``It is not only my dreams, my belief is that all these dreams are yours as well. The only distinction between me and you is that I can articulate them. And that is what poetry or painting or literature or filmmaking is all about... and it is my duty because this might be the inner chronicle of what we are. We have to articulate ourselves, otherwise we would be cows in the field.”Werner Herzog
Au cours des dernières décennies, les possibilités d’interaction des robots humanoïdes ont été évaluées sous différents angles.
environnements et conditions. Notre étude est centrée autour d'un robot HRP-4 dans le contexte de la danse
improvisation avec un performeur et un écosystème virtuel. En analysant l'effet créatif des agents artificiels sur
l'interprète et imitant sa réponse, nous visons à atteindre un état de co-création humain-robot inspiré
par le sentiment d'empathie. Cela contribue au développement de formes d'art interactives transdisciplinaires qui
remettre en question l’interactivité avec les agents virtuels et physiques.
Faire passer des robots du laboratoire à la scène est un défi à bien des égards\cite{pluta2018laboratoire}. Alors que les robots
sont déjà présents dans de nombreux secteurs manufacturiers et de services à la personne, pourquoi pas sur scène ? Selon Zaven Paré,
nous nous sommes habitués à idéaliser les robots comme des \textit{objets sociaux totaux}\cite{zaven2014effets}. Nous aurions également pu projeter beaucoup de
nos désirs sur eux. Très probablement, comme les humains, les robots peuvent être vulnérables, surtout lorsqu'ils sont utilisés comme
gestes incohérents}\cite{zaven2014effets}, les artistes recherchent un \textit{effet de présence}\cite{zaven2014effets} chez les robots. Nous croyons
cet effet est déjà perçu chez l'homme dans les spectacles de danse et l'improvisation. Les possibilités d’interaction que nous remettons en question renouvellent plusieurs expériences Human-to-Robot (H2R). Dans
En 2010, un modèle HRP-4C (la version robot humanoïde d'apparence féminine du HRP-4) présentait une danse et
performance de chant au DC-EXPO au Japon\cite{nakaoka2007learning, nakaoka2011toward}. De même en 2012, lors d'une performance de dix minutes préparée au LAAS de Toulouse\cite{ramos2015dancing}, les participants ont été témoins d'un danseur hip-hop serrant dans ses bras un robot humanoïde HRP-2 sur scène !
Alternativement, le type de mouvements et de gestes qui déterminent nos recherches actuelles sont influencés par l'art.
projets impliquant des robots non humanoïdes. L'une d'elles est l'œuvre \textit{Petit Mal} (1995) de Simon Penny où
un robot à détection entièrement autonome sur roues explore son espace architectural pour susciter un comportement de jeu
des visiteurs\cite{penny2015emergence}. Ses mouvements hésitants et ses petits gestes font référence à notre quête d'un
\textit{effet de présence} dans HRP-4. Une autre œuvre inspirante est \textit{The Blind Robot} (2013) de Louis Philippe Demers.
Cette fois, le robot est constitué de deux bras mécaniques montés sur un socle et boulonnés à une table, dans un style théâtral.
éclairage. Avec des mouvements doux, le robot explore délicatement le visage du modèle, supposément être des humains aveugles.
faire lorsque vous essayez de reconnaître des personnes ou des objets\cite{jochum2016cultivating}. Dans les deux propositions, l'accent est mis
sur les mouvements communs et ordinaires et notre intention est de déterminer dans quelle mesure ils peuvent améliorer
possibilités d'interaction pour HRP-4 et encourager la co-création.
\textbf{A.1 Mouvement et émotions}
En tant que médiateur de la rencontre entre les humains et les machines, la scène offre de nouvelles possibilités d’interaction.
A travers nos recherches, nous mettons l'accent sur la façon dont ces entités communiquent, ce qu'elles échangent et comment un
une possible co-création peut émerger. Dans cette mesure, les limites et les atouts respectifs de l'humanoïde
Le robot et le performeur dansant avec lui, ainsi que ceux de l'écosystème virtuel (EVE) et de ses agents, sont
éléments clés de nos perspectives de recherche.
Les robots et les humains peuvent exprimer leurs émotions par des gestes, car cela implique principalement de contrôler les mouvements. Pour
Chez les humains, ces gestes peuvent être générés par des actions conscientes ou émerger de processus inconscients. Dans notre
l’exploration artistique, nous choisissons d’examiner ce dernier cas. Notre intention est de vérifier dans quelle mesure ils peuvent être
recontextualisés ou esthétisés lorsqu’ils sont appliqués aux robots et nous détaillons ci-dessous nos résultats.
Jusqu'à présent, HRP-4 est capable de générer - au moyen de programmes de planification et de contrôle - deux types de mouvements :
(i) mouvements intentionnels (trajectoires implicites pour atteindre des objectifs de tâche raffinés mais bien prédéfinis qui peuvent être
changeant par rapport à un contexte évolutif et dynamique), et (ii) les mouvements réflexes (c'est-à-dire non intentionnels)
(qui peut émuler une réaction dans une portée automatisée - hors des objectifs de tâche prédéfinis). Un exemple de
le mouvement intentionnel demande à la main (c'est-à-dire une pince) du robot d'atteindre en suivant l'un des
mains du performeur ou pour imiter (recopier) au mieux la posture du performer, etc. Dans un tel contexte, on
supposer que le robot, la scène ou l'interprète soit équipé du corps entier ou des membres d'un ou plusieurs interprètes
technologies de suivi. Un exemple de mouvement réflexe d’un robot pourrait être un mouvement aléatoire de la tête du robot.
indépendant du contexte scénique et peut être connecté à n’importe quel élément auquel l’artiste peut penser. Grâce à un rapide
analogie avec les études cognitives et le comportement du corps vivant, nous considérons subjectivement que les mouvements réflexes
correspondent aux processus inconscients. Actuellement, nous étudions par des explorations pratiques lequel des deux
Des types de mouvements de robot (ou une combinaison des deux) pourraient correspondre à notre performance de danse. Pendant le
performance de danse et de chant du HRP-4C pour DC-EXPO, le robot faisait de la danse synchronisée de base
mouvements entourés de quatre danseuses. Cette synchronisation était préprogrammée, réglée et
Les réalisateurs travaillant avec des ingénieurs\cite{pluta2018laboratoire} ont mis en place une \textit{illusion théâtrale} ou une convention selon laquelle ils seraient
autonome et capable d’agir. En attendant, nous considérons plutôt que les robots peuvent apprendre à improviser ou à
au moins pour imiter l’improvisation en utilisant des techniques modernes de programmation d’IA. Penny souligne que, dans le domaine artistique
contextes, les machines ne sont pas capables d’improviser et lorsqu’elles font quelque chose d’inattendu, c’est
il s'agit plutôt d'un bug ou d'un dysfonctionnement\cite{penny2016improvisation}. Cependant, du point de vue de l'ingénierie et de la robotique, c'est-à-dire du
D'un point de vue technique, l'improvisation sur scène peut s'apprendre et se programmer, grâce à des connaissances avancées.
techniques d'apprentissage automatique (par exemple, réseaux contradictoires génératifs) et mathématiques statistiques aléatoires.
\textbf{L’enjeu de la mise en scène d’un robot humanoïde au sein d’une performance multi-agents}
Actuellement notre configuration d'étape explore un modèle d'intelligence distribuée (DIM) - que nous détaillerons dans
Fig. 1. Modèle d'Intelligence Distribuée d'interaction (DIM) entre les agents présents sur scène
Notre objectif principal est d'aborder les possibilités de co-création d'un robot HRP-4 à travers l'improvisation dansée.
dans un contexte artistique dynamique. Nous analysons d’abord l’effet créatif du robot sur l’interprète, en mettant en place
notre propre méthodologie. Ensuite, nous imitons sa réponse, visant une improvisation H2R inspirée par le sentiment
d'empathie. Cela peut éventuellement bénéficier à la manière dont les robots sociaux sont intégrés dans la vie quotidienne, ainsi qu'à
améliorer la créativité dans les formes d'art transdisciplinaires basées sur l'interactivité homme-machine (H2M).
\textbf{Adapter les principes du comportement cognitif aux expérimentations artistiques}
Afin de comprendre la complexité du comportement de HRP-4, nous considérons les principes de la cognition incarnée\cite{ziemke2016body} comme le modèle d’intelligence distribuée (Brooks 1991) qui a inspiré notre scénographie. Ça peut être
décrit à travers quatre caractéristiques : l’incarnation, l’intelligence, l’émergence et la situation. Dans notre cas particulier, l’émergence peut stimuler la créativité (au sens où un comportement nouveau et complexe peut être un
source d'inspiration pour des expérimentations artistiques). Alors que l'intelligence, l'incarnation et la situation se traduisent
différemment dans le cas des agents virtuels et physiques. Les danseurs sont habitués à exprimer leur maîtrise sur
B.2 Inventer notre propre méthodologie dans un contexte créatif dynamique
La nécessité de commencer notre exploration avec un exemple physique simplifié nous a conduit à construire un substitut au robot en
la forme d'un carton Arduino animat1. Les seuls attributs de cet appareil sont : sa capacité de
détection de mouvements et d’obstacles. Utilisant peu les capacités comportementales de la machine, nous avons continué à poursuivre
point commun entre l’intelligence inhérente au corps humain et la réaction de l’animal.
corps mécanique. L'influence de la présence de l'animat sur l'expression corporelle du performeur nous a fait
envisagez une approche similaire pour l’interaction de HRP-4 sur scène.
Comparés aux robots industriels très puissants et rapides, les robots collaborateurs sont plus conformes, avec des performances plus lentes,
mouvements élastiques inspirés de la nature. Leur capacité à complexifier leur propre comportement est directement liée à
leur capacité à interagir avec l’environnement (Brooks 1991). Le robot HRP-4 n'a pas été conçu en utilisant
contraintes industrielles, mais il est capable de résoudre des problèmes alambiqués comme conduire une voiture\cite{paolillo2018autonomous} ou
complexes de compétences de fabrication\cite{kheddar2019humanoid}. Puisque son fonctionnement repose sur un contrôle de l'espace des tâches
méthodologie\cite{bolotnikova2019multi}, nous avons pensé tester sa capacité d'incarnation\cite{aymerich2016second}, pour s'adapter à un contexte d'interaction avec les humains plus intuitif et peut-être primitif, comme la danse
improvisations.
Cet objectif d’une relation H2R interdépendante et co-créative est actuellement abordé à travers les étapes suivantes :
\begin{itemize}
\item étudier le comportement autonome des humanoïdes ;
\item conçoit des modèles élémentaires Arduino qui simulent un type de comportement autonome humanoïde ;
\item improviser des séquences de danse/mouvements avec le modèle élémentaire ;
\item analyser l’impact du comportement de la machine sur les mouvements de l’interprète ;
\item adapter puis appliquer certains d'entre eux au HRP-4 virtuel, en utilisant des statistiques et des fonctions aléatoires ;
\item créer un scénario de mouvement pour HRP-4 virtuel combinant des mouvements réflexes et intentionnels ;
\item improviser avec HRP-4 virtuel en utilisant ce scénario ;
\item analyser l'effet de ce geste sur l'interprète ;
\end{itemize}
note : \textit{l'approche animat postule qu'il est possible d'étudier la cognition humaine à travers une approche bottom-up
qui part d'architectures de contrôle minimales et d'environnements simples et les réalise ensuite progressivement
plus complexe.}\cite{bret2005interacting}
\textbf{ Rechercher un état de créativité par l'empathie}
Pour évaluer la complicité H2R, nous nous appuyons sur le sentiment d'empathie\cite{ziemke2008role} - vu comme une capacité à
comprendre émotionnellement ce que ressentent les autres et nous imaginer à leur place. Dans notre cadre artistique
les robots ne ressentent pas, mais la littérature\cite{asada2015towards} indique comment les robots s'appuient sur des émotions artificielles (c'est-à-dire des logiciels
(structures symboliquement considérées comme jouant le rôle et l'action des émotions) pour générer des mouvements. Ils
analyser leur environnement à l'aide de capteurs et y réagir selon les lois de l'utilisateur définies par l'utilisateur (c'est-à-dire définies par l'art).
interaction qui peut être simple ou complexe. L'interprète imagine ce que ressent le robot (c'est-à-dire son \textit{ umwelt}), puis
utilise cette projection comme source d'inspiration pour l'improvisation. Plus on comprend la technique
caractéristiques du HRP-4, plus on peut imaginer comment il devrait \textit{ressentir} et cultiver des intentions artistiques basées sur sur ce.
\textbf{C.1 Rôle de l'apparence du robot}
À première vue, HRP-4 a généré un sentiment de malaise et de curiosité. Proche d'un style futuriste Daft Punk
androïde, impressionnant par sa mobilité physique, on se demandait ce qui pouvait bien résider sous sa carrosserie en plastique.
L'idée était de le démonter et de découvrir sa conception électrique : ses servomoteurs, ses fils et ses microcontrôleurs.
organisé par des ingénieurs pour maintenir sa fonctionnalité. La difficulté de comprendre son code et la complexité
Les scénarios d'interaction dont il est capable nous ont fait reconsidérer notre impression initiale. A l'origine un
A.VOID est un projet numérique co-crée avec Isadora Teles de Castro en 2020. Concu comme une serie des performance collectives autour du son, du geste et de l'image, ce projet a un format hybride mélangeant radio, applications web et gestes devant une webcam.
Contexte de création
Impactées par les contraintes en lien avec la pandémie Covid19, nous nous sommes demandées, comme beaucoup d’autres, quel avenir pour l’art performatif et comment agir dans ce contexte extraordinaire. Face à des lieux de diffusion fermés, nous avons pensé organiser des performances collectives avec des utilisateurs qui se connectent en même temps que nous, pour co-créer ensemble. Cela a commencé en juillet 2020, quand nous avons présente notre premiere maquette A.VOID v1. en direct sur les ondes de Radio Galoche. Six mois plus tard, en décembre 2020, nous avons présentée la deuxième version du projet.
Ainsi l’isolement social et l'impossibilité de se rencontrer pour expérimenter et créer, nous à contraint d'inventer des nouveaux outils. Nous avons proposé une plateforme accessible en ligne pour simuler un espace de rencontre virtuel. Les participants se sont connectés grâce à leurs téléphone portables ou ordinateurs. Une fois détecté, chaque mouvement devant la webcam a été lié à un vecteur graphique dévénu agent virtuel pour des interactions son-image-texte. Des gestes ont été analysée pour extraire la direction et vitesse du mouvement et ainsi influencer le déplacement de l'agent virtuel, lors d'une succession de scénarios d'exploration appelés ``scènes”.
Parmi les objectifs du projet, nous avons cherché à:
\begin{itemize}
\item tester l’impact des technologiques numériques sur la créativité
\item s'approprier des outils de création qui échappent aux contraintes du monde physique
\item improviser avec une entité autonome virtuelle
\item provoquer des synergies son-mouvement-image et convoquer l'aléatoire dans le processus de création
\item proposer une manière inédite de s’impliquer dans une expérience artistique en tant que créateur
\item proposer un cadre alternatif de réception d’une oeuvre artistique
\item questionner le rapport performeur-scène, dans une situation de présence dématérialisée
\end{itemize}
Pour ma propre recherche en danse, ce projet m'a donné l'opportunité de comprendre intuitivement l’impact que la dématérialisation des gestes peut avoir sur le corps d'un danseur, tout comme cet impact peut influer les autres médiums comme le son ou les images. J'ai pu également observer comment l’abstraction d'un geste modifie le comportement autonome d’un agent virtuel et l'inverse.
Lorsque les participants nous ont partagé leur incertitude quand au comportement attendu et à la synchronisation avec les outils numériques j'ai pu confirmer mes intuitions quant au rôle des dispositifs numériques dans la co-création. Ce moment flou, ou l'humain se sent abandonné devant l'opacité du dispositif technologique est devenu pour moi un vrai moment de lâcher prise, catalyseur d'une expérience créative. Vidée de ses attentes et projections quant au résultat, le participant ne se regarde plus faire mais intègre le dispositif en pleine conscience, avec toutes ses sens. L'outil se transforme ainsi en véhicule d'exploration, dont les possibilités d'expression sont infinies.
Dans le cas d'AVOID, selon le rythme et la vitesse du mouvement devant la webcam, le son a été plus fort, ou plus vite.
Cela à confirmé l'importance des outils technologiques dans les processus de recherche-création. Persuadée que ce type d'état de pleine conscience à une composante synesthesique, j'ai poussée plus loin le lien entre son et geste. Les gestes ont fini ainsi se produire guidées par le son, dans l'intimité de chaque espace de représentation. Autre que moi et Isadora qui regardons la régie de la performance collective, chaque participant explorait son espace virtuel à son propre rythme. Des changements du son ou moments de silence ponctuait les transitions, encourageant une liberté d'expression pour chaque participant. Ainsi la fin était différente pour chacun d'entre eux, selon la dynamique d'exploration et les moments d'errance. Parfois des participants ont ignoré des instructions, ou manqué les observer, sans que cela soit contraignant pour notre processus. A titre personnel, cette opacité et manière de travailler est un moment privilégié loin des préoccupations pour un résultat visible. L'expérience subjective du spectateur, devenu performeur à l'intérieur de notre dispositif a été le vrai résultat de notre expérimentation.
Cela a orienté mes recherches ultérieures sur la figure du robot et l'effet qu'il produit en tant que partenaire de scène.
Parmi les notes de mon journal de bord de cette époque, j'écrivais le 4 novembre 2020:
\textit{Comment le geste du robot, par son caractère aléatoire et imprévisible, peut changer/transformer le geste du danseur?
Interagir avec une machine à laver, c’est comme interagir avec un robot? Quelque chose du comportement humain est déjà inconsciemment modifié face à un non-humain...}
Description du projet:
A.VOID cherche à modifier le rapport à une salle de spectacle, en créant des forme artistiques hybrides qui appartient aux spectateurs autant qu'aux artistes, capables d'exister indépendamment d'eux.
La performance propose un espace virtuel d’exploration collective, où les participants questionnent leur identité à travers
des sons, d'images et des textes qui interagissent avec eux.
Les participants intègrent notre plateforme à travers le webcam d'un dispositif numérique portable(ordinateur ou téléphone). Nous proposons un cadre d'improvisation avec des instructions donnés via une plateforme radio ou vidéo. Des données de position du souris dédoublent les participants en agents virtuels dont les gestes devant la webcam influencent le comportement des agents autonomens virtuels.
Ainsi dans notre système multi-agents, il y a deux catégories de participants:
\begin{itemize}
\item{A.G.A. qui signifie agent generatif autonome}
\item{D.V.P. qui signifie dedoublement virtuel d'un participant}
\end{itemize}
Le D.V.P est le résultat des données de position du souris et des gestes devant la camera, que chaque participant fait lors de sa connexion.
\caption{Schema d'interaction pour le systeme multi-agents}
\label{fig:avoidschema}
\end{figure}
Chacun se connecte et explore cet espace dématérialisé, accessible seulement le jour de la performance.
La durée de chaque expérimentation ou improvisation est d'environ 15 minutes. Selon les temps de connexion de chaque utilisateur et son interet pour la performance, nous maintenons la connexion au serveur ouverte environ 30min supplémentaires.
La première scène est collective, montrant les avatars correspondants à chaque participant. La suite est une exploration individuelle. Au fur et à mesure que la performance avance, d’autres agents autonomes interagissent avec les participants. L'apparence des agents autonomes est similaire aux avatars des autres participants, afin d'entretenir une ambiguïté sur l'interaction entre des participants humains dédoublés ou des agents virtuels.
A.VOID v1. est une proposition sonore d’isolement graphique. Les utilisateurs se connectent sur une plateforme en bougeant un objet de couleur rouge devant leur caméra. Ce déplacement est traduit sous la forme d'un point de couleur d'un canevas numérique. Sur ce canevas, un point central rouge représentant un mini-robot doit être touché pour lancer une nappe sonore. Nous captons le robot directement dans le plateau de la webradio via une webcam. Il est en train de danser maladroitement accompagné par les bruits faites par des utilisateurs connectés. Lorsque des autres points de couleur se touchent, d'autres sons émergent, le tout forme une nappe de bruitage sonore, doublé par les mouvements des utilisateurs.
La performance diffusée en juillet 2020 est accessible online, sur le site de Radio Galoche\footnote{http://www.galoche.online/emission/31/2020-07-03-10-30-avoid-i}
A.VOID v2. continue notre questionnement sur la relation son-images-mouvement, dans une perspective synesthésique. Cette fois-ci nous avons imaginé une performance individuelle en plusieurs étapes, dont la durée reste à déterminer pour chaque participant. Nous diffusons la performance en direct à la radio pendant ses premières 15 minutes, mais un algorithme de vie artificielle évolutif continue d’interagir avec les inputs webcam de chaque utilisateur. Il s’agit donc d’une exploration personnelle sur la notion de soi et d’identité numérique. Lors de la dernière scène, une image pixelisée de la webcam de chaque participant est envahie par des agents virtuels évolutifs. Selon sa couleur, chaque pixel devient de la nourriture ou du poison pour ces agents virtuels, déformant l'image de fond qui capte le background de chaque participant. Par cela, notre intention est de questionner l'identité numérique ainsi que la possibilité de performer avec des entités generés par un contexte virtuel. L'interaction ne suit plus règles des systèmes physiques et c'est difficile de distinguer les agents réels des agents virtuels de cet ecosysteme. La présence humaine est traduite par des moyens d'expression propres à l’ordinateur ou au portable qui se connecte à l'application. C’est un type d'interaction re-contextualisée avec des entités autonomes virtuelles qui agissent directement sur l'humain.
La performance diffusée en décembre 2020 est accessible online, sur le site de Radio Galoche\footnote{https://www.galoche.online/emission/307/2020-12-12-12-20-avoid-ii}
Parmi les mots-clés qui décrivent la dernière maquette du projet, nous nous sommes arrêtées sur: exploration synesthésique, performance dématérialisée, comportement aléatoire, geste dématérialisé,écosystème virtuel, dédoublement numérique.
Nos notes de 8 décembre 2020 décrivent le scénario d'A.VOID v2, qui se déroule sous la forme d'un tableau en 10 scènes.
Scène 1
L’utilisateur se connecte et voit une interface graphique où il y a une ligne qui bouge (déplacement inspiré par l'algorithme flow fields)
Scène 2
Écran noir, un contour de main apparaît avec une ligne qui suit ce contour
Scène 3 White Noise
Flock statiques comme un ciel la nuit avec des étoiles filantes
Scène 4
Flock qui bougent suivant le mouvement de l'utilisateur
Scène 5 SON1
Ecran noir avec des flow fields et moment long d’improvisation son + flow fields
Scène 6 SON2
Flow fields qui se transforment en shadder, improvisation musicale continue
Scène 7
Juste shadder avec SON2
Scène 8
Shadder avec l'apparition du visage de participant (stop SON2)
Scéne 9 White Noise
Image du webcam pixelisée avec le flock qui revient 10sec puis des les algorithmes évolutifs
Scène 10 White Noise
Lecture du texte puis encore 10sec avec les flock évolutifs
FIN
fin de l’antenne alors que chaque participant peur continuer l'expérience individuellement pour voir les algorithmes évolutifs modifier l'image de fond
\textbf{Extrait du texte qui a accompagné Avoid v2. lors de sa diffusion en decembre 2020: }
\textit{Ce voyage commence par l’empreinte d’une main, tel les empreintes à l’ocre des hommes préhistoriques sur les murs des grottes. Cette main dont le mouvement peut modifier le son de notre dispositif, est le salut d’une personne dont on ne connaît pas l’identité, vers des autres, anonymes connectés à un serveur qui diffuse notre expérimentation.}
\textit{Comme d’autres avant nous, nous aimerions dire que nous vivons un moment particulier dans l’Histoire de l'humanité. Est-ce que ce moment coïncide- en termes de mutation de l’esprit- avec ce que les humains préhistoriques ont ressenti lorsqu’ils ont créé ce que nous appelons aujourd’hui l’art rupestre? Peut-on dire que l’art numérique d’aujourd’hui sera l’art préhistorique de demain? Nous ne le saurons jamais. Mais ce que nous savons c’est que les possibilités qui se dessinent devant nos yeux sont infinies. Et notre rapport au monde, tel qu’il a été défini par nos ancêtres, est lui aussi en train de s'hybrider avec des machines dont l’existence ordonne la notre.}
\textit{Le dernier repère de cette expérimentation est le reflet d’un visage. Notre propre visage à l'intérieur du dispositif numérique. Sur l'écran de votre ordinateur, ce visage se dédouble dans des matrices de 0 et de 1. Puis un algorithme de vie artificielle s’inscrit dans l'interface pour modifier ce reflet qui change au fur et au mesure que les algorithmes opèrent. Les personnes connectées au serveur- participants à notre expérimentation- peuvent rester regarder cette transformation un temps indéfini. Chaque portrait est modifié d'une façon unique et personne n'a accès au rendu final à part l'utilisateur lui-même.}
\textit{Qui regardons-nous dans l'abysse de cette dématérialisation numérique? Est-ce nous, notre propre visage qui est altéré par des \textit{organismes numériques} ou ce sont des sosies d'une vie parallèle ? Sommes-nous ici et ailleurs? Et si oui, est-ce que nos sens se dédoublent, et ainsi se diluent, elles aussi dans l'absolu algorithmique?}
Le travail pour A.Void m'a permis d'explorer des intuitions quant à une dimension universelle de l'art, reliée aujourd'hui par la technologie. Quand un participant regarde le contour de sa main se dessiner sur l'écran, je ne peux pas m'empêcher penser aux premiers dessins pre-historiques, notamment celui de la grotte de Chauvet:
La capture de mouvement est une pratique qui a été exploitée dans de nombreux domaines, mais particulièrement dans l'analyse biomécanique des populations sportives et cliniques. Est-cette image une première tentative de capture de mouvement, ou un acte artistique?
En octobre 2021, lorsque j'ai donné le cours \textit{Perception, emotion and aesthetics of movement} (PEAMO), j'ai eu l'occasion de tester un format différent de la performance, avec les étudiants en Mastère Spécialisé Intelligence Artificielle et Mouvement pour la Robotique et les Systèmes Interactifs (MS AIMOVE) de l'école Mines Paris Tech. La performance a été adaptée au contexte, avec Isadora me rejoignant via skype pour présenter le projet et le lancer à distance.
Les participants ont interrogé les caractère spontané des interactions, leur participation collective n'étant pas la meilleure façon d'interagir avec le dispositif puisqu'ils nt pu regardes les écrans d'autres participants pour comparer leur parcours.
Pendant ce cours j'ai également fait une démonstration avec un capteur Leap Motion (LMC), pour montrer une alternative accessible à la captation des mouvements de mains. LMC est un petit périphérique USB qui se branche sur l'ordinateur. Il scanne une zone d'environ 0.22 m3 au-dessus de l'appareil, à l'aide de lumières LED et de capteurs de caméra. Cela lui est suffisant pour détecter les deux mains et les 10 doigts lorsqu'ils se déplacent dans l'espace devant l' ordinateur. Ensuite il traduit les données de position en informations numériques qui peuvent entre transformées en indices sonores ou visuels.
Ce type de capteur offre un moyen peu coûteux de suivi des mains, sans utiliser des marqueurs de position. Son utilité est limitée par un petit champ de vision mais la précision de sa détection le rend intéressant pour des projets DIY.
Pour ce projet, nous avons utilisé le langage de programmation P5.JS, dont les brouillons, en anglais \textit{sketches}, facilitent une connexion multi-utilisateurs pour co-créer ensemble. P5 est une librairie open source JavaScript accésible online pour facilliter le \textit{creative coding}- une façon de programmer simplifiée, propre aux artistes. Ce langage est dérivé de Processing - une solution software imaginé comme façon simplifiée de programmer, grâce au contenu visuel de ses modules. Avec le temps, la communauté à fait évoluer le software dans un outil de création avec multiples applications, dont le P5.
\smallskip
Bien que P5 est accessible dans un browser, pour pouvoir inviter plusieurs utilisateurs se connecter à la même page, nous avons du créer un server qui traite des demandes HTTP avec l'aide de la plateforme \textit{Heroku}\footnote{https://devcenter.heroku.com/categories/nodejs-support} et du code source \textit{Node.js} dédiées aux applications réseau- \textit{JavaScript network applications}.
Grâce aux tutoriels open source du module \textit{sockets.io} nous avons pu inviter plusieurs participants accéder simultanément à notre performance. Le principe a été de transmettre les coordonnées mouseX, mouseY du souris de chaque utilisateur, sur une canevas graphique partagée en temps réel.
Isadora a choisi explorer les possibilités graphiques de notre performance par les \textit{Shaders}-deseffets visuels spéciaux qui s'exécutent sur la GPU(Graphic Processing Unit) d'un ordinateur. Cela lui a permis de traiter de nombreux pixels à la fois pour générer du bruit et appliquer des filtres inspirés par des algorithmes de vie artificielle.
Le travail de recherche sonore, nous a conduit à employer la librairie \textit{P5sound}. Les fichiers utilisés comme bases sonores sont: \textit{le Piano Concerto \#2 in C Minor, Op. 18}(1901) par Serguei Rachmaninoff et \textit{le Concertino pour harpe et piano}(1927) par Germaine Tailleferre, en complément d'une nappe sonore de BruitBlanc, \textit{WhiteNoise} qui accompagne certaines scènes de la performance. Parmi les algorithmes de composition, nous avons choisi de détourner la fréquence et le volume sonore de ces fichiers, selon la position de chaque utilisateur sur le canevas et la vitesse de ses mouvements. Alternativement, dans la première version de la performance, nous avons associé un son au robot et un son à chaque interaction entre les positions des utilisateurs, créant un espace sonore qui illustrait les déplacements dans l'espace.
\subsection{Émission radio sur la conscience artificielle}
En juillet 2020, j'ai eu l'occasion d'animer l'émission radio \textit{Conscience Artificielle. Mythe ou Realité?} dont les invités ont été des artistes-chercheurs. Parmi les invitées: Sooraj Krishna du laboratoire ISIR, puis Chu-Yin Chen, Isadora Teles de Castro et moi-même du laboratoire INREV\footnote{http://www.galoche.online/emission/33/2020-07-03-11-30-conscience-artificielle-mythe-ou-realite}.
L'objectif de cette émission, structurée sous la forme d'un débat, a été d'échanger des points de vue personnels sur la question de la conscience artificielle. La motivation principale a été de comprendre comment la science peut modéliser un phénomène qu'elle n'arrive pas à définir entièrement. Plus exactement, nous avons cherché à comprendre et aussi spéculer sur l'éventualité qu'une conscience humaine peut-être reproduite par des moyens artificiels (ou pas).
J'ai préparé une série des références qui ont été distribués en amont de l'émission. Parmi eux, quelques extraits ont été écoutés en direct. La première mention a été le projet \textit{The Humain Brain Project} ou HBP. Ce projet scientifique d'envergure crée en 2013 vise à simuler le fonctionnement du cerveau humain grâce à un superordinateur, dont les résultats obtenus auraient pour but de développer des nouvelles thérapies médicales en réponse aux maladies neurologiques de notre époque.
Dans le déroulée de l'émission nous avons également diffusé un extrait sonore du chercheur Stanislas Dehaene, ancien élève de l'École normale supérieure et docteur en psychologie cognitive. Professeur au Collège de France depuis 2005, il est responsable de la chaire de Psychologie Cognitive Expérimentale. Ses recherches se concentrent autour des bases cérébrales d'opérations les plus fondamentales du cerveau humain: la lecture, le calcul ou la prise de conscience.
La prochaine référence partagée a été un extrait sonore qui évoque le concept d'\textit{Umwelt}, à la croisée des chemins entre biologie, communication et sémiotique. Selon Jakob von Uexkull et Thomas A. Sebeok, l'Umwelt (pluriel : Umwelten) désigne l’environnement sensoriel propre à une espèce ou un individu, traduit en français par l'expression de \textit{monde propre}. La théorie de von Uexkull explique comment des organismes qui partageant le même environnement, font l'expérience de différents réalités sensorielles. Par exemple, une abeille qui partage le même environnement qu'une chauve-souris, sera sensible à la lumière polarisée tandis que la chauve-souris réagira aux ondes issues de l'écho-location. Les deux stimuli leur étant réciproquement inaccessibles, produisent une perception différente du monde extérieur pour chacun.
Un autre article partagé, fait état d'une définition de la conscience en lien avec des états d'éveil\cite{vanhaudenhuyse2007elsevier}.
Nous nous sommes inspirés par ce graphique qui met en relation le niveau d'éveil et l'environnemt:
\caption{Corrélation du niveau d'éveil avec la conscience de soi et de l'environnement. }
\label{fig:conscience}
\end{figure}
Ensuite j'avais lu un extrait de l'article \textit{
Action \& Enaction - Emergence de l'oeuvre d'art}\cite{lambert2017action} que Chu-Yin CHEN avait écrit en 2017:
\begin{quote}
``Quand je lance un caillou, je peux prévoir sa trajectoire et savoir où il ira. Mais, si je lâche mon chat, et bien que je l’aie apprivoisé, il s’échappe de ma main : il fuit pour se cacher ou il cherche à s’amuser. Quand je l’appelle, il joue à cache-cache, il fait tout ce qu’il veut dans cette maison. En fait, toutes les entités vivantes s’administrent par leurs propres lois qui caractérisent leur autonomie.”
\end{quote}
L'intelligence ou la conscience sont des concepts dont la définition varie suivant les domaines. C'est pourquoi, dès que notre raisonnement touche à l'intangible, il devient difficile de quantifier et rationaliser la conscience sans la réduire au seul fonctionnement du cerveau. Parmi les idées véhiculés lors des interventions, je mentionne celle où les émotions et la perception sont vues comme des composantes en lien avec la conscience, tout comme les pensées ou le sens du soi. D'un point de vue psychologique, elle représente une sensation intériorisée immédiate qu'un être établit avec le monde. Dans ce sens, elle peut aussi être reliée aux notions de connaissance, d'intuition et de réflexivité.
La conscience est également représentée par un parcours graduel entre le sommeil profond et la veille peuplé par des états intermédiaires. Selon le paradigme de la recherche scientifique utilisé, un état modifié de conscience (EMC) est un état mental différent de l’état de conscience ordinaire. Cet état représente une déviation dans le fonctionnement psychologique d'un individu, par rapport à certaines normes générales de la conscience à l'état de veille. De cette façon les rêves, les états hypnotiques, les hallucinations, la transe, la méditation, les états sous l'influence des drogues psychotropes ainsi que l'état végétatif ou le coma sont des exemples d'EMC.
\textbf{illustration courbe EMC}
Dans l'introduction de son livre \textit{Les États modifiés de conscience}(1987) Georges Lapassade, décrit les EMC comme:
\begin{quote}
``un certain nombre d’expériences au cours desquelles le sujet a l’impression que le fonctionnement habituel de sa conscience se dérègle et qu’il vit un autre rapport au monde, à lui-même, à son corps, à son identité.”\cite{lapassade1986emc}
\end{quote}
Plus tard, l'ethnologue évoque l'importance du dédoublement vu comme une dissociation spontanée entre deux dimensions fondamentales de la conscience modifiée. Pour Lapassade il existe une dimension passive de la conscience où le sujet semble subir ce qui lui advient, en contrepoids d'une dimension active d’observation par laquelle le sujet prends acte de ce qu'il traverse. Le miroir d'une réalité propre, selon les capacités sensorielles de chacun, illustre ce que le sujet arrive à traduire consciemment.
A leur tour, les invités illustrent ce problème sous la forme d'une paradigme recursive dont l'objectif est la connaissance de soi. Isadora parle d'un cycle d'apprentissage qui passe par plusieurs étapes: ``the more we try to simulate consciousness, the more we understand consciousness. Our actual state of consciousness is too ahead of what we try to simulate. Our trials are a way to understand our own consciousness, a late mirror from a millions of years ago.” Ces observations nous permettent de re-définir le concept de réalité, en nous appuyant sur les concepts théoriques de von Uexkull ou de Dehaene, ainsi que sur nos propres observations.
\textbf{If you throw a robot, what would the robot do?}
Les échanges ont continué en avançant l'idée d'une possible conscience pour les robots, en lien avec la boucle perception-cognition-action. Puisque une simulation semble à l'heure actuelle la seule possibilité réelle d'une tel objectif, nous nous sommes demandés comment mieux définir cet état d'émulation d'une conscience. Par quels biais et facteurs cela doit se produire pour générer une expression crédible d'une effet de conscience ou ``make a believable expression of consciousness” pour citer Sooraj. Nous avons pris comme point de départ le comportement des organismes vivants. De cette manière, nous nous sommes demandées comment mieux anticiper le comportement qui vise la trajectoire d'un robot jetée, par rapport au trajectoire du chat ou de la pierre dans l'exemple de Chu-Yin. Nous avons conclu que le comportement émergeant d'un système complexe dépend également de l'influence de son environnemt. Le degré d'incertitude des conditions de l'environnement doit être pris en compte. Nous nous sommes mis d'accord sur le fait que la ré-activité et l'autonomie de ce type de système, est ce que
garantit sa réussite. Un robot qui s'adapte aux conditions de son environnemt avec les mêmes instincts qu'un humain, sera l'émulation parfaite. Cependant autant que nous ne connaissons pas dans les plus brefs détails notre propre fonctionnement en tant qu'espèce, nous n'y arriverons pas à la modéliser.
Rétro-activement, la pensée du Michel Bibtol peut pousser plus loin l'exercice de spéculation fait pendant l'émission radio. Suite aux nombreuses échanges, nous n'avons pas fait écho à l'article \cite{bitbol2018cp} que faisait partie de notre matériel didactique pour entrer dans la matière. Le philosophe de sciences semble conclure mieux que nous le débat:
``Et d’ailleurs, pourquoi voudrait-on plus que cela ? Pourquoi voudrait-on que les robots soient \textit{réellement} le siège ou le centre de perspective d’une conscience phénoménale, en
supplément de leur comportement analogue à celui d’un être conscient ? Qu’est-ce que cela nous apporterait de plus par rapport au \textit{comme si} ? Une seule chose : la potentialité de
s’incarner soi-même, de se ré-incarner faudrait-il dire, dans un robot et d’affranchir ainsi le flux d’identification vécu que nous appelons \textit{ego} de ce corps malade et mortel. Le test pour
savoir si quelqu’un a réussi à se convaincre de cette possibilité serait de lui poser cette simple mais dérangeante question : \textit{accepteriez-vous de mourir à l’instant si vous saviez que votre structure cognitive et vos habitus comportementaux ont été intégralement téléchargés dans un robot?} Ou auriez-vous un doute, celui que la structure cognitive en question, n’ayant aucun vécu associé, vous seriez alors mort pour de bon ?”
\end{quote}
Selon S.Dehaene, la conscience opère une intégration ainsi qu'une amplification des informations venues de différentes parties du cerveau. Chacune de ces parties traite à son tour, de façon automatique et non consciente, une partie des informations provenant de différents sous-modules. Pour le neuro-scientifique, ce fonctionnement hiérarchique basé sur le tri d’informations, permettra au robot d'adapter son comportement à chaque situation nouvelle.
Actuellement les robots autorégulent en partie leur comportement, selon leurs taches et capacités de calcul. Pour atteindre une autonomie décisionnelle, ils devraient simuler à 100\% un comportement humain. Grâce aux avancées en neurosciences, les architectures cognitives robotiques s'inspirent de plus en plus de mécanismes conscients d’intégration de l’information. Cependant ces mécanismes ne sont pas parfaitement compris, tout comme celles inconscients qui restent encore opaques et difficile à simuler.
Dans ce contexte, la théorie de l’information intégrée proposée par Giulio Tononi apporte des réponses complémentaires. Cette théorie avance l'hypothèse que l’accès à conscience d’un individu est lié à la quantité d’information intégrée dans son cerveau.
La thèse de Dehaene\cite{dehaene2021springer} approfondie cette perspective. Ainsi la définition de la conscience est donné en trois temps- celle de la conscience qui traite d'une information disponible globalement dans le cerveau ou qui peut-être utilisée à tout moment (C1 global availability of relevant information) avec l'interprétation subjective de cette information (C2 self-monitoring), mais aussi celle qui résulte des processus inconscients (C0- unconsciouss processing).
\caption{Illustration de la relation entre les composantes C0-C2 de la conscience, selon les observations théoriques de S. Dehaene}
\label{fig:c1c2}
\end{figure}
La composante C1, celle de la disponibilité de l'information à tout moment, fait référence au caractère transitif de la conscience. Dans l'exemple de Dehaene, cela corresponds au pilote d'une voiture qui comprends la signification d'un voyant qui s'allume. Ainsi la représentation mentale du voyant rouge est intégrée dans un système cognitif d'interprétation de symboles. Cette information est disponible globalement pour des autres associations, autant qu'elle reste consciente.
Une autre propreté de la conscience est son caractère reflexif. Cela signifie qu'un système cognitif est auto-référentiel, capable de s'auto-évaluer selon un contexte donné afin d'obtenir des informations nouvelles. Par exemple, l'être humain qui récupère de façon automatique des informations sur la position de son corps, pour mieux l'ajuster en cas de disconfort. Dehaene décrit cela comme une introspection, vue comme moyen de produire des représentations internes propres concernant les habilités de quelqu'un. Alors qu'une grande partie de l'information de notre environnement est décodée et stockée dans le cerveau sans que nous l'utilisons de façon conscience. Parfois des souvenirs peuvent influer nos décisions et états conscients, mais la plupart du temps cette masse d'information est opaque et opère au niveau de notre inconscient.
Selon Dehaene\cite{dehaene2021springer}, la composante C0 est siège des processus d'apprentissage et de notre coordination et la plupart des robots fonctionnent grâce à ses principes. Élargir ce modèle aux composantes C1 et C2 est un défi pour les chercheurs en robotique:
``How could machines be endowed with C1 and C2 computations? Let us return to the car light example. In current machines, the \textit{low gas} light is a prototypical example of an unconscious modular signal (C0). When the light flashes, all other processors in the machine remain uninformed and unchanged: fuel continues to be injected in the carburetor, the car passes gas stations without stopping (although they might be present on the GPS map), etc. Current cars or cell phones are mere collections of specialized modules that are largely \textit{unaware} of each other. Endowing this machine with global information availability (C1) would allow these modules to share information and collaborate to address the impending problem (much like humans do when they become aware of the light, or elephants of thirst).”
Dans les exemples de Dehaene, un éléphant est capable de parcourir jusqu'au 50km pour retrouver une source d'eau lorsqu'il a soif, en intégrant des informations de son environnement et des indices par rapport aux autres fois quand il a eu soif. Nous pouvons espérer qu'un jour, des robots conscients de leur environnement et de leurs expériences passés, seront capables de s'auto-réguler et fonctionner de manière autonome dans un éco-système où ils seront tout autant intégrés qu'un espèce vivante.
Une instance intéressante de ma recherche-création a été la préparation, entre décembre 2021 et mai 2022, d'un Module Pédagogique Innovant (M.I.P.) pour l'école doctorale EUR-ArTeC. Cette expérience d'enseignement m'a permis de conceptualiser mes questionements dans un cadre académique et ainsi les confronter et adapter à un contexte général de recherche.
De cette façon, l'atelier laboratoire \textit{Interfaces Magiques : objets connectés pour la performance artistique} a été conçu comme un partage des connaissances autour du design et de la création d'accessoires électroniques interactifs et connectés pour des performances artistiques. Proposé comme un espace d’expérimentation mixte entre arts performatives, électronique et création d’objets connectés, ce module m'a permis de réfléchir à comment des interfaces connectées peuvent enrichir la créativité d'un performeur et comment un spectateur intègre cette proposition.
Le projet a été conçu et animé en collaboration avec Isadora Teles de Castro, dans le cadre du projet ArTeC: \textit{Co-Evolution, Co-Création \& Improvisation H2M (CECCI H2M): Promouvoir une coévolution comportementale durable avec une co-création émergente Homme-Machine} dont j'ai fait mention dans l'introduction de ce travail.
Il a eu lieu du 6 au 9 mai, de 10h à 18h, dans mon studio artistique au DOC! (26 rue du Docteur Potain, 75019 Paris) puis le 27 mai en ligne, pour discussion et retour d'expérience.
Les sept participantes ont été des étudiantes en M1 et M2 de l'école EUR-ArTeC. Puisque l' objectif pédagogique a été l’appropriation des dispositifs électroniques connectés dans un contexte artistique, elles:
\item ont acquis des concepts et des références sur les accessoires électroniques interactifs portables, ainsi que sur les objets IoT connectés et leur contexte de création artistique,
\item ont expérimenté une première étape de planification, prototypage et réalisation d'interface pour des fins performatifs et artistiques,
\item ont acquis des bases en électronique et informatique qui leur permettront de s’imaginer leurs propres projets créatifs en interfaçant ensemble des modules électroniques (capteurs, actuateurs, carte contrôleur).
\item ont eu l’occasion de customiser leurs propres outils et accessoires lors d’un exercice dramaturgique en lien avec le féminisme et l’hybridation du corps.
L'atelier a été structuré en plusieurs étapes. D'abord nous avons mis en place un syllabus contenant une état d'art des projets créatifs utilisant du matériel électronique et le lien vers des tutoriels de \textit{creative coding} et projets DIY qui nous ont inspiré. Ensuite nous avons présenté notre propre matériel électronique et quelques capteurs avant de commencer le travail pratique de familiarisation et expérimentation avec les boards Arduino et les capteurs. Le troisième temps a été celui de la réalisation d'une maquette collective, pensée comme étude de cas des connaissances acquises. Grâce à l'utilisation de capteurs, des servo-moteurs et de formes textiles plissées et pliées, les participants ont appris à créer une extension corporelle portable connecté aux mouvements d'un autre corps. Dans les semaines qui ont précédé cet atelier, nous avons également organisé un temps d'échange et de retour d'expérience.
Une partie importante pour les permises du projet, a été le partage des ressources bibliographiques. Parmi les artistes qui nous ont le plus inspiré, il y a le travail de Katie Hartman. Son livre \cite{hartman2014make} présente les bases de l'électronique pour des projets créatifs, ainsi que des exemples de code et d'autres astuces et ressources partagés par la communauté. Artiste, chercheuse et pédagogue basée à Toronto, le travail de Hartman couvre des domaines comme la physique, l'informatique, l'électronique portable et l'art conceptuel. Fondatrice du \textit{Social Body Lab}, elle coordonne une équipe de recherche dédiée à l'exploration de technologies centrées sur le corps dans
un contexte social. Pour Hartman, le corps humain est une interface primaire en lien avec le monde extérieur et son projet d'utiliser des dispositifs portables (i.e. \textit{wearables}) est pensé en lien avec l'augmentation de nos capacités sensorielles.
Un expriment qu'elle propose, décrit les consignes pour l'écoute et l'amplification des bruits produit par une partie de notre corps. J'ai utilisé ses conseils lors des étapes de recherches ultérieurs, grâce à l'aide des capteurs sonores (microphones piezoéléctriques). Je parlerai de mes observations dans un prochain chapitre.
Cependant il est important de mentionner que cette approche informelle, au caractère ludique de Hartman m'a réconcilié et aidé à mieux comprendre le rapport au corps, par le biais d'une technologie simplifiée (\textit{lowtech})
Au même titre, Hannah Perner-Wilson et Mika Satomi, dont le travail est répertorié online sur le site \textit{How to get what you want}.
Leur idée est de mettre à disposition des références ``compréhensibles, accessibles et maintenables” qui encouragent les participants à contribuer ultérieurement, une fois les bases acquises. Les deux artistes et chercheuses cherchent à souder la communauté du collectif KOBAKANT\footnote{https://www.kobakant.at} qu'elles ont crée en 2008. Pour cela, elles explorent (souvent avec de l'auto-ironie et de l'humour) l'artisanat textile et l'électronique comme outils critiques des aspects technologiques de notre société.
``KOBAKANT croit que la technologie existe pour être piratée, faite à la main et modifiée par tout le monde pour mieux répondre à nos besoins et désirs personnels.”
Le travail individuel de Hannah Perner-Wilson s'est constitué en parallèle autour du projet \textit{Wearable Studio Practice} (WSP). WSP représente une collection d'objets portables -\textit{wearables}- qui facilite la création de projets électroniques nomades, comme moyen d'expérimenter le monde.
Pour elle, l'acte de fabriquer-\textit{making}-est une forme d'expression créative en lien avec la nature.\smallskip
Je rajoute à cela l'importance du héritage de Rosalind Picard et son travail au laboratoire MIT, où elle a développé sa thèse sur l'importance des émotions dans la programmation- \textit{affective computing} où le concept même d'ordinateur est revisité du point de vue de son utilité. Si la plupart des ordinateurs sont utilisés d'une façon identique, son équipe imagine des ordinateurs qui peuvent être portés comme des lunettes ou des vêtements, pour interagir avec l'utilisateur en fonction de son contexte. Son hypothèse est que les technologies peuvent augmenter nos capacités affectives, comparatif avec la communication inter-personnelle directe, puisque la communication intermédiée par un ordinateur offre des multiples possibilités d'expression\cite{picard2000affective}. Sa démarche a motivée les prochaines générations des chercheuses à affranchir des nouvelles limites et oser penser différemment. Peu à peu, l'accès aux ressources s'est démocratisé et ces projets de recherche sont devenus Open Source pour inspirer le travail de Perner-Wilson ou Hartman, quelque part à la lisière entre l'académique et le do-it-yourself (DIY).
En suivant les avancées dans ce type de communauté scientifique, dont les membres sont souvent appelés \textit{makers}, la possibilité de créer des appareils portables ludiques pour amplifier, étendre ou renverser notre langage corporel, reste une activité récréative capable d'inspirer plusieurs domaines plus ``sérieuses”, dont la robotique. La décentralisation des pratiques et le partage des ressources, déterminent une partie de makers à détourner le rôle de ces dispositifs dans les interactions sociales. Ils explorent ainsi les moyens d'étendre physiquement leur propre expressivité par l'intermédiaire de l'électronique portable. Ce qui fait que les roboticiens profitent également de l'invention des nouvelles pratiques ou matériaux, pour affiner leurs prototypes.
Dans notre contexte pédagogique, après cette première phase théorique, nous avons lancé un module pratique avec un petit inventaire des capteurs, breadboards, microcontrôleurs, connectors et le reste des matériaux disponibles pour les participantes.
\textbf{Performance collective comme rendu pratique}
La synthèse de nos expérimentations a été traduite sous la forme d'un moment performatif collectif. Pour se préparer, les participantes ont du créer un dispositif électronique connecté. Ensuite nous avons fait un travail dramaturgique pour interroger le potentiel scénique de ce dispositif, le message transmis et le rôle du dispositif connecté dans la performance.
Dans la liste des capteurs que nous avons utilisé, j'évoque celui qui a le plus inspiré les participantes- le
velostat. Ce type de capteur est utilisé dans beaucoup de projets artistiques DIY à cause de sa conductivité électrique, donnée par le noir de carbone qui imprègne sa structure. Velostat a des propretés piézorésistives, sa résistance diminue avec la flexion ou la pression, ce qui fait de lui un capteur flexible très accessible. Il est par exemple utilisé pour fabriquer les chaussures qui s'allument lorsque le porteur marche. Nous l'avons utilisé comme ``deuxième peau” pour une de nos performeuse, qui s'est collé ce matériel sur plusieurs parties de son corps, notamment la planque de pied.
Une fois qu'elle a posé son pied par terre la résistance a changé. Un petit servo-moteur connecté à distance, partie d'un accessoire porté par une deuxième performeuse, est actionné chaque fois que la résistance du velostat change.
\caption{détail de la performance- un signal envoyé via une connexion Wifi modifie l'accessoire servo-moteur selon les valeurs récupérés du capteur Velostat}
Parmi les idées qui ont peuplé notre exercice de recherche-création collectif, \textit{la guerrière empêchée} s'est imposé comme une figure matriarcale effigie d'une femme cybrog engagée qui réclame sa place au monde.
Son corps (dédoublé par les accésoirés que nos deux performeuses portaient) disposait d'une tête qui communiquait avec les pieds pour réfléchir.
J'ai partagé avec les participantes le manifeste de Donna Harraway\cite{haraway2010cyborg}, dont l'écriture nous a accompagné tout au long de ce moment de recherche dramaturgique:
\begin{quote}
``Modern machines are quintessentially microelectronic devices: they are everywhere and they are invisible. Modern machinery is an irreverent upstart god, mocking the Father’s ubiquity and spirituality. The silicon chip is a surface for writing; it is etched in molecular scales disturbed only by atmoic noise, the ultimate interference for nuclear scores. Writing, power, and technology are old partners in Western stories of the origin of civilization, but miniaturization has changed our experience of mechanism. Miniaturization has turned out to be about power; small is not so much beautiful as pre-eminently dangerous, as in cruise missiles... Our best machines are made of sunshine; they are all light and clean because they are nothing but signals, electromagnetic waves, a section of the spectrum. And these machines are eminently portable, mobile—a matter of immense human pain in Detroit and Singapore. People are nowhere near so fluid, being both material and opaque. Cyborgs are ether, quintessence.”
Lors du processus de création nous avons beaucoup interrogé nos limites et la nécessité de \textit{bien faire pour réussir en tant que femmes}. Le prototype final, entre prothèse et objet de castration relevait de nos doutes et ambitions en marge de la création. Un court extrait de cette présentation est disponible sur le blog de l'atelier\footnote{https://interfacesmagiques.tumblr.com/post/696462906243579904/day-4-the-performance-video}.
Le module que j'ai pris en charge pour une démonstration pratique utilise un capteur électromyographique (EMG) de surface appelé MyoWare Muscle Sensor Kit.
L'électromyographie est une technique qui mesure l'activité électrique musculaire à l'aide d'électrodes placées sur la peau, au-dessus du muscle. Cette mesure est prise lors d'une contraction musculaire et vise son amplitude maximale ou sa fréquence médiane. Certaines EMG captent également l'activité involontaire des muscles. Dans le domaine médical, un examen EMG est fait lorsqu’une personne présente des symptômes d’un trouble musculaire ou nerveux. Cette procédure évalue l’état de santé des muscles et des motoneurones qui les contrôlent.
Je me suis intéressée à ce type de capteur parce que les muscles sont les véritables déclencheurs du mouvement humain.
A leur tour, ils sont contrôlés par des cellules nerveuses(motoneurones) qui transmettent les signaux électriques au cerveau pour provoquer des mouvements de contraction et de relaxation. Ces deux phases, provoquent une différence de potentiel dans le signal électrique. Grâce aux tendons qui les fixent sur des os, les muscles actionnent le squelette et le font bouger articulation par articulation, suivant différentes angles de rotation. Cette mécanique de calcul et perpétuel ajustement se produit de façon autonome. Si elle est étudié par les ingénieurs bio-mécaniciens pour être modélisée, elle me fascine en tant que artiste apr son opacité quand à la conversion entre les signaux électriques et la pensée. Parfois quand je danse je verbalise une action pour un de mes membres- par exemple \textit{Leve ta main}, alors que des autres fois je m'oublie. C'est qui ce \textit{je} qui s'adresse à mon corps à la deuxième personne? Où disparaît il quand cela se produit de manière automatique?
A l'écart de ces questions ontologiques, un capteur EMG traduit la différence de potentiel en graphiques ou en chiffres qui sont ensuite nettoyés par l'intermédiaire des filtres. Ces données représentent un input pour générer du son, des images ou contrôler à distance des dispositif électroniques comme les robots.
\caption{Enveloppe du signal capté, les valeurs en rouge sont les valeurs avant l'application du filtre.}
\label{fig:signalemg}
\end{figure}
Dans la démonstration que j'ai préparé, l'EMG était connecté à un board Arduino Uno et à mon bras. Le signal capté a été ensuite transformé en son grâce à un contrôleur midi simulé avec le logiciel PureData. Le code Arduino qui a permis la configuration du capteur et la transformation du signal:
\begin{lstlisting}
int EMGPin = A0;
unsigned long sampling_period = 4; // milliseconds => ~256Hz must check if read does not take too much time !
unsigned long nextread = 0ul; //0 unsigned long (de 8 bytes)
unsigned long current_millis = 0ul;
const size_t bufferSize = 32;
int data_buffer[bufferSize]; //array de 32 pour stoquer
size_t data_ptr = 0; // adresse de chaque ecriture
bool enabled = false; //est-ce que je capture ou pas
void setup() {
// put your setup code here, to run once:
Serial.begin(9600);
for (int i = 0; i < bufferSize; i++)
{
data_buffer[i] = 0; //toutes les valeurs sont a 0, intialisation de l'array 0
}
}
void loop() {
while (enabled) //tant que je capte
{
current_millis = millis(); //le temps, la valeur en milisecondes depuis que le board est ON
//si on depase le 4ms (temps de sampling) on execute le code suivant
if (current_millis > nextread) // avant de mesurer, je verifie si un certain temps s'est passe pour pas mesurer trop vite
{
data_buffer[data_ptr] = analogRead(EMGPin); // a chaque interation on inscrit dans la prochiane caise du tableau la val analogique lu sur le pin
Lors de mes résidence artistiques dans le studio de Mathilde Monnier à Montpellier j'ai eu l'occasion d'améliorer ce prototype et le tester avec plusieurs mouvements, pour mieux comprendre mon écriture corporelle à l'aide du son.
Plus bas, un extrait vidéo d'un des moments de recherche-création\footnote{https://vimeo.com/718376555?share=copy}.
Au travers ces essais et maquettes j'ai pu mieux éduquer mes senses et ma perception à une présence active où mon corps se dilue pour mieux apparaître.
Me perdre dans ce mélange de présence. Comme Kozella remarque dans son livre\cite{kozel2008closer}, nous avons besoin des machines pour objectiver notre présence-absence. La technologie dévient un repère pour l'humain, qui se retrouve au-delà de son propre subjectivité:
``The examples of sight, touch, and movement reveal that the relation of reversibility is \textit{always imminent and never realized in fact} (Merleau-Ponty 1968, 147). It is impossible to over-exaggerate the
Nous nous sommes appuyées sur ses observations pour comprendre ce rapport à la corporéité et aux dispositifs connectés dans notre cadre d'improvisation sociale créative. Ainsi leur influence et les possibles dérives éthiques en lien avec la question du corps et ses limites, deviennent moins critiques du point de vue des \textit{wearables} DIY. Comparé à la robotique ces dispositifs sont plus accessibles, car moins compliqués et moins chers. Ils constituent un première étape dans la co-habitation avec une technologie accessible, ludique et non-invasive, pensée en lien avec l'humain. Pour moi cela se constitue dans une sorte de low-tech expérimental et experientiel, qui m'aide à mieux structurer la relation avec la technologie.
Dans une autre expérimentation, j'ai traité cette question de la low-tech et son importance dans ma recherche sur les robots, en travaillant avec des animata.
Cette fois il s'agissait des dispositifs électroniques autonomes, similaires à \textit{un animal électronique}.
La structure d'un animata dépends de son utilité. Pour mon processus de recherche-création j'ai eu besoin de comprendre comment l'improvisation dansée peut-être influencé par un déplacement spatial aléatoire.
J'ai ainsi construit un animat doté d'un capteur ultrasons HC-SR04 dont la seule contrainte était d'éviter les obstacles.
Cette bande de fréquences fait référence à des fréquences audio qui se situent en dehors de la gamme d'audition humaine (20 kHz). Les capteurs à ultrasons se reposent sur ces fréquences pour détecter la présence d'un obstacle ou pour calculer la distance d'un objet distant.
Le fonctionnement de base de ce type de capteur est semblable à la manière dont les chauves-souris utilisent l'écholocation pour se repérer en vol:
\begin{itemize}
\item un émetteur envoie une rafale d'ondes sonores à haute fréquence(entre 23 kHz et 40 kHz)
\item lorsque l'impulsion sonore frappe un objet, une partie des ondes sonores est réfléchie vers un récepteur
\item en mesurant le temps qui s'écoule entre le moment où le capteur émet et reçoit ce signal ultrasonore, la distance à l'objet peut être calculée à l'aide de la formule suivante :
\begin{equation}\label{key}
d = 0.5*c*t
\end{equation}
où \textit{d} répresente la distance en mètres, \textit{c} la vitesse du son (343 mètre per seconde) et \textit{t} le temps en secondes entre l'émission et la réception.
\end{itemize}
Cette schéma représente le monde de fonctionnement du capteur :
Parmi les charactéristiques de ce capteur, je méntionne une distance de portée précise avec une mise au point automatique, à grande vitesse. Cette technologie innovante de \textit{Time of Flight}- en français ``temps de vol”- a été d'abord la base du fonctionnement des radar. Avec le temps, la fréquence plus élevée d'un émetteur ToF basé sur la lumière, permet au signal de prendre divers modèles d'ondes, y compris les ondes carrées d'un oscillateur (differente des signaux sinusoïdaux analogiques que l'on trouve plus couramment des systèmes radar) et ainsi etre plus réactif et précis. La technologie ToF fonctionne d'une manière similaire aux capteurs ultrasons. Une source (émeteur) émette de courtes impulsions infrarouges pour ensuite mesurer le temps nécessaire à la lumière d'être réfléchie (réceptionné). Actuellement les capteurs Tof sont utilisés dans la robotique, à l'œuvre pour diverses applications de vision qui utilisent des algorithmes de ML.
Une fois que cette question de comportament d'animat a été réglé et ses arrets et deplacements sont dévenus plus netes, je me suis concentré sur nos possibilités d'intéraction. Aprés quelques prototypages et rétouches l'animait résemblait à cela:
Pour mon imaginaire artistique, je me suis dite à l'époque qu'il avait pérdu son ouie mais gagné de la vision en échange. Cela a également influencé ma façon d'imaginer sa présence lors des improvisations. Initiellement j'ai fermé mes yeux, en pensant à sa cecité induité. Sur les photos que j'ai montré plus haut, le capteur ultrasons réssemble à une paire des yeux, bien qu'en réalité il opere avec du son. En échange le capteur infrared est plus petit et son apparence peut sugerer des oreiles à la place des yeux. Fermer donc les yeux pour mieux entendre, à été une de mes prémiers explorations sénsorielles.
En avril 2021 lors d'une de mes premieres résidences de plateau dans le studio de Mathilde Monnier, j'ai commencé par des éxercices somatiques qui impliquent pas la vue. Immobile, je choissisais un endroit dans l'espace puis je laissais mon corps se réposes pour capturer son empreinte dans l'espace. J'imaginais mon enveloppe corporelle, je visualisais la position spatielle de chacun de mes mebres, j'écutais le son de ma réspiration puis les bruits autour de moi- du plus proche au plus lointain. Au fur et au mesure des mois, j'ai adapté cet exercice à plusieurs versions. J'ai arrivé à le faire début, les yeux fermes en bougeant. Beaucoup de fois la trajectoire que j'imaginais était pas la même avec celle de mes déplacements réels dans l'espace.
Cet endroit d'incertitude, l'écart entre ce que je visulaisais et là où mon corps m'amenait répresentait une sorte d'érrance joyeuse.
\textbf{dessin avec la trajectoire dans l'espace}
Restait à voir comment un animat qui à mon sens, avait un comportament similaire, pourrait intéragir avec moi. Plus concretement la question se posait inversement- comment moi dans cette joyause érrance j'ai pu intéragir avec \textit{lui}.
Parmi les scénarios d'interaction que j'ai imaginé, j'ai voulu comprendre l'incidence de son mouvement aléatoire sur mon improvisation spatiale ou l'impact de ses arrêts sur mon propre déplacement. Au sens plus large, cela m'intéressait la manière dont une improvisation dansée avec ce type de partenaire est différente d'une séance d'improvisation avec un humain.
La mise en pratique de ces scénarios s'est produite lors d'une résidence d'essai en juillet 2021, comme expérimentation préliminaire du projet CECCI-H2M.
Des vidéos de séances d'improvisation sont accésibles integralement.
Le prémier exemple\footnote{https://vimeo.com/855838173} montre une danse avec le capteur ultrasons,
le deuxiéme est une demnostration du capteur infrarouge \footnote{ https://vimeo.com/856034468}, alors que le dérnier vidéo est d'une maquette presentée lors d'une résidence de création\footnote{https://vimeo.com/856039742}. Cette maquette est le résultat de l'intéraction entre moi en tant que performeuse, l'animat et une projection des algorithmes visuels d'Isadora Teles de Castro.
Empathy, he once had decided, must be limited to herbivores or anyhow omnivores who could depart from a meat diet. Because, ultimately, the empathic gift blurred the boundaries between hunter and victim, between the successful and the defeated.
― Philip K. Dick, Do Androids Dream of Electric Sheep? }
\textit{I’m not interested in how people move. I’m interested in what makes them move.
Début 2023, aprés trois ans de travail individuel, j'ai eu l'occasion d'ouvrir ma pratique aux membres du collectif OpenSource. Crée en 2014, ce collectif propose un espace de rencontre, de réflexion et d’échange artistiques fondé sur la pratique de la mise en scène, dans une optique de mutualisation, de partage et de décloisonnement. Leur interet pour la recherche pratique en mise en scène, met en avant son caractère solitaire et individualiste. Cela faisait écho à ma recherche doctorale, puisque la recherche-création autour des robots m'a contraint a moins travailler en collectif ces dérniers années.
J'ai ainsi proposé une séance de travail sur le lâcher prise, dans le cadre d'une séssion d'experimentation à Anis Gras-le lieu de l'autre à Arcueil, du 16 au 20 janvier 2023.
Cette séance a été co-dirigé avec Erika Guillouzouic, commédiene et metteuse en scène, membre active du collectif.
Son titre - \textit{Le lâcher-prise : Pensée du corps et intelligence sensorielle}- laisse déviner le postulat de départ de ce laboratoire collectif. Mon idée était de questionner la possibilité d'un restart au travers le corps, à l'intérieur d'un processus créatif intense et contraignant. Comme si je revais inconsciement trouver une recette magique à mes propres tourments.
Ainsi cette session d’expérimentation a été orientée autour des processus de recherche-création en lien avec des pratiques somatiques\cite{jay2014pratiques} et des notions telles \textit{l'intelligence sensorielle}. J'avais auparavant participé à des sessions de recherche d'Open Source, proposés par des autres. Cette fois il s'agissait pour moi, d'ouvrir ma recherche aux autres metteurs en scène peu familiers avec la danse, la somatique et la robotique. Puis de voir comment cela s'articule avec leurs profiles, avec leurs besoins et éxperiences. Chaque participant avait son background, sa manière de faire puis aussi ses réistences quant au thème.
J'ai constitué le cadre de la session autour des exercices pratiques et des échanges théoriques, avec comme focus un autre type d'intelligence- celle qu'opère lorsque nos sens et notre perception s’activent- l'intelligence de l'instinct.
Nous avons experimenté des mouvements differentes de la danse contemoraine, notament des mouvements produits de façon automatique. Cela nous a fait comprendre comment les émotions peuvent influencer les caractéristiques physiques d'un corps en mouvement, comment les articulations se mettent en marche quand on écoute le vécu du corps.
En s'appuyant sur des réperes dans des disciplines comme la philosophie, la robotique ou les neurosciences parmi d’autres, nous avons tenté définir ce que pourrait correspondre à une \textit{conscience du mouvement} propre au corps et son vécu, dans un contexte artistique. Ainsi nous nous sommes concentrès sur ce qui échappe à notre quotidien, sur ce qui met l’intelligence analytique à l'arrêt pour faire place au spontané et à l’inattendu. En d'autre mots, nous avons cherché à laisser les corps s'exprimer.
En amont de la séance, nous avons demandé aux participants de nous faire parvenir un récit en lien avec une expérience de lâcher prise, sous la forme d’un enregistrement audio entre 3 et 10 minutes. Parmi les exemples réçues, il y avait la question du lâcher prise lors d’une représentation en tant qu’interprète, puis en tant que spectateur, mélangés avec des exemples de la vie privée. Nous avons mis en place des ressources collectives pour encourager le partage des sensibilités, des goûts et des expériences. Cela a pris la forme des repères bibliographiques, fichiers audio, supports vidéo et images. Les participants ont du réfléchir à une musique, une image ou un objet qui leur évoque le sentiment de lâcher-prise. Un coin detente et aussi une enceinte audio ont été mises à disposition pendant toute la session, pour que chacun puisse lancer un fichier sonore et intérrompre le rythme des échanges, à tout moment.
Afin d’encourager les débats et les échanges sur les disciplines transversales, j'ai mis à disposition une liste des articles scientifiques. Bien que parfois leur contenu était trop ciblé ou specifique, cela a inspiré notre processus de travail. Selon les échos et les discussions, cette liste s'est étouffé avec des extraits des livres, vidéos et articles partagés collectivement.
Le fait de traiter ces thémes collectivement, d'ouvrir sa boite aux outils et sa méthodologie quant aux défis et objectifs, implique une mise en commun des réssources, des objectifs et des envies.
Concernant le lâcher prise, si le thème m'intéresse depuis longtemps, la pratique de la danse a été un des premiers moyens pour y accéder. Avec le temps, j’ai combiné et adapté certains exercices et échauffements afin de ``faire baisser ma résistance” ou enlever mes eventuels attentes orientés résultat. Par le biais de cette session de recherche, j’ai pensé les partager avec d'autres personnes pour avoir un retour d'éxperience. Parmi les membres du collectif, trés peu ont une experience avancée en dance. Il y a eu certains qui ont avoué n'aimer pas du tout cette pratique, ou pas se sentir à l'aise danser en publique. Aborder le lacher prise par la danse leur est paru contreintuitif au premier abord.
Mon défi a été de voir s’il y a, en danse, une façon de convoquer le lâcher prise de façon directe, puis retrouver une dimension somatique dedans, independement du rapport à la danse des participants. Alors que les procesus Open Source sont collaboratives, le cadre proposé intiellement s'est beaucoup élargi au fil et à mesure que nous avons avancé dans l'exploration.
Les quatres dernières années j’ai peu travaillé collectivement en dehors de mon projet de thése. La rencontre avec Open Source à Anis Gras, lieu qui m'a accueilli plusieurs fois en résidence, a été un retour à l'effervescence du terrain, aux sources.
J’avais préparé un planning et imaginé des portes d'entrée selon les niveaux d'interet de chacun. Cela s'est fait en lien avec mes recherches scientifiques sur l'intelligence sensorielle. J'ai même pris quelques unes de mes hypothèses de recherche concernant les robots comme exemple. Comme souvent dans ce groupe de travail, une synergie collective s’est installée et je me suis retrouvée à devoir littéralement ``lâcher” certains objectifs initiaux et surtout accueillir des besoins nouveaux, autres que ceux anticipés par moi. Notamment la question du lâcher-prise collectif et la question du groupe qui s'auto-organise par inértie.
Dès lundi, les quelques définitions du mot lâcher-prise, puis les éxtraits sonores avec les expériences de chacun m’ont confirmé que cela sera une exploration propre à l’énergie de chacun des participants. Un processus héterogene entre les intiés à la danse, les curieux et les paniqués, entre regard critique et auto-dérision. Le retour méfiant quant aux rapprochements entre la technologie et l'intelligence sensorielle que vous pouvez lire \textbf{dans les annexes de ce travail de thèse}, m’ont fait comprendre que le groupe trouvera son cheminement et moi mon apprentissage avec, comme une sorte de ``méta” lâcher-prise à l’intérieur d’un processus de recherche sur le lâcher prise.
Mercredi, le troisiéme jour de travail lors d’un moment d’échange collectif, certains participants ont voulu mettre de côté la question du corps, comme un sorte de rébellion quant au dictat de la sensorialité. Ils pronait un retour aux textes, à la pensée critique, loin du veçu exprientiel. J'ai interpreté cette réaction comme une sorte de panique quant à la perte de réperes que ce type de travail peut provoquer. Comme si quelque part, ils aimeraient toucher de la terre, du solide aprés s'avoir laisés porté par les courrants. Retrouver leur réperes. J'ai pensé que mon travail en tant que co-directrice de la session était d'aider le groupe clarifier son cheminement, le guider sans le diriger. Comme je l'avais fait plusieurs fois pour mes projets de theatre...une metteuse en scène finalement. J'étais donc prete à abandoner. A ma surprise, des autres participants ont proposé faire juste une pause pour y revenir vendredi en fin de séance. Signe que notre travail preocuppait bien les esprits, nous avons eu un débat sur ce que c’est une intelligence sensorielle dans le train de retour d'Anis Gras. Un de membres du collectif me rappelle que les objectifs de la session ne sont pas forcément ceux d’une recherche académique, qu'il faut accepter la nouvelle direction que la session puisse prendre. Cette idée de proposer un cadre puis le laisser se transformer collectivement m'était claire en début de session. Cependant je n'arrivais pas à trouver les arguments pour exprimer mon réssenti emotionnel. Pour moi, ce moment de remise en question faisait partie du processus. Il devenait tout aussi important de repréciser le cadre et ses permutations que de se mettre d'accord sur ce que peut provoquer une intelligence sensorielle se manifester. Savoir reconnaitre ``ses symptomes”.
Le lendemain, suite à une greve RER nous avons travaillé chez un des participants. Nous avons decidé faire une improvisation collective in situ. Nous avions visité la Gare du Nord en tant que touristes en réperant bien l'environment sensoriel de ce lieu- les odeurs, les images, les son et la texture de choses.
Cela a déplacé les limites du jeu ailleurs, encore une fois. J’ai eu plusieurs moments où j’ai joué avec la consigne, pour voir ce que cela produit si je lâche le cadre. Tout en observant les autres faire pareil. Cela m’a renvoyé à des expériences similaires faites en marge d’un projet inspiré par le film \textit{Idioterne} de Lars von Trier. J'ai retrouvé cet éxtrait de mes notes
\begin{quote}
``Il y a quelque chose de jubilatoire dans le fou rire, lorsqu’il est honnête. Comme une relâche, probablement la respiration, le sommeil ont beaucoup à voir avec le lâcher-prise. Cependant j’entend par intelligence quelque chose d’adaptatif, qui se met en œuvre pour faire émerger du nouveau. Comme voir quelque chose qu’on a déjà vu, mais sentir qu’on le voit différemment.”
Puisque le terme de lâcher-prise a été très présent dés le début de la session, il nous a fallu du temps pour comprendre comment evaquer les attentes envers une possible définition universelle de ce terme. Pour certains partcipants la question du corps et de l'intelligence sénsorielle a été vecue en lisière de cette question du lâcher prise, parfois sans une prise de conscience directe. Cependant la question de la robotique et même plus large celle du numérique à efleuré à peine l'esprit des membres du collectif. Alors que cela fait partie des problématiques sociétales où chacun donne un avis et s'y interesse (d'autant plus mes collégues d'Open Source). Avec le temps, j'ai compris pourquoi cela s'est produit. Si pour moi le lien entre la robotique et le corps ou la sensoirialité est évident, pour certains cela peut paraître tiré par les cheveux justement parce qu'un robot est l'opposé d'un corps vivant, sénsoriel.
Parmi les retours d'experience, le danseur et choregraphe Gerry Quévreux evoquait l'exercice de sieste volontaire pratiqué ensemble, pour temoigner de la rapidité avec lequelle son esprit s'est remis en marche aprés: ``je parvenais à raccrocher les wagons ensuite, à me relier d’une manière à ce qui s’est joué sans moi pendant un moment.” Curiéusement il réliait cela à un autre exercice pratique, celui d'écriture automatique que j'avais proposé le premier jour d'exploration et qui est dévenu ensuite un sorte d'exercice preferé du groupe: ``la pratique de l’écriture spontanée a été une vraie retrouvaille et je décèle là-dedans quelque chose qui me fait toucher un lâcher prise créatif. Je veille moins au sens, il y a la présence du rythme, la scansion.” Je déduis de son temoignage à quel point la créativité est disocié de l'exactitude et de la précision. Alors que les robots sont justement conçus pour cela- etré précis et exacts dans leurs actions. Probablement si nous aurions cherché plus les antonymés de l'état de lacher prise, nous aurions tombé d'accord que le mot ``concentration” en fait partie. Tout en ne faisant pas partie proprément. Puisque dans un aure témoignage Gerry parle d'état modifié de conscience pour illustrer le lacher-prise. Alors peut-etre un autre type de concentration?
Cela réjoint l'intérvention du chercheur en musique et science cognitives Luc Pererra que j'avais invité pour nous parler de son travail sur le rythme. Selon lui, le rythme structure la conaissance: ``même inconscient le cerveau peut enregistrer des choses, par le rythme, de manière rythmique. Le fœtus fait ça dès 4 mois.” L'intervention de Luc, ainsi que les extraits musicaux qu'ils a partagé ont beaucoup éveillé notre sensibilité. Au tel point que cela risque de dévenir le souvenir le plus marquant de notre semaine de travail. Presque tous, nous gardons aujourd'hui un souvenir précieux de la voix de la chanteuse indienne Nina Burmi dont le chant, indéchiffrable au niveau de paroles, à résonné en nous à un autre niveau d'entente\footnote{https://www.youtube.com/watch?v=kfBvz2rG-NI}.
Cette éxperience collective d'adhésion à une musique inconue a été pour moi, une belle préuve de notre synergie en tant que groupe. Je n'ai pas les arguments pour analyser cela d'un point de vue neuro-scientifique, mais probablement quelque chose du caractere imprevu de cette proposition, sa frequence sonore et son rythmique a su induire en nous, au moment de l'écoute, un état de concentration et d'éveil sénsoriel. Pendant ce moment nous nous sommes sortis de notre cadre de recherche et probablement vécu un véritable lâcher prise collectif. Est-cela a cause du caractere imprevu de la situation? Est-cela plutot du au niveau d'investissement de la performeuse dans son chant? Ou plutot à cause de la frequence du chant?
Ces questions ont continué nourrir ma recherche bien aprés la session Open Source. \smallskip
Au moment de ces observations retrospectives, je ne peux pas m'empecher de considerer le temoignage des deux autres participants à la session. Pour des raisons éthiques et personelles, je prefere garder leur anonymat. Le hasard à fait que deux metteurs en scène avec de maladies implicant des sérieux problémes locomoteurs et neurologiques, ont exprimé leur interet pour la session. Un d'entre eux est un ami, agé d'une soixointaine d'années qui suite à une maladie auto-immune s'est retrouvé en incapacité motrice pendant une période de temps. Depuis il a retrouvé une certaine mobilité mais reste dependant de son traitement. L'autre a la trentaine, mais en proie d'une maladie neurodégénérative sérieuse avec des soins hospitaliers récurrents. Il m'avait fait part, lors de nos échanges par Whatsapp, des experiences de reveil de coma, puis de sa vie actuelle avec une disabilité qui conditionne son travail lourdement. Les deux ont intégré la session de façon ponctuelle. L'un d'entre eux n'a pas pu etre finalement présent qu'en distanciel, tandis que l'autre a participé à une de nos experientations collectives. Leur attitude envers le travail, leur contribution et engagement (même à distance) m'ont beaucoup touché. Les mots ``somatique” et ``thérapie” ont eu tout d'un coup une autre portée pour moi. Malgré son disconfort physique, mon ami s'est coordoné admirablement, comme si rien n'était. Il était là, actif et tonique, éngagé avec son travail corporel, à l'écoute de ses parténaires. Il avait envie d'essayer, de se mettre en jeu collectivement. De ``jouer” au sense que les enfants donnent à ce terme. Tout comme les autres participants avait envie qu'il soit là, que nous explorons ensemble nos differences dans un état d'ingenuité et naivité. A un moment donné, quelqu'un a donné la consigné d'oublier une partie de son corps. J'ai pensé à lui, à nos échanges auparavant et au fait qu'il y a quelques années c'était son corps qui a oublié de repondre, comme si une partie de lui s'est mise en veille volontairement. Je l'ai regardé et vu qu'il était ailleurs, à l'écoute de son exploration sénsorielle. Je me suis sentie l'observer pendant que nous nous deplaceons dans l'espace et j'ai senti que c'était moi celle qui n'était pas là. Il était dedans. Dedans lui-même si je puisse le dire. Je ne sais pas si ce type d'encontre que nous faisons avec nous-même est quelque chose dont nous nous apercevrons lorsque cela se produit. Probablement que non. Cependant cet état, j'ose dire ``de grace” dévient moteur de l'énergie dont nous disposons pour toutes nos actions qui le précedent. Probablement, la frequence avec laquelle nous pouvons faire cet aller-retour de reconnexion avec nous-mêmes, détermine notre tonus ou degré de fatigue. Les plus lointaines ces moments de reconnexion, le plus fatigués nous devenons. Comme si en puissant au plus profonde for de nous-mêmes, nous activons une énergie propre sous-jacente. Je me rends compte que cette façon de parler, d'évoquer des observations, des impressions perceptives peut s'appreter à un registre ambiguu, proche de la ``thérapie”. Le jour d'avant alors qu'il n'était pas là, nous avons lu le prémier chapitre du livre de Peter Levine\cite{levine2010unspoken} où il évoque son accident de voiture et la perte de controle de son propre corps. J'avais découvert ce livre alors que je cherchais à comprendre d'où vient mon interet pour les tremblements. Je vais repreciser cela dans un autre chapitre, alors que je décrirai plus en détail ma recherche en danse. Le travail de Levine faisait partie des réssources de l'atelier sur le lâcher prise, bien avant que je connaisse la volonté de participer à la séance de mon ami.
Dans ce contexte, je prefere preciser mon positionement quant aux dérives dues à la confusion entre des pratiques et des expertises en danse. Les concepts somatiques que j'applique en danse n'ont rien avoir avec une dimension therapeutique. Elles ont pour objectif une meilleure apprehension de soi-même et facillitent des prises de conscience, mais autant moi que les gens avec qui j'ai pu travailler jusqu'au là, n'avons pas de competences en medicine. L'art se veut un endroit d'exporation et par sa dimension critique elle peut amener à des observations ou des constats personelles en lien avec des soins. N'est-ce un des objectifs de l'art de soigner le monde? D'autant plus quand il s'agit de la danse, et du corps. Pour révenir au corps, c'est peut-etre le moment d'evoquer la manière dont Bruno Latour\cite{latour2004talk} le décrit. Cette façon de considerer le corps a été édifiante pour mon travail avec les robots, mais elle s'élargit de plus en plus, alors que j'intéragis collectivement avec des humains:
\begin{quote}
(...)to have a body is to learn to be affected, meaning ‘effectuated’, moved, put into motion by other entities, humans or non-humans. If you are not engaged in this learning you become insensitive, dumb, you drop dead.
Equipped with such a ‘patho-logical’ definition of the body, one is not obliged to define an essence, a substance (what the body is by nature), but rather, I will argue, an interface that becomes more and more describable as it learns to be
affected by more and more elements. The body is thus not a provisional residence of something superior – an immortal soul, the universal or thought – but what leaves a dynamic trajectory by which we learn to register and become sensitive
to what the world is made of. Such is the great virtue of this definition: there is no sense in defining the body directly, but only in rendering the body sensitive to what these other elements are. By focusing on the body, one is immediately – or rather, mediately – directed to what the body has become aware of. This is my way of interpreting James’s sentence: \textit{Our body itself is the palmary instance of the ambiguous.}
Alors je souligne ici l'importance de cette perspective du corps-interface que Bruno Latour a su anticiper bien avant les avancements du numérique. Comprendre par quoi nous sommes agis, avec quoi nous sommes en lien, nous aide à mieux nous connaitre. Comme Anna Halprin l'evoque mieux que moi, ce type d'introspection est individuelle et a beaucoup plus à voir avec des chemins de vie et des personalités qu'avec de thérapies. En d'autre mots, l'art peut etre une thérapie pour soi-même, mais elle ne peut pas faire du prosélitysme pour une solution universelle. Peut-etre que cela se réduit à ce que le metteur en scène Mathieu Hout a partagé avec nous à la fin d'une journée d'exploration. Pour lui le fait de s'appliquer et d'etre honnete dans cete recherche collective est ce qui compte le plus, au délà des résultats de la session. En cherchant ce qui peut-etre un lâcher prise collectif, il nous partage ses notes de la journe, parmi lesquelles figurent ces mots: ``Je suis avec toi. Peut-être qu’il ne s’agit que de ça. Être avec.”
J'aimerais révenir à l'impact que cette session d'experimentation a eu sur mon propre laboratoire de recherche-création, en quatriéme année de thèse. Cela m'a aidé à comprendre que le cheminement n'est jamais fini, qu'il s'agit d'un travail qui s'affine au fur et à mesure que j'avance. J'ai pu également confirmer mes motivations, mieux accepter mes doutes quant aux risques d'une appropriation thérapeutique de ma démarche en danse. Puisqu'il s'agit des notions vagues, j'ai mis ette fois à l'écart les robots, pour mieux comprendre comment travailler cela entre humains. J'ai cultivé une sorte d'écoute polymorphe, en pensant toujours que cela m'aidera à mieux comprendre les robots. Puis l'écart entre le mode de penser des metteurs en scène, comparatif à celui des roboticiens fait encore résentir ses ondes de choc. D'autant plus que pour moi quand le corps est en veille, loin du plateau c'est compliqué de s'écouter, de se comprendre entre humains. Intégrer une pluralité de points de vue, des intérogations et des critiques m'a fait du bien, car cela m'a rapellé que l'art est l'endroit qui peut intégrer toutes ces différences. Cela m'a également aidé à mieux structurer les cadres conceptuels et méthodologiques de ma recherche quant à la danse et à la robotique.
``Cette recherche infuse encore beaucoup en moi. J’ai comme l’impression que quelque chose a bougé, qu’un nouveau voyage a commencé et qu’il sera toujours temps d’ouvrir le cahier où j’ai posé des mots pendant la session pour y revenir. Le cahier comme un retour aux sources, retour à la compréhension, aux expériences et aux rebonds, pour appréhender le voyage avec sérénité.”
Pour exprimer le lien entre la conscience et la danse, Kozel évoque la couleur rouge\cite{kozel2008closer}, tout comme David Chalmers l'a fait lorqu'il a donné des exemples de la probleme difficile de la conscience. Ainsi l'incapacité d'expliquer une experience perceptive est tout autant opaque, que l'experience phénomenologique de la couleur rouge décrite par Merleau-Ponty:
``Choreography is about variation and relations, between bodies in space and time. Merleau-Ponty’s description of the color red reveals an understanding of choreography that can be
mapped onto the exchange of data: \textit{this red is what it is only by connecting up from its place with
other reds about it, with which it forms a constellation}, and it attracts or is attracted by other colors, repels them or is repelled by them, dominates or is dominated by them, existing as a \textit{node} in the temporal modalities of the simultaneous and the successive (ibid., 13 2 ). This dynamic of attraction and repulsion, sharing and containment, forming a shifting constellation across time is a way of understanding the data choreography fostered by wearable devices. My body may not exist,
nodding to Godard’s provocation, but as connective tissue I live an even greater space of potential, an expanded corporeality that is permeated by interstitial spaces that I reach across in hope and in vulnerability, sometimes in lust and anger, or that I seek to stretch in fear or pain. I am like the color red inhabiting elastic zones of interface between myself and myself, or between myself and others. Performance occurs in these interstitial spaces, both everyday performances and artistic
\textbf{Pour le philosophe et physicien Philippe Guillemant la nature de la conscience est vibratoire.\footnote{https://www.youtube.com/watch?v=ssugj6VVBCY}.Selon ses hypothéses, cete caracteristique de la conscience pourra jamais été modéelisée par une intelligence artificielle. }
Une des raisons pour laquelle j'ai commencé ce projet de thése est pour comprendre d'où vient ma fascination pour les robots. Si je remonte au temps de mon enfance, j'associe à la figure du robot celle d'une poupée. Je précise que si aujourd'hui j'asocie robots et poupées, je fais cela avec le plus grand sérieux. Un enfant considere son compagnon de jeu son égal. Mes poupées n'étaient jamais ``des jouets”, mais d'êtres à part éntiere, autant mystérieuses et intirugantes que ma \textit{comprehension} des adultes qui m'entouraient. Si à l'époque je ne partagéais pas des dillemes ontologiques quant au sens de la vie ou de l'art, les choses n'étaient pas moins compliqués. Petite, j'attendais que les poupées réagissent à mes propositions de jeu. Au défaut d'une réaction de leur part, je compensis avec beaucoup de scénarios et des propositions de jeu, pendant notre ``intéraction”. Autant que nécessaire pour que je n'observe pas leur immobilité. Serait-il aussi le cas aujourd'hui avec les robots? J'attends d'eux des veritables parténaires d'intéraction artistique, des co-créateurs? Au-défaut d'une réponse concrete, j'avance des proposition et d'esquises pour que mon térrain de jeu est moins ``déserte”?
En contrepoids, les ingénieurs sont animés par d'autres motivations pour construire ces robots. Au premier abord, ils cherchent reconcillier le besoin des compagnons aimables et émpathiques, mais qui réalisent en même temps des tâches qui nous ennuient ou qui sont dangereuses. Pour faire cela, ces robots doivent pouvoir travailler dans l’environnement humain tel qu’il est actuellement conçu et utiliser les outils des humains tels que les humains les utilisent\cite{kajita2014springer}. Si les êtres humains ont besoin de multiples outils pour faire avancer leur travail, il en va de même pour les robots. Cependant ces outils sont intégrés dans le corps d'un robot. L'effecteur final (en anglais \textit{End Effector} répresente son dérnier joint -la paume de la main, la tete sont des exemples d'end effectors. Cet effecteur est aussi l'endroit où le robot saisit au plus précis son environment. C'est là, par exemple, que se produit le contact entre le robot et un objet. Ainsi l'end effector est un outil dont la forme peut changer pour chaque tâche spécifique, modifiant la morphologie du robot et son apparence.
Pour ces raisons pratiques, les robots humanoides sont ceux dont la communauté scientifique se preoccupe actuellement le plus.
C'est ainsi que commence mon aventure avec le humanoid HRP-4. Un matin d'hiver, arrivée pour la premiere fois seule en face à face avec lui, j'enleve la housse de protection qui le cache et je l'observe dans son immobilité. Un tas de férailles et de plastique qui condense de la technologie de pointe, résultat de plus de vingt ans de recherches et éxperimentations.
Au Japon, le savoir-faire developpé par Kawada Industries et l'Institut national des sciences et technologies industrielles avancées (ASIT) a été mis au sérvice des robots HRP dés les années '90. De cette façon, le HRP-4 s'est positioné parmi les robots le plus avancés du marche, lors de son apparition en 2009. Son poids léger (39kg et 1 514 mm), ses 34 DOF, le choix de matériaux et moteurs (avec une puissance maximale de 80W) plus le solver QP integré dans l'intérface mcrtc\cite{bouyarmane2018quadratic}, lui ont permis d'executer des mouvements précises et fluides, gagnant son statut de robot ``à l’image d’un athlète mince mais bien musclé\footnote{https://spectrum.ieee.org/hrp4-hides-it-all-somewhere}.”
Arivée au LIRMM en mars 2021, mon objectif était de \textit{faire} cet athlète danser. Au grand désespoir de mon encadrant, je ne savais pas à l'époque quelle forme cette danse prendra. Je savais juste qu'il y aura une étape d'approvoisement entre nous, pour comprendre ensemble ce que nous dévons faire. Pour faire cela j'ai plongé dans la litterature scientifique, un peu comme en découvrant une langue étrangere. Malgré mes études d'ingénieur auparavant, la façon de concevoir les robots au Lirmm a peu à voir avec mes connaissances en ingénerie de systémes. Quelques mois aprés mon arrivée, en tombant sur le paragraphe suivant, je me rends compte de la difficulté de ma situation:
``Lorsque nous disons \textit{marcher}, nous entendons \textit{avancer par appuis successifs des pieds sur le sol, sur un sol irrégulier et peut-être en pente, comportant des obstacles et des inconnues, tout en conservant notre équilibre vertical}. Or, le robot brut que vous récupérez est semblable à une casserole articulée. Vous aurez beau transmettre cette définition à votre casserole –aussi articulée et élaborée soit-elle–, elle ne marchera pas si elle ne la \textit{comprend} pas. Il faut donc traduire cette définition en un langage qui soit \textit{compris} par le robot, et qui lui permette de bouger comme nous le désirons.”
Alors éclot dans mon imagination le besoin de reconsiderer cette idée de \textit{danse}. J'énvisage la danse comme quelque chose plus intime, sorte de mouvement interne nourri par des doutes et envies, par de l'instinct. Cela prendra la forme des gestes, afin de voir si ce qu'il y a de l'organique dedans, peut être modelisé par des écuations et algorithmes. D'un trait simplifié, cette exploration peut se traduire par la phrase suivante:
Si je résume peut être trop facilement le sens du livre de Philippe K. Dick, \cite{benesch1999jstor} apporte une intérepetation intéressante à cette notion de subjectivité. L'auteur s'appuie sur la thése de la chercheuse américaine Kathleen Woodward concernant les émotions, pour faire une paralelle avec l'essai de Jacques Lacan sur la constructon de soi. Le psychanaliste français idéntifie le stade du miroir comme étape primordiale dans la formation et l'assurance de soi. Selon lui la construction d’un \textit{Autre} à travers l’imagerie, commence par l'idéntification à un double refleté dans le miroir. Pour\cite{benesch1999jstor} les androides rémplacent à une échelle sociale ce double, l’anxiété des humains à l’égard des androïdes exprimanat en réalité une anxieté relative à l’identité humaine en tant qu'espece. Alors il me restait d'imaginer une danse pour un robot humanoide, conçu à partir des mouvements des humains mais sans leur \textit{conscience}. Ces mouvements, limités par des contraintes matérielles, sont à leur tour imitées par un humain (moi). Une sorte de boucle réflexive ou le point de départ dévient le point d'arrivée, en décalage. C'est justement ce décalage qui répresente, à mon sens, ce qu'il y a d'incomprehensible entre moi et le robot. La peur d'un\textit{Autre} plus performant, inconnu et distant qui n'arrive pas à se réconnaitre (ou reconnaitre son potentiel) dans un miroir.
Pour contrecarrer cette peur, les standards et normes de securité qui valident sa mise en marche sont parmi les aspects les plus importants dans le fonctionement d'un robot. Des tests doivent être effectués en permanence pour vérifier la bonne connectivité de ses circuits éléctroniques et les limites des articulations du robot. C'est pour cela que HRP-4 est calibré chaque fois à son démarage\footnote{https://www.youtube.com/watch?v=wqdCfBpnBWA}.
Comme pour les animaux, plus un robot est grand et lourd, plus il peut s'averer ``dangéreux”. Selon le contexte, les protocoles de sécurité utilisent des sensors laser (come celui que j'ai utilisé pour le projet avec l'Animat) ou des délimitations (en led ou même des grillges en métal) qui entourent le robot. Pour un robot industriel par exemple, sa vitesse peut etre adapté selon les distances de proximité détectés par le sensor laser. De cette manière, les délimitations en lumière peuvent répresenter un perimetre de securité. Une fois ce perimetre de secruité affranchi, le robot peut s'arreter en urgence.
Au LIRMM j'ai eu l'opportunité de programmer et intéragir avec un robot industriel Franka KUKA. La base de ce robot est fixée au sol, ce qui fait que son système mécanique est libre, dans la limite de ses actuateurs. En comparaison avec le robot HRP4, son fonctionement est assez intuitif. CE robot dispose d'un mode de configuration basé sur un code couleurs, où chaque couleur décrit l'état interne de la machine.
\caption{Utilisation du bras robotique Panda lors d'un contact physique. Source: FRANKA EMIKA ROBOT’S INSTRUCTION HANDBOOK}
\label{fig:schema-manual-panda-utilisation}
\end{figure}
Dans le mode apprentisage, il n'est pas necessaire de programmer le robot dans l'interface mcrtc. L'utilisateur execute une serie de mouvements que le robot va reproduire une fois ce mode desactivé. Cependant son utilisation est limitée à des taches ponctuelles, pour un méilleur controle du robot l'intérface de programmation état la solution.
Une fois les questions de sécurité traitées, la rapidité avec laquelle un robot réagit à un événement externe détermine son dégrée ``d'intelligence”.
Pour faire preuve de cette intelligence, les contrôleurs d'un robot assurent le contrôle de son mouvement ainsi que sa ``comunicaion” avec le monde physique. Décrits comme des systèmes à deux niveaux, ils comprennent des aspects mécaniques et informatiques. En pratique, ils visent à commander électriquement les actionneurs d'un robot pour lui faire rejoindre une position ou lui faire suivre une trajectoire. Ainsi le contrôle de robots nécessite l'intégration de deux typées de problémes differentes. Pour illustrer cela, les roboticiens parlent de deux niveaux. Le niveau ``haut” est associé aux problèmes de calcul et des logiciels, alors que le niveau ``bas” est associé aux aspects d'exécution (plus précisément au fonctionnement des actionneurs). Une architecture de contrôle est nécessaire, pour déterminer la communication entre les differentes modules et interfaces. Son role est de déterminer ce qui fonctionne en temps réel et quel type d'hierarchie est la meilleure pour faire communiquer ces modules. La planification de trajectoire est un exemple de module pour l'architecture de controle.
Pour modéliser un robot, les chercheurs établissent d'abord son modéle mathématique avec des matrices de transfromation pour répresenter les coordonées de ses articulations. Ce modèle, basé sur des écuations de mouvement, permettra l'incorporation du robot dans des simulations informatiques.
Un robot humanoïde peut être aussi vu comme une plateforme d’intégration pour de nombreuses technologies robotiques. Son contrôle se réalise grâce aux tâches, developées pour des intérfaces de calcul. L'environment de developpement integrée (en anglais \textit{unified computer interface}) mcrtc utilise des algorithmes de programmation quantique (en anglais \textit{quadratic programming ou QP}). Ce type de programmation non linéaire a été crée au début des années '50. Il vise l'optimisation, par une valeur minimale, de certaines fonctions quadratiques multivariées soumises à des contraintes linéaires.
Parmi les paquets de donées disponibles dans l'interface mcrtc, mc-hrp4 fournit une implementation RobotModule pour le robot HRP4 et ses differentes versions. En tant qu'interface graphique dynamique, mcrtc prend comme
entrée les informations des capteurs du HRP-4 (optiques, d'unité de mesure inertielle, de force ou de couple selon le cas) ainsi que la description de ses surfaces de contact. Ses sorties visent
la position souhaitée, l'accélération, la vitesse de couple.
La librairie Task permets l'optimisation du corps entier.
Parmi les types de taches que le robot est programmé de faire il y a:
\begin{itemize}
\item la tâche de regard pour garder les sujets en vue
\item la tâche PBVS qui lui permets de déplacer la main gauche selon la vision
\item la tâche de stabilisation qui implique le CoM et la position ou la force des joints pour maintenir l'équilibre
\end{itemize}
La stabilisation peut absorber des perturbations inattendues comme les forces dynamiques non modélisées, du bruit. Elle vise à réduire la différence de valeurs entre le système de contrôle et le système réel.
Parmi ses contraintes, il est possiblé de configurer en mcrtc:
\begin{itemize}
\item l'évitement de collisions
\item les limites de la rotation des joints
\item les dynamiques (limites de couple) et les contacts (force-friction et géométrie)
\end{itemize}
Un solver est un programme informatique autonome destiné à calculer les solutions d'un problème mathématique. Il peut regrouper une bibliothèque de logiciels pour optimiser ses solutions.
Les contrôleurs basés sur un solver QP facillitent l'éxecution de tâches complexes, lors de la programmation en temps réel de leurs contraintes.
Le solver QP est pondéré ou hiérarchique, en modifiant ses parametres de \textit{weights} ou \textit{stifness} de chaque tache.
Les modélisations mathématiques résolues grace à la QP, traduissent ensuite des commandes pour les motteurs. Selon le voltage récu, les actionneurs vont tourner avec des vitesses et rotations specifiques. L'impédance électrique mesure l'opposition d'un circuit électrique au passage d'un courant alternatif sinusoïdal. A son opposé, l'admittance détermine dans quelle mesure le courant traverse un circuit éléctronique. Le contrôle d'admittance, à l'instar du contrôle d'impédance, vise à imposer un comportement dynamique au robot. Ce robot est soumis à des forces de contact externes, comme l'inertie, la rigidité ou l'amortissement. Le livre\cite{natale2020springer} propose une schema qui résume ce fonctionnement:
Une autre approche de programmation mcrtc implique des diagrammes d'états, également appelés F.S.M.( Finite State Machines). Ces états peuvent être programées en cpp ou Python et extensibles dans le fichier yaml. Elles ont de type imbriqués ou en anglais \textit{nested} (un état est lui-même un F.S.M.) ou parallèles (plusieurs états sont executés en parallèle).
Lors d'une vizualization dans l'interface rviz, un curseur affiche la valeur de chaque joint.
Pour passer d'un état F.S.M. à l'autre, une carte de transition est detaillée dans le fichier de configuration du contrôleur
(yaml).
L'intérface mcrtc permet ainsi une optimisation du contrôle de l'espace de travail. Cela se produit par l'exécution du même code autant en simulation que sur le robot réel.
Grace au travail de developpement des roboticiens de l'équipe I.D.H. il est possible de modifier les taches et les constraintes, ainsi que les états F.S.M. et leurs ordres d'execution également dans le fichier YAML.
Selon\cite{kajita2014springer} un robot est un système articulé constitué de plusieurs corps rigides. Par l’analyse et le regroupement des mouvements de chaque corps, les robticiens obtiennent la dynamique d'un système complet. Avant cela, la cinematique étudie comment les differentes parties du robot se mettent en marche pour qu'il bouge. Les capteurs des robots sont l'équivalent de sens des humains. Les accéléromètres et les gyroscopes par exemple, servent à préciser les accélérations linéaires et angulaires des articulations du robot. Parallèlement, les capteurs d'effort détermient les forces et les moments des points de contact avec l'éxterieur. Un robot humanoïde ayant \textit{n} articulations, possède \textit{n + 6} degrés de liberté car sa base est un corps libre dans l’espace 3D\cite{kajita2014springer}.
Le mouvement des articulations du robot est décrit par des rotations dans l’espace en trois dimensions (X, Y, Z corréspondant aux mouvements de \textit{Pitch}, \textit{Yawn} et \textit{Roll}(qui répresentent en aviation les trois axes-latéral, vertical et longitudinal). En conaissant une de ces coordonées, les roboticiens calculent les vitesses angulaires et leur relation avec les dérivées des matrices de rotation. Dans le livre\cite{kajita2014springer}, les autheurs décrivent les principes de la cinematique directe-en anglais \textit{direct kinematics}- qui permet de trouver la position et l’orientation d’un segment (par exemple la main) à partir de ses angles articulaires. Il explique également comment déterminer les angles articulaires à partir de la position et de l'orientation d’un segment donné. Cela corrésponds à une écuation inversée de la précedente, appellée cinematique inversée- en anglais \textit{inverse kinemactis}.
\begin{quote}
``Quoi qu’il en soit, la relation entre les dérivées de la position et de l’orientation d’un segment, et celles des angles articulaires, peut être représentée par des équations linéaires. Ainsi, le problème de la cinématique inverse peut être résolu par la détermination des solutions d’un système d’équations linéaires, puis en intégrant ces solutions. La matrice des coefficients du système d’équations linéaires est appelée \textit{Jacobienne des vitesses}. Elle représente un concept important dans beaucoup de domaines, la robotique comprise.”
\end{quote}
La fonction principale d'un contrôleur est d'interpréter le programme d'application du robot puis de convertir cela en actions physiques. Chaque contrôleur possède un modèle interne de la structure cinématique et dynamique du robot. Selon les algorithmes et les écuations de mouvement utilisées, cela est traduit par des capacités avancées de planification et de synchronisation de trajectoire. De cette manière, un robot peut synchroniser de manière précise les mouvements de chaque articulation. Selon les objectifs de chaque tache, des milliers de paramètres sont pris en compte pour le configurer. Parmi les controleurs de base du HRP4, les plus courants sont le controleur basée sur son Centre de Masse, en anglais \textit{Center of Mass} ou tout simplement CoM, ainsi que le controleur qui determine sa posture ou \textit{Posture task}.
Me voilà en train d'imaginer (ou rêver comme les androides de Dick) une danse pour un robot humandoide pas (encore) conscient.
Rien que pour rester débout, nous les humains devons faire preuve d'équilibre et d'auto-géstion de nos capacités mortices.
Une posture debout normale est souvent comparée à la mouvement d'un pendule inversé dont la base est
fixe. Bien que la position debout semble statique
pour un observateur éxterieur, elle se caractérise par de lègeres oscillations dans lequel le corps se balance en avant, en arrière et sur le côté. Le centre de masse est ainsi situé proche de la première vertèbre sacrée du corps humain.
\caption{Source: le livre \cite{oatis2009kinesiology}}
\label{fig:pendulum}
\end{figure}
Lorsque nous répartissons nos forces ou changeaons de point de contact avec le sol, notre équilibre s'ajuste de façon automatique. Comme décrit dans le livre de \cite{nakaoka2010intuitive}, une partie de ce travail \textit{pas conscient} est réalisé par des automatismes dans la percépetion.
\begin{quote}
``En l’occurrence, lorsque vous désirez saisir une bouteille sur une table, votre attention se porte sur la main qui doit assurer la saisie. Lorsque vous désirez vous asseoir, vous vous concentrez sur le positionnement de votre bassin par rapport à la chaise. Pour taper dans une balle, vous portez votre attention sur le pied qui doit frapper la balle. La partie sur laquelle nous fixons notre attention ne nécessite que quelques
degrés de liberté pour être déplacée.(...) De l’autre côté,
les parties qui ne nécessitent pas une attention consciente peuvent être utilisées pour conserver l’équilibre.”
\caption{Le changement de la posture influence sur le CoM. Source: https://www.quora.com/What-part-is-the-center-of-gravity-in-our-body}
\label{fig:ccog}
\end{figure}
Le centre de masse se déplace de manière automatique pour assurer notre stabilité. Comment tenir début un robot en prennant compte de toutes ces contraintes?
Pour mieux anticiper ces erreurs, le livre\cite{kajita2014springer} décrit la méthode Zero Movement Point (ZMP). Ce concept joue un rôle primordial dans l’équilibre en position verticale des robots humanoïdes, lorsqu’ils se déplacent. Pusiqu'un robot humanoide n'est pas fixé au sol, il doit maintenir un contact entre ses semelles et le sol quand il se deplace. Lorsque la semelle du pied de support perd le contact avec le sol, le robot tombe. Pour qu'il reste début, son CoM doit faire partie du ZMP. Cette méthode est généralement utilisée pour déterminer la possibilité ou l’impossibilité de maintenir ce contact, sans utiliser des équations du mouvement.
``Le ZMP peut être considéré comme l’extension dynamique du principe de projection. Il est utilisé pour planifier des modèles de mouvements qui permettent au robot de marcher tout en conservant le contact entre la semelle du pied de support et le sol.”
Une autre notion importante à considérer est le centre de gravité. Celui-ci peut se déplacer en fonction de la posture de l'individu et de la position de ses membres, tout comme le CoM.
Son role est d'aider le corps ne pas s'écraser contre la gravité. Quand un humain se retrouve en position assise son centre de gravité se situe à la base de sa colonne vertébrale, au niveau du sacrum. La majorité du poids de son corps est répartie dans la moitié inférieure, le bassin et les jambes supportant la majorité de cette charge.
En paralelle avec ces recherches sur l'équilibre et les postures, les chercheurs de l'équipe AIST ont considére utile d'investiguer les autres possibilités d'expression physique du robot HRP-4. Ainsi ils ont développé un modèle de comportement utilisant les mouvements de l’ensemble de son corps- le premier robot humanoïde de taille humaine pouvant s’allonger et se relever. Ce mouvement est illustré par la figure suivante:
En voyant ces images, nous ne pouvons pas nous empecher de \textit{voir} un humain. La plupart de ses gestes et mouvements sont faciles à identifier, car elles appartiennent aux humains qui se rélevent ou qui tombent. Ces observations notés dans mes cahiers de bord, m'ont fait considérer l'option d'assoir le robot sur une chaise. Choix radicale, emergée probablement d'un désir de pousser la limite de la convention. Lorsqu'ils sont assis les humains réflechissent, ou attendent. Il y a donc une forte activité méntale, alors que le corps se répose. Des chorégraphes qui m'inspirent ont déjà traité cette question en danse. Anna Teresa de Keersmaeker, Anna Halprin ou Ohad Naharin, dont j'ai cité le travail dans la prémiere partie de cette thése, ont su mettre au défi les stéreotypes en lien avec la chaise, l'immobilité et la danse. A mon tour, j'ai pensé interessante l'idée de faire danser HRP-4, assis sur une chaise.
D'abord parce que, avec quelques exceptions dans le monde animal, s'assoir est propre (seulement) aux humains. Ensuite parce que cet acte de s'assoir impose un état réflexif. Dérnierement parce que la chaise en tant qu'objet scénique inanimé, a un statut pariculier dans l'histoire de l'art. Avant d'introduire les arguments qui appuient une dialectique de la disparition, de parler des objets en tat que processus- comme dans l'oeuvre de Bojana Cvejic\cite{cvejic2015disjunctive} mentionné dans le chapitre 1.3- j'aimerais présenter l'objet chaise en contrast avec l'objet robot.
Déjà en 1913, Marcel Duchamp propose son premier Ready Made- \textit{La Roue de bicyclette}. Cette sculpture est composée de deux objets du quotidien en opposition l’un à l’autre: une roue de bicyclette fixée sur un tabouret\footnote{https://www.wikiart.org/en/marcel-duchamp/bicycle-wheel-1913}. Si la roue réprésete la vitesse, la chaisse s'appose à cette dynamique en imposant un arrêt.
En 1964, Joseph Beuys présente une chaise couverte d'un bloc de graise dans son oeuvre \textit{Chaise de graisse}. Le récit qui accompagne son installation évoque un épisode en Crimée, pendant la deuxième guerre mondiale, lorsque Beuys perd le controle de son avion. Il se fait sauver la vie par des Tatars qui l'enveloppent de graise animale et de feutre pour le maintenir au chaud. Ce souvenir facillite une prise de conscience pour l'artiste, qui va dédier sa vie aux actions artistiques engagés et à la spiritualité. La métaphore de la graisse\footnote{https://www.tate.org.uk/art/artworks/beuys-fat-chair-ar00088}, empeche quelqu'un s'assoir, ou bien le présente comme un amat de graisse. Dans les deux cas, la chaise est un élement actif de la proposition artistique dont la présence impose un moment d'observation.
Assoir un robot humanoide sur une chaise invite à une déconstruction du regard. Lorsque le robot est inactif, c'est un objet inanimé. Pareil à une rue de bicyclette, il peut se mettre en marche ou pas. Si ce robot aurait eu une forme non-antrhopomorphe, la question de s'assoir pour réflechir aurait été moins présente. Cependant dans le cas du robot humanoide, nous voyons \textit{quelque chose} se réposer sur une chaise. Est-ce que cela veut dire qu'une action physique vient d'avoir eu lieu?
En paralelle avec ma démarche dramaturgique, j'ai programmé ce robot. C'était une étape contraignante et fatiguante durant mon initiation à la robotique humanoide au Lirmm.
Les prémiers esquises de ce processus montrent bien comment le robot, tel la série phtographie du designer italien Bruno Munari\footnote{https://www.ideabooks.nl/9788875703899-bruno-munari-seeking-comfort-in-an-uncomfortable-chair}s'assoit plutot à cote de la chaise, que corréctement:
Aprés des mois d'erreurs et d'érrance dans le monde de roboticiens, pas loin des 700 heures que Marina Abramovic à passée assise sur une chaise à MoMa\footnote{hhttps://www.moma.org/audio/playlist/243/3133}, me voilà plus proche du résultat. Le robot reste assis sur la chaise, bien qu'il n'arrive toujours pas faire y des gestes expressifs.
Les mouvements du robot et mes capacités de programmation ne sont pas encore au point. Les mains de HRP4 n'ont pas des doigts articulés pour l'instant, pour pouvoir travailler des gestes comme dans le spectacle \textit{Rosas danst Rosas} de Keersmaeker. Néanmoins, je me suis beaucoup rapporté au travail de la choregraphe belge pour préparer cette phase. Son approche du rythme et de la répetition m'a aidé comprendre comment mieux structurer les enchainements des gestes du HRP4. J'ai choisi comme répére des gestes faites avec les deux mains que j'ai repris par des variations en changeant la place de mes pieds.
Une autre étape dans ma recherche a été de chercher les mouvements du robot par l'intérmediaire de la Motion Capture. L'ingénieur de recherche de l'équipe I.D.H. a developpé un plugin pour relier 34 DOF de HRP4 et les 17 capteurs inértiels XSENS.
Des exemples de mouvements que j'ai fait pendant les simulations, qui n'arrivent pas être réalisées sur le robot réel. En effet les mouvements qui dépassent les limites des articulations et l'angle de rotation des actuateurs sont adaptés à la version réelle. Les mouvements déviennt plus \textit{conventionnelles} pour respecter l'intégrité du systéme physique du robot.
J'ai abandonée cette façon de travailler avec HRP4, parce que cela se rapprochait trop de l'idée de marionette. Bien que c'est une discipline à part éntiere avec une longue tradition en Orient où HRP4 a été developée, je rajoute ici le point de vue de Kozel\cite{kozel2008closer} qui mentionne Kleist et sa vision du marionettisme. La danse peut s'y inspirer et des autres projets ont présenté des dispositifs assez impréssionantes. Cependant mon interet est de considèrer le robot comme parténaire de danse, de respecter les contraintes liés à sa physicalité.
``Puppetry is a sister art of performance animation, akin to an alchemical practice, with a long history of transforming wood, cloth, and string into human, animal, or fantastical beings. Writing on the puppet theater in 18 11 , Heinrich von Kleist reflected upon grace as demonstrated by humans, animals, and marionettes, and he located the soul in the center of gravity. The human dancer did not fare well in the comparison, for grace was seen to exist in greater quantities in puppets and animals due to the obstructive impact the human power of reflection had on the path of the pure flow of movement. He drew this conclusion on the basis of two conceptual duets: a comparison of the movement of a dancer with that of a string puppet, followed by an anecdote of a fencing duel between a man and a bear. It is less the suggestion that a dancer is a mere puppet that is of interest than the way observations on the location of the soul are arrived at through the intercorporeal relations, albeit hypothetical, between entities.”
Aprés quelques mois encore et toujours avec l'aide de l'ingénieur de recherche de l'équipe I.D.H., j'ai mis en place des transitions F.S.M. pour mieux travailler le rythme de la sequence. Les mouvements du robot sont beaucoup plus restreints, notamment car j'ai pu le faire croiser ses jambes. Cette contrainte m'a fait explorer differement le mouvement des bras et éngaer aussi la tête dans des séquences.
Une fois la boucle de mouvements mise au point, j'ai passé du temps à tester differentes simulations et énchainements avant de faire danser le robot réel.
Le 17 septembre 2022, lors de la soirée d'ouverture de la saison 2022-2023 d'Enghien-les-Bains, nous avons presenté la performance \textit{Le mythe de l'Immorta} dans le cadre du projet CECCI-H2M. Le digital twin du robot HRP4 est intervenu, en contraste avec un écosystéme virtuel qui intéragissait avec des performeuses. L'énchainement de ses postures a suivi des itérations inspirées par l’algorithme de la courbe du Dragon\footnote{Cet algorithmé provient des systémes de régles géneratives et est à la base un système de Lindenmayer (ou système de réécriture ou grammaire formelle inventé en 1968 par le biologiste hongrois Aristid Lindenmayer)}. Ce système réproduit les processus de développement et de prolifération de plantes ou de bactéries. Pour l'équipe de projet, cette façon de combiner l'organicité du monde vivant avec l'expression des machines est intuitive. Le choix de projetter le robot sur une image de 2m sur 3m, en contraste avec les performeuses en taille réelle, marque une distance entre l'humain et la machine. De plus, cette configuration scénique évoque l'image d'un artefact dévenu totem. La représentation centrale du robot humanoïde transforme le mouvement dansé en vecteur d'influence pour un monde centré sur la technologie et ses obsessions.
Mon objectif lors de ce travail a été de comprendre comment une corporalité ``dématérialisée” du robot pourrait stimuler une réponse décalée de la part du performeur.
Cela s'inscrit dans mes intentions prémieres pour établir un dialogue non verbal où homme et machine déploient leur vulnérabilité sur scène.
\textbf{Photo de notes de mon cahier avec les itérations}.
Des extraits de cette performance sont disponibles ici\footnote{https://vimeo.com/755637977}.
Le projet s'est déroulé sous plusieurs semaines de résidence au Centre des Arts d’Enghien-les-Bains. En juillet 2021, lors de notre première phase du projet, nous avons travaillé avec une version simplifiée du robot -une animata Arduino construite pour des déplacements aléatoires dans l’espace. Cette étape nous a permis de tester l’interaction avec un prototype doté d’un comportement involontaire. Lors des improvisations sur le plateau, nous avons cherché un terrain d’entente entre l’intelligence du corps humain, la réponse du corps machinal de l’animat et la réactivité de l’environnement virtuel. L’influence de ces éléments artificiels sur l’expression corporelle du performeur, ainsi que les mouvements de l’animat, sa fragilité et sa dimension réduite, ont provoqué une interaction instinctive, en marge d’une construction rationnelle basée sur de la réciprocité.
Quelques mois plus tard, lors d'une deuxième phase du projet nous avons projeté les mouvements du robot virtuel HRP-4 sur la performeuse afin de tester une forme de mimétisme gestuel. Cela nous a également permis d’approfondir les concepts d’altérité et d’autonomie des dispositifs robotiques. Les qualités de \textit{sauvage} ainsi que la notion d’\textit{Umwelt} ont accompagné cette résidence artistique. Après quelques tests avec le robot virtuel, nous avons pu constater à quel point le virtuel reste une manifestation mystérieuse qui suscite l’imagination des artistes. Cela n’est possible qu’à partir de l’interprétation du virtuel comme un organisme différent, en manifestant une autonomie sensible à la perception du performeur. Cela nous a également permis de réfléchir aux contraintes issus de l’intégration des éléments virtuels et réels dans un projet performatif. Comme une négociation entre les solutions software et les dispositifs hardware, l’illusion du réel versus l’imaginaire virtuel et la place que chacune de ces dimensions occupe sur le plateau, représentent une phase importante de ce projet.
Lors des prochaines résidences, nous avons mis l’accent sur la spécificité du robot HRP-4. Pour sa programmation, j’ai dû d’abord étudier ses mouvements mécaniques, leur potentiel artistique en termes d’expressivité, de contraintes et des libertés. L’effet de présence d’un robot humanoïde sur scène a suscité des questionnements en lien avec l’altérité de sa figure mécanique et le concept de \textit{uncanny} produit par ses mouvements remarquablement naturels. Les différences entre l’organicité du corps humain et l’ artificialité du robot ont ainsi devenu une source d’inspiration, comme une matière à détourner.
En 2022, pour imaginer de nouvelles formes d’écriture corporelle en vue d’une improvisation performative, le travail de programmation du robot HRP4 a été réalisé en deux temps. D’abord une familiarisation avec les systèmes MoCap utilisés par l’équipe du laboratoire et l’installation de plugins qui nous ont permis de simuler en temps réel les séquences de mouvement de l'humain sur le robot virtuel. Ensuite, des tests avec le robot HRP réel ont été réalisés en mars 2022. Ces tests ont facilité la mise en place d’une séquence de mouvements sur une chaise. Ce choix de faire s’asseoir le robot sur la chaise vient comme un résultat de nos réflexions sur les contraintes d’équilibre du robot, lors des séances d’improvisation. La mise en place la plus simple, pensée avec les ingénieurs de l’équipe de prof. Kheddar, a été l’organisation de ces séquences dans de programmes de type F.S.M (Finite State Machines) qui permettent une meilleure organisation des transitions entre différentes postures.
Comme hypothèse de recherche pour une chorégraphie mimétique, j’ai pu créer des simulations de séquences de mouvement sur un robot virtuel. Dans un premier temps, j’ai décidé de rapprocher la figure du robot à celle d’un danseur de slow, réalisant quelques tests d’interaction réelle avec la version physique du HRP-4. Ensuite j’ai effectué un travail de gestes inspirés par les postures de dirigeants politiques, pour voir dans quelle mesure les postures de pouvoir sont incarnées par des gestuelles et non par des attitudes. Le pouvoir que nous leur désignons est parfois le pouvoir de fascination que leur potentiel exerce sur nous, sans s’en rendre compte. Dans cette configuration centrée sur la fascination d’un objet inanimé, nous avons voulu comprendre dans quelle mesure le mouvement et les gestes dansés deviennent vecteurs d’influence.
Une autre séquence de mouvements a été préparée pour la troisième résidence de création au Centre des Arts d’Enghien Les Bains en septembre 2022. Pour cela, j’ai codé une séquence de mouvement sur la chaise qui dure approximativement 2 minutes. A l’intérieur de cette séquence, les états sont enchaînés selon une règle inspirée par la quatrième itération de l’algorithme de la courbe du Dragon. Pour correspondre aux quatre postures choisis initialement, nous avons opéré une conversion entre les états de la courbe du dragon et les états F.S.M. Pour la performance \textit{Le mythe de l’Immorta} présentée lors de notre sortie de résidence, un travail de synchronisation avec les sons produites par Hui-Tin Hong a été fait ultérieurement. Une autre séquence de code, cette fois en montrant le robot applaudir a été rajoutée ultérieurement. Ainsi le robot virtuel est apparu dans deux moments différents de la performance- au départ sur une chaise pour présenter sa danse et à la fin début pour applaudir les spectateurs. Le rythme de certains mouvements a été modifié pour correspondre avec la musique. Une pause de six secondes a été introduite dans la séquence pour marquer un moment d’arrêt: le robot virtuel tourne sa tête pour regarder le public. Ce geste a été interprété par les spectateurs comme une façon d’évaluer la danse des performeuses.
En parallèle, des autres moments de recherche en écriture corporelle ont été possibles grâce à la mise à disposition du studio de répétition de la chorégraphe Mathilde Monnier à Montpellier. J'ai pu effectuer une recherche sur le lien entre le son et le mouvement, pour continuer mes expérimentations Arduino précédentes. Ainsi avec l’aide du logiciel PureData nous avons créé un prototype de capteur EmG pour convertir le signal électrique des muscles en du son aléatoire. Ce prototype, testé lors d’une résidence artistique à la Halle Tropismes a Montpellier, a été présenté dans le cadre du Module Pédagogique Innovant ``Objets Magiques”, conçu en collaboration avec Isadora Télés de Castro pour le projet CECCI-H2M dans le cadre du dispositif Artec. Des laboratoire de recherche inspirés par mes expériences d’éducation somatique ainsi que par l’utilisation des techniques de shaking, constituent une boîte aux outils pour rechercher une corporéité ``autre” sur le plateau.
À travers nos expériences de recherche-création, nous imaginons des séquences de mouvements qui remettent en question le concept d’anthropomorphisme chez les robots jumeaux numériques. En considérant le terme d'interactivité pour mieux définir leur interaction, nous observons comment différents matériaux de mouvement stimulent la créativité à travers un processus d'hybridation entre l'humain et la machine. Dans cette perspective, nous déterminons comment les utilisateurs vivent Qualia en apprenant par imitation une séquence de danse démontrée consécutivement par un robot humanoïde, un bras industriel et un humain. Leurs retours et nos propres expérimentations pratiques nous permettent de mieux comprendre l’impact de l’anthropomorphisme numérique dans la réalisation d’une interaction homme-robot durable.
\subsection{Introduction}
Depuis le VIe siècle avant notre ère, lorsque le terme a été utilisé pour la première fois pour décrire des phénomènes religieux\cite{demers2015machine}, l'anthropomorphisme a accompagné l'intention de l'humanité de reproduire ses caractéristiques dans différents environnements. L'anthropomorphisme (du mot grec \textit{anthropos} signifiant ``humain” et \textit{morphe} signifiant ``forme”) est décrit dans\cite{duffy2003anthropomorphism} comme:
\begin{quote}
``the tendency to attribute human characteristics to inanimate objects, animals and others with a view to helping us rationalize their actions. It is attributing cognitive or emotional states to something based on observation in order to rationalize an entity’s behavior in a given social environment.”
\end{quote}
Il s’agit d’attribuer des états cognitifs ou émotionnels à quelque chose en se basant sur l’observation afin de rationaliser le comportement d’une entité dans un environnement social donné. Comme discuté dans\cite{tisseron2011animal}, une composante essentielle de l'esprit humain est de prêter certaines caractéristiques de notre vie psychique, en projetant notre fonctionnement physique et psychologique dans des objets. Selon\cite{baddoura2013homme}:
\begin{quote}
``les humains attribuent, souvent sans le savoir, des traits de personnalité aux machines en fonction non seulement de leur apparence extérieure, mais aussi de leur fonctionnement et de leurs compétences.”
Dans le présent article, nous faisons référence à l’anthropomorphisme dans une perspective humaniste plus large, en tant que caractéristique du comportement d’un système autonome qui permet d’attribuer des caractéristiques et des intentions humaines à des entités non humaines comme les robots. Récemment, la littérature a intégré une interprétation proposée par le philosophe français Bruno Latour - où le sens de l'anthropomorphisme est défini par \textit{ce qui a une forme humaine} et \textit{ce qui donne forme aux humains}\cite{stojnic2015digital} - encourageant les chercheurs à envisager l'anthropomorphisme numérique comme concept qui intègre les deux points de vue. En utilisant ces bases, nous explorons des notions clés comme l'agence\cite{2017computation} et l'autonomie\cite{bisig2022generative} pour notre cas particulier de danse avec des robots, afin de mieux souligner le lien de ces notions avec l'anthropomorphisme numérique dans l'établissement d'une société humaine durable. interaction avec le robot (HRI).
Dernièrement, la robotique a amélioré ces perspectives, en développant des artefacts qui remettent en question l'idée d'humanité\cite{romic2021negoating}. Nous nous appuyons sur les chercheurs\cite{breazeal2004social, breazeal2005robot} pour définir la place que les robots peuvent occuper dans notre étude, en les considérant comme des outils (aider l'humain à accomplir une tâche - dans notre cas développer une chorégraphie), comme des avatars (puisque le robot s'engage dans une certaine présence sociale avec d'autres personnes - dans notre cas les spectateurs d'un spectacle de danse) et surtout en tant que partenaires (établir un processus de co-working avec un collaborateur - dans notre cas co-créer un spectacle de danse).
De\cite{duffy2003anthropomorphism} nous remarquons qu'un robot social \textit{peut être perçu comme l'interface entre l'homme et la technologie}. C’est l’utilisation de fonctionnalités socialement acceptables dans un système robotique qui contribue à briser la barrière entre l’espace d’information numérique et les personnes. Alors que la conception des robots devient modulaire\cite{siedel2011concept} et que les extensions corporelles inspirent des performances artistiques qui remettent en question les capacités humaines\cite{jochum2018becoming}, une étude anthropologique\cite{vidal2007anthropomorphism} compare l'HRI au type de connexion exprimée dans les rituels religieux antérieurs entre dieux et humains- soulignant l'influence que les robots pourraient avoir sur nous dans un avenir proche. Alors que nous évoluons actuellement vers une ère technologisée post-humaniste, où les humains étendent leurs capacités à l’aide d’exosquelettes et de divers appareils connectés, la définition du corps humain et la façon dont il interagit avec son environnement change en conséquence. Notre article étudie comment ces paradigmes affectent notre créativité et leur impact sur les pratiques sociales collaboratives comme la danse.
\cite{villard2016propos} évoque l'analogie étymologique entre la danse (de l'indo européen dix, racine de tension) et les émotions (du latin émovere : ou mise en mouvement). Dans notre quête d’une interactivité significative entre performeurs et robots, nous analysons l’impact de ces projections anthropologiques sur la danse. Dans les pages suivantes, nous décrivons comment nous créons notre séquence de mouvements en discutant de nos hypothèses de travail et de notre méthodologie et en expliquant nos phases de travail menant au concept d'hybridation humain-robot (H2R). Nous adaptons et testons ensuite la séquence sur plusieurs interprètes humains. Nous discutons ensuite des résultats et des perspectives de cette expérimentation et de ses implications dans les pratiques de danse actuelles.
\subsection{Questions et méthodologie}
Notre approche se concentre sur le processus de création d'un langage chorégraphique original inspiré des robots, influencé par les pratiques somatiques et l'intelligence incarnée. Selon l'artiste Louis Philippe Demers, toute forme abstraite et inerte \textit{peut devenir fluide, organique et éventuellement anthropomorphe par les seuls moyens de contextualisation et de mouvement}\cite{demers2015machine}. Notre objectif est de vérifier dans quelle mesure le concept d’anthropomorphisme renforce la créativité en HRI et influence la recherche artistique. Parmi nos hypothèses de travail, nous étudions comment la forme d'un robot peut influencer l'interprète en générant des mouvements involontaires similaires à des réponses kinesthésiques\cite{bogart2004viewpoints}\footnote{une réaction spontanée à un mouvement qui se produit en dehors de vous ; le moment dans lequel vous réagissez aux événements externes tels que le mouvement ou le son ; le mouvement impulsif qui résulte d'une stimulation des sens : c'est-à-dire. quelqu'un applaudit devant vos yeux et vous clignez des yeux en réponse ; ou quelqu'un claque une porte et vous vous levez impulsivement de votre chaise., Bogart, Anne, Landau, Tina. Le livre des points de vue, p. 11} ? Comment reproduire plus facilement une séquence de danse selon le type de robot ? Le retour de l’interprète change-t-il une fois que le type de robot a changé ?
Un autre domaine d’investigation concerne le processus créatif, confortant l’idée selon laquelle travailler avec un avatar substitut d’un robot que nous définirons plus tard comme son jumeau numérique, peut favoriser un état d’hybridation entre le corps ou l’interprète et le corps virtuel du robot. Nous soulignons ainsi le processus par lequel le rôle du robot passe du rôle d’outil à celui de compagnon de travail. Plus loin, on se demande si cette nouvelle individuation symbiotique entre robot et humain peut influencer la production de performances artistiques.
Les robots impliqués dans notre étude ont des dimensions similaires, bien qu’initialement conçus pour des résultats différents. Comme point de départ, nous utilisons le matériel de mouvement implémenté dans le robot HRP-4 pour le projet de performance \textit{Le mythe de l'Immorta}. Le robot humanoïde et un bras industriel sont programmés dans une série de mouvements analogues basés principalement sur la rotation des membres supérieurs et de la tête du robot humanoïde. Nous testons ensuite les séquences de danse à travers une étude de cas au sein d'un groupe d'étudiants en danse.
\subsection{Des digital twins comme facilitateurs d'interactivité }
Les élèves sont invités à mémoriser, puis à improviser la séquence de mouvements analogues indiquée par projection vidéo par différents partenaires de danse. Les séquences filmées ont le même format et la même durée (environ 1min). La première séquence est enseignée par un robot humanoïde, la seconde par un bras industriel et la dernière par un interprète humain. Les séquences ont la même structure mais diffèrent par la qualité du mouvement, selon le professeur. Ensuite, les danseurs sont invités à interpréter librement les mouvements et à improviser collectivement une séquence de danse libre, recyclant les mouvements qu'ils considéraient comme les plus inspirants. La méthode d'analyse est une forme de questions de 23 questions que les participants sont invités à remplir à la fin de l'expérience.
\subsection{Quand l'outil devient partenaire}
En Occident, les robots sont souvent conçus pour imiter le comportement humain, principalement comme outils [14] remplaçant le travail humain ou aidant les humains dans des tâches complexes. Cependant, dans des contextes créatifs, leur fonction est plus ontologique dans le sens où ils pourraient contribuer à une certaine création de sens en inférence avec le processus artistique qui les contient. Pour l’artiste et chercheur Simon Penny, la cognition ne se produit pas exclusivement dans le cerveau, étant \textit{loin d’être une manipulation logique de jetons symboliques}\cite{penny2015emergence, penny2022sensorimotor}. Faisant valoir que les processus mentaux comme l’inspiration sont incarnés, intégrés dans des tissus corporels non neuronaux (donc étendus en artefacts, systèmes sociaux et réseaux culturels), il souligne également sa nature dynamique. A travers nos expériences de recherche-création, nous imaginons des séquences de mouvements qui remettent en question le concept d'anthropomorphisme chez les robots interactifs intelligents. La scène, médiatrice de leur rencontre, apporte de nouvelles possibilités d'expression, et par conséquent d'interaction. Dans notre cas particulier, nous appliquons le terme d'interactivité\cite{bret2005interacting, bret2015creation} pour définir la relation entre humains et robots. Initialement inspirée par l'interaction humaine, l'interactivité s'est complexifiée avec le développement des nouvelles technologies et des nouveaux médias, ouvrant la voie à un processus de transformation continu. Mélangeant le vivant et le non-vivant, la réalité et les simulations, le physique et le virtuel, l'interactivité facilite une perméabilité entre l'humain et la technologie. Comme l'indique \cite{baddoura2013homme}:
\begin{quote}
``les interfaces interactives contemporaines échappent au contrôle total de l'homme et créent une situation nouvelle où celui-ci n'a plus un rôle exclusivement actif face à son outil. Il s’agit plutôt d’un échange, d’une interdépendance caractérisée de plus en plus par leur interactivité.”
\end{quote}
\subsection{Confronter les paradigmes concernant l'incarnation}
\cite{baddoura2013homme} fait une analogie entre la manière dont la technologie, notamment les interactions virtuelles, façonne la compréhension du corps humain. Les individus qui cherchent à agrandir, modifier ou fragmenter leur corps sont des indicateurs des changements en cours qui s’opèrent dans nos interactions quotidiennes. L’identité étant multipliée, diluée ou absorbée dans le monde numérique, la tendance est de projeter les mêmes attentes sur le corps humain. Les neurosciences, la robotique ou l’art n’envisagent pas l’incarnation et l’anthropomorphisme de la même manière. Dans \cite{johnson2007we}, le corps est défini comme un ensemble de processus organiques qui vont au-delà de l'expérience de la sensation et du mouvement. Cela peut inclure des réseaux sociaux tels que les familles et des artefacts culturellement construits. En parallèle, des termes anthropologiques comme \textit{domestication du corps}\cite{joffrey2015humanoides} analysent la manière dont le corps est segmenté en unités selon le domaine de recherche qui l'aborde. Dans le domaine des arts, des pionniers comme Stelarc ont toujours considéré leur corps comme un terrain de jeu pour des expériences technologiques\cite{stephens2016we}. Avec ses performances de troisième bras ou de pattes d'araignée, l'artiste brouille les frontières entre l'humain et la machine à travers des mises en scène très originales. Tandis que les roboticiens conçoivent des robots capables \textit{d’imiter} les humains grâce à leur ressemblance et leurs capacités collaboratives \cite{evrard2009homotopy}. Les chercheurs démontrent comment la forme générale d'un robot joue un rôle clé dans l'invocation des émotions souhaitées chez les utilisateurs\cite{hwang2013effects}, avec des études mesurant le degré d'acceptation des robots humanoïdes\cite{nomura2012social,kaplan2004afraid}, influencé par la conscience de notre propre \textit{schéma corporel}\cite{hoffmann2021body}. De plus, des concepts tels que \textit{l'étrangeté sociale}\cite{hoffman2020social} examinent comment notre besoin d'être unique et de nous engager dans des interactions authentiques est impacté par le développement des robots sociaux.
L’idée de commencer à expérimenter l’avatar virtuel d’un robot est née lors d’un travail en laboratoire avec les roboticiens de l’équipe \textit{Le mythe de l'Immorta}. Le robot HRP-4 étant peu disponible à cette époque, nous avons réalisé une résidence artistique dans laquelle son double virtuel représentait le réel. Le robot a exécuté une série de mouvements inspirés des postures de pouvoir des dirigeants politiques assis sur des chaises. Lors de l'improvisation, sa corporéité imaginaire déclenchait différentes réponses cinétiques chez l'interprète, nous étions donc curieux d'aller plus loin et de comprendre ce phénomène. Dans\cite{sohier2022degre} on note la distinction entre les robots virtualisés et les simulations informatiques nécessaires au fonctionnement des robots dans le monde réel. Pour aller plus loin, dans notre étude actuelle, nous employons le terme de \textit{digital twin}\footnote{selon IBM, alors qu'une simulation étudie généralement un processus particulier, un double numérique peut lui-même exécuter un certain nombre de simulations utiles afin d'étudier plusieurs processus.} par rapport aux simulations, en raison de leur traitement des données en temps réel et de la possibilité d'étudier plusieurs processus dans diverses simulations.
\subsection{L'hybridation résultant de l'interactivité créative }
\cite{joffrey2015humanoides} retrace le processus d'hybridation entre le corps humain et les objets technologiques dès la préhistoire, lorsque l'anatomie de notre main s'est adaptée à la manipulation d'objets comme les outils de sculpture. Il soutient que la notion de réflexivité occupe une place centrale dans le fonctionnement de l'anthropomorphisme, citant l'anthropologue culturel Victor Turner pour qui l'humain est plus qu'un animal performatif, étant proche d'un animale qui se réalise. Par analogie, créer une séquence de danse robotique est aussi un processus réflexif. L'humain joue un double rôle d'initiateur et de récepteur de mouvement (dans le sens où il répond à la proposition faite par le robot) tandis que le robot devient un médium traduisant avec ses contraintes mécaniques l'architecture corporelle qu'il est censé embarquer, sans grand chose. en alternant le modèle initial.
Pour approfondir notre compréhension du concept d'hybridation, nous le définissons en relation avec le travail de l'artiste numérique Edmond Couchot. Pour lui l'hybridation se situe toujours dans l'expérience, \textit{plus précisément dans la relation entre le sensible, le corps et son environnement}\cite{sohier2022degre}. L’auteur de l’article souligne la nature en cours de l’hybridation ou, pour citer l’artiste, \textit{un état évolutif, de l’humain à l’artificiel et de l’artificiel à l’humain}. Dans sa classification des agents artificiels, Couchot fait une distinction entre les robots et les humains artificiels, en utilisant les concepts de matérialité et d'autonomie pour distinguer les deux. Pour l'autonomie, sa classification s'oriente autour de deux polarités : l'avatar fantoche (niveau minimal d'autonomie) et l'acteur autonome (niveau maximal d'autonomie). Concernant sa définition de la matérialité, il structure ses observations autour de l'expérience technesthésique comme étant:
\begin{quote}
``une expérience sensible vécue dans l'acte technique [qui] constitue une sorte d'habitus perceptuel, de connaissance sensorielle, partagée par chaque membre d'un société et façonner ses manières d'être et d'agir, de penser, par des voies différentes de celles du langage et de la pensée symbolique.”
\end{quote}
Il est intéressant de noter que cette expérience implique la disparition de soi, en s'appuyant sur les restes de l'expérience des autres avec technologie. Cela rejoint l'observation de Becker\cite{joffrey2015humanoides} pour qui l'histoire des gestes partagés, retrace l'évolution de l'humanité dans sa relation avec la technologie.
\subsection{L'humain dans la boucle}
L'un des enjeux de notre recherche-création est d'explorer cette dimension intermédiaire qui s'opère entre la qualité de mouvement de deux entités distinctes (humain et robot).
In\cite{villard2016propos} une expérience réalisée avec un robot Poppy, favorise l'émergence du concept d'empathie kinesthésique- illustré par le décalage et la tension qui s'opèrent une fois le geste transmis de l'humain au robot. Dans notre cas particulier, dans les improvisations en temps réel, une fois le robot HRP-4 programmé pour reproduire une séquence de danse, la chorégraphie peut être modifiée en fonction des caractéristiques techniques du robot - état des actionneurs et de la batterie, problème de code, limitations articulaires. . Nous appelons ce type d'inférence des \textit{mouvements parasites}, nécessitant une adaptation sensori-motrice de la part de la machine et de l'humain. En comparaison, en travaillant avec des jumeaux numériques, les réglages se font au niveau de la vidéo-projection. Le concept de morphing\cite{villard2016propos} emprunté au traitement de l'image offre une analogie intéressante avec la production de mouvement, définissant un processus de réhabilitation et de réajustement continu des corps et de leur transformation en formes. Pour une de nos expérimentations de recherche-création, nous avons projeté la figure du robot sur le corps du performeur.
À notre grande surprise, les images se chevauchent, ce qui donne lieu à une figure hybride de robot et de machine. Après plusieurs essais, le performeur s'est adapté à cette spécificité inattendue du robot, comme dans un processus d'apprivoisement et il en est résulté une figure symbiotique, mi-humain, mi-robot.
\subsection{Étude de cas d'une interaction de danse homme-robot impliquant l'anthropomorphisme}
À travers notre étude de cas, nous étudions comment les différents matériaux de mouvement sont vécus par les artistes lorsqu'ils dansent avec des robots. L'objectif de notre article est de déterminer comment les utilisateurs expérimentent \textit{qualia}\footnote{selon l'Encyclopédie de philosophie de Stanford, les philosophes utilisent souvent le terme ``qualia” (singulier ``quale”) pour faire référence aux aspects phénoménaux et accessibles de manière introspective de notre vies mentales. Le statut des qualia est vivement débattu en philosophie, en grande partie parce qu’il est essentiel à une bonne compréhension de la nature de la conscience. Les Qualia sont au cœur même de la problématique corps-esprit.} tout en apprenant par imitation une séquence de danse démontrée consécutivement par des agents humains et non humains. Arguant que le corps et l’esprit sont la même expression d’un processus organique\cite{mark2007meaning}, décrit les arts et l’esthétique comme l’aboutissement des tentatives de l’humanité pour trouver un sens. Après avoir travaillé avec le double jumeau du robot HRP-4 pour la performance \textit{Le mythe de l'Immorta}, nous avons souhaité comprendre comment les robots sont perçus par leurs partenaires humains lors des pratiques créatives.
Les ingénieurs peuvent facilement préprogrammer des intentions liées à des émotions ou à des comportements humains spécifiques chez les robots en utilisant une approche de boucle affective\cite{damiano2020emotions}. Cette approche se concentre sur la capacité du robot à engager les humains dans des échanges affectifs et donc à attribuer du sens à leur comportement. En 2010, une interface utilisateur simplifiée qui crée des mouvements corporels\cite{nakaoka2010intuitive} a été implémentée dans un robot HRP-4C pour un spectacle de danse. Le robot exécute des mouvements de danse synchronisés de base entourés de quatre danseurs, donnant l’impression d’une copie parfaite de l’interprète humain. Comme le dit \cite{penny2016improvisation}, nous attendons des œuvres d'art intelligentes et conscientes de nous surprendre. Pour aborder cette attention, nous imaginons des interactions qui se concentrent sur les mouvements spontanés, ``parasites” et les comportements inattendus des robots, questionnant un ``effet de présence”\cite{zaven2014effets} sur scène. Pour explorer les potentialités de ces interactions évolutives créatives, différents scénarios ont été programmés et testés, impliquant des imitations et des mouvements aléatoires. Cette approche permet de comprendre comment les corps artificiels et organiques peuvent s'adapter les uns aux autres et atteindre un état d'hybridité propre à notre environnement de travail.
Lors de la conception de notre première séquence de danse avec HRP-4, nous avons dû prendre en compte différentes contraintes : la manière dont le robot stabilise son centre de masse, son autonomie en position debout et le mécanisme de sécurité qui lui permet de se déplacer. Ce contexte nous a fait envisager dans un premier temps une interaction dansée assise. Inspirés par le travail de chorégraphes célèbres comme \textit{Echad mi Yodea} (1998) d'Ohad Naharin, \textit{Rosas danst Rosas} (1983) d'Anne Teresa De Keersmaeker ou \textit{Seniors Rocking} (2005) d'Anna Halprin qui utilisaient des chaises dans leurs chorégraphies, nous avons choisi de travailler sur les postures de célèbres dirigeants politiques. Le fait qu'ils étaient assis, en train de réfléchir, mais que par leur raisonnement ils ont influencé le résultat de notre vie quotidienne a transformé la figure du robot en une figure totémique habitée par des gestes de pouvoir. La séquence de danse a été transposée dans le jumeau numérique HRP-4, sur scène lors du projet \textit{Le mythe de l'Immorta}.
Dans une instanciation différente de ce projet, l’interprète a interagi en temps réel avec les deux systèmes autonomes de la performance – en utilisant la même séquence de danse avec l’environnement virtuel de la performance E.V.E. (non anthropomorphe) ainsi que le HRP-4 virtuel (anthropomorphe). Le résultat de cette expérience fut que les mouvements répétitifs du HRP-4 généraient un sentiment d’oppression et de limitation chez l’interprète, déclenchant le besoin de les déconstruire en divers mouvements similaires aux réponses kinesthésiques mentionnées précédemment. Considérant la réactivité d'E.V.E. lui faisait facilement oublier la séquence initiale et suivre la rythmique proposée par les agents artificiels. Les deux systèmes ont été identifiés comme partenaires de scène par l'interprète, le robot évoquant un sentiment d'absence ou un phénomène de \textit{fantôme dans la coquille }\footnote{https://www.imdb.com/title/tt0113568/}. Une fois ces idées développées grâce à notre processus créatif, nous avons ressenti le besoin de les confronter à un contexte plus large.
La suite de votre expérimentation était une étude de cas proposée à 25 étudiants en danse qui ont testé une séquence de danse conçue pour le robot humanoïde HRP-4 et enseignée par celui-ci, ainsi qu'un bras industriel FRANKA et un performeur humain. Par rapport à la version inspirée des postures de puissance, le robot HRP-4 bougeait ses membres supérieurs, ses hanches, sa tête et son torse, mais cette fois-ci debout. De nouveaux mouvements, correspondant à des mouvements involontaires similaires à des réponses kinesthésiques, ont été ajoutés dans la boucle pour simuler ce que nous avons défini précédemment comme des mouvements parasites. Il était initialement demandé aux participants de reproduire les mouvements puis d'improviser librement en appliquant certains des gestes dont ils se souvenaient. Ils ont été encouragés à explorer cette dimension sensorielle et à oublier toute projection personnelle concernant l'esthétique et l'apparence de la séquence.
Dans\cite{jochum2017computation, duffy2003anthropomorphism}, les chercheurs relient la notion d'agentivité à la question de l'anthropomorphisme, citant la théorie de D.C. Dennett sur les \textit{systèmes intentionnels}. Dans les contextes artistiques, outre le comportement cinétique de l’objet, un autre facteur d’influence est la stratégie du spectateur pour comprendre et prédire le comportement de l’objet performant. Nous avons donc souhaité ouvrir notre démarche de recherche-création à des acteurs extérieurs, en organisant une expérimentation pratique avec des étudiants en danse.
Parmi les questions auxquelles devaient répondre les 25 participants à notre étude, certaines concernaient le processus d’apprentissage par imitation du mouvement. La plupart des participants n'ont trouvé aucune différence significative dans la manière dont le robot (56\%) présentait le mouvement, par rapport à l'humain (76\%). Cependant, la plupart des participants étaient fortement d'accord sur le fait qu'il était plus facile de suivre les mouvements du robot humanoïde (64\%), par rapport au bras industriel (8\%). Concernant la qualité du mouvement, la plupart des participants pensaient que le robot humanoïde (44\%) et le bras robotique (44\%) avaient des mouvements intentionnels. Alors que 56\% estiment qu'il leur a été facile de détecter les \textit{mouvements parasites} de la séquence. Une légère différence a été observée lorsqu'on a demandé aux participants s'ils pouvaient distinguer les mouvements intentionnels des mouvements non intentionnels, 28\% des participants étant d'accord et 24\% tout à fait d'accord que c'était facile. Une partie importante des participants ne savait pas (36\%) si les robots sont des créatures étranges, 24\% étant tout à fait d'accord avec le fait qu'ils le soient et 20\% étant d'une manière ou d'une autre d'accord qu'ils ne le soient pas. Même répartition en considérant si les robots ont ou non une conscience, avec 28\% en quelque sorte en désaccord et 24\% en quelque sorte d'accord. Quant à l'interactivité créative, la majorité des participants (68\%) ont ressenti le besoin d'ajouter d'autres mouvements, une fois la séquence devenue répétitive. Aucun d'entre eux n'a convenu qu'ils appliquaient habituellement les mouvements appris lorsqu'ils dansaient, tandis que très peu d'entre eux ont convenu que les mouvements étaient naturels pour le robot HRP-4 (8\%) et le robot Franka (16\%). Il est intéressant de noter que pour le robot Franka, 4\% des participants étaient tout à fait d'accord que ses mouvements étaient naturels, alors qu'aucun pour le robot humanoïde. Concernant les émotions, seulement 12\% des participants étaient d'accord que le robot HRP-4 communiquait leurs émotions par la danse, une majorité (64\%) étant en désaccord et 24\% étant indécis. Quant aux émotions du robot Franka, 80\% des participants n'étaient pas d'accord avec le fait qu'il les exprimait à travers la danse, tandis que 8\% étaient indécis et 4\% d'une manière ou d'une autre d'accord. Il est intéressant de noter que 8\% des participants pensaient que le robot Franka communiquait des émotions à travers sa danse. La plupart des participants à notre étude (64\%) pourraient consacrer plus de temps à comprendre le mouvement grâce à l'interaction robotique.
Un processus d’hybridation a également été observé après la séquence, lorsqu’il a été demandé aux participants d’interpréter librement les mouvements du robot qu’ils avaient expérimentés plus tôt. Cela a facilité l’exploration d’un état où les sens étaient plus présents et où les mouvements spontanés apparaissaient plus facilement. Un état que nous définissons comme créatif, dans le sens où il permet une expressivité corporelle inhérente à la spécificité de l'incarnation - où par imitation ils se sont appropriés et transformés la séquence de danse robotique. En bougeant, leurs corps semblaient habités par la présence robotique.
Les résultats de l'expérimentation sont disponibles avant\footnote{ https://vimeo.com/779347404} et après\footnote{https://vimeo.com/779363288} l'essai du robot.
\subsection{Limitations}
Concernant notre intention de modifier légèrement les séquences, de les voir dans un ordre particulier : HRP-4, le Franka puis l'interprète humain, aurait pu influencer le processus ou leurs réponses. Certains participants connaissaient déjà les mouvements du robot HRP-4 grâce aux précédentes séances de travail organisées plus tôt cette année-là.
Par rapport au travail avec des jumeaux numériques, les résultats peuvent également être différents lorsque l’on travaille en temps réel avec des robots physiques.
De plus, en appliquant la notion d’anthropologie numérique aux jumeaux numériques des robots utilisés dans nos expériences, nous aurions pu omettre certains résultats intéressants selon d’autres formes et dimensions.
Il ne faut pas non plus oublier que même si les agents artificiels peuvent simuler des intentions et des affects, notre manière de les interpréter – ou la notion de qualia évoquée plus haut – est toujours différente.
Après avoir implémenté la séquence de danse analogue du robot humanoïde sur le bras industriel, nous avons constaté des différences (notamment en ce qui concerne la symétrie de la posture mais aussi la vitesse et les secousses), le bras industriel se révélant plus conforme compte tenu du type d'actionneurs qui exécutaient le mouvement.
\subsection{Perspectives futures utilisant les technologies robotiques émergentes}
La prochaine phase de nos recherches consistera à tester les mêmes scénarios avec la version physique des robots. De cette manière, nous pouvons déterminer si la perception de l'interprète, ainsi que sa qualité de mouvement, peuvent être impactées différemment lorsqu'il travaille dans les mêmes conditions, avec le corps réel et mécanique des robots. Cela permettra également de comprendre comment le processus d’hybridation est influencé par les phases d’imitation du mouvement. Nos premiers résultats empiriques nous encouragent à mettre en place une étude scientifique en laboratoire, mesurant l'empathie kinesthésique grâce à la détection de neurones miroirs, en utilisant le traitement du signal de l'électroencéphalogramme (EEG).
\subsection{Conclusion}
Apprendre par imitation, puis établir une interaction créative à l'aide de jumeaux numériques nous a permis de rechercher les qualités vécues par chaque participant et d'améliorer la qualité globale du mouvement grâce à l'improvisation dansée. Ce type d'interactivité créative impliquait l'hybridation entre humains et robots, générant de nouvelles formes visuelles lors de la projection vidéo, ainsi qu'un type original de matériau de mouvement.
Espérons que nos remarques sur l’anthorpomorphisme numérique stimuleront davantage les échanges entre roboticiens et artistes, anticipant une nouvelle phase d’individuation dans la relation globale robot-humain.
En s'interrogeant sur la manière dont les connaissances acquises grâce aux pratiques artistiques \textit{peuvent être liées à d'autres formes de connaissances considérées par le public comme plus ou moins faisant autorité ou dignes de confiance}\cite{gunn2004learning}, les chercheurs défendent l'idée que l'art est un cadre parfait pour la connaissance distribuée.
Les recherches actuelles suggérant que le comportement des individus à l'égard des robots est influencé par l'observation de rencontres entre des robots et d'autres personnes\cite{timmerman2021springer} offrent des informations importantes. Pour autant que nous le sachions, nous sommes les premiers dans la littérature à étudier les interactions de tiers (c'est-à-dire robot - robot - humain) dans un contexte d'imitation de danse. De telles interactions deviendront de plus en plus courantes avec l’avènement du robot.
Selon \cite{jung2018acm}, un robot peut affecter son environnement social au-delà de la personne qui interagit avec lui. Dans ce contexte, nous pensons qu’il est important d’explorer l’HRI dans des contextes sociaux complexes. Notre étude initiale s'est basée sur une HRI collective réalisée avec des avatars virtuels de robots lors d'un atelier de danse. La prochaine étape de notre recherche nous permet d'aborder de nouvelles possibilités d'interaction et de vérifier une nouvelle hypothèse sur la dynamique sociale homme-robot : du point de vue d'un autre humain interagissant avec une dyade homme-robot, le type d'incarnation influence la façon dont le robot est perçu. et son impact sur l'environnement. Grâce à notre approche, nous examinons l'effet de robots de différentes formes dans un contexte multi-personnes lors de routines de danse, pour comprendre comment la conception du robot améliore le processus artistique.
Dans cet article, motivés par la perspective florissante des robots de mise en scène dans les performances artistiques, nous introduisons une nouvelle méthode tierce
cadre d’interaction homme-robot-humain (HRHI). Traditionnellement, les interactions avec des tiers sont nettement moins étudiées que leurs homologues entre deux parties (voir par exemple les études de médiation en ce qui concerne les études de négociation, etc.). Nous nous limitons à la mise en place de routines de danse collaboratives impliquant des mouvements du haut du corps entre un danseur professionnel, un robot et un humain. A travers ce cadre, nous nous intéressons au potentiel créatif de tels partenaires d'interaction que nous proposons de mesurer par la capacité d'improvisation du spectateur humain. Comme le note \cite{bailin1984creativity}, la créativité dans les œuvres d'art implique une compétence définie comme une certaine \textit{plasticité du contrôle} (c'est-à-dire être capable de voir au-delà du problème spécifique auquel on est confronté et d'avoir une réelle compréhension du problème). méthodes et procédures de la discipline et les principes et objectifs qui les sous-tendent).
Lorsqu'ils définissent la créativité, les chercheurs \cite{gaut2009brill, bailin1984creativity} font remonter le débat initial au philosophe grec Platon, qui définit la créativité comme un processus mystérieux impliquant l'inspiration. Nous soutenons que cette vision est erronée, car elle adopte à tort une vision anti-téléologique du processus créatif. De plus, \cite{gaut2009brill} identifie la valeur de la liberté humaine et la valeur du courage en tant que catalyseurs de la créativité. Nous transposons ces arguments à notre contexte de danse HRI, afin d'évaluer les facteurs possibles qui améliorent la créativité des robots.
Nous proposons ainsi d'analyser la capacité d'improvisation induite par l'état créatif à partir de deux points clés : d'une part la substituabilité\cite{kirsh2010wayne} et d'autre part la conscience kinesthésique\cite{gemeinboeck2016roman} des participants.
L'imitation dans la danse interactive des robots humains a fait l'objet de recherches de longue date dans la littérature, en particulier dans le cadre d'une incarnation. Alors que l'improvisation était principalement utilisée pour améliorer la réactivité et l'acceptation sociale des robots \cite{jochum2019moco, hoffman2012impro, weinberg2007impro}, les artistes font improviser des robots sur scène, que ce soit pour danser \cite{demers2016multiple} ou jouer de la musique \cite{hoffman2011stage}. Il est important de préciser que dans notre étude actuelle, plutôt que d’improviser, les robots émulent l’improvisation selon des algorithmes préprogrammés.
En danse, la mémorisation d'une phrase ou d'un geste implique un processus d'assimilation appelé marquage, où chaque danseur reproduit la matière du mouvement en activant différentes parties du corps. Les observations de\cite{kirsh2010wayne} proposent la technique de marquage comme \textit{un échafaudage pour projeter mentalement une structure plus détaillée que celle qui pourrait autrement être gardée à l'esprit.} Semblable à une stratégie interactive augmentant la cognition, les danseurs marquent avec leur corps, des séquences de danse pour mémoriser et les transmettre.
L'une des propriétés du marquage est la substituabilité, décrivant comment un mouvement dans une partie du corps peut représenter le mouvement dans une autre. Suite aux observations de Kirsh selon lesquelles \textit{les mouvements des mains et les inclinaisons de la tête représentent régulièrement le mouvement de différentes parties du corps}, nous proposons une expérience de danse avec les mains traduite par des robots, qui code différentes parties du corps chez les partenaires humains.
Inspirés par le travail de \cite{jochum2019moco}, nous utilisons l'improvisation comme approche ascendante pour analyser l'interaction incarnée dans la danse. Au cours de nos essais en laboratoire, les robots et les personnes se sont spontanément déplacés afin de déterminer quels facteurs renforcent un résultat créatif. À l’origine outil de composition, l’improvisation dansée est devenue une technique de performance live améliorant la conscience kinesthésique des interprètes. Selon\cite{schwartz2000action}, ce type de conscience est également lié à l'incarnation\cite{jochum2019moco} chez les artistes humains. Transposer ces observations aux robots permet de déterminer leur impact sur un processus artistique global et d'analyser comment le type d'incarnation influence les réponses spontanées des humains.
Comme le dit \cite{dautenhahn2018acm}, la conception des robots évolue rapidement tandis que les modèles deviennent obsolètes une fois que les entreprises cessent de les développer davantage. Par conséquent, la communauté robotique a des difficultés à partager un terrain d'entente sur ce que le terme \textit{robot}implique actuellement, y compris un large éventail de formes comme \textit{androïde, humanoïde, mécanoïde, semblable à une machine, zoomorphe ou anthropomorphe}. comprendre les possibilités d'interaction entre humains et robots est un défi complexe, au cœur de plusieurs disciplines impliquant la robotique, les neurosciences, la psychologie, l'éthologie, la philosophie de l'esprit... Le recyclage des pratiques, technologies et protocoles actuels est moins étudié que les modèles innovants, conduisant à à une vision trop simpliste de l'HRI. Dans notre étude, nous cherchons à comprendre et à étendre les paramètres originaux d'un HRI standard à un modèle d'interaction avec des tiers, afin de développer d'autres concepts émergents liés aux arts et à la créativité qui pourraient accroître l'acceptation sociale chez les robots. Les auteurs de\cite{fdili2019acm, fdili2017moco, jochum2019moco} citent l'informaticien Paul Dourish pour qui \textit{l'incarnation n'est pas une propriété de systèmes, de technologies ou d'artefacts ; c'est une propriété d'interaction }. Le type d'interaction incarnée que nous étudions vise \textit{la création et le partage de sens} tel que défini par Dourish. Selon lui, le concept d'incarnation ne se limite pas à la manifestation physique des personnes et des objets, \textit{mais s'étend également aux interactions sociales, relations et participation entre les personnes et les choses}. À notre tour, nous étudions comment l’interaction entre un danseur et un robot peut déclencher du sens et une conscience kinesthésique chez les participants. Nous analysons les types de modèles d'interaction générés par deux contraintes - l'imitation et l'improvisation - en demandant aux participants de remplir un formulaire de vingt-neuf questions. Nous identifions les matériaux originaux du mouvement et analysons comment le type d'incarnation du robot peut être un catalyseur de cette expérience.
Dans ce contexte, dans cet article, sur la base de l’expérience mentionnée ci-dessus, nous avons obtenu les principaux résultats suivants :
\begin{itemize}
\item Les robots industriels pourraient faciliter un état créatif plus élevé pour la danse, par rapport aux robots humanoïdes
\item Le degré d'acceptation du deuxième participant humain dépend du degré de familiarité du participant avec le robot
\item Dans un contexte tiers humanoïde-robot-danseur-humain, le danseur est moins perçu mais il est vu comme une source d'inspiration lors de la phase d'improvisation
\item Les participants étaient moins intéressés à toucher physiquement le robot, quelle que soit sa forme
\item Les participants ont préféré imiter et improviser avec les robots plutôt qu'avec le danseur.
\item Le sentiment de synchronisation avec les robots était moins présent lors de la phase d'improvisation
\item Lors de la phase d'improvisation, les participants projetaient et attendaient une réactivité de la part du bras industriel mais moins de la part de l'humanoïde.
\item Durant la phase d'improvisation, les participants n'ont pas interagi avec la danseuse humaine, ni l'ont imitée.
Notre expérience motivante s'est déroulée à l'extérieur du laboratoire, lors d'une pratique de cours de danse. Les observations de \cite{jung2018acm} nous ont inspiré à travailler dans un cadre original, en adaptant notre hypothèse aux contraintes de l'environnement (ie. les participants ont vécu une expérience collective de HRI, lors d'une séance de formation collective en danse). Les résultats de ce processus hybride sont disponibles ici (\url{https://vimeo.com/779347404} et \url{https://vimeo.com/779363288}). Même si notre objectif était de comprendre comment l’anthropomorphisme numérique déclenche la créativité, l’expérience a fourni des informations utiles sur la créativité en général, nous donnant l’opportunité d’aborder ce concept dans un contexte plus large.
Les vingt-cinq étudiants participants ont eu pour mission d'imiter puis d'improviser avec les versions virtuelles d'un robot industriel et d'un robot humanoïde, puis de remplir un formulaire comportant des questions sur une échelle de notation de 1 à 5. L'apprentissage par imitation, pour commencer par établir une interaction créative, a permis d'améliorer la qualité globale du mouvement grâce à l'improvisation dansée. La plupart des participants étaient fortement d'accord sur le fait qu'il était plus facile de suivre les mouvements du robot humanoïde (64\%), par rapport au bras industriel (8\%). Une partie importante des participants ne savait pas (36\%) si les robots sont des créatures étranges, 24\% étant tout à fait d'accord avec le fait qu'ils le soient et 20\% étant d'une manière ou d'une autre d'accord qu'ils ne le soient pas. La majorité des participants - (68\%) - ont ressenti le besoin d'ajouter d'autres mouvements, une fois la séquence devenue répétitive. Aucun d'entre eux n'a convenu qu'ils appliquaient habituellement les mouvements appris lorsqu'ils dansaient, tandis que très peu d'entre eux ont convenu que les mouvements étaient naturels pour le robot HRP-4 (8\%) et le robot Franka (16\%). Concernant les émotions, seulement 12\% des participants étaient d’accord sur le fait que le robot HRP-4 communiquait des émotions par la danse, avec une majorité (64\%) en désaccord. Quant aux émotions du robot Franka, 80\% des participants n’étaient pas d’accord sur le fait qu’il exprimait ses émotions à travers la danse.
Notre modèle d'interaction suit l'amélioration de l'étude précédente mentionnée ci-dessus, basée sur des simulations virtuelles et adressée à des participants familiers avec la danse.
Afin de comprendre comment les robots sont perçus et quel est leur impact sur leur environnement, l’autonomie est un facteur clé. Les observations de\cite{stubbs2007iee} suggèrent qu'à mesure que l'autonomie d'un robot augmente, ``l'incapacité des humains à comprendre les raisons des actions du robot perturbe la création d'un terrain d'entente”. Suite à cette remarque, nous avons décidé d'organiser notre expérience au laboratoire, l'environnement originel des robots.
Pour questionner la notion de créativité en HRI, nous avons personnalisé notre expérience à l'aide de premiers essais impliquant majoritairement des collègues chercheurs de notre laboratoire. Nous leur avons demandé de comparer deux contextes : interagir seuls avec un robot et interagir simultanément avec un robot et un danseur humain. Leurs retours ont clarifié l’hypothèse de travail selon laquelle les humains devraient s’habituer à la présence d’autres humains lorsqu’ils interagissent avec des robots.
L'un de nos objectifs était d'identifier quel cadre (avec ou sans médiateur humain) est le plus utile et inspirant pour déclencher la créativité pendant l'HRI.
Parmi nos observations, nous avons noté que la place du robot au sein de l’expérience dépend de son degré de familiarité avec le sujet (c’est-à-dire que le participant a déjà interagi avec ce type de robot ou non). La majorité des roboticiens préféraient interagir directement avec le robot, sans que le danseur humain n'intervienne comme intermédiaire dans cette interaction. Parmi les raisons qui ont motivé cette préférence : la présence de l'humain devient plus importante que celle du robot, une fois la phase d'improvisation de l'expérience effectuée. De la même manière, les chercheurs qui n’avaient jamais interagi avec un robot auparavant ont estimé que la présence du médiateur humain les a encouragés à s’inscrire à l’expérience et à développer davantage leurs compétences créatives. Un autre fait important, une fois l'instruction d'improviser donnée, les attentes et les réactions rendent les participants confus quant au résultat possible, ou à \textit{la meilleure} façon d'exécuter l'instruction. Avoir un danseur humain improvisant simultanément avec le robot aide les participants à se détendre. et restent confiants quant au résultat de l'expérience, quel que soit leur niveau de danse. Ces premières remarques nous ont encouragés à maintenir le cadre d'un danseur humain interagissant avec différents robots, dans notre cadre d'expérimentation.
Travailler avec de vrais robots au lieu de leurs jumeaux numériques\cite{silviaISEA} est motivé par le fait que les séquences de danse apparaissant fluides dans les simulations sont accompagnées de bruit réel et soumises à des contraintes mécaniques lorsqu'elles sont exécutées à travers les corps des robots. Comme evoqué par\cite{jochum2019moco}, \textit{une telle imprévisibilité est liée à l’incarnation matérielle d’un robot et à une partie de son charme idiosyncratique en tant qu’interprète}.
Notre choix de faire une interaction impliquant uniquement des routines de danse du haut du corps est lié au fait que travailler avec des contraintes élargit les possibilités d'expression chez l'humain et réduit les risques de dysfonctionnement du robot. Le bras industriel étant posé sur un socle fixe, il semblait logique d'immobiliser le robot humanoïde, sur une chaise. Les possibilités d'accessibilité d'une chaise nécessitent d'adopter une position réflexive et statique tandis que le danseur doit compenser avec les mains l'expressivité du mouvement.
Dans cet article, nous faisons l'hypothèse que la créativité est une combinaison de compétence et d'intention suite aux travaux de \cite{gaut2009brill, gaut2010philosophy, bailin1984creativity, bresnahan2015skill}. Cette hypothèse a suscité de nombreux débats. Parmi eux l’idée que la créativité peut être téléologique.\cite{gaut2010philosophy} donne l'exemple d'un chimpanzé brossant de la peinture : si le dresseur enlève la peinture lorsqu'il le juge approprié, le résultat pourrait être créatif ; alors que si le chimpanzé est laissé seul avec son papier, il finira par le recouvrir de couleurs ou tout simplement le détruire. Pour Gaut:
\begin{quote}
``les types d'actions qui sont créatives sont celles qui présentent au moins un objectif pertinent (en n'étant pas purement accidentelles), un certain degré de compréhension (en n'utilisant pas simplement des procédures de recherche mécaniques), un degré de jugement (dans la manière de appliquer une règle, si une règle est impliquée) et une capacité d'évaluation orientée vers la tâche à accomplir. En raccourci pour ces caractéristiques, nous pouvons dire que les actions créatives doivent faire preuve de flair.”
\end{quote}
Nous extrapolons ces remarques aux robots autonomes, qui ont un comportement téléologique une fois qu'ils sont préprogrammés avec une tâche.
Notre méthodologie identifie les facteurs qui différencient un résultat entre un résultat non créatif et un résultat créatif. Compte tenu de ces prémisses, l’invention d’une danse particulièrement nouvelle pendant la phase d’improvisation peut-elle être considérée comme créative ? Si oui, à travers quels facteurs ?
Le défi de concevoir des robots capables de se comporter de manière fiable et sûre dans des environnements humains a conduit les scientifiques à étudier des domaines tels que les sciences sociales et la philosophie.
Puisqu’il existe peu de recherches empiriques sur l’art, nous proposons un modèle d’IRH basé sur deux phases (imitation de danse et improvisation de danse) pour analyser les attentes humaines en son sein.
En supposant que la créativité soit une question de degré\cite{gaut2009brill}, nous analysons à travers notre questionnaire la conscience kinesthésique, la substituabilité ainsi que le potentiel de synchronie de deux robots opérant dans un laboratoire identique. Bien que les algorithmes de mouvement soient identiques, les mouvements des robots ont suscité des réactions inattendues chez certains participants. Ils ont défini la même séquence de danse exécutée par un robot différent comme créative, leurs commentaires étant liés à leur familiarité avec les robots (c'est-à-dire des participants moins habitués aux robots, mais plus enthousiastes quant à leur potentiel créatif en danse).
Nous résumons nos résultats et identifions certains des défis comme suit.
Lors de la phase d'imitation, 95,3\% des participants ont facilement imité la séquence de danse du robot humanoïde, contre 56,5\% pour le bras industriel. De plus, 71,5\% des participants à l'interaction avec le robot humanoïde et 56,5\% pour le bras industriel n'ont pas jugé acceptable d'utiliser des mouvements d'improvisation pendant cette phase. Ces participants étaient engagés dans ce que Dourish appelle un \textit{coping absorbé}\cite{jochum2019moco}, ou un engagement total dans l'interaction, avec 47,6\% de participants pour l'humanoïde et 30,4\% de participants pour le bras industriel, n'imitant pas le danseur professionnel. Répartition similaire des réponses concernant le confort lors de l'imitation : avec 85,7\% des participants se sentant à l'aise en imitant le robot humanoïde et 38,1\% le danseur, contre 60,9\% le robot et 43,5\% le danseur - pour le robot à bras industriel. Le sentiment d'être inspiré par les mouvements du danseur humain par rapport au robot suit la même tendance, avec 42,8\% des participants convenant que c'est le cas du robot humanoïde, contre 39,1\% pour le robot industriel. Globalement, les participants ont trouvé plus intéressant de suivre les mouvements du robot que ceux du danseur - avec 61\% pour le robot industriel et 66,6\% pour le robot humanoïde. Paradoxalement, seule une petite minorité - 20\% pour le robot industriel et 14,3\% ont identifié des émotions dans la danse du robot, par rapport à celle de l'humain - 60,9\% pour l'essai industriel et 57,1\% pour l'humanoïde. Cette observation prouve notre intuition selon laquelle les participants engagés dans la danse (soit en imitant, soit en improvisant) contemplaient moins l'acte performatif.
Par ailleurs, lors de la phase d'imitation, 66,7\% des participants se sont sentis en synchronisation avec le robot humanoïde contre 55\% pour le robot industriel. En comparant ces résultats à la même question concernant la phase d'improvisation, on constate une grande différence puisque seulement 20\% pour le robot industriel et 23,8\% pour le robot humanoïde ont répondu positivement. Ce constat prouve que la synchronie s’établit moins par l’improvisation.
Un autre fait intéressant à mentionner est que lors de l'improvisation, les participants n'ont pas ressenti le besoin d'entrer en contact physique avec le robot (68,2\% pour le bras industriel et 90,5\% pour le robot humanoïde) avec un léger pourcentage d'indécision pour le bras industriel. (18,2\% ), contre (9,5\%) pour le robot humanoïde. Alternativement, 13,6\% des participants à l'expérience avec le bras industriel ont répondu par l'affirmative à cette question, alors qu'aucun pour le robot humanoïde.
En improvisant, on note une légère indécision quant à la réactivité du robot industriel (avec 15\% des participants pour le robot industriel et 9,5\% pour l'humanoïde), alors que la majorité des participants (80\% des participants pour le robot industriel et 90,4\% pour l'humanoïde) rejetant l'idée que les robots étaient réactifs, alors qu'en réalité ils ne l'étaient pas. Cependant, 40,95\% des participants pour le robot industriel et 23,8\% pour l'humanoïde, ont exprimé ce besoin lorsqu'on leur a demandé s'ils souhaitaient faire réagir le robot à leurs gestes.
Puisque nous avons inclus dans la séquence du danseur une combinaison de mouvements intentionnels et non intentionnels (type bâillement), nous avons voulu voir si les participants faisaient la distinction entre ces deux mouvements lors de l'interaction avec le tiers. Dans les deux cas - 52,1\% pour le bras industriel et 47,6\% pour le bras humanoïde, les participants ont réussi à les identifier. Pour les robots, ces mouvements ont été simulés lors des essais de la phase d'improvisation, où chaque séquence était réalisée dans un ordre aléatoire par rapport à la phase d'imitation. Pour le robot humanoïde, un état inspiré des tremblements humains a été ajouté. Seuls 17,4\% des participants pour la branche industrielle ont identifié ces mouvements, contre 85,7\% pour le robot humanoïde. Nous expliquons cette différence par le fait que le mouvement de secousse était relativement différent des autres types de mouvements de la séquence.
Lorsqu'on leur a demandé avec qui ils avaient improvisé lors de la deuxième séance, les réponses avaient une répartition similaire pour les deux robots. Pour le robot humanoïde, 33,3\% des participants ont improvisé uniquement avec l'humain, 28,6\% uniquement avec le robot, 23,8\% ont improvisé avec les deux, tandis que 9,5\% ont improvisé complètement par eux-mêmes et 4,8\% n'ont pas respecté la consigne de improviser.
Pour le bras industriel, 21,7\% des participants ont improvisé uniquement avec l'humain, 21,7\% uniquement avec le robot, 21,7\% ont improvisé avec les deux, tandis que 8,7\% ont improvisé complètement par eux-mêmes et 8,7\% n'ont pas respecté la consigne de improviser. Le reste des 17,5\% des participants ont soit improvisé uniquement avec l'humain, soit l'ont imité pendant l'enseignement d'improvisation, prouvant que la créativité est facilitée par les interactions entre humains plus facilement que par les interactions entre humains et robots.
Les chercheurs\cite{truman2015primacy, gallagher2002primacy, sheet2011primacy} font la distinction entre l'action et le mouvement à travers le sens. Pour notre étude dans les deux contextes, les participants utilisaient alternativement les deux, comme l'illustrent les réponses.
Pour approfondir la discussion, nous citons\cite{jochum2019moco} pour qui
\begin{quote}
``un robot ou un système artificiel pourrait imiter de manière convaincante une action significative, mais ce n'est pas la même chose qu'un système agissant de manière significative.”
\end{quote}
De plus, ``la dynamique qualitative inhérente pour animer des formes de vie (mouvement cinétique) sont distincts de l'action motrice exécutée par des formes inanimées (action motrice)”.
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les utilisations sociales et culturelles plus larges
Pour aller plus loin, les actes artistiques qui engagent un dialogue entre le corps et les technologies numériques favorisent une construction collaborative de niveaux de nouveaux états physiques, perceptives, et même de conscience.
Toutes les articles et livres du folder/idh/creativity sur les origines de l'art et la préhistoire\cite{mithen1998prehistory, srinivasan2007cognitive, abraham2018cambridge, vartanian2013mit}
Dans les années 1970, le psychologue américain Gordon Gallup a mis au point le test du miroir. L’idée est d’estimer la conscience de soi chez un animal, y compris un humain, en lui apposant subrepticement une marque sur le front. Face à un miroir, quand l’individu essaie de toucher, d’enlever la trace ou fait simplement mine d’avoir noté le changement, on en conclut qu’il est conscient de son propre corps. À ce jour, les espèces qui ont passé avec succès le test du miroir sont les chimpanzés, les bonobos, les orangs-outans, les dauphins, les éléphants, les corbeaux. Les bébés y parviennent à partir de 18 mois. Et les robots ?
Par ailleurs, des éthologistes ont récemment montré que les grands singes, les dauphins ou encore les éléphants sont capables d’une certaine identification d’eux-mêmes et, en conséquence, réussissent le test du miroir. Des espèces inattendues, tels les perroquets et les pies, semblent également réussir le test du miroir sans qu’on puisse dans leur cas parler rigoureusement de conscience de soi.
Entre communication scientifique et proposition artistique, notre idée à été de confronter ce format experimental devant les spectateurs pour avoir leurs impréssions et échanger sur la poténitialité artistique des robots. Sous la forme d'une conference performative d'approximativement 40minutes, nous avons alterné entre des moments explicatifs et des moments performatifs. Sur scéne trois humains (Arnaud Tanguy comme ingénieur de récherche du robot HRP4, Maxime Aleves pour la création sonore et moi-même en tant que performeuse) plus le robot HRP4. En dehors de la scène, Thomas Guillot en tant que collaborateur artistique de la compagnie Desiderate.
\caption{Setting de la présentation publique \textit{Here is where I differ with Herzog. Robots et conscience artificielle} le 31 mars 2023 au studio LaNef à Montpellier.}
Ce projet transdisciplianire a vu le jour grace au soutien de la cooperative artistique La Nef et du LIRMM, à Montpellier. Il synthetise sous la forme d'une speculation artistique, mes observations quant à des intéractions en danse performeur-robot humanoide, ainsi que mes hypothéses de recherche sur la créativité et une possible \textit{conscience artificielle}, en rélation avec des robots.
Cette performance est une mise en abyme de mon processus de récherche-création, révu dans l'optique du documentaire \textit{Grizzly Man} (2005) de Werner Herzog. Rapprocher la figure du robot à celle du vampire et de l'ours sauvage m'a aidé clarifier le statut qu'un robot a, à l'intérieur de mon experience artistique. Par ce biais, j'ai pu également approfondir mes intuitions quant au potentiel scénique des robots- en tant que parténaire ou catalyseur de mon expressivité corporelle et inspiration créative. J'ai aussi pu parler ouvertement des peurs et incertitudes quant à mes ambitions de traiter le sujet de \textit{conscience artificielle} lors de cette thése. Au contrepoids de mes speculations artistiques, j'ai misé sur le réalisme éxcentrique des oeuvres de Herzog- un ariste visionnaire qui a passé des années à pursuivre des projets lufoques, avant de les réaliser. Dans son journal\cite{herzog2009conquest}- qui m'a accompagné tel un livre de bord- Herzog évoque les difficultés qu'il a rencontré pour réalsier le film \textit{Fitzcarraldo} (1982) où il tourne en plein milieu de la fôret péruvienne. L'historie suit les aventures d'un personnage original, parti constrire une opèra pour inviter Enrico Caruso et Sarah Bernhardt se produire dans la jungle. Lorsqu'un de ses plans initaux écouhent à cause de la méteo, il décide de poursuivre son voyage et countourne les rapides en faisant tirer le bateau sur une montagne par des indigénes.
``A vision had seized hold of me, like the demented fury of a hound that has sunk its teeth into the leg of a deer carcass and is shaking and tugging at the downed game so frantically that the hunter gives up trying to calm him. It was the vision of a large steamship scaling a hill under its own steam, working its way up a steep slope in the jungle, while above this natural landscape, which shatters the weak and the strong with equal ferocity, soars the voice of Caruso, silencing all the pain and all the voices of the primeval forest and drowning out all birdsong. To be more precise: bird cries, for in this setting, left unfinished and abandoned by God in wrath, the birds do not sing; they shriek in pain, and confused trees tangle with one another like battling Titans, from horizon to horizon, in a steaming creation still being formed. Fog-panting and exhausted they stand in this unreal misery - and I, like a stanza in a poem written in an unknown foreign tongue, am shaken to the core.”\cite{herzog2009conquest}
Au-délà de Fitzcarraldo, qui est un de mes films preferés, le rapport que Herzog a vis à vis de son propre travail, a toujours été une source d'inspiration pour moi. Son humilité et son ambition ont quelque chose de primitif, qui nous contrarie. Il se désigne plutot témoin que créateur, dont la mission est d'articuler les rêves qui peuplent notre époque. Pour lui, chaque humain asipre au fond de lui aux mêmes idéaux,à les mêmes angoisses, parfois sans le savoir, et le travail d'un artiste est de mettre en place les conditions pour que cela se produisse. Dans ses films, il cherche à utiliser le particulier et l'intime pour parler de l'unniversel.
A mon tour, j'ai essaié d'appliquer ces principes, laisser le corps s'éxprimer au travers la danse, plutot que le faire danser ou choregraphier des mouvements. J'ai passé du temps à me connecter avec mes senses, trouver une écoute du corps pour mieux renouer avec l'environement. Cela m'a permis de me sentir plus disponible à intéragir avec un robot à la place d'un humain. J'ai vecu cet apprentisage comme un sorte d'encrage imposé dans le paysage actuel où les machines envahisent notre quotidien, sans que nous ne rendons compte. Je me rends compte à quel point cela a crée en moi une distruption. L'alterité des machines, tout ce qu'il y a de non-dit et caché dans une \textit{rélation} avec eux, ont fortement perturbé ma liberté artistique. \textbf{Danser avec des robots reste une experience singuliere, à l'opposé d'une immersion dans la nature, ou d'une experience sensorielle partagée avec un humain.}
Bien qu'ils sont inanimés, leur fonctinement s'inspire des lois biologiques, ils simulent l'autonomie, l'intelligence et dérnierement l'émotion humaine. Grace à leur présence accrue dans nos sociétes, nous commencons les envisager comme des êtres à part éntiere. \textit{Mais quel type d'etre est un robot?}
Pour répondre à cette question, j'avais besoin d'un regard déconstruit sur ce qu'ils répresentent. J'ai donc arreté de penser à leur place, de danser à leur place pour me demander si cela est juste ou pas. J'ai voulu les connaitre, sans que cela soit trés clair ce qu'ils réprésentent pour moi, ou pour notre societé une fois que leur perfrmance et fonctionalité est eloignée de l'écuation. Evidement dans ce type de projection, il n'y a pas de méilleure façon pour faire. Mon experience au laboratoire est peu à peu devenue une experience anthropologique, qui m'a permis de rencontrer une autre culture- celle des robots et roboticiens.
Pour explorer cette piste dramaturgique, je me suis inspirée des passages d'un autre film de Herzog \textit{Grizzly Man} (2005), dont quelques élements se rapprochent de \textit{Fitzcarraldo}. Le documentaire a été réalisé à partir des prises de vue de sénsibilisation près des ours grizzly, filmés par Timothy Treadwell dans le Katmai National Park en Alaska. L'été 2003 cellui-ci et sa copine sont retrouvés morts, attaqués par un ours qu'ils suivaient depuis quelques jours. En s'appuiant sur le materiel de Treadwell, Herzog peint sa personnalité et les raisons complexes qui l'ont poussé à se mettre en danger pour mieux comprendre les ours grizzly. J'ai pu rémarquer une analyse trés fine entre ce qu'il y a la compréhension d'une espece, par une autre, puis l'échec de cet exploit trop ambitieux. Si l'heros du film passe son temps à vouloir dévenir ours, nous ne savons pas comment voient cela les ours mêmes. A mon échelle, j'ai passé deux ans parmi des robots et roboticiens pour vouloir mieux les comprendre, puis debattre sur l'art avec eux. Cela a plus ou moins marché.
Auparavant j'ai mentionné\cite{kozel2008closer} qui réliait danse, marionettes et ours. Je trouve son analogie intéréssante pour etré appliquée également aux robots. Un robot peut-être similaire à un ours par sa force et son poids, aussi par le fait qu'il passe beaucoup de temps en état de hibernation ou d'inactivité. Jadis dans les pays d'est, les ours étaient utilisés pour entretenir la foule, avec des dresseurs qui les enseignait des acorbaties rudimentaires où ils imitaient les humains. Plus un numéro de foire était réussi, plus l'ours était aimé et admiré par les humains. Si nous tenons en compte les observations sur \textit{la valée de l'étrange} de Mori, nous allons à l'encontre de cette téndance pour les robots. Plus un robot est proche d'un humain, plus qu'il provoque un sentiment de malaissance. Est-ce cela du aux complexes d'infériorité que les humains developpent envers les robots? Par leur nature, les robots paraissent immortels, or cette immortalité n'a rien à voir avec les projections sur la vie aprés la mort des humains. Un robot n'a pas de vie, bien qu'il la simule. Un ours est vivant et cette condition finie est partagée par l'humain. L'admiration pour un etre dont on partage la condition réside dans cet rapporchement.
Le pari de mes experiences artistiques est quelque part simple. Autant qu'ils ne connaissent pas les limites d'une machine, les humains projettent leurs ambtions dessous. Prennons l'exemple du joueur d'échec de Wolfgang von Kempelen mentionné dans le capitre 1.3.3 de la prémiere partie. Sans savoir la verité, les spectateurs l'ont considére une prouesse technologique. Avec l'avénement de l'informatique, dans l'écuation humain-animal-artefact, le cadre d'autre fois est transgressé. Pour quelq'un avec peu de connaissances en informatique, même en voyant les algorithmes à la base de son programme, le résultat reste opaque. La machine parait omnipotenté car elle dépasse les capacités humaines de compréhension. Pour l'informaticien qui les developpe, il y a un part de curiosité quant à la potentialité des algorithmes. Cependant il a peu de regard critique quant aux consequences éthiques de cette course contre le montre concernant les limites de la science. Il va toujours relativiser son processus et trouver des argumentes pour se dé-responsabiliser de l'impacte de tout cela sur la societé.
Le terme ancien glanage appartient d’abord au monde agricole et consiste à amasser les épis qui ont échappé aux moissonneurs et, par extension, à recueillir ici et là des bribes dont on peut tirer avantage (CRNTL). Ce terme a été utilisé dans un cours de stratégie de recherche-création par un étudiant, Kyril Dubé (2013), en lien avec le très beau documentaire d’Agnès Varda intitulé Les glaneurs et la glaneuse (1999).
Dans le contexte qui est le nôtre, le glanage consiste donc à accumuler, dans un journal ou autrement, des stimulations, le résultat d’observations directes dans son entourage ou après une immersion dans un ailleurs relié ou non au projet de création, à la suite de la lecture de textes, de journaux, de revues, d’écrits d’artistes, d’ouvrages. savants, ou de la consultation d’images fixes et animées dans les médias, ou produites par d’autres artistes.
Dans l’ouvrage Métamorphose de l’âme et ses symboles (1950), Jung précise que « les influences de l’inconscient
collectif, lorsqu’elles impriment le conscient, sont à la source des courants de croyances, des expériences religieuses, des visions extatiques mais aussi des arts, de la littérature et des rituels » (Jung, Carl Gustav et Le Lay, 1953).
C’est dans des moments d’ouverture que se produit un phénomène que Carl Jung nomme \textbf{synchronicité}, soit l’occurrence simultanée d’au moins deux événements qui ne présentent pas de lien de causalité, mais dont l’association prend un sens pour
la personne qui les perçoit : \textit{La synchronicité signifie donc d’abord la simultanéité d’un certain état psychique avec un ou plusieurs événements parallèles signifiants par rapport à l’état subjectif du moment, et – éventuellement – vice-versa.} (Jung, C., 1981, p. 2) Malgré le caractère parapsychologique qui entoure ce concept, n’en reste pas moins que lorsqu’on porte intensément un projet de recherche ou de création, nous faisons la rencontre de toutes sortes de phénomènes apparentés à notre projet, et ce, bien qu’ils soient tout à fait fortuits, c’est-à-dire sans aucun lien causal avec celui-ci, ce que Jung appelle des \textit{coïncidences acausales}. Ces rencontres dues au hasard et à notre ouverture ou à notre disponibilité sont précieuses, car elles viennent souvent enrichir notre projet\cite{paquin2014methodologie}
Alors ces connaissances qui pourraient être qualifiées de processuelles
Paquin emprunte la notion de \textit{chiasme} à la phénoménologie de Merleau-Ponty, pour désigner un point ``d’entrecroisement et de réversibilité”\cite{paquin2015dialogue} entre recherche et création.
Dans \textit{Le Visible et l'Invisible}, Merleau-Ponty introduit le concept de \textit{chiasme}\cite{merleau1979visible}. A la base, ce terme d'origne greque signifie \textit{entrecroiser une pièce de bois en croix, car la forme de la lettre grecque chi est un x}. Dans un contexte réligieux ou poétique, il répresente une figure de style rhétorique dans laquelle les éléments sont inversés ou répétés selon un modèle inversé (par exemple dans l’Évangile selon Luc: \textit{Celui qui s’élève sera abaissé, celui qui s’abaisse sera élevé}). Il peut également faire référence à un nerf de l’œil qui traverse le côté opposé du cerveau. Pour Ponty il désigne le chevauchement qui produit une expérience unifiée (par exemple, la combinaison des deux yeux pour produire une vision unique).
loin des experimentations technologiques des humanités numériques\cite{citton}
Pour définir un geste, je m'appuie sur les observations d'Yves Citton\cite{yves2012gestes} qui s'intéresse aux gestes présents dans les expériences esthétiques pour voir comment elles peuvent influencer notre comportement.
Ecrit sous la forme d'un journal\cite{charmatz2009je}, B. Charmatz, danseur et chorégraphe, décrit les fondements du dispositif de recherche et de création pédagogique qu'il a mis en place sous le nom de Bocal. Il expose les outils et exercices élaborés au sein d'un goupe de 15 personnes. L'ensemble constitue une réflexion sur les ressorts politiques de toute expérimentation pédagogique radicale.
Dans le livre\cite{Sachs p. 40}, Sachs les danses à main de type samoan sont liées à la culture bouddhiste où le geste de la main, \textit{mudra}, a une valeur spécifique. L'auteur désigne l'Inde, plus particulièrement l'Hindoustan, comme berceau de la danse des mains répandu dans l'Orient puis en Occident avec le bouddhisme. Lors d'une description d'une de ces danses de la main, il cite le poète Autrichien Rainer M. Rilke):
\begin{quote}
``There they were, these dainty little dancing maids, like gazelles metamorphosed. Their long, slender arms as though in once piece drawn through the shoulders, through the slender yet study torso(with the full slenderness of Buddha pictures), as though in a single finely wrouht piece as far as the wirsts, out of which the hands walked out like players, mobile and independent of action. And what hands! Buddha hands that know how to sleep; that lie down easily zhen their time comes, finger next to finger, to rest for cenuries on their laps, lying palm upward or standing straight up from the joint, bidding ceaselessly for quit. Imagine these hands awake ! These fingers speard appart, openm radiate or turned inwards like the petals of a Jricho rose; those fingers enraptured and happy or anxious, pointing out from the very end of the long ar;s; these fingers dancing. And the wholebody in action- this ultimate in balance dances suspended in the air, in the atmosphere of the body itself, in the golden glow of the Orient.”
Influence de Robert Rauschenberg, artiste du Pop Art et ami de Cunningham \textit{Je ne fais ni de l’Art pour l’Art, ni de l’Art contre l’Art. Je suis pour l’Art, mais pour l’art qui n’a rien à voir avec l’Art, car l’Art a tout à voir avec la vie.}
C'est la danse qui rend claire la conscience du moment présent, partagé à la fois par le danseur et le spectateur. Le corps est l'événement et cet événement n'existe qu'une fois (...). Il est frustrant que l'art du peintre ou du sculpteur ne puisse jamais approcher ce présent toujours changeant, ne dise jamais rien de cette vie du corps indépendant de l'art.
La position de Rauschenberg dans l’histoire de la danse et de la performance peut être attribuée, en partie, à ses relations avec les chorégraphes pionniers Merce Cunningham et Trisha Brown. Ses collaborations avec Cunningham ont commencé avec leur implication dans la pièce de théâtre n°1 du compositeur John Cage en 1952 au Black Mountain College en Caroline du Nord. (Cage était également un collaborateur de longue date de Rauschenberg et Cunningham.) Rauschenberg a ensuite rejoint la Merce Cunningham Dance Company en 1954, concevant des décors et des costumes pour les spectacles de Cunningham pour les années à venir.
Mais l'artiste a aussi participé à un mouvement chorégraphique d'avant-garde extrêmement radical et subversif, aux côtés de danseurs et d'artistes plus jeunes que lui: le Judson Dance Theater. Dans le cadre de ce collectif, il a apporté son aide pour créer les éclairages des spectacles et il a souvent pris en charge la régie. Puis, il se lance lui-même dans la chorégraphie avec la pièce Pelican en 1963, dans le cadre d'un spectacle du Judson Dance Theater à Washington, organisé sur une piste de patins à roulettes. Deux danseurs (dont Rauschenberg lui-même), réalisent une chorégraphie sur patins à roulettes avec une ballerine, dansée par Carolyn Brown, la danseuse fétiche de Cunningham.
Parmi les performances exécutées ensemble par Brown et Rauschenberg figurent Glacial Decoy (1979), Set and Reset (1983) et If you could't see me (1994), dans lesquelles Brown se détournait du public tout au long de son solo.
Malgré ses collaborations prolifiques en danse, se souvient Rauschenberg, ce n'est que lorsqu'il fut \textit{accidentellement} répertorié comme chorégraphe dans les annonces de presse pour le concert de danse numéro cinq du Judson Dance Theatre le 9 mai 1963, à Washington, D.C., qu'il chorégraphier sa première performance, Pelican. Rauschenberg et l'artiste Per Olof Ultvedt se sont produits sur des patins à roulettes, la danseuse de Cunningham Carolyn Brown s'est produite sur pointes, et tous étaient vêtus de survêtements gris. Rauschenberg et Ultvedt portaient en outre des parachutes modifiés attachés à leur dos, qui fonctionnaient comme un décor, formant un environnement architectural tout en soulignant simultanément les mouvements des deux patineurs. Rauschenberg, qui a appris à patiner pour le spectacle, a raconté : \textit{Comme je ne savais pas grand-chose sur la danse, j'ai utilisé les patins à roulettes pour me libérer de toute sorte d'inhibitions que j'aurais.}
Entre 1963 et 1967, Rauschenberg a chorégraphié treize œuvres, culminant avec Urban Round (1967). (Ce numéro indique tous les spectacles de danse formellement chorégraphiés par Rauschenberg, y compris des œuvres telles que Tango [1964] et N.Y. 172619 [1965].) Plusieurs danses de Rauschenberg comportaient des objets du quotidien composés d'accessoires, de décors ou de costumes, qui limitaient et définissaient souvent les mouvements. des interprètes. Dans la première de Linoléum (1966), par exemple, les actions des danseurs étaient largement déterminées par un assortiment inattendu d'objets : Simone Forti, vêtue d'une robe de mariée antique et tenant sur ses genoux un pot de spaghettis cuits, était assise sur une chaise. au sommet d'une plate-forme mobile déplacée par Deborah Hay ; Steve Paxton gisait dans un poulailler rempli de poulets vivants alors qu'il mangeait du poulet frit, utilisant périodiquement ses bras pour manœuvrer sur la scène ; Alex Hay se tenait les jambes plantées dans un cadre de lit en fil de fer ouvert, luttant pour bouger, et sa tête et le haut de son torse étaient recouverts d'une coque en papier mâché. D’une manière tout aussi absurde, Spring Training (1965) mettait en scène Rauschenberg sur des échasses, naviguant de manière précaire avec des tortues qui erraient sur scène avec des lampes de poche attachées au dos (dont l’une est devenue l’animal de compagnie de Rauschenberg, Rocky).
Parmi les performances exécutées ensemble par Brown et Rauschenberg figurent Glacial Decoy (1979), Set and Reset (1983) et If you could't see me (1994), dans lesquelles Brown se détournait du public tout au long de son solo.
\caption{Lucinda Childs et Robert Rauschenberg avec des tortues dans Spring Training de Rauschenberg (1965) au ONCE Again Festival, parking de la rue Maynard, Université du Michigan, 1965. Source: https://www.rauschenbergfoundation.org.}
\label{fig:rauschenberg}
\end{figure}
La performance de Rauschenberg, \textit{Open Score}, a été conçue pour l'ouverture des séries E.A.T. au 69th Regiment Armory à New York le 14 octobre 1966. Elle commence par un match de tennis, dont la raquette est dotée d'un émetteur FM en miniature et un micorphone de contact. Chaque fois que le peintre Frank Stella frappait la balle, les vibrations des cordes de la raquette étaient transmises aux haut-parleurs puis l'une des 48 lumières illuminant l'arène s'éteignait. Lorsque le dernier spot de lumière s'éteint, les cinq cents spectateurs desdencent dans l'obscurité sur la scéne où leurs silhouettes sont enregistrés à l'aide des capteurs infrarouge puis projetées sur trois grands écrans qui entourent le terrain.
chose de nouveau ou de différent du phénomène ou de la situation étudiée par
rapport à ce qui en est connu?}\cite{paquin2014methodologie}
\begin{quote}
La pertinence d’une recherche-création doit, elle, dans tous les cas être établie sur le plan personnel (ses intentions,
sa quête, etc.) et sur le plan communicationnel ou artistique, selon la discipline.
\end{quote}
Question de recherche céntrale:
Problemes qu'il est difficile d'hierarchiser
Question ouvertes
Tous les mots employés et tous les éléments auxquels la question renvoie doivent avoir été préalablement présentés.
Les questions de recherche exploratoires
Qu’est-ce que... ?
Comment ... ?
Quels sont les... ?
En quoi... ?
Qu’est-ce qui... ?
les questions de vérification commencent par les
mots interrogatifs suivants :
Est-ce que... ?
Si... alors...
Communication
La vision interactionniste ou constitutive de la communication provient de l’École de Palo Alto\footnote{mouvement apparu dans les années '50 à Palo Alto, en Californie et coordonné par l'anthropologue Gregory Bateson; qui a influencé la cybernétique et la théorie des systèmes}, selon laquelle \textit{on ne communique pas, mais on participe à la communication}. Dans ce sens, Paquin mentionne la théorie cybernétique de matémathicien et philosophe Norbert Wiener (1894-1964) pour qui \textit{tout processus communicationnel est pensé comme un processus circulaire continu}.
\begin{quote}
``La production du sens n’est plus appréhendée comme reposant uniquement sur la maîtrise d’un code, mais comme un phénomène global, dont on peut distinguer différents niveaux: l’interaction en tant que telle, le contexte où l’interaction advient et qui l’influence, autant qu’elle influence celui-ci en retour, et la situation dans laquelle et à partir de laquelle l’interaction se déroule.”
\end{quote}
Le contexte se distingue d’une situation en tant que
celle-ci, bien qu’elle soit concrète, est perçue de façon subjective par les acteurs et influence l’interaction.
\begin{quote}
``La pertinence artistique d’un projet de création est plus délicate, dans la mesure où celle-ci doit être établie et argumentée en rapport au courant, au mouvement, au genre, dans lequel celui-ci s’inscrit. Chacun d’entre eux comporte ses présupposés qui dictent ce que devrait être une création réussie, et desquels sont tirées des règles et des injonctions quant à l’esthétique, à la symbolisation, à la forme et à la
matérialisation, de même que, dans une mesure moindre, aux thématiques traitées. La situation est d’autant plus compliquée que les différentes avant-gardes ainsi que le courant postmoderne n’ont eu de cesse de dévaloriser les mouvements précédents ou concurrents, de façon à imposer leur propre vision de l’art, ou encore leur propre critique de l’art.”
\end{quote}
Paquin evoque également l'activité \text{autotélique} de l'art, terme emprunté au philosophe J. M. Baldwin (1861-1934) et signifie littéralement, \textit{sans autre but que lui-même, l’art qui se suffit à lui-même}.
Dans la collection des écrits d’Allan Kaprow, souvent
considéré comme l’inventeur du happening, Essays on the Blurring of Art and Life(1993), le \textit{artlike life} et \textit{le lifelike art} sont définis. Cette posture largement
répandue au 20e siècle visait à abolir la séparation entre l’art et la société, entre l’art
et tout le reste, à démocratiser l’art, à le désinstitutionnaliser, à déconstruire ce qui le
définissait par la transgression de ses frontières, en l’amenant dans la rue, dans les
endroits publics, en œuvrant à partir de matières ordinaires, voire à partir d’ordures,
en faisant entre autres expériences de l’art invisible, de l’art laid, grossier ou
répugnant.
Harold Rosenberg (1972/1992), dans\cite{rosenberg1983definition}, constate que \textit{la
nature de l’art est devenue incertaine. Ou du moins, elle est ambigue}; il ajoute que
\textit{nul ne peut dire avec certitude ce qu’est une œuvre d’art – ou plus important, ce que
n’est pas une œuvre d’art}. En conséquence,
\textit{l’art doit se soumettre à une recherche continue de lui-même}, ce qu’il nomme la \textit{dé-définition}.
Cette notion renvoie à la perte des qualités que l’essentialisme de la philosophie classique ainsi que la théorie traditionnelle des
beaux-arts lui conféraient. Une telle déperdition fait de l’œuvre d’art un \textit{objet
anxieux}(1972/1992, p. 27) et, ainsi, \textit{l’attitude de contemplation et d’appréciation
esthétique cède devant l’incompréhension désolée, ou l’incapacité à cerner ce qu’il y
aurait à évaluer comme art ou même objet sensible} (Massin, 2012, p. 13).
Lors de cette présentation publique, j'ai pu partager mes notes et observations quant à un type d'echauffement particulier, que j'ai déjà mentionné dans le capitre 1.1.2. Le shaking a été un outil d'apprentissage de la danse, une façon de lâcher-prise pour se reconnecter aux sensations et à l'instant présent.
\caption{Moments d'échauffement en shaking lors de la présentation publique \textit{Here is where I differ with Herzog. Robots et conscience artificielle} le 31 mars 2023.}
J'ai eu besoin d'intégrer ce moment pratique en plein milieu de la présentation car cela m'a aidé mieux préparer mon attention pour la suite, lors de la danse avec HRP4. Avec le temps, le shaking est dévenu ma manière de retrouver une non-hiérarchisation des parties du corps mises en jeu dans la danse. De façon concrete, executer un mouvement et vivre dans le meme temps une désorientation face à ce mouvement signifie pour moi, à ce jour, avoir une conscience du mouvement.
``It is instructive to reflect on the way in which earth-based biological evolution spent its time. Single cell entities arose out of the primordial soup roughly 3.5 billion years ago. A billion years passed before photosynthetic plants appeared. After almost another billion and a half years, around 550 million years ago, the first fish and vertebrates arrived, and then insects 450 million years ago. Then things started moving fast. Reptiles arrived 370 million years ago, followed by dinosaurs at 330 and mammals at 250 million years ago. The first primates appeared 120 million years ago and the immediate predecessors to the great apes a mere 18 million years ago. Man arrived in roughly his present form 2.5 million years ago. He invented agriculture a mere 19000 years ago, writing less than 5000 years ago and \textit{expert} knowledge only over the last few hundred years. This suggests that problem solving behavior, language, expert knowledge and application, and reason, are all rather simple once the essence of being and reacting are available. That essence is the ability to move around in a dynamic environment, sensing the surroundings to a degree sufficient to achieve the necessary maintenance of life and reproduction.”
Le livre\cite{dehaene2014odile} traite du sujet des origines de la conscience. Pour mieux définir la consicience et ses proprietés, Stanislas Dehaene s'intérroge sur ce qui distingue notre espèce par rapport aux autres. Parmi les critiéres qu'il étudie lors de ses éxperiences scientifiques, il méntionne le langage articulé et la plasticité de notre cerveau qui peut se modifier grâce à l'éducation. Avant de traiter la question des machines, il fait une paralelle avec les especes animales qui, selon ses recherches, font preuve des formes de conscience à differentes degrés. Pour lui, nous partagions la plupart,
des processeurs cérébraux avec d'autres espèces
animales. Cependant le cerveau humain reste unique dans sa
capacité d'acceder et combiner des processus internes pour produire de la pensée. Pour cela, Dehaene évoque une coordination entre les processus sénsoirelles et le cortex, qui est à la base de l'apprentissance. Cette coordiantion s'appelle appellé \textit{inférence statistique}:
\begin{quote}
``Or l'inférence statistique, dans un réseau de neurones, exige un échange bidirectionnel d'informations : les aires sensorielles envoient les données qu'elles reçoivent vers le haut de la hiérarchie corticale, et les aires supérieures, en retour, leur répondent avec des prédictions qui tentent d'anticiper sur la suite. Tous ces échanges participent d'un
algorithme d'apprentissage qui vise à expliquer, le mieux possible, les informations reçues par les organes des sens. L'apprentissage ne cesse que lorsque les représentations mentales de haut niveau sont si précises qu'elles rendent compte de tous les détails des entrées sensorielles. À ce stade, le \textit{signal d'erreur}, c'est-à-dire la différence
entre ce que le cerveau prédit et ce qu'il reçoit, devient négligeable. En conséquence, toute surprise disparaît. Le signal d'entrée perd son intérêt et ne déclenche plus d'apprentissage.”
Pour ce qu'il y a des machines conscientes, Déhaene décrit, dans le dérnier chapitre de son livre\cite{dehaene2014odile}, ses caractéristiques. Ainsi il souligne l'importance des programmes spécialisés qui tournent en parallèle, proche des applications des téléphones portables- \textit{véritables systèmes de reconnaissance des visages, de détection du mouvement, de cartographie spatiale, de production et de compréhension de la parole ou de commande motrice entre autres}. De plus, ces programmes dévraient avoir accés à des autres programmes intérnes, sorte de \textit{d'introspection ou de méta-connaissance de soi du systéme}. Ils dévraient également savoir détecter et corrigéer leurs propres erreurs.
Auparavant Dehaene identifie les trois caractéristiques eséntielles de la conscience, à modéliser dans les machines: la communication flexible, la plasticité et l'autonomie. Il trace en paralelle la liste des paradoxes concernant le conscience, en faisant reference à Ned Block ou A David Chalmers que j'ai cité dans le chapitre 1.2.2 et leur probléme de modélisatin de qualia. En contrepoids il présite les théories du sir Roger Penrose quant à l'influence de la mécanique quatique sur les sciences cognitives.
Pour clarifier ces aspects, Dehaene introduit le concept de \textit{libre arbitre} où il lui donne une nouvelle définition. Selon lui, ce concept émerge des décisions conscientes conditionnés par notre structure physhcico-culturelle inconsciente: \textit{ce qui compte pour qu'une décision soit libre, c'est l'autonomie de la délibération.}
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``La problématique de la recherche-création se construit par raffinement successif, dans un aller-retour entre le désir consigné dans l’énoncé de projet produit précédemment à partir d’une amorce et le résultat de recherches. Cet aller-retour
cherche autant à compléter le double cadrage entrepris précédemment (cf.) – celui par rapport à la sphère conceptuelle, qui permet de donner du sens, et celui par
rapport à un corpus d’œuvres apparentées, qui permet de déterminer la pertinence communicationnelle ou artistique – qu’à résoudre les incertitudes quant à la technique, aux matériaux et aux autres aspects pratiques touchés par la réalisation du projet. La problématique de recherche-création se construit aussi par des aller-retour entre ce travail de conceptualisation et sa mise à l’épreuve en atelier, qui en
constitue l’ultime validation, à l’image de la problématique de recherche, qui nécessite une validation dans une préenquête sur le terrain. En effet, une problématique peut être tout à fait réussie sur les plans formel et du respect des règles et de la construction mentale et s’avérer tout à fait inadéquate ou inopérante pour le faire œuvre, qui constitue la principale finalité de la thèse.”
``Déléguer de la conscience aux machines, signifie faire de la conscience une propriété objective, une propriété physique. Chercher cela parce que nous autres, membres tard-venus d’une civilisation occidentale qui déclare avoir vaincu ses origines mythiques, pensons vivre dans un monde fait uniquement d’objets physiques. À partir de là, tout ce qui paraît non physique ne peut être qu’une propriété ou un sous- produit de quelque objet physique. Mais au nom de quoi pense-t-on cela ? Au nom d’une hypostase tacite des objets de la connaissance scientifique et de la manipulation technologique.”
Au délà de leur message artistique, ces performances aident à comprendre l'impact de la technologie numérique sur les interactions sociales. Selon Kozel, nous découvrons les autres à travers des systèmes informatiques interactifs.
\textit{La puissance de calcul que permet un réseau de 16 milliards de neurones corticaux dépasse notre imagination
actuelle. Ce réseau fluctue sans cesse d'une façon partiellement
autonome, créant ainsi un monde interne de représentations
subjectives. Même lorsqu'il est confronté à des entrées sensorielles strictement identiques, il ne réagit pas de la même manière en fonction de son humeur, de ses buts et de ses souvenirs. Le code neural varie également d'un cerveau à l'autre. Bien que nous partagions tous le même attirail de neurones codant pour la couleur, la forme ou le mouvement, les détails de leur organisation résultent d'un long développement qui sculpte différemment chacun de nos cerveaux, en amplifiant ou en éliminant certaines de nos synapses.\cite{dehaene2014odile}
``Consciousness emerges from the mastery of sensorimotor knowledge resulting from the interaction between agent and environment, with the view that the living body's homeostatic regulation is crucial to self and consciousness.”
It is not only my dreams, my belief is that all these dreams are yours as well. The only distinction between me and you is that I can articulate them. And that is what poetry or painting or literature or filmmaking is all about... and it is my duty because this might be the inner chronicle of what we are. We have to articulate ourselves, otherwise we would be cows in the field.”