoire de robotique où jai effectué mes recherches mais aussi danalyser la cinématique et la cinétique des mouvements humains avec des capteurs type PerceptionNeuron et XSens. Outre mon activité de création des spectacles, jai mis en place des partenariats pour des démonstrations déquipement de la robotique industrielle, en participant à des événements autour de l'Intelligence Artificielle. C'est ainsi que les enjeux sociétaux de la robotique sont devenus une source d'inspiration pour mes expérimentations artistiques. Mes projets de danse partent d'une recherche sur des gestes quotidiens, afin de raconter comment le corps est éprouvé par la technologie dont limpact pourrait « robotiser » nos modes de fonctionnement.
Pour aller plus loin, ma démarche questionne lendroit où la danse inspirée par des pratiques somatiques et génératrice de gestes spontanés est un outil pour comprendre et saisir le réel de la technologie, dune façon sensible. Dans le cadre de cette thèse, ces éléments de mon parcours nous aideront à analyser si le fait de conférer à des robots la capacité de générer des mouvements associés à des sensations ou émotions, s'apprête à des expérimentations sensorielles artificielle ou pas. Plus particulièrement, un de mes objectifs est de voir comment la façon de représenter le corps performatif est traitée dans la robotique - par exemple en capturant des gestes spontanés avec l'aide des capteurs et en les implémentant dans des robots. Un enjeux plus complexe à mettre en place est celui de programmer des robots qui improvisent en direct leurs mouvements en interaction avec un performeur.
Couramment les algorithmes de machine learning (ML) apprennent ce que définit leur base de données. Il y a toujours un écart entre ce que les algorithmes apprennent à reconnaître sur demande et le comportement autonome que nous imaginons pour eux. Pour entraîner son programme de ML, il faut classifier et ordonner des données, l'accompagner dans le processus dapprentissage et interpréter ses résultats. Cependant le principe d'apprentissage non-supervisé incite les programmes à apprendre tout seuls, sans la supervision humaine. Reste à voir si dans les prochaines années un robot sera capable de développer des initiatives particulières, indépendamment de ses concepteurs. Dans son livre “En attendant les robots”, le chercheur Antonio Casilli fait remarquer que dans un programme qui traite des données aléatoires pour trouver des solutions à des problèmes, les résultats sont surprenants quand il s'agit du caractère spontané de prédiction fait par celles-ci. Cela donne évidemment place à des réflexions éthiques. Pour le physicien et philosophe Alexei Grinbaum, les éventuelles dérives autour de l'IA peuvent être anticipés avec l'aide du hasard: « les projections anthropomorphiques sont inévitables, parce que la machine imite l'homme et qu'elle apprend à partir des données que celui-ci produit. Elle est donc soumise aux biais et aux erreurs que ces données contiennent. (...) Faire du hasard une valeur, c'est permettre à la machine de se soustraire à cette posture morale et au jugement qui l'accompagne.» L'interprétation que nous donnons au concept de CA est pensée en lien avec ces réflexions éthiques. Puisque des disciplines tels la psychologie, la neurologie et les neurosciences ou la philosophie, narrivent pas à se mettre d'accord sur ce que le terme “conscience” humaine désigne, imaginer son équivalent artificiel reste une simple projection artistique. Cependant les artifacts qui la contiennent, leur spécificité et capacités sont des paramètres que nous pouvons étudier de prêt en mettant en avant leur degré dintelligence et dadaptation, bien que ces termes selon le domaine où elles opèrent ont des significations spécifiques.
Dans le cas de lartefact ordinateur, un de ses avantages est sa grande capacité d'analyse de masses de données. Cependant l'accumulation continuelle des données, identifiée actuellement sous le nom de “big data”, pose des problèmes danalyse. Aucune machine n'est capable dinterpréter des données sans l'aide de l'humain qui configure les critères de l'analyse. Pour un concepteur, la phase où lalgorithme apprend puis sentraîne pour s'améliorer, reste opaque. Nous assistons à des comportements et phénomènes stochastiques de la machine et leur effet sur la compréhension de lhumain. Des concepts plus avancés comme lintelligence artificielle, font l'objet des débats et scissions au sein de la communauté de développeurs. Entre ce quil a été défini comme lIA symbolique et lIA numérique et la polarité entre ces approches exclusives déclarée dès ses origines- une alternative comme le concept d'intelligence extensive (IE) où « Extended Intelligence » - vise l'amélioration des capacités humaines danalyse. Plus concrètement, en lieu dêtre en compétition directe avec l'intelligence humaine, l'IE cherche à la sublimer. Cette nouvelle discipline utilise l'erreur comme outil dapprentissage et intègre des principes de slow science pour permettre à l'humain de mieux analyser les données et coopérer avec la machine. En cherchant des analogies dans notre contexte particulier qui est le domaine de l'art, il est plus facile de se concentrer sur cet aspect de l'erreur comme outil d'apprentissage et donner place à l'expressivité de la machine. Les enjeux sont moins importants. Ainsi nous pouvons imaginer comment les robots peuvent influencer des nouvelles formes d'expressivité corporelle dans une performance, par la suite des accidents qui surgissent dans ce type dinteraction.
Methodologie
Tout travail de recherche-création sinscrit dans un parcours de croisement de disciplines et de pratiques. Dans notre cas, les disciplines sont elles-mêmes résultantes de plusieurs sous-domaines. Que cela soit le cas de la danse inspirée par des pratiques somatiques - elles mêmes originaires de rapprochements entre plusieurs domaines comme la kinésiologie, la biomécanique et l'ergothérapie- ou de la robotique -influencée par des disciplines comme linformatique, l'électronique ou la mécanique- nos démarches s'appuient sur des études en neurosciences, philosophie, arts et robotique. Le terrain de nos expérimentations varie entre des laboratoires et halles de robotique, des studios de danse et des lieux qui accueillent des dispositifs performatifs.
Pour faire dialoguer arts et science, nous avons mis en place une double méthodologie nécessitant une adaptation continuelle à des principes et des savoir-faire propres à chaque discipline. Des termes ou concepts appartenant à un domaine ont nécessité un travail dexplication quant à sa signification dans lautre. Pour témoigner de cette difficulté, prenons par exemple, le mot “mouvement” au cœur de nos expériences pratiques. Ce mot a une signification très précise en robotique. Le mouvement dun robot implique un déplacement dans lespace, alors que pour la danse cela peut se traduire par des expérimentations perceptibles en étant immobile, à lintérieur de son corps pour les pratiques somatiques.
Notre processus de travail collaboratif artistique implique un ajustement constant a des envies, curiosités et contraintes technologiques. Tandis que le travail avec des ingénieurs est formel et nécessite des précisions concrètes.Pour définir nos hypothèses de recherche nous avons cherché à correspondre tant aux postulats de la robotique (avoir des caractéristiques mesurables et quantifiables dans une logique d'implémentation scientifique), quaux envies et intuitions artistiques qui visent un renouvellement de formes de la danse à l'ère du numérique.
Ainsi nous sommes rapprochées de l'intelligence kinésique comme expérience du mouvement au-delà de la compréhension corticale pour inventer des fictions sensor- motrices dans des robots. Plusieurs scénarios d'interaction ont été analysés et discutés avec léquipe de prof. Kheddar, Interactive Digital Humans. Face à la pensée cartésienne de lingénieur, lartiste peine à justifier son ressenti, son intuition. La créativité serait-elle un calcul mathématique, facilement paramétrable?
Similaire au ressenti des artistes-chercheurs en éducation somatique, jai dû faire le chemin inverse du repli sur soi pour mieux comprendre. Des mots intraduisibles pour justifier la nécessité de mettre en scène des robots, tels des pantins sur des fils invisibles. Ces pantins je les ai côtoyés de près, chez eux, dans leur laboratoire. Je me suis habitué à leur présence, à leur façon d'être manipulés et mis en veille lorsque létude scientifique prend fin. Reste à trouver le chemin du langage pour courter lécart d'incompréhension avec les ingénieurs et les ramener sur scène. Que deviendront-ils là-bas et comment cette expérience sera vécue à lintérieur de mon propre corps? Dans la pratique somatique des micro-changements opèrent pendant et après l'expérience. Le témoignage de Carla Bottigliari dan son article “Les trames du fond : fabriques et usages des imaginaires somatiques” décrit très bien ce processus. La transformation ressentie dans le corps du danseur pourrait correspondre à la transformation de l'artefact en partenaire de plateau, seulement si celui-ci pourrait sexprimer et décider de son gré:
“Quelque chose, peut-être, resterait de lexpérience, dans un coin de la mémoire corporelle : une émotion, une densité chromatique différente dans lespace ambiant, une fraîcheur ou une torpeur, un questionnement ou une stupéfaction, une sensation davoir une colonne, davoir des pieds ou au contraire, de ne les avoir guère, de nêtre que sol et espace. Et encore, peut-être, limpression dun visage défait, dun dévisagement, dun sourire depuis los, comme lon dirait du sourire du chat du Cheshire, ou dun regard qui revient de très loin tes yeux sont revenus/ dun pays arbitraire1 , dintervalles plus longs entre les sons, comme si le lointain nen finissait plus de sétaler. Un monde. Le même, mais pas tout à fait”.
Ce moment difficilement traduisible résultat dune l'expérience somatique, correspond à une concentration de perception à un niveau périphérique, tout en étant le contraire dune concentration proprement parler. Cela pourrait se rapprocher comme vécu, de ce que nous identifions comme présence attentionnelle diffuse. En danse cela se produit au niveau de la proprioception, sans que cela signifie que le danseur “se voit danser”. Au contraire, le danseur est immergé dans son expérience sensorielle de danse, tout en gardant une attention périphérique à son environnement.
Le journal de bord- outil transversal et archive
Nos problématiques et hypothèses se heurtent aux aléas de la pluridisciplinarité. En raison de contraintes ou incompréhensions des approches, le processus de travail lors de notre projet de recherche-création implique une temporalité non linéaire. Un journal de bord rythme les aller-retour et hésitations de ma démarche.
Ces aller-retour entre des expériences et des observations donnent suite à des nouvelles initiatives et questionnements. La difficulté de notre processus est dimposer à cela une dynamique propre aux projets de création. Dans ce type de fonctionnement collectif, la complémentarité des acteurs est fondamentale. Chaque membre doit être au clair avec sa propre identité professionnelle et son champ de compétences pour mieux recueillir et partager des informations qui enrichissent les échanges. Une décision suite aux contraintes dun domaine, nest pas forcément pertinente pour lautre.
Ainsi nos formes de production se déclinent, selon le contexte, en journées détude, transmission de connaissances théoriques sous la forme des articles ou des cours et sorties de résidence. Lors de derniers trois années nous avons organisé une journée détude et trois sorties de résidence au Centre des Arts dEnghien-les-Bains dans le cadre du projet CECCI-H2M, un séminaire de recherche autour du concept de lâcher-prise et lintelligence sensorielle avec le collectif Open Source à Anis Gras en janvier 2023, deux ateliers de recherche corporelle avec les élèves du cours de danse du Lycée Mercy à Montpellier en novembre et décembre 2022, un cours sur la perception et lesthétique du mouvement pour les élèves de master de lécole Mines ParisTech à Paris en octobre 2021. Test labo ?
Ces expérimentations ont été accompagnées par trois hypothèses de recherche que nous allons détailler dans les prochaines pages.
H1 Quel type d'intelligence sensorielle pouvons-nous transmettre aux robots dans des contextes artistiques? Est-ce la conscience du mouvement une capacité qui rend les robots plus adaptatifs et réceptifs lors des improvisations avec les humains?
Lintelligence sensorielle est un concept apparu lors des pratiques somatiques de fin de 19é siècle qui commence à intéresser les chercheurs des domaines comme la psychologie et les neurosciences. Similaire au débat entre lIA numérique et lIA symbolique, pour une partie des neuroscientifiques, les processus mentaux sont des processus de computation et de représentation dans le cerveau, vu comme ordinateur. Pour d' autres l'importance du corps sensoriel est déterminante et ils cherchent à mettre en avant un lien entre la perception, nos capacités cognitives et notre corps. Dans la robotique, pour définir l'intelligence, il est parfois question de mimétisme et de compréhension des systèmes biologiques qui sadaptent. Ainsi des roboticiens imaginent des bio-robots qui explorent leur environnement dune façon autonome, sans le recours au calcul informatique. L'idée que le corps et ses interactions avec l'environnement contribuent au développement dune cognition intégrée, plus large, est suffisamment séduisante pour que des chercheurs et des artistes imaginent ses applications dans le mode réel. Ces dernières années, plusieurs laboratoires prestigieux de robotique ont mis en place des études scientifiques pour comprendre ce type dintelligence. Cependant le terrain dexploration est vaste et des artistes sexpriment également sur le sujet(citations).
Les robots sont omniprésents dans les sociétés technologiques. Au Japon ils font partie intégrante du quotidien des personnes (citations). En Europe, leur utilité prime dabord, les rendant indispensables dans la plupart des industries. Ils suscitent néanmoins beaucoup de curiosité lorsqu'ils sont présents à des événements tels des salons de robotique. En France, de plus de plus des festivals dédiés aux arts numériques (citer festivals) présentent des œuvres interactives et performances avec des robots (citer oeuvres).
Le caractère innovant de notre démarche réside dans le fait dappliquer des principes dintelligence sensorielle à des intéractions avec les robots. Tester lincidence des facteurs comme lattention, la synchronie et la précision des mouvements imités pour témoigner des états de présence et de réception dans des contextes de collaboration artistique est peu étudié par la communauté scientifique actuellement.
Au-delà des expériences esthétiques et intentions artistiques, les danses inspirées par des pratiques somatiques invitent les chercheurs en neuroscience et robotique à penser différemment le corps. Lors des expérimentations dimprovisation en danse, lhumain réagit de façon spontanée, laissant sexprimer les émotions à travers des mouvements. Des choreographs tels Anna Halprin et Deborah Hay ont longuement étudié ce type de mouvements, leur impact sur lintention artistique du chorégraphe ainsi que leur capacité de témoigner dun état de présence “autre”, dans le sens plus réceptif à son environnement, plus précis et conscient de ses actes. Pareil aux systèmes dintelligence distribuée, les danses somatiques laissent parler le corps et les émotions à travers les senses. La façon dont ces sens interagissent avec l'environnement permet au corps d'être plus présent/aware et précis dans ses intéractions. Les paradigmes liés à lintelligence sensorielle nous poussent à penser différemment la relation entre corps et esprit, avant de la léguer aux robots. Des nouveaux concepts tels que ``schéma corporel/ body schema” ou “cognition incarnée/ embodied cognition” complexifient notre savoir et la mécanique de nos intentions. Cela nous permet daffiner notre capacité d'auto-réflexion, dinterroger notre savoir empirique direct, en utilisant la danse comme objet détude.
Dans notre recherche-création nous souhaitons évaluer le rôle de la conscience de mouvement- définie ici comme kinesthésie en lien avec la proprioception et lintroception- en interaction de danse avec des robots. Notre intention est de savoir si une connaissance approximative de ce type, gouvernée par des lois sensorielles éloignées de calculs mentaux conscients, trouve un fonctionnement analogue dans un organisme artificiel et dans quelle mesure cela le rend plus réceptif à des interactions avec des humains. Dans notre contexte artistique, nous considérons ce type dintelligence sensorielle en parallèle avec des notions telles le lâcher-prise et la capacité dimprovisation des humains. Ainsi la proprioception nous permet de cartographier notre environnement sans aucun calcul mental préalable, tandis que lintroception où nos sens sont aiguillés, moins parasités par les processus mentaux en arrière-plan, clarifient la perception que nous avons de nous-mêmes et notre organisation interne, nous rendant plus disponibles à des interactions avec notre environnement.
Nous nous interrogeons à notre tour sur le type de conscience corporelle que nous pouvons déléguer aux robots lors des improvisations en danse. En espérant que ce type de réflexion suscitera un intérêt de la part de la communauté scientifique, nous mettons en place des sessions d'expérimentation avec différents dispositifs automatisés, pour comprendre leur impact sur les mouvements spontanés et la façon dont le corps humain réagit en situation d'improvisation avec un tel dispositif. Ainsi modéliser des états inspirés par la conscience du mouvement pour les transmettre aux robots, nous aidera à mieux comprendre si la danse avec les robots est influencée par les caractéristiques des robots tels que la taille ou la forme, le rythme et la nature des mouvements. De façon connexe, cela pourra donner suite à des études plus complexes sur lintelligence sensorielle humaine et son équivalent artificiel.
H2 Est-ce que l'interaction avec les robots engendre des états créatifs?
Est-ce que leur corps est performatif? Sont les émotions un concept clé pour le développement de la performativité?
Un des objectifs de cette thèse est d'investiguer les facteurs qui déclenchent la créativité en état d'improvisation avec des robots. Nous partons du postulat que létat de créativité est influencé par des processus émotionnels et que leur modélisation dans des systèmes autonomes type robots nécessite un travail préalable de mise en situation, similaire à la mise en scène.
La présence des robots sur un plateau de théâtre suscite beaucoup de curiosité parmi les spectateurs. Les émotions que les acteurs ou performeurs éprouvent sont peu partagées par leurs compagnons artificiels. Dans nos expérimentations, nous nous interrogeons sur les possibilités d'expression des robots, pour comprendre comment la créativité peut émerger dans des situations d'interaction entre humains et non-humains.
Depuis quelques décennies, les interactions multimodales des robots ont beaucoup été étudiées par la communauté scientifique (citer). Cependant, à ce jour les robots sont peu capables dutiliser leurs six sens simultanément comme les humains le font. Ainsi leur capacité dinteragir et simuler des émotions est une modélisation réduite des processus de cognition et de perception humaine. Lors de nos expérimentations nous nous demandons si en situation d'interaction avec un partenaire non-humain, l'artiste réagit différemment par rapport à un partenaire humain. Nous questionnons la présence de dispositifs robotisés hors de leur contexte scientifique (que cela soit social, académique ou industriel) pour évaluer leur potentiel esthétique sur scène. Du point de vue de la réception de ce type dœuvre artistique, nous nous intéresserons à l'effet de ces formes sur la perception du spectateur: quest ce quil a retenu du type d'interaction quil a vu, quels sont les éléments déclencheurs et auxquels niveau ils opèrent.
Les danses influencées par des pratiques somatiques considèrent le vécu du corps et les émotions comme des concepts clé pour le développement de la performativité. En tant que danseuse, jaimerais comprendre comment provoquer des états “autres” définis par des mouvements spontanés/involontaires lors de l'improvisation avec un robot humanoïde ou industriel. En confrontant le spectateur à ce type d'expérience, je cherche à produire une coupure dans la linéarité de son vécu pour y associer plusieurs clés d'interprétation.
Lors de sessions d'improvisation, je me demande comment définir la créativité dans ce type d'interaction. Peut-être que le robot, vu comme partenaire et pas comme outil, a influencé mon inspiration plus quun partenaire humain laurait fait. Il y a probablement plusieurs critères à tenir en compte pour définir le cadre de notre interaction et son effet réel, au-delà de mon expérience immédiate sur scène.
Tout dabord je minterroge sur l'apparence de celui-ci - si humanoid ou non, ainsi que sa taille et façon de se déplacer. Lors de mon séjour au LIRMM jai eu lopportunité d' improviser avec le robot humanoïde HRP-4 et le bras industriel Franka Panda. Lors de ces “tentatives” de danse en laboratoire avec chacun dentre eux, jai pu constater dans quelle mesure ces facteurs ont un impact sur ma créativité et disponibilité d'improvisation. Lorsque le robot Panda a effectué des mouvements différents de celles propres à ma morphologie, mon imagination sest prêté à un jeu de dépersonnalisation. Jai pu mimaginer une autre physicalité à mon tour, avec des gestes méconnus qui résonnaient plus avec ce que la machine devant moi éprouvait, quavec ce que je sentais. Lors d'une autre session de travail avec un petit animata en carton, jai pu réduire aussi la perception de mon propre corps pour ressentir des sensations nouvelles et midentifier à ce que lanimat devant moi me proposait dexplorer.
Mes observations traitent également de la différence entre une présence virtuelle et une présence physique des robots. Lorsque jai effectué les mêmes séquences de mouvement avec les avatars virtuels des robots, quelque chose de lordre dune image en mouvement sest figé, ouvrant un espace de rêverie et de liberté de proposition. En échange, la présence physique des robots sest imposée en moi comme un corps autre- quelque chose détrange et dinconnu que jai voulu dabord connaitre avant de pouvoir danser avec.
Les différentes incorporations mont aussi fait comprendre dans quelle mesure lanthropomorphisme joue un rôle important dans la projection des narrations entre les deux partenaires: humain et non-humain. En effet, leur façon de bouger similaire à la mienne ma permis dempathiser plus vite. Ainsi nous avons mis en place des études qui questionnent comment lanthropomorphisme encourage une fluidité dans l interaction homme-robot et par quoi est facilité un processus créatif, une fois quil est mis en place.
H3 Comment serait-il possible de définir et mesurer un état de conscience dans les artefacts ? Existe-t-il un état sauvage propre aux robots ?
Les artistes dialoguent avec des machines sur scène pour créer une expérience perceptive et sensorielle pour eux et pour les spectateurs. Pour certains chercheurs (citation), l'intelligence humaine dépend du corps et du mouvement et la capacité de retour sensori-motrice d'un système peut déterminer son degré d'intelligence. En se proposant de mettre en place des études similaires sur scène, cette thèse analyse plusieurs formes dinteraction artistique avec les robots. Notre intention est de vérifier comment le robot imite le comportement humain et comment, à travers des contraintes mécaniques et des erreurs de hardware, il simule dexpériences perceptives propres. A leur tour, ces expériences font émerger des nouvelles formes dexpressivité dans son partenaire humain. Nous estimons que ces formes d'expressivité concernant les robots-mêmes, permettent à lhumain d'identifier dans leur comportement quelque chose proche d'un état sauvage, difficile à anticiper ou à décrypter.
Pareil aux spécialistes en éthologie qui observent le fonctionnement des animaux sauvages, nous nous interrogeons sur la façon dont l'intelligence propre à la machine est saisie par l'humain. Lobjectif de ces analyses est de comprendre jusquau où l'humain sadapte aux robots, en testant des séquences de mouvement conçues pour mettre à l'épreuve l'autonomie des systèmes interactifs intelligents. En effet, nous aimerions également comprendre comment utiliser l'aléatoire de ce type de comportement pour générer du spectaculaire sur le plateau. Une de nos perspectives, est d'implémenter des mouvements réflexes dans des robot humanoïde et dimproviser avec -suivant des principes déducation somatique en lien avec “la conscience du mouvement”- pour ensuite analyser limpact de cette interaction sur lexpressivité artistique des performeurs humains. Au sens plus large, nous aimerions comprendre en quoi les mouvements réflexes et les comportements imprévus influencent notre perception et notre état conscient lorsque nous dansons. Ces observations appuient l'hypothèse que notre expressivité corporelle se transforme par des états de lâcher prise et constitueront des bases pour un vocabulaire scénique inédit, construit sur mesure.

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\part{Titre partie}
\part{Contexte thèorique: La danse pour raconter le corps}
\chapter*{Introduction}
\chapter*{Pratiques somatiques et quête de lintelligence sensorielle}
\addcontentsline{toc}{chapter}{Introduction}
Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. Sed eget erat tortor. Mauris iaculis congue nibh ac sollicitudin. Aliquam aliquam velit eu aliquet tincidunt. Vestibulum lacus ipsum, feugiat at feugiat id, auctor quis nisl. Maecenas ultricies sagittis convallis. Curabitur at velit ut odio condimentum fringilla. Ut consequat eget arcu vitae pharetra. Pellentesque quam quam, luctus at ipsum non, accumsan ultrices ipsum. Integer dictum, leo et ornare viverra, enim massa tristique est, aliquam porta odio arcu non lectus. Maecenas posuere, ante sed congue blandit, nisi quam aliquet enim, in vehicula eros metus vitae quam. Nam lacinia malesuada lorem, at mattis risus mattis interdum. Nullam ac sapien nec quam ultrices dictum vitae eu erat. Curabitur a leo a lorem mollis volutpat. Duis volutpat porta nulla in convallis. Mauris sed accumsan nisl, ac efficitur nisl.
Les critiques et philosophes spécialistes en danse ont longuement analysé lémergence du geste dansé, selon le contexte socio-culturel et lépoque quand cela a eu lieu. Pour ce quil y a de la danse contemporaine, la pratique de limprovisation, vue comme geste libre et libérée du dogmatisme de la technique du danseur, a suscité une révolution longuement attendue. Comme le remarque Anne Boissiére dans son livre “Approche philosophique du geste dansé”, ce geste semble “sinventer par lui-même, sans aucune origine ni intention immédiate autre que celle de se manifester”. Un geste qui na pas eu besoin des explications pour s'auto suffire:
La danse dans sa nouveauté et sa vie propre, confronte la pensée esthétique à ses propres limites; elle nest pas seulement un art du geste mais un art qui fait geste, contre les risques denlisement dune pensée esthétique trop sure delle meme. L'émancipation de la danse vis-à-vis des autres arts oblige à reconsidérer la définition de lart dans sa dimension multiple, c'est-à dire le rapport moderne qui lie lart à ses genres.(...) La question de limprovisation apparaît centrale pour penser le geste dansé, dans la mesure où celui-ci, dans sa liberté, semble ne plus devoir emprunter à un quelconque modèle mais procéder de soi, dans une impulsion et un dynamisme internes affranchis de tout point dappui, de toute extériorité. Limprovisation nest plus une variation sur des schémas préexistants, elle a une valeur constituante. Elle tisse une forme en acte à laquelle rien ne préexiste, une forme sinventant à partir delle-même, dans une sorte de point zéro ou de commencement absolu qui lui donne son évidence et sa pureté. Il y a, à lorigine du mouvement libre, une opération de réduction qui nest pas sans relation avec ce quil faut bien appeler le miracle de la danse que nous voyons opérer sous nos yeux. Quel est ce néant, ce vide, qui est au travail de façon invisible et manifeste dans la danse ?
\chapter{Titre du chapitre} \label{chap:tire-chapitre}
\section*{Introduction}
\chapter{Pratiques somatiques et quête de lintelligence sensorielle
} \label{chap:tire-chapitre}
\section*{Les multiples facettes des pratiques somatiques}
Selon Jeremy Damian, cette discipline est née en 1976, lorsque Hanna fonde la revue “Somatics Magazine -Journal of the Bodily Arts and Sciences” dont le thématique soriente autour des études sur le corps expérientiel et ses expériences personnels -(ie. the study of the body through the personnel experiential perspective):
“Dune manière générale, les recherches sur le corps sont souvent prisonnières dune alternative infernale entre une tentation dinspiration phénoménologique et une tentation sémiotique : le corps comme expérience et le corps comme signe. Lanthropologue Thomas J. Csordas déclare vouloir établir une synthèse de ces deux approches. Il réalise bien plus que cela en portant son attention sur ce quil nomme les « modes somatiques dattention » (somatic modes of attention), quil définit comme des « manières culturellement élaborées dêtre présent à et avec son corps (ways of attending to and with ones body) dans des environnements qui incluent la présence “embodied” dautres ». Son originalité vient de son insistance à rendre compte de lélaboration culturelle dengagements sensoriels portant à la fois sur une personne, un corps et son environnement, ou un « milieu intersubjectif », en ajoutant à ces descriptions une perspective somatique qui ouvre une autre « image » du corps que celle que renvoie le miroir.”
Dans sa thèse, Violetta Salvatierra rappelle le contexte dapparition de léducation somatique en France: “Elle arrive ainsi en France des États-Unis, en passant par le Québec, importée par des praticien·nes de la méthode Feldenkrais. Hanna essaye de forger à travers celle-ci une définition du corps, opérante dans ces pratiques, qui serait en rupture épistémologique avec la conception dualiste du corps/esprit et distincte ainsi du corps objectivable de la médecine (body) ; appréhendé dans sa dimension holistique et systémique, et attaché au corps vécu à la première personne, le terme « soma », dans la définition de Thomas Hanna, fait référence au « corps perçu de l'intérieur » et « la somatique » est définie comme « l'art et la science des processus d'intéraction synergétique entre la conscience, le fonctionnement biologique et l'environnement ». Par la suite, d'autres théoricien·nes ont proposé d'autres termes et notions pour désigner le champ d'expériences mobilisé par ces pratiques, tels que la « soma-esthétique »,proposé par le philosophe Richard Shusterman, dont les travaux dans le domaine se révèlent fort normatifs”.
Selon la chercheuse Laurence JAY, il y a une certaine écologie dans les pratiques somatiques. Sadressent au corps sujet dans une approche psycho-phénoménologique, elles conviennent au contexte spécifique dune personne, en encourageant une forte affirmation de sa subjectivité. Le corps est identifié par des caractéristiques communes avec le domaine du vivant, donc en homéostasie, pour assurer une survie permanente: “Il est pensé comme un tout. Il ne sagit pas dun amas de parties disjointes, mais dun système organisé de façon dynamique et en équilibre complexe, interdépendant dans chaque mouvement, chaque fonction, chaque échange dénergie et dinformation. Il ne sagit pas dune vision mécaniste qui sépare le haut et le bas, la matière et le processus, le soi et les autres, le soi et lenvironnement, la pensée et les émotions. Cest une pensée systémique, un point de vue corps-sujet-monde. Ce point de vue rejoint les théories écologiques et systémiques et permet dimaginer une écologie corporelle, en actes.”
Pour mieux expliquer la dynamique qui opère entre la danse et les pratiques somatiques, nous nous interrogeons sur la façon dont ces techniques structurent la corporéité lorsquelles sont employés comme exercices d'échauffement et entraînement. Lorsquun danseur apprend une technique de danse, son corps est capable de reproduire les mouvements et de se mouvoir selon les contraintes de cette technique. Lorsqu'il sapproprie une pratique somatique, cela est plus difficile à prouver, le danseur nayant pas dautre preuve à son appui que les traces de cette expérience à lintérieur de son propre corps. Ainsi lintériorité et l'expérience sensible du danseur deviennent un outil dans l'expérience kinesthésique:
Si toute technique de danse5 est affaire dun programme systématique dinstructions, venant façonner le corps perçu à limage dun corps idéal, via la médiation dun corps démonstratif (Foster, 1992) ; si les injonctions à faire et à sentir, et corrélativement, les actions et les perceptions produites (Cazemajou, 2013), relatent implicitement un modèle déterminé de corporéité ; peut-on dire la même chose pour les somatiques ?
Lors des stages et ateliers de professionnalisation, jai eu l'occasion de me former et d'acquérir des compétences orientées autour de ma propre intériorité. Mais l'expérience de mon corps et son vécu est difficilement traduisible pour les autres. Pour mieux témoigner de cet état le philosophe Bruno Latour explicite dans son essai “How to talk about the body” ce quil entend par le fait d'avoir un corps:
“To have a body is to learn to be affected, meaning effectuated, moved, put into motion by other entities, humans or non-humans. If you are not engaged in this learning you become insensitive, dumb, you drop dead. Equipped with such a patho-logical definition of the body, one is not obliged to define an essence, a substance (what the body is by nature), but rather, I will argue, an interface that becomes more and more describable as it learns to be affected by more and more elements. The body is thus not a provisional residence of something superior an immortal soul, the universal or thought but what leaves a dynamic trajectory by which we learn to register and become sensitive to what the world is made of. Such is the great virtue of this definition: there is no sense in defining the body directly, but only in rendering the body sensitive
to what these other elements are. By focusing on the body, one is immediately or rather, mediately directed to what the body has become aware of.”
Pour revenir au terme de somatique, du grec “soma” (corps ressenti, vécu de l'intérieur) et faire la distinction entre ses différentes approches, je mappuie également sur les observations dIsabelle Ginot qui dans son livre “Penser les somatiques avec Feldenkrais” mentionne la motivation du chercheur Thomas Hanna de réunir sous le terme générique de somatiques une panoplie de pratiques afin de souligner leurs principes communs: “une conception holistique du sujet (où corps, pensée, affects, émotions sont indissociables), un instrumentarium savant de techniques gestuelles, manuelles et tactiles, une place centrale accordée à lexpérience subjective via un travail approfondi sur la perception en général, et en particulier sur le sens kinesthésique (celui qui nous permet de savoir dans quelle position nous sommes, si nous sommes stables ou en train de bouger, quelle est la position de nos membres même si nous ne les voyons pas…). Au-delà de ces principes communs, ces techniques sont multiples, elles puisent dans des croyances et des savoirs divers selon leur époque, et surtout, elles inventent et diffusent des imaginaires du corps et des gestes bien différents les uns des autres.”
Plus loin, Ginot propose une classification selon les critères de lanalyste du mouvement Hubert Godard orientés autour de l'expérience collective ou individuelle.
Souvent dans les séances collectives, le praticien propose des explorations sans illustrer le mouvement, afin que chacun puisse explorer sa propre sensibilité esthétique et contraintes physiologiques. Lors des séances individuelles, le praticien propose un guidage à partir du toucher, parfois guidant par la parole une prise de conscience de son sujet. Celui-ci observe les effets du relâchement des blocages musculaires sur ses gestes, les variations de son propre poids selon les changements de posture et découvre grâce à des représentations internes, des parties auparavant méconnues de lui-même appelés par Godard “des zones organiques profondes”:
“Certaines travaillent à partir dune cartographie des tissus et de leurs caractéristiques biologiques — fascias, muscles, peau, os, viscères — et pensent le changement du geste et de la posture primordialement à partir des changements conduits dans ces tissus ; dautres, telle la méthode Feldenkrais qui nous intéressera ici, sappuient avant tout sur la construction des coordinations, soit la façon dont chacun de nous a appris (et peut réapprendre) à composer ses gestes dans lespace et le temps jusquà ce que ce répertoire de nouvelles habitudes gestuelles compose la texture même de sa vie, et garde la plasticité nécessaire pour des changements ultérieurs. Dautres encore privilégient le travail sur la perception… Elles se pratiquent en séances collectives ou individuelles, passent très souvent par un travail sur le toucher (un des nombreux tabous concernant le corps en Occident), se définissent soit comme « éducatives » soit comme « thérapeutiques », ou encore les deux à la fois.”
Depuis 2014, jai pratiqué plusieurs disciplines en lien avec la pensée du corps et lintelligence du mouvement. Nous définissons ici lintelligence du mouvement selon Jay pour laquelle il sagit principalement de “la faculté qua le corps à sentir, ressentir, réguler, équilibrer, décider, agir pour exprimer la vie qui lanime cest-à-dire le sujet. Lintelligence du mouvement habite le corps tout entier, pas seulement le cerveau. Le cerveau est informé et informe et lintelligence du mouvement dialogue avec la pensée. Nous avons appris à considérer notre corps comme une machine, à faire en sorte de le contrôler le plus efficacement possible, à le gérer comme un lieu dentrée sortie, à lespérer plus silencieux quexpressif, pour finalement somatiser lorsque notre corps exprime linexprimé.”
Concernant mes propres expériences kinesthésiques et le travail de « prise de conscience » du corps, ma motivation principale est le lâcher prise lors des moments d'improvisation. Les outils que jai retenus lors des sessions d'apprentissage servent principalement à affiner ma concentration et ma facilité de mouvement. La plupart des méthodes que jai pu expérimenter, visent l'utilisation dune quantité d'effort appropriée pour une activité particulière, libérant les tensions de mon corps pour avoir plus d'énergie à utiliser ailleurs. Bien que la communauté des pratiquants puisse parler des effets thérapeutiques de ces pratiques, il ne s'agit pas des traitements proprement parler, mais plutôt d'une volonté de rééducation de l'esprit et du corps en libérant des tensions et blocages.
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\section{Élements basiques}\label{sec:elements-basiques}
\subsection{B.M.C}\label{sec:elements-basiques}
En me rapprochant des pédagogies du corps orientés vers la recherche dun équilibre entre le système nerveux sympathique et le système nerveux parasympathique, j'ai découvert entre outre la méthode Body Mind Centering lors de sessions de training physique pour le théâtre du Soleil en tant quassistante décor pour leur spectacle MacBeth à la Cartoucherie de Vincennes. Avec d'autres stagiaires nous nous réunissons le matin pour pratiquer des exercices déveil corporel.
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La Body-Mind Centering a été créée à la fin des années 70 par Bonnie Bainbridge Cohen, danseuse, ergothérapeute et ancienne choréologue en notation Laban. Cette pratique oriente la perception vers un étude expérientielle de l'anatomie et de la physiologie du corps classés dans des systèmes. Cest à la fois une expérience cognitive de compréhension et une expérience phénoménologique de vécu et d'intégration expérientielle qui interroge les dynamiques psychophysique de la perception. Le développement du mouvement est étudié de point de vue ontogenetic ( du stade d'embryon au stade adulte) mais aussi de point de vue (en tant qu' évolution progressive des espèces dans le règne animal- la marche des amphibiens évolue en marche bipède des mammifères par exemple).
Cette pratique corporelle largement utilisée est appliqué non seulement dans la danse mais aussi dans de nombreux types de travail corporel, psychothérapie, yoga ou musique. Avant tout, BMC® est « une étude expérientielle basée sur l'incarnation et l'application de principes anatomiques, physiologiques, psychophysiques et développementaux multiples, utilisant le mouvement, le toucher, la voix et l'esprit » (Cohen 1993 : s.p.). Cette étude explore une prise de conscience dans les divers systèmes du corps- liquides, tissus, organes, squelette, sens, le système neuroendocrinien- pour orienter une action basée sur la perception.
Cohen exprime l'intérêt quelle porte au développement en tant que processus de travail mais aussi devenir du corps:
“Development is not a linear process but occurs in overlapping waves with each stage containing elements of all the others. Because each previous stage underlies and supports each successive stage, any skipping, interrupting, or failing to complete a stage of development can lead to alignment/ movement problems, imbalances within the body systems, and problems in perception, sequencing, organization, memory, creativity and communication. “
Dans son livre “Sensing, feeling and acting”, elle explique son intention de faciliter l'accès à “une connaissance nouvelle en provenance de soi” et ainsi résoudre la dichotomie corps-esprit. Cela est structuré autour de trois concepts-clé quelle appelle lalphabet de mouvement: “les réflexes primitifs en lien avec les mouvements spontanés et leur relation avec les mouvements intégrés, les réactions de redressement par rapport à la gravité et les réponses d'équilibration pour garder notre centre de masse en équilibre et rester débout”. Un quatrième concept intitulé Basic Neuro Cellular Patterns” synthétise ces derniers, en organisant une classification de modèles en lien avec le développement phylogenetic et ontogenetic du mouvement.
Il faut également préciser quen BMC le terme “somatique” est pensé en opposition avec celui de psychique, avec un fort intérêt pour les mouvements réflexes et la façon dont le système nerveux périphérique s'organise. Pour clarifier la distinction entre mouvement réflexe et mouvement réflexive, Cohen affirme:
“When a movement becomes reflexive, would you say that the experience goes from sensing to feeling? Yes it gets into the blood. I feel the reflexes have a lot to do with the blood, with emotional expressions”.
De plus, la qualité de mouvement de chaque individu est influencée par la manière dont le mental se manifeste dans le corps lorsquil bouge. Un alignement harmonieux entre différents systèmes se fait par un ajustement perpétuel entre action et cognition. Les supports d'exploration en BMC sont constitués de nos sens mais aussi de notre imagination: mouvement, toucher, voix et état d'esprit, nouvelles organisations du corps dans sa dynamique et dans sa posture, tissus, cellules et organes du corps. Parmi ces systèmes, nous mentionnons le système squelettique- structure de soutien qui répartit notre poids sur la terre, en lien avec la gravité.
Le système des organes est pour la communauté BMC plutôt connecté à nos émotions et à notre façon de les exprimer. Le système endocrinien est vu comme métaphore de notre intuition et s'exprime dans nos moments forts tandis que le système de muscles exprime notre vitalité et notre puissance. Le système nerveux à son tour est un support de la mémoire de nos expériences et perceptions. Lorsque le mental incorpore cette structure, il facilite l'apprentissage de nouvelles expériences basées sur lintuition et la créativité.
Pour les praticiens BMC, lorsqu'un système est sur-stimulé ou déséquilibré, il peut devenir la source de blessures, de maladies ou de détresse émotionnelle et psychologique. Pour équilibrer cela, l'imaginaire biologique du BMC stimule une prise en conscience du fonctionnement du corps pour les personnes qui se font guidées durant ces sessions. Cependant, comme le décrit lanthropologue Jeremy Damien dans sa thèse, lors de son expérience BMC en danse amateur avec le collectif les Zélées, les danseurs ont du mal à se représenter et entrer en relation avec certains systèmes. Le système lymphatique avec les attributs désignés par les praticiens tels la clarté et la finesse induit en erreur les danseurs, au point où lauteur se demande si cela relève dune réalité du corps ou plutôt dune métaphore à intégrer de façon subjective. Nous remarquons ici encore une fois des ambiguïtés en lien avec des concepts pluridisciplinaires. La signification du mot “lymphe” dans le domaine de la médecine nest pas la même lors dun atelier de danse. Au-delà de la pré-supposée dimension thérapeutique de certaines pratiques, que Damien rapproche, en tant quanthropologue, à des rituels et formes dauto-suggestion collectives, nous nous intéressons aux effets de ces pratiques sur limagination des danseurs et leur capacité de produire des mouvements nouveaux. Pour citer Cohen : “when we are talking about blood or lymph or any physical substances, we are not only talking about substances but about states of consciousness and processes inherent within them. We are relating our experiences to these maps, but the maps are not the experience”.
Pour porter cette réflexion plus loin, Carla Bottiglieri cite à son tour la philosophe et chorégraphe allemande Petra Sabisch pour qui : « le mouvement est porté par une sorte de conjecture : il est lexpression exacte de lindétermination de la relation entre sensation et imagination. Sans cette inspiration spéculative dans le jeu co-immanent entre le fond kinesthésique et les procédures imaginatives de production de limage, il ny aurait pas de spécifications par rapport aux qualités du mouvement. La relation indéterminée entre sensation et imagination devient un rapport singulier : elle produit une différence dans la qualité du mouvement, sans pour autant épuiser la virtualité de leur relation .»
Entrer dans cette dimension imaginaire implique la sollicitation de notre sens de la proprioception. Cela part de l'hypothèse que chaque tissu de notre corps a sa propre vibration et résonance. La qualité du toucher dans BMC est ainsi basée sur la compréhension expérientielle de ces données. En parallèle, les praticiens peuvent prendre conscience d'une partie du corps en étudiant des images, des textes ou des livres d'anatomie pour mieux la visualiser. Ainsi la manière dexploration la plus directe en BMC est un mélange entre le toucher et la visualisation des parties du corps pour arriver à un état de somatisation. Cet état est défini ici comme une prise de conscience directe des sensations, ressentis et perceptions qui se dégagent de la partie du corps sur laquelle nous nous focalisons. Lors de cette étape de somatisation en BMC, un échange d'informations bidirectionnel a lieu entre les cellules du corps et le cerveau. Comme le toucher et le mouvement sont parmi les premiers sens que nous expérimentons lors de notre naissance cela renvoie à des sensations plus anciennes de notre corps et aussi des processus de re-mémorisation.
Un autre concept employé par cette méthode est le centrage, décrit la Carla Bottiglieri de la façon suivante:
Dautre part, lopération de centrage renvoie métaphoriquement aux gestes manuels du potier, qui tourne largile autour du vide, pour donner forme à un vase. Moulage ou modulation 17 ? Le centrage, écrit Cohen, nest ni la recherche daboutissement dune forme, ni un lieu darrivée, mais un « équilibre dynamique qui fluctue autour dun point en déplacement constant » 18 . Il peut ainsi sinitier en nimporte quel point, se propager vers nimporte quelle direction : plusieurs centres, donc, comme autant de foyers possibles damorce et damplification. Jajouterai que ce mouvement est le processus continu dune relation où les termes séchangent, ou se permutent : body et mind ne relèvent pas de deux ontologies distinctes, bien plutôt, ils instancient deux bordures, ou deux faces dune limite topologique où formes et forces saffectent mutuellement, se répètent et se différent, adviennent les unes aux autres, deviennent.
Comme cette technique est en constant renouvellement et amélioration, dernièrement un autre concept-clé a été développé, qui est celui de la conscience et de lembodiment cellulaire - “ a state in which all cells have equal opportunity for expression, receptivity and cooperation. Attuning ourselves to our cellular consciousness brings us to a state in which we can find the ground from which flows the intricate manifestations of our physical, physiological and spiritual being.” Cependant Cohen ne mentionne pas ses applications en danse et la filiation avec le travail de la chorégraphe américaine Deborah Hay que nous allons mentionner plus loin. Si pour Cohen “cellular consciousness is awakening the cells to themselves, which the brain cannot do.” pour Hay cela relève dun état méditatif pour convoquer des états de présence que nous allons discuter plus tard dans notre étude.
Faire l'expérience de ma propre anatomie et de son propre fonctionnement psychologique, a augmenté mon sentiment didentité artistique. Dans mon propre laboratoire expérimental sur la conscience corporelle jai eu loccasion daméliorer ma pratique et choisir ce qui mieux correspond à mes intentions, en interprétant à ma façon cette discipline kinesthésique de l'anatomie et aspects physiologiques de l'incarnation.
Ainsi jai utilisé le BMC® comme point de départ afin de développer une meilleure compréhension des sensations de mon corps et de l'action exprimée dans le mouvement et le toucher, pour activer une forme de conscience propre à chaque endroit et ainsi faire émerger une danse spontanée, propre à son vécu.
\subsection{Feldenkreis}\label{sec:elements-basiques}
De cette manière, jai découvert la méthode Feldenkrais lors des cours hebdomadaires à luniversité Sorbonne Nouvelle. Cette méthode mise en place par Moshé Feldenkrais revisite le mouvement des articulations de chaque corps, laissant à chacun la possibilité dêtre plus autonome et confiant lorsquil bouge à sa façon. Elle permet de se focaliser sur les sensations internes pour voir comment exécuter des mouvements plus facilement, en comprenant la quantité d'efforts nécessaires pour exécuter un mouvement de façon efficace. Elle visa à restaurer la capacité à bouger lors des accidents et à reprendre des habitudes de mouvement naturelles. En remarquant son propre mouvement, chaque participant a la possibilité d'être plus autonome et en confiance lors de ses déplacements dans lespace. Les cours Feldenkrais sont connus sous le nom de cours de prise de conscience par le mouvement. Semblables aux pratiques corporelles type Tai Chi, elles utilisent des mouvements lents pour faciliter la concentration du pratiquant sur des effets de maîtrise de sa force ou sa flexibilité.
La chercheuse Sylvie Frotin mentionne comment cette pratique contribue au processus de subjectivation en valorisant le corps-sujet plutôt que le corps-objet. En invitant, par exemple, une personne «à déterminer la position optimale pour exécuter un mouvement en sappuyant sur son ressenti plutôt que sur des standards esthétiques arbitraires » 3 . Différents exercices basés sur la perception du corps en mouvement (et la conscience de la respiration 4 ) permettent aux participant.e.s de prendre conscience de leurs habitudes corporelles. « Lapprentissage consiste à éveiller les zones danesthésie sensorielle et à élargir les types de sensation possible».
Ainsi la méthode Feldenkrais aide à coordonner différentes parties du corps ensemble, encourageant l'expression des ressentis et des émotions pour une intégration holistique du corps et de l'esprit. Conscience du mouvement et conscience de la respiration vont ensemble, dans lapproche défendue par cette pratique somatique :
« Léducateur somatique adhère à lidée quune fonction sensori-motrice entravée affecte lensemble de la personne. Réciproquement, toute amélioration dune fonction améliorera éventuellement lentièreté de la personne. Par exemple, face à une personne présentant une respiration déficiente, le professeur pourra donc proposer diverses activités de mouvements pour que la personne chemine vers un mouvement diaphragmatique ample et pleinement fonctionnel, puisquil sait quun diaphragme apaisé est accompagné de cognitions moins anxiogènes. (…) Ressentir sa solidité osseuse, ressentir une expansion de sa respiration, sentir son regard souvrir, pour ne citer que ces quelques exemples, sont la manifestation physique dune confiance en soi ou, inversement pourrions-nous dire, la confiance en soi est la manifestation psychologique dune solidité osseuse, dune expansion de sa respiration ou dun regard ouvert » .
Les positions utilisées dans Feldenkrais telles que la pose au sol, visent à réduire leffet de la gravité sur le corps. Cela encourage la hanche à s'ouvrir pour faciliter des actions comme la marche et la course et améliore la mobilité des mouvements et aide à soulager les tensions et les tensions sur les articulations.
Ce sont des exercices collectifs structurés autour dun thème, dont lobjectif est davoir une prise de conscience sur son propre mouvement. Autre que les instructions de position et de mouvement, le praticien donne des indications perceptives ( sur quoi concentrer son attention) et conceptuelles (pourquoi cette méthode ne sillustre pas, pourquoi on cherche le moindre effort). Les exercices du recueil “Awareness Through Movement (PCM)” peuvent etre liés aux travaux de F. Varela sur l'autopoïèse.
Dans son article “Que faisons nous et à quoi ça sert” Isabelle Ginot témoigne des changements qui opèrent dans le corps et la manière de les évaluer. Plus loin nous allons discuter le lien de ces pratiques au concept émergeant “dimage de son corps” et schéma corporel:
À la fin dune séance de Prise de conscience par le mouvement, lexpérience la plus courante est celle dun changement très sensible dans la perception de la posture debout (des appuis, de lalignement, de la hauteur, de lespace autour…)et de la marche ou de divers mouvements quotidiens proposés à lexploration en guise de conclusion de la séance. Ce changement peut être ressenti plus ou moins durablement, et sa perception peut être en partie consciente et spécifique (par exemple « mon poids est plus égal entre les deux pieds ») et en partie confuse (« je me sens différent/e »)(...)Si ce changement persiste dans la durée, il deviendra « plus habituel » ou, selon lexpression de Feldenkrais, intégré. Ce qui signifiera que mon poids sera désormais plus au centre de mes deux pieds quauparavant, mais que je ne le remarquerai plus. La nouvelle organisation gravitaire sera devenue « pré-noétique », elle aura intégré le schéma corporel.
\subsection{Viewpoints}\label{sec:elements-basiques}
Une autre méthode que jai intégrée dans mon approche expérimentale d'entraînement est la technique ViewPoints.
Approche structurelle du processus de composition et de mise en scène, Viewpoints est issue dune méthode inventée par lartiste de théâtre Mary Overlie dans les années 70. Son objectif est de stimuler la créativité et linspiration en utilisant des points de vue pour focaliser la concentration et ordonner la façon de travailler. Cette méthode a été ensuite adaptée par les metteuses en scène Anne Bogart et Tina Landau autour de neuf points de vue "physiques" et de 5 points de vue "vocaux". L'apprentissage de cette méthode sest fait à travers des sessions d'expérimentations pratiques avec le collectif de metteurs en scène Open Source. En tant quoutil de mise en scène, le ViewPoints revisite la hiérarchie traditionnelle entre metteur en scène et acteurs. Les acteurs sont considérés comme des participants actifs dans la création globale du spectacle. Leur attention est focalisée sur différents éléments de la performance (tempo, durée, geste, relation spatiale). Cela part de la supposition que sils sont ouverts à leur environnement scénique, cherchant à convoquer leur instinct sur le plateau, ils peuvent créer un mouvement et une composition scéniques dynamique. Dans une intervention lors dune conférence sur cette technique, une de ses fondatrices, Anne Bogart affirme : « Dans le travail de Viewpoints, rien n'est inventé tout est une réponse.»
Pour aller plus loin, ce qui m'intéresse dans cette technique est son rapport à la danse, définie au sens large de mouvement : “What is dance? they asked. If an elephant swings its trunk, is it dance? If a person walks across the stage, is that dance?” Parmi les principes employés, la réponse kinesthésique est un type de mouvement selon lequel un geste spontané surgit en réponse à lenvironnement extérieur- par exemple, parfois nous nous levons instantanément quand quelquun ouvre une porte ou nous grattons la tête si quelquun nous pose une question difficile. Ce principe permet danalyser le geste selon deux critères : - gestes comportementaux (ceux que nous employons dans notre vie quotidienne, qui font écho à des situations de vie) et gestes expressifs (ceux qui expriment une émotion et répondent à des besoins dabstractisation). Appliquer ces observations au fonctionnement dune machine, ma permis de voir si des gestes expressifs peuvent lui être propres ou pas.
Entre philosophie pratique du travail, approche d'entraînement ou technique dimprovisation, Viewpoints propose une discipline du corps dans l'espace et le temps. Les éléments tangibles - points de vue- selon lesquels les participants concentrent leur attention fournissent un ensemble de tâches pour libérer l'imagination. Souvent la logique systématique de cette approche aide les praticiens à remettre en question leur perception et s' investir dans une pratique créative qui exige action et exploration, et à déconstruire, réorganiser et reconstruire des partitions et des séquences dans la poursuite d'un théâtre viscéral et visuel.
Larticle (citer Dennis) rend compte des expériences des étudiants en danse qui utilisent cette méthode. L'auteur interroge les exigences de l'apprentissage incarné du mouvement à partir de multiples positions dun sujet - observateur / participant / créateur / réflecteur / acteur.
\subsection{Buto}\label{sec:elements-basiques}
Une autre type dexploration sensorielle que jai eu loccasion de découvrir est la danse Buto, lors de mes stages avec Atsushi Takenouchi entre 2013 et 2015. Cette pratique vue comme un style de danse japonaise d'avant-garde mais aussi comme un mode de vie, diffère à la fois de la danse traditionnelle japonaise et de la danse occidentale moderne. Créé par Tatsumi Hijikata et Kazuo Ohno probablement en réaction aux événements de la Seconde Guerre mondiale, afin dexplorer des thèmes tabous, cette danse convoque des images grotesques avec des mouvements corporels parfois lents, parfois compulsifs toujours en lien avec le soi. Katsugen Undo, une pratique développée par Haruchika Noguchi (1911 - 1976) - inventeur du concept thérapeutique Seitai- est une pratique complémentaire au butô. Katsugen Undo part du postulat que nous avons tendance à nous concentrer sur des énergies excessives qui inhibent nos systèmes d'autorégulation, altérant ainsi nos fonctions physiques, mentales et émotionnelles. Cette pratique est un exercice dynamique destiné à soulager le stress, à détoxifier le système et à amener les énergies du corps à un équilibre naturel et sain. Elle vise à y parvenir en laissant libre cours aux mouvements involontaires du système nerveux autonome, en soulageant le stress et en améliorant l'endurance et la flexibilité de l'organisme.
Ensuite début 2020 je suis allée en Israël pour expérimenter le Gaga Movement- dont la pédagogie encourage le lâcher prise et le bien être des danseurs. Mouvement de danse non-conventionnelle, cette pratique a été développée par le directeur artistique de la Batsheva Dance Company, Ohad Naharin qui lors dun accident au dos dans les années 90, s'est lancé dans un processus de recherche corporelle avec des personnes sans expérience en danse. Ces expérimentations ont donné place au laboratoire Gaga/people étant ensuite demandés comme training régulier par les danseurs de sa compagnie, donnant suite aux cycles Gaga/dancers. Selon le context, cette technique a plusieurs déclinaisons: training pour renforcer le corps et le préparer physiquement en termes de souplesse et d'endurance, échauffement avant des répétitions et outil dexploration pour cultiver sa créativité.
Dans son article, The Phenomenology of the Body Schema and Contemporary Dance Practice: The Example of “Gaga”, la chercheuse Anna Foultier décrit les modalités de travail des danseurs du 21e siècle, devenus entrepreneurs de leur propre corps et technicité:
En raison des tendances chorégraphiques et artistiques ainsi que de la difficulté croissante pour les danseurs d'obtenir des contrats plus longs, la danseuse est devenue une « entrepreneure » censée façonner sa formation, s'adapter à divers styles et pratiques chorégraphiques et souvent fournir du matériel de mouvement aux pièces avec lesquelles elle travaille. Que cela soit perçu comme libérant l'agence et l'autorité de la danseuse sur son travail ou comme un accommodement à un contexte sociétal marqué par le néolibéralisme où La qualité marchande est un impératif, le danseur contemporain a une approche éclectique où l'entraînement peut varier du ballet, moderne, jazz, capoeira, pilates ou yoga à la natation ou à la course. Dans le monde de la danse post-postmoderne, l'accent n'est plus mis sur le moulage du corps dans une certaine forme, comme dans le ballet classique, ou sur le démantèlement des habitudes afin de découvrir des modèles de mouvement naturels, comme dans la danse moderne, mais plutôt sur la déconstruction et le remodelage continus du corps.
Dans les cours de Gaga que jai pris, l'enseignant et les participants sont en constant mouvement. Les participants reçoivent plusieurs types d instructions: lever ses bras comme s'il y a un poids lourd sur le dos, les soulever et les laisser tomber en étant recouvert par du miel, sentir ses bras légers comme une plume, tomber au sol avec la même vitesse que les bras qui tombent, etc. L'objectif de Gaga est d'ouvrir de nouvelles possibilités d'exploration dans le corps et ainsi confronter les anciennes habitudes afin de développer la conscience du corps et l'écoute intérieure.
\subsection{Le Shaking comme outil de travail}\label{sec:elements-basiques}
Le Shaking vu ici comme tremblement volontaire du corps est une pratique somatique que nous pouvons observer dans les animaux lorsquils secouent leur corps après un événement dangereux qui a sollicité leur instinct de survie. Les éthologues ont identifié trois mécanismes de défense comme formes de réaction immédiate chez les animaux: sen fuir, se battre ou se figer (fight, flee or freeze). La réponse “se figer” (freeze) est un mécanisme de survie qui protège lanimal en danger en inhibant et immobilisant son corps face à la douleur. Cest lexemple avec le bison entouré par des lions qui dévient tout dun coup mou et arrête de se débattre dans la bouche du crocodile, pour senfouir deux secondes après que les lions commencent à leur tour attaquer le crocodile pour disputer leur proie. Une fois inhibés, les mécanismes de défense produites par le corps, comme l'adrénaline, restent stockés à lintérieur et une fois le danger passé, les animaux vont secouer leur corps pour les libérer.
Jai décidé dutiliser et ensuite adapter cette technique lors de mes échauffements de danse car cette méthode na pas spécifiquement pour but de se concentrer sur soi et de ralentir le fil des pensées, mais plutôt de « libérer » le corps de ses tensions et privilégier le sentiment de lâcher-prise. Cette technique peut fonctionner particulièrement bien pour tous ceux et celles qui ont beaucoup de mal à rester sans bouger et à mettre leurs pensées en pause. Actuellement des thérapeutes utilisent des techniques de shaking pour réduire les effets du stress traumatique -PTSD.
Les exercices de libération des tensions aident le corps à accéder à des schémas musculaires profonds de stress et de tension, voire de traumatismes pour certains chercheurs (citer). Elles activent un mécanisme réflexe naturel de tremblement ou de vibration qui libère la tension musculaire, calmant le système nerveux. Lorsque ce mécanisme de secousses musculaires et vibrations est activé de façon volontaire, le corps est encouragé à revenir à un état d'équilibre
\subsection{Contexte}\label{sec:elements-basiques}
David Berceli, Ph.D. est auteur et praticien dans les domaines de la réduction du stress suite à des traumatismes. Psychologue et activiste humanitaire américain, il a travaillé en Extrême-Orient et en Afrique dans des zones de conflit à la fin des années 1990 et a remarqué à quel point les secousses étaient une réponse universelle au traumatisme. Ces expériences lont mené à la création d'un ensemble d'exercices de libération de tension et de traumatisme appelés Tension and Trauma Releasing Exercises(TRE). Il est l'auteur de trois livres qui ont depuis été traduits en 15 langues. Sa carrière universitaire comprend un diplôme en travail social (PhD), en travail social clinique (MA), en théologie (MA), en études du Moyen-Orient (MA). Lobjectif de sa thérapie est de calmer le système nerveux avec laide de ce qu'il défine comme Self Induced Therapeutic Tremors (SUTT) pour un état de détente et repos parasympathiques profond. Sa méthode est basée sur une approche neurophysiologique intégrative qui utilise l' homéostasie pour décharger de façon mécanique la tension physique du corps.
Selon des études (citer), pratiquer le « shaking » en tant que protocole de mouvement au moins entre 5 et 15 minutes à la fois, permettrait dactiver le système nerveux parasympathique, ce quindique au corps de se détendre. Cette communication directe entre nos muscles, nos membres et notre système nerveux central permet de relâcher certaines tensions, tout en activant un sens de présence dans le corps.
Un autre outil que Berceli combine avec sa technique est la méditation de la pleine conscience pour réguler les émotions en augmentant le lien avec le corps et sa sensorialité. La pleine conscience encourage l'acceptation plutôt que l'évitement des expériences traumatiques et diminue la rumination sur des événements passés ou futurs qui peuvent épuiser notre énergie. Une première étude pilote qui mesure le stress chez 21 professionnels de la santé en Afrique du Sud, avant et après une utilisation de la méthode TRE pendant 8 semaines, montre les effets de cette méthode citer.
\subsection{Exemple dexploration sensorielle avec du shaking inspiré par la technique TRE}\label{sec:elements-basiques}
Tout d'abord, je me familiarise avec la pièce où je suis et la surface sur laquelle mon corps sappuie, afin que mon système nerveux soit détendu et loin dun état dalerte. Je ferme les yeux et écoute les bruits autour de moi, du plus lointain au plus proche. Une fois ce type dexercice sensorial fini, je commence par faire quelques exercices préparatoires tels que des étirements type pilates pour fatiguer les muscles. Lobjectif est d'être moins en contrôle pour que les tremblements puissent venir plus facilement.
Ensuite je m'allonge sur le dos dans une pose papillon, la plante des pieds jointe, les genoux pliés sur le côté. Chaque deux minutes, je ramène mes genoux l'un vers l'autre et je maintiens. Bientôt, je sens l'intérieur des muscles de ma cuisse s'engager et il y a un léger tremblement- pour Berceli ce sont les shakes qui sortent. Au fur et à mesure que mes genoux sapprochent, les tremblements deviennent plus forts et je peux les sentir remonter le long de ma colonne vertébrale. Après dix minutes, alors que mes genoux sont maintenant presque collés l'un à lautre, les tremblements sont difficiles à ignorer- je vacille et me saccade presque comiquement.
Pour intégrer l'expérience je m'allonge sur le dos et prends quelques minutes pour me détendre avant de m'asseoir sur mes talons. Je prends quelques respirations, puis je réfléchis à mon ressenti et à comment intégrer cette expérimentation dans mes recherches corporelles.
\subsection{Renouvellement des approches chorégraphiques dans lhistoire de la danse }\label{sec:elements-basiques}
Dans son livre “Histoire de la danse” (1933) Curt Sachs parle de la danse comme le premier-né des arts: « La musique et la poésie s'écoulent dans le temps ; les arts plastiques et l'architecture modèlent l'espace. Mais la danse vit à la fois dans l'espace et le temps. Avant de confier ses émotions à la pierre, au verbe, au son, l'homme se sert de son propre corps pour organiser l'espace et pour rythmer le temps”. Pour prouver que la danse apporte une dimension sotériologique partout dans le monde et depuis toujours, il liste les danses à contre coups et les danses extatiques des peuples primitifs. Un siècle après ces observations, la dimension thérapeutique des danses reste toujours dactualité. Des méthodes déducation somatique développent autant de moyens pour dépasser nos dissonances cognitives et comprendre lintelligence du corps. Cependant il est important de souligner que dans notre contexte, ce qui nous intéresse est la façon dont ces méthodes ont pu accompagner les danseurs et praticiens en danse dans leur lintention de renouveler les formes dexpression de cet art.
Lhistoire de la danse moderne et son renouvellement de formes à partir du début du 20e siècle, commence avec l'américaine Loïe Fuller et sa « Danse serpentine », faite de spirales et de volutes de voiles. Égérie de l'avant-garde artistique de la Belle Epoque, elle libère le corps et met en place les bases de labstraction en danse. Complémentaire à cette approche est la démarche mise en place par François Delsarte (1811-1871) professeur de chant qui développe entre 1840 et 1870 une théorie de lexpression fondée sur des correspondances entre geste et émotion. Par le biais du dramaturge américain Steele Mackaye, inscrit à ses cours à Paris, les danseurs des Etats Unis vont prendre connaissance du système mis en place par Delsarte, donnant place à un mouvement appelé “delsartisme” d'après le nom de son inventeur. Linfluence de Delsartre va marquer tout une génération de danseurs modernes en Amérique tels Ruth Saint Denis (1879-1968) et Ted Shawn (1891-1972).
Quelques années plus tard cest le tour de lallemande Mary Wigmann de promouvoir la danse libre et de présenter sa « Danse de la Sorcière» ou « Hexentanz » en 1914. Selon Hubert Godard, il y avait dans sa démarche deux conceptions “une travaillant limaginaire, lautre le contraignant par une idéologie (le nazi), infléchissant lorganisation tonico-gravitaire qui anticipe et accompagne tout geste, toute attitude corporelle”
Ce courant international, initié entre autres par Isadora Duncan (1877-1927) influença de nombreux chorégraphes et marqua les débuts de la danse moderne. Le solo de danse de Wigman rompt avec la tradition classique par des gestes brusques, une posture au sol et des bras tendus. Avec l'accompagnement de percussions, son apparence de possédée convoque une dimension sensorielle de la danse, centrée sur une expérience de l'intimité et de connexion à soi. Tandis qu' à la même époque a Paris, lukrainien Vaslav Nijinski va plus loin dans le rapport a la sensorialité en simulant une masturbation pendant « L'après-midi dun faune». Quelque décennies plus tard, Martha Graham développe une pédagogie basée sur l'opposition entre contraction et libération, avec laide des cycles de respiration. Considérée comme fondatrice de la danse contemporaine, son travail a inspiré les générations de chorégraphes de fin de XXéme siècle. Toujours dans les années 1940, Merce Cunningham et John Cage ont développé un concept radicalement nouveau en préparant la musique et la danse indépendamment, au sein d'une même performance. Ainsi les mouvements des danseurs ne sont plus liés aux rythmes, à l'humeur et à la structure de la musique. Chaque forme d'art existe de façon autonome dans un espace et un temps partagés. Dans une autre partie du monde, cette fois le Japon, Tatsumi Hijikata (1928-1986) et Kazuo Ōno (1906-2010) development la danse de butō nourris par les avant-gardes artistiques européennes comme l'expressionnisme allemand et le surréalisme. Née dans les années 1960, cette danse marque une rupture avec les arts vivants traditionnels du nô et du kabuki, en sinspirant de bouddhisme et de croyances shintô. Les remous socio-politiques qui secouèrent le Japon à cette époque, notamment les événements tragiques d'Hiroshima et de Nagasaki de 1945, donnent forme à cette danse sensorielle basée sur lintrospection de ses protagonistes. Une autre figure incontournable de l'expression corporelle est Pina Bausch(1940-2009) danseuse et chorégraphe allemande. Fondatrice de la compagnie Tanztheater Wuppertal, elle rompt définitivement avec les formes de danse conventionnelles en introduisant le concept de danse-théâtre ou Tanztheater sur la scène allemande et internationale. Au début, des spectacles tel «Le Sacre du printemps» (1975) ont suscité de nombreuses critiques, avant de devenir une référence dans l'histoire de la danse postmoderne. Sur un sol recouvert de terre, danseurs et danseuses sopposent en se livrant à une lutte sauvage et poétique couverts de boue et de sueur. Cette lutte marque le sacrifice de lÉlue, comme dans le rituel paien du chef-dœuvre de Stravinsky. En allant jusqu'à l'épuisement, la danse se libère ainsi de son rapport à la représentation en développant de nouvelles normes esthétiques. Presque à la même époque, Carolyn Carlson, née le 7 mars 1943 à Oakland en Californie, danse pieds nus à l'Opéra Garnier à Paris et ouvre un laboratoire de recherche sur le mouvement en invitant des danseurs amateurs à rejoindre sa recherche. Tandis quAnne Teresa De Keersmaeker crée «Rosas danst Rosas » en 1983, pièce pour quatre danseuses et quatre mouvements, dont le titre donne le nom de sa compagnie. Lutilisation presque radicale de la musique de Steve Reich et Thierry De Mey, comme support premier de sa composition chorégraphique, ainsi que le recours aux motifs géométriques (cercles, courtes spirales, diagonales impeccables) comme base pour les mouvements, distinguent le travail de Keersmaeker des autres chorégraphes de sa génération. Le travail sur une chaise, la répétition et l'épuisement du corps sont également des éléments clés de sa démarche. Quelques années plus tard, au contrepoids entre l'Amérique et lIsraël, Ohad Naharin renouvelle avec les traditions et les chants traditionnels juifs. Dans «Echad Mi Yodea » (1990), des danseurs assis sur des chaises, en train de trembler de façon répétitive évoquent des moments de dévotion à la synagogue. Des piles de vêtements jetés par terre peuvent renvoyer a des photographies de l'Holocauste. Les danseurs peinent à travers la chorégraphie et leur lutte pourrait être interprétée comme un hommage à la construction d'Israël mais aussi comme un dépassement de soi.
Le début du 21ème siècle continue cette tradition de la danse libérée de formes, de croisement de disciplines et des pratiques que cela soit chant, art martiaux, arts plastiques ou nouvelles technologies. Souvent lors des spectacles avec plusieurs danseurs sur le plateau, nous nous habituons à voir pousser les limites de la physicalité, sans oublier lhistoire de la danse et ses traditions, auxquelles la plupart des chorégraphes que je cite rendent hommage. Dans le chef d'œuvre «In Spite of Wishing and Wanting » (1999) Wim Vandekeybus a imaginé une performance sur le désir primordial et la tension entre le familier et l'étrange. Sur scène que des hommes. Leurs mouvements frôlent la férocité, la sauvagerie et la naïveté. Des séquences de danse envoûtantes sur la bande sonore sensuelle de David Byrne, donnent limpression que les danseurs sont possédés par quelque chose ou quelqu'un. La peur et le désir de se transformer en quelque chose dautre représentent un thème central dans le travail de Vandekeybus.
Un projet qui traite du rapport que nous avons à la composition de la danse et la façon de la représenter est «Synchronous Objects for One Flat Thing» (2010). La collaboration entre William Forsythe et l'Ohio State University est basée sur le traitement des informations numériques, spatiales ou temporelles à partir de vidéos de l'œuvre de danse «One Flat Thing» de Forsythe ou des performeurs dansent sur et avec des tables. Leurs mouvements se synchronisent selon une série d indices internes. Une fois la danse enregistrée sous différentes perspectives, les données ont servi pour créer d'autres médias, événements et objets. Par exemple, un objet synchrone développé par Ola Ahlqvist dans le département de géographie de l'Ohio State montre la densité du mouvement des danseurs - sous la forme dun paysage topographique avec des montagnes colorées représentant les endroits ou chacun passait la plupart de son temps lors de la danse. Dans la même lignée, le spectacle «The Great Tammer » (2017) du chorégraphe grec Dimitris Papaioannou traite du rapport que les danseurs ont au corps, en sinspirant de la sculpture et la peinture classique. Son travail a une forte composante plastique et repose sur une dilatation du temps. L'expérience quil propose aux spectateurs est sensorielle- des corps qui se démembrent pour se reconstituer en nouvelles images sur le plateau. Ce questionnement du corps est partagé, mais traité dans une approche différente par la chorégraphe brésilienne Lia Rodrigues. Ses créations transgressent plusieurs formes dont celle du rituel performée. Son spectacle «Furia» (2018) met en scène des moments extatiques en danse et corps démembrés. Similaire au travail de Vandekeybus, nous pouvons croire les danseurs possédés. Leur présence convoque de l'émotion brute et transmet au spectateur une envie de partager la danse qui s'opère devant ses yeux.
\subsection{ La danse postmoderne de Anna Halprin et Deborah Hay
}\label{sec:elements-basiques}
Anna Halprin- The Taking part process
Anna Halprin est une danseuse et chorégraphe américaine qui a beaucoup influencé la danse contemporaine. Dans sa pratique elle intègre des principes somatiques, en se focalisant sur des impulsions internes et un état de grounding (connexion) avec soi-même. Pour elle, il existe un phénomène d'interdépendance entre mouvement, sentiment et association interne du mouvement (vu comme représentation mentale).
Son travail influencé par sa propre expérience du cancer la amenée à travailler avec des victimes de préjugés raciales, des personnes atteintes de maladies incurables comme le Sida et le cancer. Elle a intégré les principes de sa pédagogie lors des ateliers de danse en grande communauté. Son travail des dernières années de sa vie, atteste dun lien entre la danse et la spiritualité. Dans un entretien avec Ilene A. Serlin(citer), elle évoque sa première professeure de danse et l'impacte que cela a eu sur sa carrière:
“Margareth 'Doubler was my true mentor, and she provided the best dance education I possibly could have had. She was a biologist by training, which gave her the foundation to approach dance from a different perspective than what was being taught by others as dance. She taught me to view dance from a scientific as well as philosophical and aesthetic point of view. She used to say, "Teach the objective principles of dance
and this will enable your students to subjectify their experience." What she gave me was a great gift. She taught me to cultivate my own creative expression rather than imitate someone else's style.”
Pour Halprin il y a une équivalence entre le fait d'être incorporé (embodied) et la spiritualité. Une des danses quelle avait mis en place cest ce cycle de danses planétaires, ou plusieurs milliers de personnes dansent ensemble sur plusieurs continents:
“I created “Circle the Earth” with a different approach because I want to make dance as accessible as possible to everyone. I want to create dances that anybody can do, and I want to return people to an awareness of movement that I believe is one of our most essential birthrights.(...)I think dance happens to be my particular language; it always has been. Any medium can be anybodys language; dance just happens to be mine. Its been a way that has pointed me to directions that I could not preconceive, and that's been the adventure. It was a risk- taking for me. You know, I didnt know I was going to be doing a dance about reclaiming a mountain.(...)This way of working is now called the expressive arts approach, although it wasnt called expressive art in those days. I was able to envision a kind of dance that had a purpose, a healing purpose, a societal purpose, an environmental purpose. I never considered myself a therapist, although I might be referred to as a therapist. I consider myself simply a dancer. I began to think of these dances I was making as rituals. I found that the word ritual enabled me to move more consciously into the realm of dancing for the people, dancing for change.“
Cette danse a été dabord performée un dimanche de Pâques, en pleine nature, sur une montagne où elle avait déjà lhabitude de danser. Avec son groupe de participants, ils sont descendus du sommet de la montagne, après avoir accueilli le lever du soleil. Ils ont ensuite formé un cercle en dansant juste en dessous du sommet, pour pouvoir regarder dans les quatre directions. Chaque direction avait sa propre symbolique: le Sud est l'endroit d'où vient la vie, le Nord est l'endroit d'où vient la mort, et l'Ouest est l'endroit où va la lumière et l'Est est l'endroit d'où vient la lumière. Après avoir fait cela, les danseurs partagent leur expérience, par petits groupes. En remémorant une de ses expériences de Danse Planétaire, Halprin évoque le souvenir dun participant quelle connaissait qui était en larmes, profondément ému par quelque chose. En écoutant son récit, elle a compris que son ami a eu une prise de conscience soudaine des aspects spirituels de sa vie. Comme souvent parmi les participants, la recherche de la spiritualité peut donner limpression de quelque chose de spécial, d'inatteignable. Cependant son ami a trouvé un moment dillumination en lien avec son travail. Il a pris conscience de la relation quil avait avec ses employés au restaurant, de la façon dont il traitait ses collègues, de la façon dont ils avaient l'habitude d interagir et de coopérer. Pour lui, cette expérience dappartenir à un groupe relevait de la spiritualité.
L'élément principal dans l'approche de la danse dAnna Halprin est son usage du mouvement naturel, intrinsèque au vécu quotidien du danseur. Ce type de mouvement structure lexpression et l'expérience de chaque corps. Dans son approche “Taking Part” Halprin parle de deux étapes. La première a lieu pour apprendre un langage commun à partir du corps, par lusage des mouvements naturels. Les archétypes du corps reflètent et influencent les archétypes de la vie de chaque personne. Pour elle, le corps humain a des multiples dimensions: énergétique, physique, émotionnelle, mentale et spirituelle.
La deuxième étape est un outil pour libérer la créativité collectivement pensée en lien avec les Cycles RSVP. Cette méthode de Cycles RSVP a été développée par son mari Lawrence Halprin dans les années 70 pour le projet Circle the Earth afin que chaque participant amène son vécu et histoire de vie dans le projet. Les Cycles RSVP se basent sur quatre principes: R parle de ressources (matériaux à disposition), S en anglais Scores représente les partitions comme celles de musique, V parle de de la valeur des actions (plus spécifiquement l'appréciation, le feedback et la valeur qui accompagne le processus de création), alors que P vient de Performance ou l'implémentation des partitions.
Deborah Hay
“What my body can do is limited. This is not a bad thing because how I choreograph frees me from those limitations. Writing is then how I reframe and understand the body through my choreography.” — Deborah Hay
Deborah Hay est danseuse, chorégraphe, écrivaine et enseignante. Son travail se concentre sur des projets de danse postmodernes impliquant des danseurs non formés, un accompagnement musical fragmenté sur des mouvements ordinaires exécutés sous la forme des partitions. Elle est l'une des fondatrices du Judson Dance Theater- collectif de danseurs, compositeurs et artistes visuels qui se sont produits entre 1962 et 1964, à la Judson Memorial Church à Greenwich Village en Manhattan. Les artistes impliqués dans ce collectif sont reconnus pour avoir déconstruit la pratique et la théorie de la danse moderne. Sur son site, Hay décrit linfluence de ses débuts dans la compagnie de Merce Cunningham. Lors dune tournée au Japon en 1964, elle rencontre le théâtre Noh et incorpore dans sa pratique l'extrême lenteur, le minimalisme et la suspension des mouvements dans sa chorégraphie post-Cunningham. En 1966, Hay et d'autres artistes travaillent avec les experts en informatique des Bell Labs, dans des performances collaboratives intitulées “Evenings: Theatre and Engineering”. Lors de cette collaboration, elle participe à la performance : "Studies in Perception #1" de Ken Knowlton et Leon Harmon. Une image de Hay, nue allongée avec lun de premiers ordinateurs de Bell, est alors imprimée dans le New York Times puis exposée lors de l'une des premières expositions d'art informatique - “The Machine as Seen at the End of the Mechanical Age” au Museum of Modern Art de New York à la fin de lannée 1968.
Après ces expériences, elle quitte New York pour sinstaller à Vermont en 1970. Éloignée du monde de l'avant-garde artistique new-yorkaise, elle crée “Ten Circle Dances”- une pièce jouée dix soirs consécutifs sans public. Son premier livre, “Moving Through the Universe in Bare Feet (1975)”, contient ses observations tirées de cette expérience. Puis en 1976, Hay déménage du Vermont à Austin, au Texas, où elle commence à développer un ensemble de pratiques chorégraphiques autour du concept intitulé «playing awake” ( jouant éveillée) qui engageaient l'interprète à plusieurs niveaux de perception à la fois. Cette méthode chorégraphique a été dabord enseignée lors des ateliers pour des interprètes et danseurs non formés, donnant suite à des performances publiques par la suite. Son deuxième livre, “Lamb at the Altar: The Story of a Dance” (1994), documente le processus créatif utilisé lors de cette période.
Dans les années 1990, Deborah Hay se concentre presque exclusivement sur des danses solo, développées avec des principes de “playing awake”- sa méthode chorégraphique expérimentale. Ces œuvres comprennent “The Man Who Grew Common in Wisdom” (1989), “Voilà” (1995), “The Other Side of O” (1998), transmises ensuite à des interprètes renommés aux États-Unis, en Europe et en Australie. “My Body, The Buddhist”, son troisième livre, est publié par la suite à Wesleyan University Press en 2000. Ce livre contient ses réflexions sur le bouddhisme et les leçons qu'elle a apprises en portant une attention particulière à son corps pendant qu'elle dansait. Le concept de “mémoire cellulaire” est également décrit dans son livre.
Dans sa thèse “Dance in the light of neuroscience : sharing the experience of Deborah Hay's performance : her work and reflections”, Gabriela Karolczak par du postulat que la danse est une expérience partagée entre un danseur et un spectateur, enracinée dans le mécanisme neurologique des neurones miroirs. Pour elle, les problèmes liés aux neurosciences de la danse visent la validité écologique des expériences vécues. Le travail de Hay, la façon dont elle témoigne de ses observations empiriques à travers les décennies de sa pratique, nous rendent des participants actifs de ses questionnements et du soulagement offert par cette pratique. Dailleurs le credo artistique de Hay est défini de façon suivante:
“Without it being my intention, dance has become a medium for the study and application of detachment. Actually, I prefer the term dis-attachment because it implies a more active role in letting go. The balance between loyalty and dis-attachment to that loyalty, sensually and choreographically, is how the practice of dance remains alive for me.”- December 2010
\subsection{Notations de danse}\label{sec:elements-basiques}
Comme l'affirme Violeta Salvatierra dans sa thèse, outre les pratiques somatiques et l'improvisation dansée, un troisième champ de ressources pour les savoirs gestuels de cette thèse, est celui de l'analyse du geste:
“Également nommée « approche qualitative de l'analyse du mouvement » (j'utiliserai ces deux expressions indistinctement), l'analyse du geste a été développée par Hubert Godard, Odile Rouquet et d'autres danseur·ses en France depuis les années 1980, et partage des racines communes avec les techniques somatiques, dont elle se nourrit. Elle regroupe également des savoirs en biomécanique et en anatomie du mouvement
humain, en relation avec des savoirs pédagogiques. Elle est historiquement reliée à la constitution de la discipline de lanalyse fonctionnelle du mouvement du corps dansé (dérivée de celle antérieurement connue sous lappellation de « kinésiologie de la danse »), et travaille, comme les méthodes somatiques, avec lesquelles elle partage de nombreux enjeux, sur la plasticité sensorimotrice et sur la capacité de moduler les différents paramètres qui colorent la qualité expressive du geste.”
Avant lapparition du numérique, archiver la danse par écrit a été une manière de garder intacte le patrimoine culturel de chaque époque. Si le mouvement humain partage avec la musique les caractéristiques propres à cette dernière - hauteur, force, durée, rythme- lexpression corporelle comporte en plus un aspect tridimensionnel particulièrement difficile à rendre en deux dimensions. Bien que la danse sécrit et se lit sur des partitions depuis le Moyen ge, le XXe siècle a apporté de linnovation dans ce domaine. Pour décrire la fluidité du mouvement, déterminer sa durée et sa dynamique dans l'espace, ainsi que les singularités de l'interprète, les chorégraphes et chercheurs ont recours à des systèmes de notation plus complexes. Ainsi les plus connus outils d'analyse et de transcription de la danse traduisent les mouvements de manière spécifique en utilisant des notations musicales et des silhouettes, des symboles abstraits, des lettres ou des abréviations. Leur objectif est daméliorer et répertorier les performances dansées dans la culture occidentale.
\subsection{La notation Laban
}\label{sec:elements-basiques}
Le système de notation Laban, appelé aussi la cinétographie Laban, est un système décriture et danalyse du mouvement du corps humain publié en 1928 par le chorégraphe et pédagogue hongrois Rudolf Laban. Selon Goddard, “limpuissance à saisir par notre organisation linguistique le sens profond du mouvement “ a amenée laban vers la mise au point de son système de notation. Sous le nom de Laban Movement Analysis, il développera ultérieurement la choreutique (harmonie du corps dans l'espace) et l'eukinétique (étude de la dynamique du mouvement)- opposant “pensée motrice et pensée en mots”. Les principaux symboles de ce système sont les signes de direction avec leur durée et orientation, classifiés en formes et motifs pour déterminer la partie du corps concernée par le mouvement. Le placement des signes sur la portée donne la simultanéité des mouvements (lecture horizontale) et leur succession (lecture verticale). Les distances, les relations avec des partenaires ou avec des objets, les micro-mouvements ou encore le dessin des déplacements au sol sont indiqués par des signes spécifiques.
Laban définit également la kinésphère comme un espace imaginaire personnel placé autour de la personne et accessible directement par ses membres, jusqu'au bout des doigts et des pieds tendus dans toutes les directions. Ainsi les changements de forme peuvent être statiques (changements de postures) ou dynamiques- ce qui définit ensuite la notion de qualité de la forme, comme la manière dont le corps évolue activement d'un point à un autre de l'espace. Ce concept est étroitement lié à la qualité perçue du mouvement, concept clé dans les analyses de mouvement.
\subsection{La notation Benesh}\label{sec:elements-basiques}
Apparu à Londres en 1955 sous le nom de Benesh Movement Notation, ce système de notation a été créé par Rudolf Benesh, musicien et mathématicien. Ainsi lobjectif de la notation Benesh est de codifier de façon concise par l'écriture tous les mouvements possibles du corps humain - à la manière d'une partition de musique. Autre que lanalyse de mouvement chorégraphique, cette notation sera utilisée conjointement dans le domaine de lergonomie, de la médecine et de lanthropologie de la danse. Parmi autres un projet pilote, réalisé avec le Centro di Educazione Motoria de Florence en 1967 où la notation Benesh permet danalyser les déficiences musculaires, contribue au traitement des enfants souffrant de paralysie cérébrale. Ensuite des physiothérapeutes basés en Suède et au Japon étudieront et exploiteront le potentiel de la notation comme outil dobservation clinique et danalyse pour le suivi des patients. Cependant la notation Benesh est principalement utilisée comme outil d 'enregistrement des créations chorégraphiques. La maîtrise de la grammaire pour lanalyse du mouvement est claire et simple: lu de haut en bas, les cinq lignes du cadre de notation coïncident avec les positions de la tête, des épaules, de la taille, des genoux et des pieds.
\subsection{La notation Eshkol-Wachman}\label{sec:elements-basiques}
La notation de mouvement Eshkol-Wachman est un système d'enregistrement de mouvement développé en Israël par la chorégraphe Noa Eshkol et l'architecte Abraham Wachman. Apparu en 1958, ce système a été créé pour la danse, afin de permettre aux chorégraphes et aux danseurs de reconstituer tout type de mouvement de danse contemporaine dans son intégralité. En comparaison avec la plupart des systèmes de notation et analyse de mouvement, Eshkol-Wachman est destinée à noter n'importe quel type de mouvement, sur papier ainsi que sur lordinateur. Grâce à cela, il est utilisé dans de nombreux domaines, notamment la danse, la médecine ou léthologie.
Des observations psychomotrices, cognitives et socio-émotionnelles en lien avec l'apprentissage de ce système, ont encouragé les chercheurs à mettre en place des études pilote quant à leur impact sur des phénomènes de coordination de mouvement (citer art EShkol) qui pourraient servir comme moyen de détection des formes dautisme.(citer art EShkol)
Selon son fondateur, Noa Eshkol ce système est également un outil d'apprentissage qui peut aider les gens à regarder differement le mouvement:
“Eshkol-Wachman Movement Notation is a thinking tool that can teach people the art of observation, i.e. encourage them to aspire for the ultimate level of seeing. It does so by organizing the material known as movements of the human body in relatively simple categories, thereby allowing us an insight (in-sight) into the complexity of this phenomenon as a whole.”
Ainsi, dans la notation Eshkol-Wachman le corps est divisé en articulations où chaque paire d'articulations définit un segment de ligne. Chaque système articulé des axes tient compte des relations spatiales et des changements de relations entre les parties du corps. Le résultat est un processus analytique, entre le corps, lespace et le temps dans un référentiel sphérique où les directions et les trajectoires de chaque partie du corps sont répertoriées. Quand une extrémité d'un segment de ligne est maintenue dans une position fixe, ce point est le centre de la sphère dont le rayon est la longueur du segment de ligne. Les positions de l'extrémité libre sont définies comme deux valeurs de coordonnées sur la surface de cette sphère, analogues à la latitude et à la longitude dun globe mais écrites sous la forme des fractions avec le nombre vertical écrit au-dessus du nombre horizontal.
\subsection{Tableaux} \label{sec:sous-sec-1}
@ -120,11 +288,11 @@ Voici un exemple d'acronyme \gls{bdd} et de glossaire \gls{dataflow} définis da
\caption{Une figure contenant plusieurs sous-figures.}
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\author{Swann \scshape{Martinez}}
\title{Collaboration en temps réel pour la production de film danimation numérique}
\date{05 04 2021}
\author{Sorina-Silvia \scshape{Cîrcu}}
\title{Danser avec les robots: le corps performatif et \textit{la conscience artificielle}}
\date{18 06 2023}
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