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@ -34,7 +34,7 @@ Toujours pour Bertoz, les modèles internes de la réalité physique ne sont pas
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``L’analyse du mouvement permet donc de découvrir les solutions trouvées au cours de l’évolution pour anticiper les conséquences de l’action et simplifier le contrôle des gestes.”
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\end{quote}
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Le plus que cette connaissance du corps humain s’élargit grâce à des disciplines comme les neurosciences, le plus c’est compliqué d’adapter ces principes à des nouvelles technologies. Par exemple en robotique le problème de degrés de liberté (ie le nombre d’articulations dont un corps organique dispose) reste un défi pour les ingénieurs en mécatronique. Pour Berthoz, les centaines de degrés de liberté qui caractérisent l’organisation anatomique et dynamique du squelette de la plupart des animaux et de l’homme, rend possible le contrôle du mouvement grâce aux mécaniques d’organisation géométriques du squelette. Ces mécanismes se sont développés au cours de l’évolution, adaptant constamment le nombre de degrés de liberté que le cerveau doit contrôler. Comme le chercheur le souligne, les roboticiens rencontrent des vrais défis mécaniques lors qu'ils tentent de réaliser des machines de la complexité d'un moindre insecte. Bien qu'il y a eu des progrès dans les algorithmes utilisés ces derniers années\cite{qp progrqmming}, la capacité de calcul des ordinateurs est vite saturée\cite{berthoz}, une fois que le nombre de dégrées de liberté augmente.
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Le plus que cette connaissance du corps humain s’élargit grâce à des disciplines comme les neurosciences, le plus c’est compliqué d’adapter ces principes à des nouvelles technologies. Par exemple en robotique le problème de degrés de liberté (ie le nombre d’articulations dont un corps organique dispose) reste un défi pour les ingénieurs en mécatronique. Pour Berthoz, les centaines de degrés de liberté qui caractérisent l’organisation anatomique et dynamique du squelette de la plupart des animaux et de l’homme, rend possible le contrôle du mouvement grâce aux mécaniques d’organisation géométriques du squelette. Ces mécanismes se sont développés au cours de l’évolution, adaptant constamment le nombre de degrés de liberté que le cerveau doit contrôler. Comme le chercheur le souligne, les roboticiens rencontrent des vrais défis mécaniques lors qu'ils tentent de réaliser des machines de la complexité d'un moindre insecte. Bien qu'il y a eu des progrès dans les algorithmes utilisés ces derniers années\cite{bouyarmane2018quadratic}, la capacité de calcul des ordinateurs est vite saturée\cite{berthoz}, une fois que le nombre de dégrées de liberté augmente.
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Bertoz va plus loin quant à la complexité des systèmes vivants et à l’intégration de ces principes dans des systèmes technologiques, en faisant référence au terme de \textbf{synérgie}:
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\begin{quote}
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``Le mot synergie vient de syn (ensemble) et ergos (travail). Ce concept a été proposé par Bernstein pour appuyer l’idée que, le système nerveux ne peuvent contrôler toutes les degrés de liberté, l’évolution a sélectionné un répertoire de mouvements simples ou complexes, que nous pouvons appeler ``mouvements naturels”, et qui impliquent des groupes de muscles et de membres travaillant (ergos) ensemble (syn). Nous avons d’ailleurs mentionné plus haut les contraintes qu’exerce le squelette sur le nombre de mouvements possibles à chaque articulation. Ce répertoire n’est d’ailleurs pas très large. Il suffit de contempler une danseuse pour constater l’extraordinaire pauvreté du répertoire moteur dont elle dispose. C’est la combinaison dans le temps et l’espace de ces éléments et les jeux de partenaires qui font à la fois le génie du chorégraphe et la richesse expressive de la danse.”
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@ -956,7 +956,6 @@ D’une façon avant-gardiste et engagée, Meyerhold a dédié son travail à la
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totalitaire stalinien ont fait que son théâtre soit fermé en 1938 et le metteur en scène exécuté en 1940, malgré le fait qu’il soutenait pleinement les idées communiste. Presque un siècle après sa mort, ses écrits inspirent des metteurs en scène et chorégraphes contemporains. Entre temps, les robots défient les performances physiques des humains dans le travail industriel. Il nous reste à comprendre leur potentiel dans les domaines artistiques, notamment le spectacle vivant.
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\section{Faire danser les robots}
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@ -967,17 +966,17 @@ Pour comprendre comment mettre en scène les robots, je commence cette analyse a
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Une certaine partie de la communauté artistique en danse, semble œuvrer à une compréhension phénoménologique de l’expérience de l’incarnation. Les danseurs et chorégraphes proches de ce mouvement, s’intéressent à la conscience du corps
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ainsi qu’à l’évolution des formes de corporéité avec l’émergence des principes neuroscientifiques et somatiques. Le livre \textit{Disjunctive Captures of the Body and
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Movement}\cite{cvejic2015disjunctive} interroge les formes de corporéité qui donnent une façon propre d’habiter le corps. Pour cela, Bojana
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Movement}\cite{cvejic2015disjunctive} interroge les formes de corporéité qui donnent une façon propre d’habiter le corps. Pour cela, Bojana
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cite des choreographs tels Ingvartsen et Jefta VanDinther ou Eszter Salamon pour qui la danse est, avant tout, un lieu d’expérimentation. Elle questionne l’expérience subjective du mouvement, tout comme le fait la chercheuse Stamatia
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Portanova dont Bojana revendique l'appartenance. A son tour, Portanova travaille sur les nouvelles technologies et leur impact sur la danse\cite{portanova2013moving}. Dans le chapitre \textit{Can objects be processes?}, elle se demande comment le geste dansé peut s’échapper à la linéarité du temps et faire émerger un contenu original, atemporel. Dans le contexte d’une monde dominé par les ordinateurs et les sciences computationnelles, elle désigne
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le \gls{glitch} comme facteur perturbateur\cite{Portanova}, capable de transgresser les lois physiques et de provoquer une faille anachronique dans des représentations scéniques:
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le \gls{glitch} comme facteur perturbateur, capable de transgresser les lois physiques et de provoquer une faille anachronique dans des représentations scéniques:
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\begin{quote}
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``the appearance of the new takes the form of a glitch, an interruption of the continuous relational chain between past and future, the moment when past data are valued and particular ideas are selected in an occasion of experience, in order to determine what the future occasion will be.”
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``the appearance of the new takes the form of a glitch, an interruption of the continuous relational chain between past and future, the moment when past data are valued and particular ideas are selected in an occasion of experience, in order to determine what the future occasion will be.”
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\end{quote}
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Cette hypothèse se construit autour du travail de William
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Forsythe. Le spectacle \textit{One Flat Thing, reproduced}(2000) a comme contrepoids numérique \textit{Synchronous Objects for One Flat Thing reproduced} - un objet numérique porche d'un site vidéo créé par la
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compagnie de danse Forsythe en collaboration l’Université d’Ohio comme outil de visualisation des paramètres chorégraphiques. Les paramètres captés lors du mouvement des danseurs sont transposés en données statistiques en lien avec la musique, l’architecture, ou la géographie - pour explorer sous un autre ongle, les possibilités de composition entre le mouvement et l’espace. Le site \textit{Synchronous Objects} ne peut pas reproduire la chorégraphie à posteriori, malgré la multitude des données capturées et l’infinité des possibilités de représentation- puisque le temps de la performance est unique dans sa temporalité. Pour Stamatia, l’analogie avec le glitch trouve son correspondant dans l’instantanéité du présent quand chaque mouvement répétée en dehors de la représentation, donne suite à une œuvre inédite et éphémère.
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Mettre en scène des robots est souvent sujet à des contingences et erreurs de dernière minute. Nous l'avons aussi constaté lors des expérimentations\cite{silviaLausanne} en improvisation, présentés dans les prochaines chapitres. Ce caractère imprévisible des robots est aussi catalyseur d'une inspiration artistique, une les partenaires humains des machines développent une forte capacité d'adaptation. Dans ce sens, souvent un spectacle avec des robots n'est pas le même d'un soir à l'autre.
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Mettre en scène des robots est souvent sujet à des contingences et erreurs de dernière minute. Nous l'avons aussi constaté lors des expérimentations en improvisation présentées dans la deuxième partie de cette thèse. Le caractère imprévisible des robots est aussi catalyseur d'une inspiration artistique, une les partenaires humains des machines développent une forte capacité d'adaptation. Dans ce sens, souvent un spectacle avec des robots n'est pas le même d'un soir à l'autre.
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@ -997,11 +996,11 @@ réfléchis au corps et au mouvement, en symbiose avec la machine. Lorsque les d
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Dans l'optique de Cvejic, les philosophes Deleuze et Guattari voient ce résultat hybride des objets détachées et des corps réorganisés, comme un processus perpétuel:
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\begin{quote}
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``Partial objects are only apparently derived from (prélevés sur) global persons;
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they are really produced by being drawn from (prélevés sur) a flow or a
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nonpersonal hyle, with which they re-establish contact by connecting themselves
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to other partial objects.” \cite{cvejic2015disjunctive}
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``Partial objects are only apparently derived from (prélevés sur) global persons;
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they are really produced by being drawn from (prélevés sur) a flow or a
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nonpersonal hyle, with which they re-establish contact by connecting themselves
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to other partial objects.” \cite{cvejic2015disjunctive}
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@ -1011,8 +1010,8 @@ de perception.
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Pour parler de sa démarche, Salomon cite à son tour la critique d'art Peggy Phelan\cite{phelan2003unmarked} pour qui toute performance à sa propre réalité. Cette réalité existe seulement pendant le temps de la représentation:
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\begin{quote}
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``Performance's only life is in the present. Performance cannot be saved, recorded, documented, or otherwise participate in the circulation of representations of representations: once it does so, it becomes something other than performance.
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.”
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``Performance's only life is in the present. Performance cannot be saved, recorded, documented, or otherwise participate in the circulation of representations of representations: once it does so, it becomes something other than performance.
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.”
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\end{quote}
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Pour la création du \textit{Nvsbl}, la chorégraphe hongroise s’est inspirée des techniques somatiques comme le Body Mind Centering, mentionné dans le chapitre
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@ -1025,11 +1024,11 @@ Un autre travail mentionné dans\cite{cvejic2015disjunctive} fait référence à
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plusieurs rencontres mouvement-machine. Le mouvement reste partagée entre le corps et le trampoline, entre le volontarisme de l’action et le lâcher-prise de
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la personne qui subisse le rebond:
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\begin{quote}
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``We are not looking for what we can do on a trampoline but rather for what a
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trampoline can do for us. By introducing the trampolines as a resistance
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to the movement production we force ourselves to reconsider everything we know
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about the dancing body, in relation to weight, shape, gravity, direction, rhythm
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and phrasing.” \cite{cvejic2015disjunctive}
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``We are not looking for what we can do on a trampoline but rather for what a
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trampoline can do for us. By introducing the trampolines as a resistance
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to the movement production we force ourselves to reconsider everything we know
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about the dancing body, in relation to weight, shape, gravity, direction, rhythm
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and phrasing.” \cite{cvejic2015disjunctive}
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Les deux performeurs multiplient les possibilités d’expression, alternant entre le lâcher prise et la maîtrise totale du geste, un corps tonique et un corps mou, un saut haut et un saut très bas. Le rythme de leurs sauts donne l’impression d’un visionnage des images cinématographiques à la façon d'un étude de mouvement de Muybridge. Le corps apparaît comme une figure, à la fois humaine, animale et
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@ -1039,7 +1038,8 @@ mécanique, en compétition avec la gravité. Sa dé-subjectivation en relation
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\subsection{Déconstruire la corporéité des robots}
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Au cours des dernières décennies, des chercheurs dans différents domaines de la robotique ont étayé l’importance du mouvement dans la mise en place des
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Dans notre contexte particulier de la danse, analyser les changements dans la conception et la configuration des projets d’art robotique, nous aide à mieux évaluer les possibilités d’interaction physique lors d’une performance live. Les chercheurs en robotique développementale considèrent le comportement parmi les facteurs clés qui définissent l'interaction. En suivant l’évolution des principes concernant la notion d'incorporation (embodiment)\cite{clark1998being}, \cite{dautenhahn2002embodied}, \cite{ziemke2013s}, \cite{ziemke2016body}, les artistes utilisent ces principes pour créer des formes d'art hybrides.
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Au cours des dernières décennies, des chercheurs dans différents domaines de la robotique ont également étayé l’importance du mouvement dans la mise en place des
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interactions avec les robots. Pour la grande majorité d’entre eux, le contrôle optimal est le facteur clé pour améliorer tout travail collaboratif homme-robot.
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Leur objectif est de générer des commandes motrices adaptées à plusieurs contextes et contraintes. Certaines études mesurent l’effet de l’imitation sur le HRI alors que d’autres se concentrent sur l’improvisation et l’apprentissage par renforcement. A notre échelle, cette thèse en recherche-création s’attache à comprendre comment la perception du mouvement peut augmenter le sentiment de complicité avec les systèmes artificiels. De manière large, elle interroge la façon dont le comportement et plus particulièrement le mouvement (qu'il soit dansé ou simple geste quotidien) augmentent la capacité d’agence et l’autonomie des robots- concepts que nous allons aborder dans les prochains chapitres consacrés aux observations pratiques.
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@ -1055,11 +1055,11 @@ mouvement. Selon le roboticien Jean-Pierre Laumont, ``un mouvement est perçu pa
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les autres dès son achèvement dans l’espace physique”\cite{laumond2016dance}. Pour lui, toute analyse du mouvement humain qui peut être transmise aux robots, se concentre sur la relation entre l’espace physique et l’espace corporel. Les roboticiens sont confrontés à ces questions quand ils modélisent un espace physique comme \textit{l’espace opérationnel} dans lequel les actions du robot sont exprimées, alors que \textit{l’espace du corps est}, pour eux, l’espace de contrôle ou l’espace de configuration du système robotique considéré. Leur travail se concentre sur la prise en compte des informations cinématiques d’un mouvement tout comme sur les informations dynamiques - par exemple les forces de contact avec l’environnement lors d’un mouvement. La dynamique permet entre autres, de contrôler la stabilité du robot pour générer des mouvements fluides et sûrs. Comparativement à la biomécanique, qui permet d’affiner l’interaction du corps humain avec son environnement, la dynamique est un critère important pour observer la qualité d’un mouvement et mesurer sa performance. Ainsi les humains, comme les animaux, utilisent des forces de contact pour générer du mouvement et se tenir debout face à la gravité. Pour cela, ils effectuent des tâches complexes où ils adaptent leur corps à l’environnement de façon spontanée. La communauté scientifique à formalisé cette propriété innée dans la théorie des primitives de mouvement dynamique\cite{DMP}, ou en
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anglais \gls{Dynamic Movement Primitives} (DMP). Pour programmer des mouvements similaires à une danse, il faut les décomposer dans une séquence de mouvements élémentaires, basée à son tour sur des primitives de mouvements dynamiques. Lorsqu’il s’agit de modéliser les processus psycho-somatiques ou les émotions qui déterminent une danse, les choses deviennent en général plus compliquées. Des avancées en neurosciences s’intéressent à ce type de défis et j'ai pu découvrir quelques travaux dans ce sens.
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De façon pratique, chaque mouvement peut être modélisé sous la forme d’une équation mathématique qui respecte les lois physiques. Cette équation est à son tour traduite en langage de programmation. Des modèles mathématiques sous-jacents à l’analyse de la dynamique du mouvement humain correspondent à des modèles descriptifs basés sur une multitude de variables mécaniques. Dans ce sens, \textbf{les équations de mouvement} ont une terminologie spécifique, selon leur domaine d’utilisation. De façon générale, elles décrivent le mouvement d’un objet physique selon les lois de la mécanique newtonienne. Ce mouvement peut être représenté sous la forme de coordonnées sphériques, cylindriques ou cartésiennes. Il comprend l’accélération de l’objet en fonction de sa position, de sa vitesse, de sa masse et les variables connexes. \smallskip
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De façon pratique, chaque mouvement peut être modélisé sous la forme d’une équation mathématique qui respecte les lois physiques. Cette équation est à son tour traduite en langage de programmation. Des modèles mathématiques susjacents à l’analyse de la dynamique du mouvement humain correspondent à des modèles descriptifs basés sur une multitude de variables mécaniques. Dans ce sens, les équations de mouvement ont une terminologie spécifique, selon leur domaine d’utilisation. De façon générale, elles décrivent le mouvement d’un objet physique selon les lois de la mécanique newtonienne. Ce mouvement peut être représenté sous la forme de coordonnées sphériques, cylindriques ou cartésiennes. Il comprend l’accélération de l’objet en fonction de sa position, de sa vitesse, de sa masse et les variables connexes. \smallskip
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Selon Laumond, une équation de mouvement en robotique est définie comme un moyen de comprendre la relation qui varie entre le temps pour un mouvement spécifique, le moment des forces appliquées sur l’environnement et les forces générées par les muscles et transmises par couples articulaires. Pour les humains, la capacité de combiner et d’adapter des unités de mouvement de base en tâches complexes, se produit par la coordination entre des muscles et des articulations. Puisque le corps humain dispose d’approximativement 700 muscles, 360 articulations et 206 os\cite{tozeren1999human}, le même mouvement peut être réalisé en activant différentes parties du corps. Définir le mouvement à partir des multiples stratégies possibles dévient encore plus compliqué lorsque nous prenons en compte la spécificité de chaque individu. Cette spécificité est souvent observée lors des séances d’éducation somatique où l’intuition et le ressenti du praticien comptent plus que les statistiques et les équations mathématiques des scientifiques. Néanmoins une fois une hypothèse émise, elle doit être vérifiée scientifiquement pour pouvoir être validée et acceptée par la communauté scientifique. C’est en cela qu’un travail intuitif et instinctif en danse contemporaine est à ce jour difficilement transposée en robotique.
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En fonction des mesures disponibles et de la partie du corps qui initie le mouvement humain, différentes approches peuvent être envisagées. Certaines chercheurs se concentrent seulement sur le mouvement des extrémités ou du torse, ce que correspond au \textit{task-space} ou l’espace des tâches en robotique.
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En fonction des mesures disponibles et de la partie du corps qui initie le mouvement humain, différentes approches peuvent être envisagées. Certaines chercheurs se concentrent seulement sur le mouvement des extrémités ou du torse, ce que correspond au \textit{task-space} ou l’espace des tâches en robotique\cite{kajita2014springer}, \cite{bouyarmane2018quadratic}.
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En effet, la plus grande partie du corps humain est le torse; représentant en moyenne 43\% du poids corporel total alors que les cuisses, le bas des jambes et
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les pieds constituent les 37\% restants du poids total - suivis par les membres supérieurs (13\%) et la tête et le cou (7\%)\cite{tozeren1999human}.
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Pour les mouvements courants, ces primitives ont l'origine dans notre inconscient et sont pour la plupart des gestes automatiques ou des mouvements réflexes.
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@ -1071,38 +1071,28 @@ Hubert Godard fait appel au concept de pré-mouvement comme langage non conscien
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\textbf{Le libre arbitre vs ``the readiness potential”}
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Pour aller plus loin et illustrer mon point de vue sur la dualité corps-esprit, je mentionne l’expérience du neurologue Benjamin Libet\cite{Libet} qui, avec ses collègues, s'intéressent aux phénomènes qui opérant dans le cerveau au moment où une action intentionnelle a lieu. Plus spécifiquement, l’expérience demande aux participants de bouger leur doigt spontanément, quand ils veulent. En parallèle,
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ils regardent une horloge avec un point de lumière tournant, afin d’indiquer l’endroit où est le point sur l’horloge lorsqu’ils prennent leur décision consciente de vouloir exécuter un mouvement de doigt.
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Pendant ces instructions, Liebt et son équipe analysent l’activité cérébrale avec des capteurs d’électroencéphalographie (EEG) et mesurent le mouvement réel des doigts avec des capteurs électromyographiques (EMG). Leurs résultats prouvent
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que le début de l’activité cérébrale commence plus d’une demi-seconde avant le mouvement réel des doigts et plus de 300 ms avant que les sujets ne prennent conscience qu’ils veulent bouger leur doigt. Ils définissent alors le facteur de
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\textit{readiness potential} (potentiel de préparation) - pour illustrer le fait que la volonté consciente de bouger le doigt se produit un intervalle significatif après le début de l’activité cérébrale pertinente. Cette expérience démontre que
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le concept de libre arbitre est plus complexe à définir que ce que nous entendons par \textit{décisions consciente} et influe sur les débats actuels concernant l’intelligence artificielle. Si 40 ans après cette expérience, il nous est toujours difficile de modéliser le facteur de \textit{readiness potential} , rendre des
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robots capables de prendre des décisions \textit{conscientes} reste un défi.\smallskip
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Pour aller plus loin et illustrer mon point de vue sur la dualité corps-esprit, je mentionne l’expérience du neurologue Benjamin Libet\cite{libet1993brain} qui, avec ses collègues, s'intéressent aux phénomènes qui opérant dans le cerveau au moment où une action intentionnelle a lieu. Plus spécifiquement, l’expérience demande aux participants de bouger leur doigt spontanément, quand ils veulent. En parallèle,
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ils regardent une horloge avec un point de lumière tournant, afin d’indiquer l’endroit où est le point sur l’horloge lorsqu’ils prennent leur décision consciente de vouloir exécuter un mouvement de doigt. Pendant ces instructions, Liebt et son équipe analysent l’activité cérébrale avec des capteurs d’électroencéphalographie (EEG) et mesurent le mouvement réel des doigts avec des capteurs électromyographiques (EMG). Leurs résultats prouvent que le début de l’activité cérébrale commence plus d’une demi-seconde avant le mouvement réel des doigts et plus de 300 ms avant que les sujets ne prennent conscience qu’ils veulent bouger leur doigt. Ils définissent alors le facteur de \textit{readiness potential} (potentiel de préparation) - pour illustrer le fait que la volonté consciente de bouger le doigt se produit un intervalle significatif après le début de l’activité cérébrale pertinente. Cette expérience démontre que le concept de libre arbitre est plus complexe à définir que ce que nous entendons par \textit{décisions consciente} et influe sur les débats actuels concernant l’intelligence artificielle. Si 40 ans après cette expérience, il nous est toujours difficile de modéliser le facteur de \textit{readiness potential} , rendre des
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robots capables de prendre des décisions \textit{conscientes} doit encore atteindre.
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Cependant cela n’empêche pas la communauté scientifique d’imaginer d’ autres pistes d’exploration et hypothèses de recherche.
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Une de ces pistes réside dans l’importance de l’interaction avec
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l’environnement. Si un agent ou un système a un corps physique ( en anglais \textit{is embedded}, il est soumis aux lois de la physique qui impliquent de s’habituer à la gravité et aux forces de friction, ainsi qu’à l’approvisionnement en énergie pour survivre. Ainsi cela pose de nouveaux défis pour ce qu’il y a de capacité d’adaptation et des multiples négociations entre les calculs internes et des actions directes:
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Comme nous avons montré dans les chapitres précédents, une de ces pistes réside dans l’importance de l’interaction avec l’environnement. Si un agent ou un système a un corps physique (en anglais \textit{is embedded}, il est soumis aux lois de la physique qui impliquent de s’habituer à la gravité et aux forces de friction, ainsi qu’à l’approvisionnement en énergie pour survivre. Ainsi cela pose de nouveaux défis pour ce qu’il y a de capacité d’adaptation et des multiples négociations entre les calculs internes et des actions directes:
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\begin{quote}
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``the real importance of embodiment comes from the interaction between physical
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processes and what we might want to call information processes. In biological
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agents, this concerns the relation between physical actions and neural
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processing—or, to put it somewhat casually, between the body and the brain. The
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equivalent in a robot would be the relation between the robot’s actions and its
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control program.” (Rolf Pfeifer et Josh Bongard p.18)
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control program.”\cite{pfeifer2006mit}
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\end{quote}
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Pour illustrer cela, ils font une comparaison entre l’action d’attraper un verre par un humain et par un robot. Si pour l’humain, le tissu de ses bout des doigts s’adapte à la forme du verre, le calcul de forces à appliquer se fait en conséquence. Cependant pour une main de robot le tissu est rigide, il n’y a pas
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cette possibilité d’adaptation et plus souvent le verre se casse car la force appliquée n’est pas la bonne. Ainsi ils argumentent l’hypothèse que l’intelligence humaine est distribuée dans tout le corps, et pas que dans le cerveau.
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Pour illustrer cela, ils font une comparaison entre l’action d’attraper un verre par un humain et par un robot. Si pour l’humain, le tissu de ses bout des doigts s’adapte à la forme du verre, le calcul de forces à appliquer se fait en conséquence. Cependant pour une main de robot le tissu est rigide, il n’y a pas cette possibilité d’adaptation et plus souvent le verre se casse car la force appliquée n’est pas la bonne. Ainsi ils argumentent l’hypothèse que l’intelligence humaine est distribuée dans tout le corps, et pas que dans le cerveau.
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Pour simplifier les choses, une approche plus pratique est celle où les robots humanoïdes imitent des mouvements de danse capturés lors des démonstrations humaines. La simulation numérique du système
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musculo-squelettique humain permet de travailler avec un grand nombre de données expérimentales. La capacité de traiter ces données de façon itérative en temps réel dépend de la fréquence d’enregistrement. Les roboticiens utilisent des techniques de \textit{Motion Capture} combinées à des technologies comme le Learning from Paradigme\cite{112} qui propose des modèles pour faciliter la danse- tels la cinématique inverse ou les modèles de contrôle prédictif- ainsi que de la dynamique inversée de l’espace opérationnel\cite{113}. L’objectif de ces
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technologies est d’enregistrer et générer des mouvements avec un coût de calcul optimal. Une grande majorité des projets artistiques actuels font appel à des robots préprogrammés par des humains pour répondre à des signaux spécifiques et
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se comporter d’une certaine manière. Sur scène, le fardeau des mouvements synchrones qui garantissent l’interaction repose sur la réactivité et l’adaptabilité de l’artiste. En danse par exemple, le performeur doit garder le tempo, ce qui ne lui laisse que très peu de possibilités d’improvisation. De plus, il n’a pas le droit à des erreurs, car le robot continuerait alors à exécuter son programme quels que soient les événements imprévus qui se déroulent
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en parallèle. Cette situation est généralement évitée grâce à un opérateur humain disponible pour prendre le contrôle du robot à distance. En utilisant les technologies de suivi existantes comme des capteurs XSENS, l’artiste peut se connecter directement au robot, pendant que ses mouvements sont analysés en
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temps réel. Alternativement, ses mouvements peuvent être utilisés pour contrôler le mouvement du robot ou déclencher des changements de rôle. D’autres techniques basées sur la reconnaissance thermique ou la vision et le suivi haptique du mouvement humain, font l’objet des études en cours qui pourront éventuellement
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Pour simplifier les choses, une approche plus pratique est celle où les robots humanoïdes imitent des mouvements de danse capturés lors des démonstrations humaines. La simulation numérique du système musculo-squelettique humain permet de travailler avec un grand nombre de données expérimentales. La capacité de traiter ces données de façon itérative en temps réel dépend de la fréquence d’enregistrement. Les roboticiens utilisent des techniques de \gls{motion capture} ou MoCap, combinées à des technologies comme le \textit{Learning from observation paradigme\cite{nakaoka2007learning}} qui propose des modèles pour faciliter la danse- tels la cinématique inverse ou les modèles de contrôle prédictif- ainsi que de la dynamique inversée de l’espace opérationnel\cite{ramos2015dancing} ou OSID.
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L’objectif de ces technologies est d’enregistrer et générer des mouvements avec un coût de calcul optimal. Une grande majorité des projets artistiques actuels font appel à des robots préprogrammés par des humains pour répondre à des signaux spécifiques et se comporter d’une certaine manière. Sur scène, le fardeau des mouvements synchrones qui garantissent l’interaction repose sur la réactivité et l’adaptabilité de l’artiste. En danse par exemple, le performeur doit garder le tempo, ce qui ne lui laisse que très peu de possibilités d’improvisation. De plus, il n’a pas le droit à des erreurs, car le robot continuerait alors à exécuter son programme quels que soient les événements imprévus qui se déroulent en parallèle. Cette situation est généralement évitée grâce à un opérateur humain disponible pour prendre le contrôle du robot à distance. En utilisant les technologies de suivi existantes comme des capteurs XSENS, l’artiste peut se connecter directement au robot, pendant que ses mouvements sont analysés en temps réel. Alternativement, ses mouvements peuvent être utilisés pour contrôler le mouvement du robot ou déclencher des changements de rôle. D’autres techniques basées sur la reconnaissance thermique ou la vision et le suivi haptique du mouvement humain, font l’objet des études en cours qui pourront éventuellement
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inspirer la communauté artistique.\smallskip
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En 2012, lors d’un spectacle de danse de 10 minutes avec un robot HRP-2 et un danseur de hip-hop, l’humain a embrassé
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l’humanoïde sur scène. Les mouvements ont été calculés grâce au modèle OSID développé par LAAS. Le geste du danseur- ouvrant ses bras devant l’humanoïde- peut être interprété rétrospectivement comme une réaction empathique d’abandon
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devant la machine, une invitation pour devenir amis, ou bien l’acte de reconnaître un vieil ami.
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En 2012, lors d’un spectacle de danse de 10 minutes avec un robot HRP-2 et un danseur de hip-hop, l’humain a embrassé l’humanoïde sur scène. Les mouvements ont été calculés grâce au modèle OSID développé par LAAS. Le geste du danseur- ouvrant ses bras devant l’humanoïde- peut être interprété rétrospectivement comme une réaction empathique d’abandon devant la machine, une invitation pour devenir amis, ou bien l’acte de reconnaître un ami de longue date.
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\begin{figure}
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